Domaine de Chaumont – 9ème saison d’art contemporain
Domaine de Chaumont – 9ème saison d’art contemporain
Le domaine de Chaumont a inauguré fin mars sa neuvième saison d’art contemporain, naturellement sous le signe du végétal et du Pouvoir des fleurs. Priorité aux invités de l’année, mais on n’oubliera pas la découverte, au fil d’une promenade dans le parc, de l’extraordinaire collection de sculptures souvent monumentales, surprenantes, qui empruntent au végétal, s’immiscent dans la végétation, structurent les perspectives… Anne et Patrick Poirier, El Anatsui, Giuseppe Penone, Chris Drury, Yamou, excusez du peu ! Ils sont vingt-et-un, de cette trempe.
Dans la galerie du fenil, Sheila Hicks expose (jusqu’en 2019) Glossolalia, une commande de la région Centre-Val-de-Loire. On est surpris par la vivacité, la profusion des couleurs, qui parlent toutes les langues à la fois (d’où le titre, qui fait référence à la Pentecôte et au don des langues offert aux disciples du Christ). Coussins, énormes pelotes, tissages, fils tendus, la grange est entièrement occupée par cet hommage en grand format aux « ouvrages de dame ». Au-delà d’un clin d’œil à l’artisanat des années soixante-dix, cette Glossolalia évoque un pouvoir féminin qui se tisse, malgré tout, sur toute la planète.
Des fleurs, Davide Quayola, nous en offre à la galerie basse du fenil (jardins d’été) : filmées dans le domaine même, travaillées à l’ordinateur, cela donne une vidéo néo-impressionniste, agréable. Plus surprenantes sont les vidéos de Luzia Simons, (Blacklist), regard intime, en temps réel, sur le flirt entre les insectes et les fleurs et sur le glissement du végétal à l’animal. Ce que l’on retrouve avec le monumental Momento fecundo, de Henrique Oliveira, à la grange aux abeilles : un tronc, une poutre enroulée comme un anaconda, un concentré de puissance.
À côté, Sara Favrau met l’énergie de sa sculpture dans le grignotage d’un pilier, dans le découpage obstiné, jusqu’à la dentelle, d’un réseau de délicates cages de bois. Mais l’un des œuvres les plus riches de cette partie du parcours (galerie haute de l’Asinerie) est celle de l’artiste suisse Andrea Wolfensberger, qui travaille le carton jusqu’à y trouver des formes complexes, vivantes, si vivantes qu’il est presque impossible de les photographier.
Du côté des élégantes écuries du château : le rideau en 3D de fleurs odorantes de Rebecca Louise law, la Petite Loire de Mathieu Lehanneur, marbre vert intégré au sol de la cour, qui se révèle sous la pluie avec ses petites flaques et ses brillances. Dans le manège (un ancien four à plâtre), Stéphnae Guiran a planté Le nid des murmures, jardin de fleurs de quartz (les « fours » ouverts) accompagné d’une délicate bande-son, tendance et tentation pour beaucoup d’artistes plasticiens, mais ici parfaitement juste.
Mais nous n’aurons pas tout vu : il faudra revenir, avant tout pour le château, qui expose Sarkis, Gabriel Orozco, Sam Szafran et ses Papiers peints, Karine Bonneval et ses fleurs de sucre, Jannis Kounellis disparu en février dernier(une de ses dernières installations)… On aura toujours le bonheur de rencontrer les œuvres confrontées à la puissance des bâtiments et des jardins : elles ont pour elles l’espace, elles respirent, elles luttent, et elles tiennent. La force de l’art.
Christine Friedel
Domaine de Chaumont, jusqu’au 5 novembre. T. 02 54 20 99 22.
www.domaine.Chaumont
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