Zig Zig, conception et mise en scène de Laïla Soliman
Zig Zig, conception et mise en scène de Laïla Soliman en arabe et anglais surtitré
En 1919, l’Egypte est en ébullition, en lutte pour son indépendance contre l’occupant anglais. En représailles des sabotages du chemin de fer par les partisans, à Nazlat al-Shobak, petit village au bord du Nil, près de Gizeh, des soldats britanniques pillent, brûlent les maisons, violent… « Zig zig ! », baragouinaient les violeurs, désignant en arabe populaire, l’acte sexuel.
Dix-neuf villageoises ont porté plainte contre eux auprès du tribunal. Reprises par le mouvement nationaliste de l’époque, leurs histoires furent une cause célèbre, avant de tomber dans l’oubli. Leila Soliman les ramène ici sur le devant de la scène, en résonance avec les violences et abus sexuels faits aux femmes dans l’Egypte d’aujourd’hui, comme ailleurs.
La metteuse en scène égyptienne, qui défend un théâtre résolument engagé, s’est emparée des minutes du procès, trouvées dans les archives du ministère britannique des Affaires étrangères alors qu’elle préparait sa pièce précédente, Whims of Freedom, sur la première révolution égyptienne de 1919, amenant son pays à l’Indépendance en 1922.
Cinq comédiennes dont une musicienne, s’installent face public à de petits pupitres ; elles compulsent les documents et vont témoigner au nom de ces femmes. Dans ce rapport frontal, en s’adressant directement au public, elles reconstituent les interrogatoires musclés auxquels sont soumises les paysannes, interprétant alternativement les deux parties. Tantôt en anglais, tantôt en arabe.
Mona Hala, Reem Hegab, Sherin Hegazy, Zainab Magdy, Nancy Mounir jouent sobre et énergique. Pour casser la raideur de la reconstitution historique, elles dansent et chantent, accompagnées par le violon. Tour à tour juges et témoins, victimes et soldats. Et elles font la démonstration, sans aucun commentaire, de la partialité du tribunal dans ses conclusions. Justice n’a pas été rendue. Justice n’est toujours pas rendue aujourd’hui aux femmes violentées.
Ce documentaire théâtral, créé en avril 2016 au Jesuit Cultural Centre du Caire, est sans doute un acte politique nécessaire mais a du mal à passer la rampe: la mise en scène reste statique malgré les intermèdes. Le jeu des actrices se noie dans un texte souvent insistant, démonstratif et répétitif, si abondant qu’il est difficile de suivre les surtitres et de saisir les nuances. Dommage, car Zig Zig rend hommage au courage de simples paysannes, bravant la honte et le silence qui musèlent encore aujourd’hui nombre de femmes violentées.
Mireille Davidovici
Nouveau théâtre de Montreuil, centre dramatique national, avec le Festival d’Automne à Paris, jusqu’au 21 octobre.
Festival Sens Interdit, Lyon les 25 et 26 octobre ; Spielart Festival, Munich les 28 et 29 octobre.
Tandem-Théâtre d’Arras, Douai les 14-15 novembre ; Les Rencontres à l’échelle, Les Bancs Publics, Friche la Belle de Mai, Marseille les 17 et 18 novembre.
Théâtre Garonne, Toulouse du 21 au 23 novembre.
Festival Vagamondes, La Filature, Mulhouse le 23 janvier.