Les Passagers de Flavio Goldman, mise en scène de Filippos Mendes Lazaris

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Les Passagers de Flavio Goldman, traduction de Christodoulos Kakouris et Katerina Kokkinidou, mise en scène de Filippos Mendes Lazaris

Ce texte de l’auteur brésilien met  en scène une rencontre entre un patient et un psychiatre qui prennent ensemble l’ascenseur pour arriver à son bureau.Mais  à cause d’une panne,  ils vont y rester enfermés. Une séance étrange va alors se dérouler dans ce tout petit espace qui se transforme en ring en dévoilant les psychismes de ces personnages coincés qui échangent des répliques où se mêle le vrai et le faux, le secret et le mensonge d’une relation purement professionnelle  avec  pour but, le traitement du patient.

La psychanalyse est, comme on sait, un long voyage douloureux avec des épreuves souvent désagréables, afin que la personne prenne conscience de sa situation et définisse ses objectifs. Les limites de l’âme, les réactions de l’inconscient et l’auto-connaissance ne se rangent pas toujours aux données qu’un spécialiste peut manipuler avec sureté. Les méthodes ont des effets différents et chaque cas est unique.

Filippos Mendes Lazaris, lui aussi brésilien, a une approche réaliste du texte et réussit à créer un spectacle bien rythmé et intense. Manolis Iliakis a conçu un ascenseur dont les lumières de Christina Thanassoula soulignent la clôture, et le jeu entre réalité et le factice. Les comédiens forment un duo exceptionnel: les expressions du visage entre raison et humeur, d’Alexandros Sotiriou (Le Psychiatre),  sont remarquables et Stelios Xanthoudakis (Le Patient) trace avec clarté les lignes de démarcation entre l’être et le paraître.

 Nektarios-Georgios Konstantinidis

 Studio Mavromichali, 134 rue Mavromichali, Athènes. T. : 0030 210 64 53 330.


Archive pour 2 janvier, 2018

Candide ou L’optimisme de Voltaire, adaptation et mise en scène de Thomas Moshopoulos

 

©Patroklos Skafidas

©Patroklos Skafidas

Candide ou l’optimisme de Voltaire, adaptation et  mise en scène de Thomas Moshopoulos
 
Dans ce conte philosophique publié en 1759 et révisé en 1761, Voltaire veut montrer que le monde va mal et qu’il pourrait aller mieux, si l’on commençait par dire moins de bêtises. En attendant,  avertit le célèbre auteur français, mieux vaut rire que pleurer, tout en cultivant notre jardin: Candide conjugue la philosophie et le comique.

Le destin mouvementé de ses personnages contredit la théorie philosophique de l’optimisme, selon laquelle tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, mais sans la détruire tout à fait, puisque la plupart d’entre eux finissent par se retrouver près de Constantinople, pour cultiver sagement leur jardin, en renonçant à la métaphysique.

Thomas Moshopoulos a écrit des dialogues où il fait passer  le message philosophique sans perdre la vivacité du langage parlé. Il garde ainsi intact l’esprit de l’écrivain et souligne sa critique caustique en insistant sur la dimension comique de l’œuvre.  Ici les notions philosophiques font sens dans la joie et le divertissement. Le décor d’Evangelia Thérianou et les costumes de Clare Bracewel renvoient à l’époque des Lumières et rappellent les données historiques du conte.  Avec le soutien efficace de la chorégraphie signée Sophia Pashou et des lumières de Sophia Alexiadou.

Michalis Syriopoulos, Hélène Vlachou, Irène Boudalis, Efsthathie Tsapareli, Manos Galanis, Pantelis Vassilopoulos, Foivos Siméonidis, Vassilis Koulakiotis et Dimitris Fourlis interprètent avec enthousiasme tous les personnages, avec la fougue des petits enfants qui racontent une histoire… Un spectacle à ne pas manquer !

 
Nektarios-Georgios Konstantinidis
 
Théâtre Porta, 59 Avenue Messogeion, Athènes. T. :  0030 210 771 1333.

Adieu Jacques Lassalle

 

Adieu Jacques Lassalle

©Sarah Cuvelier - Radio France

©Sarah Cuvelier – Radio France

L’année théâtrale 2017 avait mal fini avec le décès de Pierre Debauche, et la nouvelle commence  bien tristement! Jacques Lassalle avait 81 ans. Metteur en scène d’expérience, il avait une solide culture et se passionnait à la fois pour le théâtre classique  dont il n’hésitait pas à bousculer parfois les codes avec une grande intelligence scénique, mais aussi pour la scène contemporaine.

Il fut élève au Conservatoire national où il enseigna plus tard de 1981 à 1983, et il créa en 1967, à la demande de Marcel Rosette, maire de la ville, le Studio Théâtre de Vitry-sur-Seine qu’il dirigea jusqu’en 1982.

Il fut ensuite pendant sept ans directeur du Théâtre National de Strasbourg, puis de 90 à 93 administrateur de la Comédie-Française. Choqué par l’accueil mitigé au festival d’Avignon de son Andromaque de Racine- dont il monta aussi Bérénice- il abandonna un temps la réalisation.

Nous l’avions connu en 1976, avec un très belle mise en scène, qui le révéla au grand public, de Travail à domicile de l’auteur allemand contemporain Frans Xaver Kroetz. Et on lui doit de nombreuses et remarquables réalisations d’auteurs classiques comme en particulier dès 1969, Shakespeare : Comme il vous plaira, Carlo Goldoni :La Locandiera puis en 1989, La Bonne Mère. Et La Serva amorosa en 91, puis en  2007,  Il Campiello à la Comédie- Française.  Molière, avec un très beau Tartuffe que jouait Gérard Depardieu, L’Ecole des femmes (2001), et en 1988 Amphitryon. Puis Le Mariage forcé et Le Cocu imaginaire,  et La Comtesse d’Escarbagnas et Georges Dandin, Le Misanthrope, et surtout un remarquable Don Juan au festival d’Avignon puis à la Comédie-Française avec Andrzej Seweryn et encore L’École des Maîtres autour de Monsieur de Pourceaugnac à Saint-Pétersbourg.

Et la Bérénice de Racine ou Mélite de Corneille mais aussi  Marivaux un de ses auteurs préférés avec Le Jeu de l’amour et du hasard (en chinois) à Pékin, et La Fausse suivante à Varsovie, L’Epreuve à Montréal,  L’Heureux Stratagème (1984) Les Acteurs de bonne foi (1987) au festival d’Avignon mais aussi  William Shakespeare, Le Roi Lear. Et Euripide avec Médée  ou  encore Anton Tchekhov avec Platonov et Bertolt Brecht avec La Vie de Galilée, et Figaro divorce d’Odön von Horváth. Bref, Jacques Lasssalle était un homme d’une inlassable curiosité. Il assurera aussi la mise en scène de Lohengrin de Wagner, puis de Lear  de Reimann à l’Opéra de Paris.

  Il s’intéressa  beaucoup aux dramaturges contemporains avec Histoire de dires de Jean-Pierre Thibaudat, et créa l’année suivante Risibles amours de Milan Kundera puis Olaf et Albert d’Henrich Henkel, Pour un oui ou pour un non de Nathalie Sarraute. Il monta surtout le théâtre de Michel Vinaver : Nina, c’est autre chose,  Théâtre de chambre de et en 1980, du même auteur  À la renverse 1979-1980. Dissident, il va sans dire  puis L’Émission de télévision. Il mit aussi en scène Le Professeur Taranne d’Arthur Adamov, Dans le plus beau pays du monde de Jean Vilar puis  Le Fils et  Matin et soir, deux pièces de l’auteur norvégien Jon Fosse.Il écrivit aussi quelques pièces qu’il mit en scène comme Jonathan des années 30 (1973) et l’année suivante, Un couple pour l’hiver,  et en 1975, Le Soleil entre les arbres.

C’était un homme  pas facile et très exigeant mais  d’une grande élégance morale, et profondément tourmenté, que nous avions souvent rencontré, et qui nous priait de l’excuser à chaque fois de n’avoir pas plus de  quarante-cinq minutes à nous consacrer mais… qui était encore là deux heures plus tard à nous expliquer avec passion sa conception du théâtre et de sa pédagogie, et plus tard à revenir sur son éviction de la Comédie-Française, pour des raisons assez peu claires, par Jacques Toubon, alors ministre de la Culture. Il n’avait jamais réussi à  accepter vraiment cette injustice qui l’avait  marqué au plus profond de lui-même, comme une blessure personnelle.

Avec lui, disparait un des metteurs en scène qui auront marqué le dernier tiers du XXème siècle à la fois par sa lucidité et la haute qualité de son travail de metteur en scène et de pédagogue. Hervée de Lafond dans Conseils du Théâtre de l’Unité à ne pas suivre de Jacques Livchine (voir le récent Livres et revues dans Le Théâtre du Blog  raconte qu’après un de leurs spectacles, Jacques Lassalle leur avait dit: « Vous devriez faire attention, vous êtes tout de suite dans la dérision, ce qui fait qu’on ne croit pas à vos personnages, ce serait beaucoup plus fort si vous appliquiez la méthode du « corset qui craque ». Mettez un corset à vos personnages et à votre mise en scène, et faites le craquer.  » Et Hervée de Lafond ajoute:  » C’était tout simple, on s’est mis à le faire, et tout est devenu beaucoup plus puissant, on y pense sans arrêt depuis. »

Ce genre d’analyse généreuse et de réflexion exemplaires témoignait d’une exigence et d’une passion pour le théâtre comme on en voit peu.

Philippe du Vignal

 

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