Le poète aveugle par la Needcompany

 

Le poète aveugle  par la Needcompany

 

0B_ipR67mNolSX1FXWUtGTHJFVlEJan Lauwers et sa Needcompany  jouent pour la première fois à la Colline avec Le Poète Aveugle, créé en 2015 et on retrouve une partie de l’équipe que l’on a tant aimée dans La Chambre d’Isabella.  C’est important puisque les acteurs constituent le matériau de cette pièce qui pose la question de l’identité. Comme le dit Erwin Jans : « Au centre des préoccupations de la Needcompany ; se trouve le groupe : ce réseau fragile de relations conscientes et inconscientes, visibles et secrètes entre membres d’une famille, amis et inconnus. Les paraboles théâtrales de Jan Lauwers partagent une trame identique : un groupe déséquilibré par un événement inattendu, se voit  obligé de se redéfinir. Le Poète Aveugle a pour thème central, les individus, mais leurs portraits ouvrent, eux aussi, une fenêtre sur la grande Histoire. »

C’est le principe de ce spectacle : chaque comédien quand il se présente  au public, décrit sa généalogie, « Cela ressemble, dit Erwin Jans,  à la méthode généalogique de Nietzsche : plus on remonte dans le passé, plus on trouve des couches dont est composée notre identité, et plus « impur » on devient. » Jan Lauwers a eu l’idée de ce spectacle, après avoir visité la grande mosquée de Cordoue; la hiérarchie catholique en a, dit-il, détruit une partie pour y ériger une cathédrale mais elle semble un peu petite et grotesque au milieu de cette belle architecture.
La visite lui a permis de retrouver la vérité: Cordoue, capitale mauresque, avait une civilisation où les femmes étaient puissantes et l’athéisme courant, et où les bibliothèques débordaient d’ouvrages. De l’autre côté, le monde chrétien de la même époque était beaucoup plus fermé, moins florissant et Charlemagne était analphabète.

 Jan Lauwers cherche ici à s’interroger sur le mensonge de l’Histoire, écrite par des vainqueurs qui dicteront quoi penser à la masse de la population. Après une arrivée par la salle, les comédiens-musiciens-danseurs, vêtus de beaux kimonos bariolés, s’installent, et Grace Ellen Barkey commence en chantant son nom et rien que son nom, pendant un long moment pour nous le faire bien entendre. Vêtue d’un costume traditionnel indonésien très coloré, chaussée avec des extensions de pieds qui lui font une démarche appuyée comme celle d’un clown. Il y a de l’humour dans sa façon de décliner ses origines : son côté musulman, car « on ne sait jamais », son côté chinois qui l’arrange aussi… car les chinois « ont tout acheté ». Elle va jusqu’à montrer des photos d’une tournée en Chine où elle aurait ressenti une forte appartenance à ce pays…jusqu’à ce que ces collègues y démentent sa présence ! 

On retrouve avec plaisir les interprètes de  la NeedCompany qu’on a aimés: Maarten Seghers-voix forte, démarche hasardeuse et pantalons bouffants, le charismatique Benoit Gog, dans un témoignage déchirant proche de celui de son personnage dans Isabella. On découvre un nouveau venu dans la famille: le danseur Mohamed Toukabri, aperçu chez Anne Teresa de Keersmaeker ou Sidi Larbi Cherkaoui, magnifique d’amplitude, de fluidité et aussi bon comédien !

Dans ce spectacle moins inspiré et bavard mais aux belles images théâtrales, il n’y a plus la folie et l’énergie que l’on a connues ; Jan Lauwers a cherché le spectaculaire, notamment avec ce cheval qui repose sur une bascule…. Dés le début, les acteurs semblent chercher une participation du public qu’ils n’obtiennent pas, ce qui met assez vite mal à l’aise. Le message nous est asséné un peu trop en force et un entracte inutile vient couper toute énergie, alors que le spectacle dure juste un peu plus de 2 heures ! Dommage ! On nourrissait une forte attente. La part de loufoque et d’exagération, marque de fabrique de la Neddcompany, ne résonne plus de la même façon et ce spectacle emporte moins le public qui, comme les acteurs, a vieilli !  

Reste à Jan Lauwers : réussir à se renouveler. On attend donc avec impatience son prochain Guerre et thérébenthine qui sera présenté à Sète.

 

Julien Barsan

 

La Colline-Théâtre National, rue Malte-Brun Paris XXème,  jusqu’au 22 octobre. T. : 01 44 62 52 52

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Archive pour 21 octobre, 2017

Le poète aveugle par la Needcompany

 

Le poète aveugle  par la Needcompany

 

0B_ipR67mNolSX1FXWUtGTHJFVlEJan Lauwers et sa Needcompany  jouent pour la première fois à la Colline avec Le Poète Aveugle, créé en 2015 et on retrouve une partie de l’équipe que l’on a tant aimée dans La Chambre d’Isabella.  C’est important puisque les acteurs constituent le matériau de cette pièce qui pose la question de l’identité. Comme le dit Erwin Jans : « Au centre des préoccupations de la Needcompany ; se trouve le groupe : ce réseau fragile de relations conscientes et inconscientes, visibles et secrètes entre membres d’une famille, amis et inconnus. Les paraboles théâtrales de Jan Lauwers partagent une trame identique : un groupe déséquilibré par un événement inattendu, se voit  obligé de se redéfinir. Le Poète Aveugle a pour thème central, les individus, mais leurs portraits ouvrent, eux aussi, une fenêtre sur la grande Histoire. »

C’est le principe de ce spectacle : chaque comédien quand il se présente  au public, décrit sa généalogie, « Cela ressemble, dit Erwin Jans,  à la méthode généalogique de Nietzsche : plus on remonte dans le passé, plus on trouve des couches dont est composée notre identité, et plus « impur » on devient. » Jan Lauwers a eu l’idée de ce spectacle, après avoir visité la grande mosquée de Cordoue; la hiérarchie catholique en a, dit-il, détruit une partie pour y ériger une cathédrale mais elle semble un peu petite et grotesque au milieu de cette belle architecture.
La visite lui a permis de retrouver la vérité: Cordoue, capitale mauresque, avait une civilisation où les femmes étaient puissantes et l’athéisme courant, et où les bibliothèques débordaient d’ouvrages. De l’autre côté, le monde chrétien de la même époque était beaucoup plus fermé, moins florissant et Charlemagne était analphabète.

 Jan Lauwers cherche ici à s’interroger sur le mensonge de l’Histoire, écrite par des vainqueurs qui dicteront quoi penser à la masse de la population. Après une arrivée par la salle, les comédiens-musiciens-danseurs, vêtus de beaux kimonos bariolés, s’installent, et Grace Ellen Barkey commence en chantant son nom et rien que son nom, pendant un long moment pour nous le faire bien entendre. Vêtue d’un costume traditionnel indonésien très coloré, chaussée avec des extensions de pieds qui lui font une démarche appuyée comme celle d’un clown. Il y a de l’humour dans sa façon de décliner ses origines : son côté musulman, car « on ne sait jamais », son côté chinois qui l’arrange aussi… car les chinois « ont tout acheté ». Elle va jusqu’à montrer des photos d’une tournée en Chine où elle aurait ressenti une forte appartenance à ce pays…jusqu’à ce que ces collègues y démentent sa présence ! 

On retrouve avec plaisir les interprètes de  la NeedCompany qu’on a aimés: Maarten Seghers-voix forte, démarche hasardeuse et pantalons bouffants, le charismatique Benoit Gog, dans un témoignage déchirant proche de celui de son personnage dans Isabella. On découvre un nouveau venu dans la famille: le danseur Mohamed Toukabri, aperçu chez Anne Teresa de Keersmaeker ou Sidi Larbi Cherkaoui, magnifique d’amplitude, de fluidité et aussi bon comédien !

Dans ce spectacle moins inspiré et bavard mais aux belles images théâtrales, il n’y a plus la folie et l’énergie que l’on a connues ; Jan Lauwers a cherché le spectaculaire, notamment avec ce cheval qui repose sur une bascule…. Dés le début, les acteurs semblent chercher une participation du public qu’ils n’obtiennent pas, ce qui met assez vite mal à l’aise. Le message nous est asséné un peu trop en force et un entracte inutile vient couper toute énergie, alors que le spectacle dure juste un peu plus de 2 heures ! Dommage ! On nourrissait une forte attente. La part de loufoque et d’exagération, marque de fabrique de la Neddcompany, ne résonne plus de la même façon et ce spectacle emporte moins le public qui, comme les acteurs, a vieilli !  

Reste à Jan Lauwers : réussir à se renouveler. On attend donc avec impatience son prochain Guerre et thérébenthine qui sera présenté à Sète.

 

Julien Barsan

 

La Colline-Théâtre National, rue Malte-Brun Paris XXème,  jusqu’au 22 octobre. T. : 01 44 62 52 52

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