Pierrot lunaire, théâtre lyrique avec marionnettes

Pierrot lunaire, théâtre lyrique avec marionnettes, d’après l‘œuvre d’Arnold Schönberg sur vingt et un poèmes d’Albert Giraud, précédé de Quatorze Manières de décrire la pluie d’Hanns Eisler, direction musicale de Takénori Némoto, avec l’Ensemble Musical Nigella, mise en scène de Jean-Philippe Desrousseaux (spectacle en allemand surtitré en français)

 

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©Gabriele Alessandrini

 Le Pierrot lunaire (1912) d’Arnold Schönberg, avec son « sprechgesang » (mélodie parlée), fait suite au Pelléas et Mélisande (1902) de Claude Debussy. Dans cet opéra rempli d’effervescence intellectuelle et de foisonnement artistique, la voix dit le texte, sous l’emprise d’une musique insinuante qui en magnifie les valeurs expressives.

Ici, avec la mezzo-soprano Marie Lenormand-ou Fiona McGown, le 31 mars-la musique du XXème siècle,  imprévisible ouverte aux formes de l’aléatoire, sort de la temporalité classique. Avec un mélange de provocation, d’ironie et de prétentions cosmiques…

 Arnold Schönberg lançait un défi aux valeurs reçues, avec  une autre manière de vivre et de sentir, au début de ce siècle tourmenté. La définition des arts volait en éclats, entre volonté de jeu, fantaisie, irrespect, sarcasmes et refus du sentimentalisme. Cette épopée en trois parties de sept mélodrames se situe dans une maison close japonaise, à l’époque Edo (1600-1868). Pierrot, amoureux de Colombine-une geisha soumise au vieux Cassandre et surveillée par une maquerelle-se morfond, jaloux, puisqu’il est impossible à Colombine de se libérer. Elle se suicidera avec le katana de ce Pierrot lunaire, jeune héros exposé au désir, à la faute meurtrière et à sa rédemption.

 Cette œuvre écrite pour le cabaret,un lieu à la fois savant et canaille, celui de l’élégance et de la transgression, possède, pour Jean-Philippe Desrousseaux, des personnages de la commedia dell’arte qui peuvent être saisies par un théâtre de marionnettes, notamment le fameux bunraku, le théâtre japonais traditionnel  de marionnettes. Le goût de la parodie, entre provocation et burlesque, se glisse dans les figures grimaçantes de Pierrot, Colombine, Cassandre, et d’une vieille femme rouée, à travers une fête bergamasque qui tournera au drame, et le bunraku, avec son esthétique, répond techniquement et scéniquement à ce Pierrot lunaire.

Une narratrice-chanteuse nous raconte ici ce drame de figures solitaires, ici japonisées et animées à vue et avec précision par Gaëlle Trimardeau, Bruno Coulon, Antonin Autran, Jean-Philippe Desrousseaux, entièrement drapés de noir. Dans ce beau cauchemar, les personnages évoluent dans un univers fantastique très  sombre. Violence, désir cruel et nostalgie: le bunraku traduit avec finesse, la musique intérieure des personnages.

Ici, apparait une lune mystérieuse dans les tableaux imaginés par le metteur en scène, avec un vaste firmament de lumières brumeuses ou pures conçues par François-Xavier Guinnepain; on peut ainsi voir, en ombres, de souverains et magiques instruments de musique et leurs interprètes. La création vidéo de Gabriele Alessandrini qui, dans  les Quatorze manières de décrire la pluie dHanns Eisler, montre, grâce au graphisme numérique, l’apparition puis la disparition de taches noires et de couleur, sur fond blanc, entre abstraction et figuration, entre les images d’archives du Japon traditionnel, et  celles de la modernité. Un moment d’attention délicate pour un drame musical, avec le théâtre de jeux d’ombres et de lumières qui fascine le public …

Véronique Hotte

Athénée-Théâtre Louis-Jouvet, 7 rue Boudreau, Paris (IXème) jusqu’au 31 mars. T : 01 53 05 19 19

 

 

 

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