Tesseract, conception et interprétation de Nacho Flores

 

Tesseract, conception et interprétation de Nacho Flores (tout public à partir de six ans)

(C)Erik Damiano

(C)Erik Damiano

 Matériau noble et résistant, le bois conserve symboliquement les caractères de la vie végétale et d’intenses qualités poétiques. De plus, frayer avec le bois, en caresser la matière, être sensible à son dessin, à la géométrie et à la solidité des volumes, c’est aussi se laisser aller, pour l’équilibriste Nacho Flores, madrilène d’origine, à jouer avec des cubes en bois, avec une discipline constructive, et une volonté d’ordre et de mesure.

L’interprète un peu fou qui s’embarrasse à plaisir de morceaux et fragments de bois, billots, rondins, dont Nacho Flores fait ainsi tout son miel, tel un ours de conte enfantin qui se serait égaré dans une forêt et aurait choisi par la force des choses de faire l’équilibriste en herbe sur des cubes de bois.

Tesseract  titre éponyme du spectacle, en mathématiques, désigne un hyper-cube, un cube à quatre dimensions. Avec des techniques diverses qui vont de la vieille magie à la 4D ou au placage d’une image sur un objet 3D, l’artiste mathématicien utilise un certain nombre de figures géométriques primaires qu’il s’emploie à déconstruire avec méthode : les cubes appréhendés comme des pixels traduisent alors notre monde numérique.

 Barbe et cheveux lâchés ou bien retenus, au plus proche de la nature, Nacho Flores  doit se tenir, en exacte mesure physique  et harmonie corporelle sur quelques  minces piles  de cubes; il en enlève dangereusement tel ou tel autre, histoire de goûter au risque et de voir ses constructions, pourtant ordonnées avec soin, dévier tout à coup et s’effondrer sec.

 Déviation, décalage: les figures se fragilisent dans des équilibres précaires, selon la poursuite imaginaire et bientôt concrète du point de rupture. L’artiste, comme le public, respire d’un même souffle, dans l’attente haletante de la catastrophe à venir qui vient ou pas, s’accomplit brutalement ou pas. Mystère…

 En dépit des chutes à venir, l’équilibriste reconnaît aimer le bois, sa texture, sa lumière, sa flexibilité qu’il fait vivre au son des notes de guitare d’Alessandro Angius, entre ombres et luminosité, apparitions et disparitions. L’artiste de cirque est un enfant ou bien un génie des bois, se plaisant à assembler, à combiner entre eux des cubes, à les modifier, les transformer pour créer de nouvelles formes. Jeux d’illusion grâce au manipulateur d’objets placé dans l’ombre non loin de lui, et grâce aux images projetées sur les tours de cubes, qui les font apparaître comme disparaître par magie.

 Divertissement et récréation ludiques, Nacho Flores se montre ravi quand il présente ce spectacle où il se confronte avec les lois de la gravité, quand il construit des architectures de l’instant, des paysages éphémères et des monuments à forme humaine. Un spectacle-performance vivifiant, frais et entêtant, à la poésie boisée.

Véronique Hotte

Théâtre de la Cité Internationale, boulevard Jourdan, Paris XIVème jusqu’au 31 mars. Tél : 01 43 13 50 50

 


Archive pour 22 mars, 2017

Sylvia Plath et Ted Hughes

 

Sylvia Plath et Ted Hughes

738_12592779424_1bfa889e8f_o La Maison de la poésie rassemblait, ce soir-là, les traducteurs Sylvie Doizelet et Jacques Darras, mais aussi Dorothée Zumstein, auteure d’une pièce consacrée au célèbre couple Sylvia Plath et Ted Hughes, accompagnée de son équipe de création, la metteuse en scène Marie-Christine Mazzola et les comédiens Thibault de Montalembert et Sarah-Jane Sauvegrain qui nous firent, alternativement, entendre quelques merveilleux textes dont Le Brochet de Ted Hughes et La Lune et le Cyprès, paru dans Ariel, dernier recueil de la poétesse à être publié de son vivant, La lune n’offre aucune issue, c’est un visage morne/ D’une blancheur d’os effroyable. (…)/ Trou béant de désespoir total. J’habite ici (…) /  Je suis tombée de trop haut. Des nuages fleurissent/ Mystiques et bleus, à la face des étoiles. »

Sylvie Doizelet citant Sylvia Plath :  » Dying is an art I do it exceptionally well »  (Mourir est un art  j’y excelle), nous a rappelé l’itinéraire de la jeune Américaine de Boston, abreuvée, par ses parents allemands, au romantisme germanique. Elle nous raconte le coup de foudre de Sylvia, en 1956, à Cambridge, pour l’auteur de The Hawk in the rain, poèmes à elle dédiés, qui lui valurent une immédiate célébrité.

Son épouse et admiratrice restait modestement dans son ombre tutélaire. Jusqu’au jour où il trahit sa confiance, avec Assia Wevill, une amie de leur couple, elle aussi écrivaine. Jamais poètes n’avaient atteint, au cours du XXe siècle pareille notoriété. Par leur talents croisés mais aussi par leur destin tragique qui défraya la chronique : son suicide à elle dans l’hiver 1963, puis celui d’Assilia six ans après, la nouvelle compagne de Ted qui entraîna leur fille dans la mort.  Point de départ de Never never never de Dorothée Zumstein qui sera prochainement mise en scène par Marie-Christine Mazzola*.

 Nous sommes en 1984. Ted Hughes va être nommé « Poète Lauréat », titre prestigieux au Royaume-Uni. Il reçoit ce soir-là, tour à tour, la visite de son épouse et celle de sa maîtresse. Le vivant (Ted) est balloté, en une série de  retours en arrière, par l’irruption alternative des défuntes, d’un lieu et d’une époque à l’autre… L’auteure s’inspire des vies de Ted Hughes, Sylvia Plath et Assia Wevill, mais sans emprunter de citations de leurs œuvres respectives. Ces deux femmes hantent cet homme rongé par la culpabilité qui ne cessera, sa longue vie durant, d’adresser à Sylvia des Lettres d’anniversaire. Pour conclure la soirée, les comédiens nous donnèrent une aperçu de cette pièce labyrinthique.

 Comme souvent, la Maison de la poésie conjugue littérature et théâtre pour faire vivre les textes et nous inciter à aller plus loin.

 Mireille Davidovici

 Rencontre à la Maison de la poésie, passage Molière Paris 75003, le 27 février.

 *Never never never à Gare au Théâtre à Vitry-sur-Seine du 11 au 15 avril. 

 Poèmes de Ted Hughes , 1957-1994, traduits par Jacques Darras et Valérie Rouzeau, et l’œuvre de Sylvia Plath sont édités chez Gallimard.

Never never never, est publié aux éditions Quartett.

 

 

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