Semaine extra, 3ème édition à Thionville

 

Semaine Extra (troisième édition) à Thionville

Jean Boillot, metteur en scène et directeur du Nest et Cécile Arthus, artiste associée à la jeunesse, (voir Le Théâtre du Blog) ont mis au point cette semaine Extra, maintenant bien rodée. « Pour le plaisir des sens et du partage intergénérationnel, disent-ils, elle propose des morceaux choisis à l’intention des publics jeunes et de leurs familles. Avec délicatesse, humour ou gravité, les pièces programmées bousculeront notre capacité à consentir le pire. (…) Sous le signe de la rébellion et de l’engagement. Langages non-académiques, loin des rives du bien-pensant, formes poétiques débordantes, voilà ce que nous offre cette programmation avec son plein d’énergie vivifiant.”
Soit, sur cinq jours de festival, six spectacles dans les lycées et les théâtres de Thionville, une création Tisez-vous ou je tire, réalisée avec la participation de jeunes de la ville, un match d’improvisation, et enfin onze ateliers encadrés sur les métiers du spectacle.

Taisez-vous ou je tire, texte de Métie Navajo, mise en scène de Cécile Arthus

 

©Luc Maréchaux

©Luc Maréchaux

Cela se passe dans la salle où une jeune professeure d’un collège de banlieue donne un cours de théâtre à une classe d’adolescents. Elle leur fait travailler Don Juan de Molière, ou plutôt elle essaye… L’exercice n’a rien de facile mais, comme elle s’y prend de la façon maladroite et à la limite de la caricature, elle n’arrive pas à s’en sortir! Elle fait pourtant preuve d’une  petite autorité mais se révèle incapable de leur montrer les enjeux de la pièce. Choc de générations, choc des cultures…Bref, le ton commence à monter: tout est en place pour que cet atelier-théâtre ne fonctionne pas, et les élèves veulent prouver à leur prof que l’œuvre étudiée ne les concerne en rien…

Mission accomplie. C’est vite la confusion générale, quand un revolver tombe du sac d’un élève! Prise de panique, la jeune prof  s’en empare habilement et va en faire un instrument de pouvoir. Plusieurs élèves réussissent à s’enfuir mais elle a du mal à gérer la situation! Elle peut régner sur cette classe, terrorisée mais que l’on sent assez admirative: la prof commence à parler leur langage et à installer des rapports de force! Molière est maintenant bien loin… Et les scènes de Don Juan font place à la naissance d’une tragédie possible avec bain de sang à la clé, si les choses tournaient mal, d’autant que la prof se met alors à tirer des coups de feu, avec un certain sang-froid mais quand même…

Retournement brutal de situation: un élève réussit à prendre le revolver  jusqu’au moment,  où, enfin, elle le récupère. La direction de l’établissement, prévenue, va faire déclencher le plan de secours ; on entend derrière la porte, les mises en demeure au mégaphone de la police qui ignore ce qui se passe exactement dans cette salle, entre les élèves et leur prof. Négociations refusées dans un climat impressionnant de réalisme bien réalisé par Cécile Arthus. Même si les méthodes  du GIGN sont sûrement différentes…

La situation change donc en effet, puisqu’ils sont tous obligés-élèves comme prof-d’être solidaires face à l’imminence d’un passage en force. Une jeune journaliste de radio, micro à la main-assez caricaturale-raconte depuis le début à ses chers auditeurs, cette descente aux enfers et dramatise les choses pour donner du piquant à cette longue attente. Les appels à se rendre par mégaphone se succèdent, augmentant encore l’émotion palpable. Même si l’auteure n’a pas réussi à conclure  sa pièce qui se termine, plutôt qu’elle ne finit vraiment…Mais on ne vous dévoilera pas la fin.

“Le théâtre de Métie Navajo est politique, dit Cécile Arthus, il interroge le présent et défriche des situations complexes qui ont toute quelque chose de familier (…) Au milieu de cette réalité gluante qui nous colle à la peau, elle permet de croire en un avenir différent et meilleur.” N’exagérons rien, c’est faire bien des honneurs à la petite pièce de Métie Najo mais le traitement de ce fait divers qui aurait pu tourner au cauchemar, est habile, et a au moins le mérite de mettre l’accent là où cela fait mal: doit-on enseigner uniquement ce que les programmes imposent de la même façon partout en France quel que soit les élèves, et si oui comment? Avec la meilleure conscience du monde, que ce soit au lycée Louis le Grand à Paris, ou au lycée Saint-Exupéry à Marseille ?  Comment intéresser à un texte dit « classique » des jeunes qui n’en voient pas l’intérêt, sans doute plus friands de rap et de BD, d’informations sur Internet et de jeux vidéo?

 Que ceux qui ont la réponse, lèvent le doigt! Jamais sans doute être enseignant dans le secondaire n’aura été plus difficile… Il y faut être humble, avoir été bien formé, accepter ensuite d’être mal payé, avoir une foi inébranlable dans son métier; et si on anime un atelier-théâtre comme ici, il faut aussi posséder une solide culture théâtrale et une sensibilité aux textes, une empathie réelle avec ses élèves, et avoir déjà une bonne expérience. Et encore, pas sûr que cela réponde aux attentes et marche à tous les coups. Bref, la quadrature du cercle! Et tout cela, face à de jeunes baraqués d’un milieu social souvent défavorisé, parlant et écrivant souvent mal le français  mais bourrés d’énergie qui ont envie d’en découdre avec une école à laquelle ils ne s’identifient pas… Bienvenue dans le club!

Dans la belle salle en bois du Nest, Cécile Arthus a réalisé une mise en scène où elle réussit à mettre en valeur chacun de ses jeunes comédiens, tous très crédibles,et en même temps, à bien maîtriser le groupe quand il est en mouvement, à la limite permanente de la bagarre générale. Olivia Chatain est tout à fait remarquable dans le rôle de la jeune prof de français. Et les jeunes spectateurs durant une heure vingt, regardaient passionnés…  Aucun doute: oui, le théâtre est bien vivant quand il est encore capable de susciter une pareille attention!

Spectacle créé à Thionville, du 4 au 8 avril.
Le 25 avril à La Ferme du Bel Ebat, à Guyancourt (78).

Les 27 et 28 avril, au Théâtre de Lorient-Centre Dramatique National, dans le cadre du Festival Eldorado.

Festival ADO#8 au Préau-Centre Dramatique de Normandie-Vire, du 2 au 6 mai.
Les 9, 11, 12, 18, 19 et 20 mai,  dans plusieurs communes de la Manche, du Calvados et de l’Orne. 
Le 9 mai, à Domfront; le  11 mai,  à Mortain;  le 12 mai, à Torigny-les-Villes; le 18 mai, à Passais; le 19 mai, à  Saint-Sever et le  20 mai,  à Condé-en-Normandie.

 

Millefeuille, conception et interprétation de Jean-Baptiste André

 Ce sympathique et jeune artiste de cirque arrive dans une salle de classe du lycée Charlemagne à Thionville, et se présente comme un conférencier; effectivement, il va parler aux élèves de son métier, mais aussi de sa vie personnelle. Les jeunes élèves de troisième l’écoutent poliment mais pas plus. Puis cette conférence va se transformer en une suite de numéros d’acrobatie au sol, et sur la petite scène de cette salle.
Pas très passionnant, ce  monologue  a eu du mal  à retenir notre attention. Sans doute à cause du texte d’Eddy Palaro, à l’écriture insuffisante… Et on ne nous fera pas croire que, comme l’indique une note d’intention un poil prétentieuse, que l’auteur et l’interprète “créent une proposition où texte et chorégraphie se font écho et interrogent le rapport de la scène et de la salle” (…) Et que “cette rencontre malicieuse amènera l’élève, après bien des sourires et des doutes, à devenir un véritable spectateur de cette poésie profonde du langage et du corps.”
Cette « proposition » trop juste, n’est pas à la hauteur des autres spectacles. Tant pis!

 Maintenant que je sais, texte de Catherine Verlaguet, mis en scène d’Olivier Letellier

 Bon praticien du théâtre pour jeune public, le metteur en scène avait présenté à Chaillot Un Chien dans la tête, et l’an passé, au Théâtre des Abbesses,une trilogie écrite respectivement par Catherine Verlaguet, Magali Mougel et Sylvain Levey: Maintenant que je sais, Je ne veux plus, Et Me Taire (voir Le Théâtre du Blog).

Cela se passe en 1983, une jeune journaliste française correspondante d’un journal au Brésil, raconte une histoire qui lui est arrivée dans ce pays où elle arrivait en ne connaissant personne. Au hasard d’une rencontre,  elle devient vite amie avec un opposant au régime dictatorial militaire et avec sa compagne Magdalena qui soutient son amoureux dans  son combat pour la liberté d’expression, et la liberté tout court. Mais un jour, il disparaîtra sans laisser aucune trace. Et Magdalena, enceinte mais épuisée par ses recherches pour le retrouver, finira par ne plus donner signe de vie, probablement, elle aussi torturée puis tuée par les militaires. Et la jeune journaliste comprendra qu’elle a tout intérêt à vite reprendre l’avion pour la France si elle ne veut aps subir le même sort…

Ce monologue/confession est joué  dans une salle de la cité Hélène Boucher à Thionville devant une classe de seconde (dix-sept filles et neuf garçons). Avec juste, une table où trône une petite et légendaire machine à écrire bleue, comme celle d’André Malraux de marque Japy, qui était fabriquée à Audincourt, dans les locaux actuels du Théâtre de l’Unité…

Jeanne Favre s’asseoit face aux élèves, puis se lève,  et va, une heure durant, vers les petits groupes qui se sont formés en groupe.. Aucune distance dans cet exercice théâtral, un travail sans filet pour ce monologue qu’elle assume très bien. Les jeunes élèves de cette classe de seconde  (15/16 ans) semblent être bien conscients que le récit d’Hélène ouvre une réflexion sur le sens d’un engagement qui peut  parfois justifier une vie de quelqu’un, mais aussi la détruire, comme celle de ses  proches.

Jeanne Favre ensuite, après le spectacle, engage une conversation avec ces lycéens et  arrive à leur montrer que le fait de dire non et de pratiquer une forme de résistance quelle qu’elle soit, peuvent être aussi le fait d’une personne seule, avec de tout petits moyens pour le faire, telle une Rosa Parks noire, refusant il y a soixante ans, de céder sa place dans un bus, à un blanc. Avec des conséquences inimaginables…
 Mais curieusement, plusieurs élèves semblaient avoir une attitude défaitiste! D’autres plus lucides, plus courageux, estimaient aussi capital de dire non. Sans être vraiment du théâtre, comme dirait notre confrère Jean-Luc Jenner qui a en profonde aversion, les solos, un petit spectacle comme celui-ci, joué dans un lycée ou une bibliothèque, peut amener à une prise de conscience chez des jeunes qui ne fréquentent guère les salles de spectacle.

Quelques-uns de leurs professeurs présents dans la salle regrettaient d’ailleurs qu’un bus pour aller au théâtre ait dû être décommandé, faute de clients,et que l’atelier théâtre ait été fermé pour non fréquentation… Oui, mais aucun d’eux n’avait eu la curiosité d’aller voir-et d’emmener leurs élèves que cela aurait sûrement passionné-cette remarquable création qu’est Blockbuster (voir Le Théâtre du Blog) qui a fait l’objet d’une longue ovation du public. Cela se passait au très beau théâtre municipal à quelque cent mètres du lycée! Quelle tristesse! Cherchez l’erreur!

Blockbuster-new-Dominique-Houcmant-3Blockbuster

Nous avons donc en effet revu le spectacle du collectif liégeois Mensuel qui s’est encore bonifié avec le temps. Une belle fluidité dans le jeu, des acteurs exceptionnels, en particulier Sandrine Bergot qui  joue ici tous les rôles de femme, de façon exemplaire. Ils savent tout aussi de l’art du doublage et du bruitage, et sont d’excellents musiciens. En une heure et demi, ils procèdent pour dire cette fable sur la violence de la classe dominante, à un détournement aussi caustique que très drôle, de quelque 1.400 plans de films américains! bien connus pour la plupart! Et avec des répliques très calées sur les phrases originales qui, bien sûr, n’ont rien à voir avec ce nouveau scénario. Quel travail, quelle intelligence, quelle maîtrise du plateau pour cette performance contestataire qui créée l’an dernier à Liège, tourne un partout et avec un grand succès en France. Si Blockbuster passe près de chez vous, conseil d’ami, ne le ratez surtout pas…

 Philippe du Vignal

 Spectacles vus les 6 et 7 avril, à Thionville dans le cadre de la Semaine Extra.

 

 


Archive pour 15 avril, 2017

Semaine extra, 3ème édition à Thionville

 

Semaine Extra (troisième édition) à Thionville

Jean Boillot, metteur en scène et directeur du Nest et Cécile Arthus, artiste associée à la jeunesse, (voir Le Théâtre du Blog) ont mis au point cette semaine Extra, maintenant bien rodée. « Pour le plaisir des sens et du partage intergénérationnel, disent-ils, elle propose des morceaux choisis à l’intention des publics jeunes et de leurs familles. Avec délicatesse, humour ou gravité, les pièces programmées bousculeront notre capacité à consentir le pire. (…) Sous le signe de la rébellion et de l’engagement. Langages non-académiques, loin des rives du bien-pensant, formes poétiques débordantes, voilà ce que nous offre cette programmation avec son plein d’énergie vivifiant.”
Soit, sur cinq jours de festival, six spectacles dans les lycées et les théâtres de Thionville, une création Tisez-vous ou je tire, réalisée avec la participation de jeunes de la ville, un match d’improvisation, et enfin onze ateliers encadrés sur les métiers du spectacle.

Taisez-vous ou je tire, texte de Métie Navajo, mise en scène de Cécile Arthus

 

©Luc Maréchaux

©Luc Maréchaux

Cela se passe dans la salle où une jeune professeure d’un collège de banlieue donne un cours de théâtre à une classe d’adolescents. Elle leur fait travailler Don Juan de Molière, ou plutôt elle essaye… L’exercice n’a rien de facile mais, comme elle s’y prend de la façon maladroite et à la limite de la caricature, elle n’arrive pas à s’en sortir! Elle fait pourtant preuve d’une  petite autorité mais se révèle incapable de leur montrer les enjeux de la pièce. Choc de générations, choc des cultures…Bref, le ton commence à monter: tout est en place pour que cet atelier-théâtre ne fonctionne pas, et les élèves veulent prouver à leur prof que l’œuvre étudiée ne les concerne en rien…

Mission accomplie. C’est vite la confusion générale, quand un revolver tombe du sac d’un élève! Prise de panique, la jeune prof  s’en empare habilement et va en faire un instrument de pouvoir. Plusieurs élèves réussissent à s’enfuir mais elle a du mal à gérer la situation! Elle peut régner sur cette classe, terrorisée mais que l’on sent assez admirative: la prof commence à parler leur langage et à installer des rapports de force! Molière est maintenant bien loin… Et les scènes de Don Juan font place à la naissance d’une tragédie possible avec bain de sang à la clé, si les choses tournaient mal, d’autant que la prof se met alors à tirer des coups de feu, avec un certain sang-froid mais quand même…

Retournement brutal de situation: un élève réussit à prendre le revolver  jusqu’au moment,  où, enfin, elle le récupère. La direction de l’établissement, prévenue, va faire déclencher le plan de secours ; on entend derrière la porte, les mises en demeure au mégaphone de la police qui ignore ce qui se passe exactement dans cette salle, entre les élèves et leur prof. Négociations refusées dans un climat impressionnant de réalisme bien réalisé par Cécile Arthus. Même si les méthodes  du GIGN sont sûrement différentes…

La situation change donc en effet, puisqu’ils sont tous obligés-élèves comme prof-d’être solidaires face à l’imminence d’un passage en force. Une jeune journaliste de radio, micro à la main-assez caricaturale-raconte depuis le début à ses chers auditeurs, cette descente aux enfers et dramatise les choses pour donner du piquant à cette longue attente. Les appels à se rendre par mégaphone se succèdent, augmentant encore l’émotion palpable. Même si l’auteure n’a pas réussi à conclure  sa pièce qui se termine, plutôt qu’elle ne finit vraiment…Mais on ne vous dévoilera pas la fin.

“Le théâtre de Métie Navajo est politique, dit Cécile Arthus, il interroge le présent et défriche des situations complexes qui ont toute quelque chose de familier (…) Au milieu de cette réalité gluante qui nous colle à la peau, elle permet de croire en un avenir différent et meilleur.” N’exagérons rien, c’est faire bien des honneurs à la petite pièce de Métie Najo mais le traitement de ce fait divers qui aurait pu tourner au cauchemar, est habile, et a au moins le mérite de mettre l’accent là où cela fait mal: doit-on enseigner uniquement ce que les programmes imposent de la même façon partout en France quel que soit les élèves, et si oui comment? Avec la meilleure conscience du monde, que ce soit au lycée Louis le Grand à Paris, ou au lycée Saint-Exupéry à Marseille ?  Comment intéresser à un texte dit « classique » des jeunes qui n’en voient pas l’intérêt, sans doute plus friands de rap et de BD, d’informations sur Internet et de jeux vidéo?

 Que ceux qui ont la réponse, lèvent le doigt! Jamais sans doute être enseignant dans le secondaire n’aura été plus difficile… Il y faut être humble, avoir été bien formé, accepter ensuite d’être mal payé, avoir une foi inébranlable dans son métier; et si on anime un atelier-théâtre comme ici, il faut aussi posséder une solide culture théâtrale et une sensibilité aux textes, une empathie réelle avec ses élèves, et avoir déjà une bonne expérience. Et encore, pas sûr que cela réponde aux attentes et marche à tous les coups. Bref, la quadrature du cercle! Et tout cela, face à de jeunes baraqués d’un milieu social souvent défavorisé, parlant et écrivant souvent mal le français  mais bourrés d’énergie qui ont envie d’en découdre avec une école à laquelle ils ne s’identifient pas… Bienvenue dans le club!

Dans la belle salle en bois du Nest, Cécile Arthus a réalisé une mise en scène où elle réussit à mettre en valeur chacun de ses jeunes comédiens, tous très crédibles,et en même temps, à bien maîtriser le groupe quand il est en mouvement, à la limite permanente de la bagarre générale. Olivia Chatain est tout à fait remarquable dans le rôle de la jeune prof de français. Et les jeunes spectateurs durant une heure vingt, regardaient passionnés…  Aucun doute: oui, le théâtre est bien vivant quand il est encore capable de susciter une pareille attention!

Spectacle créé à Thionville, du 4 au 8 avril.
Le 25 avril à La Ferme du Bel Ebat, à Guyancourt (78).

Les 27 et 28 avril, au Théâtre de Lorient-Centre Dramatique National, dans le cadre du Festival Eldorado.

Festival ADO#8 au Préau-Centre Dramatique de Normandie-Vire, du 2 au 6 mai.
Les 9, 11, 12, 18, 19 et 20 mai,  dans plusieurs communes de la Manche, du Calvados et de l’Orne. 
Le 9 mai, à Domfront; le  11 mai,  à Mortain;  le 12 mai, à Torigny-les-Villes; le 18 mai, à Passais; le 19 mai, à  Saint-Sever et le  20 mai,  à Condé-en-Normandie.

 

Millefeuille, conception et interprétation de Jean-Baptiste André

 Ce sympathique et jeune artiste de cirque arrive dans une salle de classe du lycée Charlemagne à Thionville, et se présente comme un conférencier; effectivement, il va parler aux élèves de son métier, mais aussi de sa vie personnelle. Les jeunes élèves de troisième l’écoutent poliment mais pas plus. Puis cette conférence va se transformer en une suite de numéros d’acrobatie au sol, et sur la petite scène de cette salle.
Pas très passionnant, ce  monologue  a eu du mal  à retenir notre attention. Sans doute à cause du texte d’Eddy Palaro, à l’écriture insuffisante… Et on ne nous fera pas croire que, comme l’indique une note d’intention un poil prétentieuse, que l’auteur et l’interprète “créent une proposition où texte et chorégraphie se font écho et interrogent le rapport de la scène et de la salle” (…) Et que “cette rencontre malicieuse amènera l’élève, après bien des sourires et des doutes, à devenir un véritable spectateur de cette poésie profonde du langage et du corps.”
Cette « proposition » trop juste, n’est pas à la hauteur des autres spectacles. Tant pis!

 Maintenant que je sais, texte de Catherine Verlaguet, mis en scène d’Olivier Letellier

 Bon praticien du théâtre pour jeune public, le metteur en scène avait présenté à Chaillot Un Chien dans la tête, et l’an passé, au Théâtre des Abbesses,une trilogie écrite respectivement par Catherine Verlaguet, Magali Mougel et Sylvain Levey: Maintenant que je sais, Je ne veux plus, Et Me Taire (voir Le Théâtre du Blog).

Cela se passe en 1983, une jeune journaliste française correspondante d’un journal au Brésil, raconte une histoire qui lui est arrivée dans ce pays où elle arrivait en ne connaissant personne. Au hasard d’une rencontre,  elle devient vite amie avec un opposant au régime dictatorial militaire et avec sa compagne Magdalena qui soutient son amoureux dans  son combat pour la liberté d’expression, et la liberté tout court. Mais un jour, il disparaîtra sans laisser aucune trace. Et Magdalena, enceinte mais épuisée par ses recherches pour le retrouver, finira par ne plus donner signe de vie, probablement, elle aussi torturée puis tuée par les militaires. Et la jeune journaliste comprendra qu’elle a tout intérêt à vite reprendre l’avion pour la France si elle ne veut aps subir le même sort…

Ce monologue/confession est joué  dans une salle de la cité Hélène Boucher à Thionville devant une classe de seconde (dix-sept filles et neuf garçons). Avec juste, une table où trône une petite et légendaire machine à écrire bleue, comme celle d’André Malraux de marque Japy, qui était fabriquée à Audincourt, dans les locaux actuels du Théâtre de l’Unité…

Jeanne Favre s’asseoit face aux élèves, puis se lève,  et va, une heure durant, vers les petits groupes qui se sont formés en groupe.. Aucune distance dans cet exercice théâtral, un travail sans filet pour ce monologue qu’elle assume très bien. Les jeunes élèves de cette classe de seconde  (15/16 ans) semblent être bien conscients que le récit d’Hélène ouvre une réflexion sur le sens d’un engagement qui peut  parfois justifier une vie de quelqu’un, mais aussi la détruire, comme celle de ses  proches.

Jeanne Favre ensuite, après le spectacle, engage une conversation avec ces lycéens et  arrive à leur montrer que le fait de dire non et de pratiquer une forme de résistance quelle qu’elle soit, peuvent être aussi le fait d’une personne seule, avec de tout petits moyens pour le faire, telle une Rosa Parks noire, refusant il y a soixante ans, de céder sa place dans un bus, à un blanc. Avec des conséquences inimaginables…
 Mais curieusement, plusieurs élèves semblaient avoir une attitude défaitiste! D’autres plus lucides, plus courageux, estimaient aussi capital de dire non. Sans être vraiment du théâtre, comme dirait notre confrère Jean-Luc Jenner qui a en profonde aversion, les solos, un petit spectacle comme celui-ci, joué dans un lycée ou une bibliothèque, peut amener à une prise de conscience chez des jeunes qui ne fréquentent guère les salles de spectacle.

Quelques-uns de leurs professeurs présents dans la salle regrettaient d’ailleurs qu’un bus pour aller au théâtre ait dû être décommandé, faute de clients,et que l’atelier théâtre ait été fermé pour non fréquentation… Oui, mais aucun d’eux n’avait eu la curiosité d’aller voir-et d’emmener leurs élèves que cela aurait sûrement passionné-cette remarquable création qu’est Blockbuster (voir Le Théâtre du Blog) qui a fait l’objet d’une longue ovation du public. Cela se passait au très beau théâtre municipal à quelque cent mètres du lycée! Quelle tristesse! Cherchez l’erreur!

Blockbuster-new-Dominique-Houcmant-3Blockbuster

Nous avons donc en effet revu le spectacle du collectif liégeois Mensuel qui s’est encore bonifié avec le temps. Une belle fluidité dans le jeu, des acteurs exceptionnels, en particulier Sandrine Bergot qui  joue ici tous les rôles de femme, de façon exemplaire. Ils savent tout aussi de l’art du doublage et du bruitage, et sont d’excellents musiciens. En une heure et demi, ils procèdent pour dire cette fable sur la violence de la classe dominante, à un détournement aussi caustique que très drôle, de quelque 1.400 plans de films américains! bien connus pour la plupart! Et avec des répliques très calées sur les phrases originales qui, bien sûr, n’ont rien à voir avec ce nouveau scénario. Quel travail, quelle intelligence, quelle maîtrise du plateau pour cette performance contestataire qui créée l’an dernier à Liège, tourne un partout et avec un grand succès en France. Si Blockbuster passe près de chez vous, conseil d’ami, ne le ratez surtout pas…

 Philippe du Vignal

 Spectacles vus les 6 et 7 avril, à Thionville dans le cadre de la Semaine Extra.

 

 

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