May he rise and smell the fragrance, chorégraphie d’Ali Chahrour/ Festival June Events
May he rise and smell the fragrance, chorégraphie d’Ali Chahrour
Dans le cadre de June Events
Temps fort de la saison pour l’Atelier de Paris/Centre de Développement chorégraphique national, situé à la Cartoucherie de Vincennes, et consacré à l’accompagnement des artistes et de leurs créations, ce festival de danse reflète ses missions de création et de transmission. En juin, cette onzième édition, avec les spectacles de vingt-cinq compagnies, dont sept créations dans les théâtres de la Cartoucherie, au Cent Quatre, au Panthéon, au musée de la Chasse et de la Nature… comprendra aussi des causeries organisées pour découvrir la démarche des artistes. On pourra y voir les nouvelles pièces de jeunes compagnies comme de chorégraphes confirmés : Daniel Larrieu présentera Littéral à la soirée de clôture le 17 juin.
Dans le lointain, une femme que l’on ne voit pas, lance une triste mélopée. Trois hommes se lèvent et gagnent le plateau, attirés par son chant puissant. Ils restent silencieux face public, avec des regards où se lit encore la fureur des batailles… La chanteuse enfin paraît et tout bascule…
Le jeune chorégraphe libanais s’attache, depuis ses premières pièces, à «revisiter les grands récits du monde arabe», avec un refus des corps formatés de la danse contemporaine occidentale.
Après Fatmeh (voir Le Théâtre du Blog) et Leila se meurt, voilant et dévoilant les corps féminins, Ali Chahrour présente le dernier volet de sa trilogie sur les rituels chiites du deuil, où il introduit la part du masculin: «La femme, prêtresse du deuil, convoque les hommes afin qu’il appréhendent le chagrin et la douleur de la perte. »
Ali Chahrour danse avec Ali Hout et Abed Kobeissy, les deux musiciens du groupe électro-acoustique beyrouthin Two or the Dragon. Ils évoluent avec une certaine raideur, accompagnés par le rythme des tambourins et celui, lancinant, de cordes frottées à l’archet. Cette composition allie sons traditionnels et modernité, en accord avec une chorégraphie contemporaine enracinée dans une culture ancestrale.
A la brusquerie des hommes, s’opposent les gestes sinueux d’Hala Omran; avec une indéniable présence et un chant puissant, l’actrice tente d’arracher les trois guerriers à un univers viril qui les conduit inévitablement à leur perte. Car les héros sont fragiles et leurs corps s’affaissent. D’abord, dans la déploration, brisée par le chagrin devant le cadavre de son fils, elle réapparaît ensuite en majesté, torse nu, dominant la scène. Femme, mère, déesse, force de vie : sera-t-elle capable de l’arracher à la mort ? De faire renaître l’espoir ? Pourra-t-il se relever et humer les fragrances ? « C’est, dit le chorégraphe, une performance dansée et une cérémonie où la mort, dans son caractère primitif violent, émerge de la profondeur de la terre pour devenir un rite pour la vie. »
Face à la violence qui sévit autour de lui, Ali Chahrour, en transcendant déploration, violence et colère, signe une création à la fois sensible et forte qui nous remue et sonne comme un cri d’alarme, comme un vibrant appel à la réconciliation…
Mireille Davidovici
Première en France vue au Théâtre de l’Aquarium, Cartoucherie de Vincennes le 6 juin.
June events, se poursuit jusqu’au 17 juin. T. 01 41 7 417 07. juneevents.
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