CTRL-X de Pauline Peyrade, mise en scène de Cyril Teste

CTRL-X de Pauline Peyrade, mise en scène de Cyril Teste

Ctrl-X1-c-Scan-ArtUltra-moderne solitude : de la baie vitrée de sa chambre, Ida voit clignoter les lumières de la ville. Un quadrillage beau comme un tableau panoramique de Vieira da Silva. Le voilage prend les courants d’air, rien ne se passe et tout s’agite : écrans, téléphones, projections, messages. Pas un instant d’immobilité, l’insatisfaction détraque le temps, étiré ou ramassé, ou carrément bloqué par la répétition de micro-élans et désirs mort-nés : «Viens, ne viens pas, si, viens, j’ai besoin de toi, non… » Seule l’image rend réels l’amoureux lointain, ou le  «coup d’un soir» tout proche.

La sœur d’Ida-ou n’importe quelle jeune femme de la classe moyenne urbaine- vient lui apporter ses médicaments : non, elle n’en veut pas ; elle ne veut pas qu’on vienne la voir, et en même temps, supplie qu’on l’aime, qu’on s’occupe d’elle, et aussi qu’on la laisse seule avec ses images, ses messages, ses écrans, ses photos, et le réel dissous en pixels.

Une guitare triste (composition de Nihil Bordures, beau pseudonyme…) accompagne cette nuit perdue, cette nuit pour rien. Les images vidéo de Patrick Laffont et Nicolas Doremus tissent dans la chambre une “réalité augmentée » qui, à la fois, y fait entrer le monde- les guerres que couvre l’amoureux photographe- et le détruit, livré à l’image. Scénographie de MxM, lumières de Mehdi Toutain-Lopez, mise en scène, jeu : tout le travail du collectif MxM est constamment remarquable, cohérent, avec une adéquation parfaite entre les moyens employés et le propos. Pas une maille du filet perdue, les éléments scéniques s’organisent en un ensemble mouvant et tout est d’une grande beauté.

On dira que le spectacle ne nous apprend rien sur l’émiettement de la vie, sur l’incapacité à endurer la frustration, sur l’impatience qui tue chaque minute au profit de la suivante, sur le mal-être des biens lotis et l’inconfort d’une vie, somme toute, facile. Mais sur le plateau, Adrien Guiraud, Agathe Hazard-Raboud et Laureline Le Bris-Cep imposent en douceur, sans sourire mais avec une juste pincée d’humour, une telle mélancolie moderne, qu’on a envie de les suivre, avec une sympathie navrée et agacée. Il y a du vivant là-dedans, et sous l’infantilisme, peut-être de l’enfance non résolue.

CTRL-X n’est pas une symphonie pour grand orchestre mais plutôt une étude pour musique de chambre. Écoutons la résonner, rigoureuse et sensible.

 Christine Friedel

Montfort Théâtre, 106 rue Brancion, Paris XVème. T.  : 01 56 08 33 88, jusqu’au 20 janvier.
Le texte est publié aux éditions des Solitaires Intempestifs.

 

 

 

 

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