Festival Parades à Nanterre

 

Festival Parades à Nanterre:

22762_893_parades_2016_page-froideDepuis des années en juin,  ce Festival de rue illumine la vieille ville. Une quarantaine de compagnies avec plus  de deux cent artistes s’y déploient pendant trois jours avec théâtres, installations, performances, spectacles de marionnettes …

 Série C par Kumulus Burkina Faso et France

27431_884_KumulusSept acteurs parés de tissus terre orangée restent prostrés, puis se déploient aux rythmes de tambours et percussions. Un chanteur blanc entonne une mélopée. Trois femmes Burkinabés et une  Européenne, se dévoilent en gémissant, se tordent les mains, dansent en rond. Une grosse fille saute : Entrez dans la danse ». Une autre se fait chevaucher,  tous rigolent. Chacun des comédiennes s’enferme dans  une cage métallique et s’y suspend. On assiste à la tragédie de l’enfermement et de l’excision des femmes : « La mort, disent-elles, vaut mieux que l’excision ! ».

Elles chantent en miré, dioula et français, se rassemblent et s’étreignent, puis on les enferme dans les cabanes qu’on a préalablement scotchées. Elles étendent ensuite du linge, ce qui donne un aspect joyeux et coloré, presque carnavalesque. Il faut résister où que l’on soit !  Il y a ici de la joie et une force de vie qui surgissent bizarrement de cette oppression féminine. De jeunes enfants assistaient avec nous à cette avant- première, et semblaient, comme nous, fascinés.

Après Les Squames, Tout va bien, Bail à céder… la compagnie Kumulus  après une résidence au Burkina Faso, vient de réaliser l’un de ses meilleurs spectacles, porteur de l’énergie incroyable de l’Afrique.

 

La Nuit a son existence de et par Lucile Rimbert, chorégraphie pour un spectateur

On me convie d’abord à m’asseoir sur une chaise, puis me coiffe d’écouteurs qui délivrent un message énigmatique oublié… et on me fixe un rendez-vous pour le lendemain. Une jeune femme m’invite alors à pénétrer dans une voiture. Elle se tourne et se retourne sur le siège arrière, exhibant ses jolies jambes nues. Elle parle du sommeil auquel elle ne parvient pas : elle ne dort pas  à cause des rumeurs de la ville….

Thank you Tezuka

Tezuka, un mime japonais déballe tout son matériel : un fatras bizarre avec petit ventilateur, poupées, valise, etc. Il tourne autour, affublé de lunettes ridicules,  devient un combattant de sumo, se masque puis se démasque, et coupe un citron. Il se déguise en femme en revêtant un justaucorps argenté, et roule des mécaniques. C’est plutôt incohérent et, nous dit-on, très japonais ! Mais cela fait beaucoup rire les petits enfants !

 Regards en biais par la compagnie la Hurlante

Noël Folly court dans la rue et distribue des tracts. Une femme enceinte est terrorisée. L’homme tape sur les poubelles et sur les portes. « Le travail, j’ai l’attitude relax ! ». Une femme nettoie des vitres. En face, une autre clame : « Voyez, ils vont venir me chercher ! » On s’installe au café pour prendre l’apéro pour les quinze ans de mariage de Nadège à Nîmes. On porte un toast.

La sœur suicidaire s’arrache les sourcils : »Si toi tu dérailles, c’est moi qui m’écroule ! La folie, ça fait toujours peur. J’ai connu la psychiatrie. Sur la folie, j’ai plein de chose à vous dire. Le monde devient malhonnête. Je suis un jardinier paysagiste ! ».
 On peut voir comment la folie a traversé nos vies. Surtout quand une sœur s’est suicidée à vingt-trois ans. Ces Regards en biais nous bouleverse.

La terrible histoire de Thomas Sankara  de Brigitte Burdin et Gilles Rhode

Ces deux-là ont quitté quelques jours leurs prodigieux spectacles aériens comme Les Maudits sonnant, Lâchers de Violons, etc. avec quelque cinquante représentations sur plusieurs continents d’ici la fin de l’été!  Ils interprètent ici la vie de Thomas Sankara sur une boîte à images, comme celle qu’utilisent le Théâtre à Bretelles.

Gilles évoque le pays d’ailleurs avec des arbres gigantesques, la grande forêt de l’Est qui s’est peu à peu transformée en savane, dans le Burkina Faso, encore appelé Haute-Volta dans les années cinquante. Thomas Sankara devient médecin.«Pour la chirurgie, c’est mal barré, pardi! » puis élève officier à Madagascar. Il rêve de créer un nouveau pays: Libertaïa. «Obéir, c’est bien, mais il faut comprendre à quoi sert l’ordre ! »
Au Burkina Faso, «le pays des hommes intègres », ça chauffe ! D’abord ministre de l’information et de la culture, Thomas Sankara né en 1949, il deviendra président de la République, le seul en Afrique à avoir vendu les luxueuses voitures de l’État pour les remplacer par des Renault 5. Il avait essayé de  rompre avec la société traditionnelle inégalitaire burkinabè, et  a cherché à intégrer les femmes.en affaiblissant le pouvoir des chefs de tribu, Il a aussi institué la coutume de planter un arbre à chaque grande occasion pour lutter contre la désertification.

Mis en prison, puis déporté, il devra ensuite rester une semaine à planter des arbres dans le Sahel. On édifie  trente barrages en quatre ans, et 2,5 millions d’enfants sont vaccinés en 15 jours. Et finalement assassiné en 1949.  «On peut flinguer les hommes, on ne tue pas les idées ».
Brigitte et Gilles se multiplient avec humour pour faire vivre cette étonnante boîte à images.

Jacqueline et Marcel au fil du trottoir par  la compagnie l’Art Osé

La pluie a noyé le festival, donc ce spectacle déambulatoire s’est réfugié avec nous à la Maison de la musique de Nanterre. Un couple se présente acclamé par le public : «Vous étiez venus voir les lions? » demandent-ils.
En fait, Christelle Lefèvre et Pierre-Jean Ferrain vont nous jouer L’Ours d’Anton Tchekhov. Un couple s’affronte: l’homme porte une rose à sa boutonnière et Élena Ivanovna Popova, une jeune veuve, entame avec lui un échange des plus agressifs, rythmé par un violoniste, avant de tomber sous le charme de cet ours qui la demande en mariage.

Edith Rappoport

Spectacles vus à Nanterre (Hauts de Seine) les 4 et 5 juin.

 

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Archive pour 8 juin, 2017

Dissident, il va sans dire de Michel Vinaver

 

Dissident, il va sans dire de Michel Vinaver, mise en scène de Nicole Charpentier et Christian Chabaud

Dans le cadre de Pyka Puppet Estival

  Consacré aux arts de la Marionnettes et des formes animées, Pyka Puppet Estival, troisième édition d’une semaine,  a lieu dans deux théâtres d’Ile-de-France. On pourra y voir six spectacles, de trois compagnies étrangères notamment la Compagnie de la Tortue noire, originaire du Canada-Québec et de trois troupes franciliennes, avec des adaptations d’œuvres de Bertolt Brecht, Michel Vinaver, ou encore de la bande dessinée Les Pieds Nickelés. Il y aura aussi une table ronde  avec les  artistes et un stage de marionnettes  pour professionnels.

f-c56-568fd6e41f8ca Le Théâtre de chambre de Michel Vinaver,  fondé sur le dialogue, ne se prête pas a priori au jeu de  marionnettes. Mais la compagnie Daru réussit pourtant à faire vivre le drame de cette mère isolée et de son fils, avec des pantins confinés sur un petit espace et manipulés à vue par un seul acteur.

En douze très courts tableaux, l’auteur raconte la dérive d’un adolescent qui habite chez sa mère : «Attachés l’un à l’autre, écrit Michel Vinaver. Mais lui passe son temps à se dégager d’elle, du monde. Dissident, il l’est avec passivité (…) il va sans dire. Elle n’est pas immobile, elle va et dit le discours (des parents) ». Dans une société faite par, et pour les gagnants, à l’instar du père absent, ces deux  perdants n’ont pas leur place, et sombrent imperceptiblement. 

Aux ellipses du texte correspond une esthétique en creux. Dans un décor minimaliste, inspiré d’Edward Hopper, les objets se transforment pour figurer les différentes pièces de l’appartement. Le mur latéral séparant ce jeune homme et cette femme mûre, encore belle,  dont les corps filiformes et raides s’articulent. Les  marionnettes sont d’une grande simplicité et leurs visages ont des traits réalistes .

Dans une immobilité apparente traduisant une situation sans issue, le moindre geste prend alors toute sa valeur : un doigt pointé, un corps affaissé sur un canapé, ou suspendu à l’horizontale, au plafond. Pour souligner le caractère fusionnel de ce couple, fils et mère parlent d’une seule voix, masculine, enregistrée, mais avec le risque que l’on confonde leurs répliques, malgré une manipulation très fine. L’acteur, présent derrière ses petites créatures, symbolise le père absent.

 La compagnie Daru-Thempô, implantée dans l’Essonne depuis vingt ans,  a créé un lieu de création et de fabrique et un pôle-ressources de la marionnette et elle reprend ici  son spectacle créé en 2004. La pièce, de Michel Vinaver qu’il a écrite dans les années soixante-dix, montrait déjà la violence du monde du travail et ses répercussions dans la sphère familiale et n’a rien perdu de son actualité ! Ce drame intime entre une mère qui va perdre son emploi et un fils chômeur trouve toute sa force dans une réalisation modeste qui garde ses distances et sait éviter le pathos, sans nous priver d’émotion.

 Mireille Davidovici

Spectacle vu au Théâtre de l’Atalante

Pyka Pupper jusqu’au 10 juin  T. :01 82 01 52 02 www.lepilierdesanges.com:

Au Théâtre de l’Atalante,  place Charles Dullin, Paris XVIIIème 

Au Théâtre Roublot , 95 rue Roublot  Fontenay-sous-Bois (Val de Marne).

 

Le texte est publié par l’Arche éditeur, collection  Scène ouverte, 1997

 

 

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