Memories of Sarajevo/Dans les ruines d’Athènes

 

Cabaret Europe: Memories of Sarajevo/Dans les ruines d’Athènes, mise en scène de Julie Bertin et Jade Herbulot

©JMedelli

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Berliner Mauer : vestiges était un spectacle avec un dispositif visant à impliquer les spectateurs et avait aussi trait à l’Europe (voir Le Théâtre du Blog).
Nous avions remarqué la belle dynamique de cette mise en scène mais aussi ses manques et ses longueurs. On  souhaitait donc voir un autre travail de ces jeunes metteuses en scène-toutes deux sorties du Cons-mais dont la conception serait plus travaillée, et dont le temps et l’espace seraient aussi beaucoup mieux maîtrisés… Peu après cette première expérience, Julie Bertin et Jade Herbulot ont fondé leur compagnie, Le Birgit Ensemble.

Et voilà maintenant un échantillon en une heure de Memories of Sarajevo et Dans les ruines d’Athènes, futurs spectacles qui font partie d’une tétralogie, Europe mon amour, où les deux amies veulent  parler de ces crises majeures et pas vraiment soldées que connait l’Europe à partir des années 90, avec d’abord, la guerre de Bosnie, puis le tsunami économique qui a secoué et secoue encore la Grèce. Avec les redoutables  effets sur la confiance  envers les institutions européennes! Des Grecs d’abord mais aussi des citoyens des autres pays. «Entre géopolitique, histoire et mémoire, disent-elles, la dramaturgie et la scénographie du spectacle confronteront les instances politiques à la réalité des habitants. »

On oubliera le titre en anglais de ces deux petites formes-une mode ridicule et en inflation! Les dieux du snobisme doivent savoir pourquoi!-présentées dans une péniche, donc un espace des plus limités-mérite heureusement mieux. Sur une scène bi-frontale, avec une cinquantaine de spectateurs de chaque côté, des guirlandes d’arbre de Noël,  et un piano droit, une batterie et leurs  interprètes. Et quelques belles et jeunes comédiennes/chanteuses, et un seul acteur, pour un  grande heure, dans une sorte de ballade à travers la tragédie de Sarajevo et le déroulement de l’actuelle crise grecque.

Ce mini-cabaret commence par un coup de rouge, et une savoureuse mise en bouche avec le célébrissime Hymne à La joie qu’elles chantent en chœur, puis cela continue avec des chansons, et l’histoire de cette belle jeune fille nommée Europe, des extraits de discours comme à la radio, en langue originale (dans le fond) et en français au micro (un peu trop fort pour ce petit lieu mais bon, la balance se fera). Le tout assez foutraque, c’est à dire aussi fou qu’absolument maîtrisé, avec une série de petites scènes au jeu parfois physique, qui s’enchaînent avec cohérence, avec une diction impeccable et des plus raffinées, avec souvent un curieux phrasé tout en nuances, très étudié, précis, doux et sensuel, mais ausi dur, tendu, à d’autres moments, quand on entend Alexis Tsipras, premier ministre grec, parler des décisions en terme de budget… soumises au bon vouloir de de l’Europe, et donc surtout de l’Allemagne.

Il y a aussi une courte parodie d’Angela Merkel, pas trop appuyée et assez drôle. La petite équipe,  bien soutenue par ses musiciens, est physiquement au plus près du public, et dans une grande connivence avec lui. Si bien qu’on est vite sous le charme…  Jade Herbulot et Julie Bertin ont l’art et la philosophie de dire les choses sur l’Europe, dans un spectacle à la fois généreux, intelligent et souvent plein d’humour. Que demande le peuple?

Mais avec une apparente légèreté, et sans  avoir l’air d’y toucher, loin, très loin des grandes et prétentieuses machines en trois heures sans entracte, avec vidéos et fumigènes. (On ne vise personne mais suivez notre regard!) Et  cela fait grand bien. Au prochain festival d’Avignon, Julie Bertin et Jade Herbulot, avec une équipe plus importante, présenteront les formes complètes de ces  « petites formes ». On peut parier que si, elles ne sont pas trop longues et si elles ont la même force et le même humour, elles devraient faire un tabac. Donc, à suivre…

Philippe du Vignal

Spectacle vu le 1er avril à la péniche La Pop, face au 40 quai de la Loire, Paris 18ème.
Festival d’Avignon, Gymnase Paul Giéra, du 9 au 15 juillet (sauf le 12).  

 

 

 

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Archive pour 4 avril, 2017

Les Gravats par le Collectif la Mouline

 

Les Gravats par le collectif La Mouline

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©Didier Goudal

« Nos vies disent, ces quatre compères, ne seraient que cette tentative désespérée d’inventer une dignité jusqu’au dernier moment puisqu’il en est un fatal et définitif, la mort. Ne jamais faiblir. Alors comment raconter cette lutte, ce travail, cette invention permanente du vivant qui va irrémédiablement vers ce repos obligé, surtout quand on est vieux. Comment? Eh! Bien en fanfare, en chanson ou en poèmes, en témoignage, en image, en info, en documents.

  »Il faut absolument que ça s’arrête ! Rien ne se passe ici, c’est fini, l’histoire est longue et la vie très courte. Devant moi le désert ! » Ils chantent tous les trois, et dansent sur leur fauteuil. Puis, avec quelques éclats d’humour noir, Jean-Pierre Bodin arrache des os à Jean-Louis Hourdin…

« Les vieux anars, dit-il, qui fêtent la vie avant de calencher, qui font la nouba pendant la nuit(…) Une grande improvisation avec déambulateurs, fauteuils roulants, lits médicalisés, support perf, avec les couches culottes, les bas à varices, les béquilles, avec leurs cercueils, qui dansent avec des enfants qui leur racontent des histoires pour les endormir et qui continuent à jouer la comédie avec des postiches, avec des perruques, des fausses barbes, des masques, qui font de la musique avec des os sur un squelette, qui se servent de leur dentier pour faire des castagnettes, qui se dressent pour résister face à tous ceux qui les humilient. »

« Je me tiens sur le seuil de la vie et de la mort(… ) L’homme n’est que poussière, c’est parti à petit feu, sans qu’on s’en aperçoive ! (…) Pour moi, une personne âgée, c’est quelqu’un qui a quinze ans de plus que moi ! Le 17 avril, je me vois mourir, je me découvre morte. Tous les jours, un petit effort, c’est bien.»

Une obsession que nous partageons tous. Mais les trois compères s’amusent, et nous avec…

Edith Rappoport

Spectacle vu le 1er avril, au Moulin du Roc de Niort. T: 05 49 77 32 32.

Le Fils de Marine Bachelot Nguyen

© Thierry Laporte -

© Thierry Laporte -

 

Le Fils de Marine Bachelot Nguyen, mise en scène de David Gauchard

Une femme s’adresse au public : «Vous savez ce que c’est d’être mère ? » Et de nous conter par le menu, la naissance de ses fils, son mariage, son métier de pharmacienne tenant boutique avec son époux. Une femme d’aujourd’hui, dans une ville de province, à la vie bien ordonnée entre famille et travail… allant à la messe le dimanche avec mari et enfants…  Deux fils qui grandissent, si différents l’un de l’autre. Elle s’engage dans des mouvements catholiques traditionnalistes,  et va aux manifestations contre le spectacle de Roméo Castellucci, Sur le concept du visage du fils de Dieu puis ira aux marches contre le mariage pour tous. Avec le sentiment d’appartenir à une bonne société bien pensante…

Une adresse simple, factuelle. Tantôt la comédienne dit : je, tantôt elle prend du recul, avec un récit à la troisième personne. Mais banal, le personnage cerné par l’auteure s’avère complexe et cela, dès le début du récit : «Les enfants,  elle était envahie par eux. Elle les aimait et les détestait.» Pétrie de contradictions et d’angoisses, elle apostrophe de temps à autre  le public, en quête d’approbation : «Et vous vous allez à la messe ? » «Et vous, vous parlez de sexualité avec vos enfants ? » …

Au fil du récit, on sent, à la tension du jeu de la comédienne, monter le drame final. La jeune femme ne l’aura pas  vu venir car, aveuglée par ses certitudes, elle est persuadée d’être dans le droit chemin, de lutter pour la bonne cause. Sa croisade contre le Mal, au nom de valeurs qui suintent la haine d’autrui, lui vaudra le pire des châtiments.

Rien de moraliste dans cette pièce, commande  de la compagnie l’Unijambiste, en réponse  à  l’essor de l’intégrisme catholique. Une analyse  froide et scrupuleuse des mécanismes à l’œuvre dans l’engrenage qui conduit à des engagements politiques nauséabonds, en toute inconscience.  « Cette fiction a un fort ancrage documentaire (…) Un travail de recherche sur les mouvements catholiques intégristes en France et sur d’autres mouvements plus policés et ambigus, a accompagné et précédé l’écriture du texte, note l’auteure. » 

 A la précision et l’efficacité du texte, répond une mise en scène sobre et rigoureuse. Et Emmanuelle Hiron, au jeu d’une grande intensité, tient le public en haleine pendant une heure vingt. La présence d’un jeune claveciniste qui apparaît de temps à autre sur le plateau, pas vraiment justifiée, apporte un contrechamp, une respiration dans le jeu serré et subtil de la comédienne qui, au plus près du personnage et de ses émotions, sait, en même temps, s’en tenir habilement à distance.

Cette mère de famille ordinaire, qui pourrait être notre sœur ou notre collègue, nous semble, à nous aussi, à la fois familière et lointaine. Du bel ouvrage, sans autre prétention que de nous révéler la face sombre et tragique de la bien-pensance.

 Mireille Davidovici

Spectacle vu à la Maison des Métallos le 2 avril.
Festival Mythos à Rennes. T. : 02 99 79 00 11, les 6 et 7 avril.
Espace Malraux/ Chambéry (73) T. 04 79 85 55 43 , les 3, 4,10, 11 et 12 mai .
La Manufacture à Avignon T. 04 90 85 12 71 du 6 au 26 juillet.

 

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L’Exception et la Règle de Bertolt Brecht

L’Exception et la Règle de Bertolt Brecht
 

©CarineBoeuf

©CarineBoeuf

«En ces temps de mise en examen, illustres ou nombreuses… C’est selon, nous voilà avec notre nouveau spectacle, replongés dans Brecht, avec L’Exception et la Règle ! (…) La justice n’est pas la même pour tout le monde…, Il ne faut jamais accepter l’inacceptable, même lorsque c’est la règle !» déclare  les comédiens, infatigables lutteurs, de la compagnie Jolie Môme.
 Au sommet de la pyramide qui surplombe les spectateurs, deux musiciens prononcent les paroles de Brecht interprétées par les protagonistes de ce voyage infernal à travers un désert où un marchand assassine son coolie qui lui offrait sa gourde, ayant cru qu’il allait l’attaquer avec une pierre. A Urga, avant de traverser le désert, le marchand, à la recherche de puits de pétrole, licencie son guide mais garde son coolie qu’il brutalise avec la dernière méchanceté. «L’homme faible meurt, l’homme fort se bat, celui qui ne se méfie pas n’est qu’un imbécile. Quelle maladie pourrait être aussi dangereuse que l’homme ?»
 
Le coolie a le bras cassé par son maître, et il a perdu sa vie à la gagner. Son épouse, privée de ressources, intente un procès qu’elle va perdre. «Quel motif, le coolie aurait-il eu de donner à boire à son maître ? » Les comédiens, en bas de la pyramide, sont de naïves et attendrissantes marionnettes. On s’amuse beaucoup à voir remuer les lèvres des musiciens qui les doublent. Ici, de bons, de grands, d’infatigables comédiens font honneur à  la compagnie Jolie Môme.
 
En ouverture, Clarisse Taron, présidente du Syndicat de la magistrature, exposait à la représentation du 2 avril, les dix exigences pour la Justice…

Edith Rappoport
 
Théâtre de la  Belle Étoile, 14 Rue Saint-Just, 93200 Saint Denis, jusqu’au 22 avril. T: 01 49 98 39 20.

 

 

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