Karaflobekatsos et Spyridoula de Lena Kitsopoulou, mise en scène Konstantinos Markellos
Karaflobekatsos et Spyridoula de Lena Kitsopoulou, mise en scène de Konstantinos Markellos
Cette pièce appartient à un répertoire où l’insolite remplace peut-être une esthétique méta-moderne. Mais l’écrivaine grecque emploie ici un grotesque centré sur certains clichés. Avec ce que l’on appelle le «théâtre dans le théâtre», l’élément expressif accompagne donc ici un acte corporel, à côté d’une thématique associée au faire et au dire.
Les clichés provocateurs sont légion, dans un texte qui se veut aussi dénonciateur, visant la médiocrité de la petite bourgeoisie. Ainsi, entre provocations et dénonciations, Lena Kitsopoulou attaque l’ordre établi et prend le spectateur à témoin pour exorciser les forces maléfiques des bienséances, au détriment bien entendu, de la vraisemblance dont on n’aurait, parait-il, pas besoin.
Mais montrer sur un plateau, par le biais du corps du comédien, la trivialité d’une société qui aurait aussi besoin d’être guérie de ses multiples maladies, ressemble, à vrai dire, à l’effort de Dieu pour purifier les maudits! Lena Kitsopoulou veut choquer le public et l’invite ainsi à voir en face une vérité vulgaire. Pourtant, depuis que la civilisation existe, le théâtre voudrait corriger les mœurs et cela, sans toujours hurler son désespoir mais rien ne bouge! Ce que l’auteure écrit, perd ainsi de sa force vitale. Le public en effet perd de vue l’objectif de ce théâtre dont les grandes-et trop nombreuses-thématiques sont ici masquées par la grossièreté du langage. L’esprit soi-disant provocateur reste un faux-semblant cachée sous les apparences d’un « vouloir changer le monde »
Ici, les comédiens jouent avec exactitude leurs rôles, conformes en cela à une mise en scène du vulgaire. En deux volets, avec un Homme (Karaflobekatsos) et une Femme (Spyridoula). L’Homme, un pauvre type (Konstantinos Avarikiotis), ne fait que parler à soi-même et notamment à ses paries génitales mais comme il a tant de choses à leur raconter, il succombe à la fin aux puissances maléfiques de son corps mal foutu… Konstantinos Avarikiotis donne à son personnage la petite dose de vérité obsessionnelle qui le rend sympathique.
Hélène Stergiou, elle, incarne une espèce de femme fatale, habillée de façon appropriée, qui parle aussi toujours d’elle aussi et étale les menus détails de sa vie, cachant sa vraie nature. L’Homme débite des mots choquants, soi-disant inconnus d’un public considéré ici apparemment comme imbécile, alors qu’Athènes pullule de petits et grands théâtres d’avant-garde.
Konstantinos Markellos tombe ainsi dans le piège tendu par le texte mais la scénographie de Giorgos Vafias, les éclairages de Melina Mascha et la musique de Giorgos Kassavetis permettent d’entrevoir une petite lumière proche d’une vérité et d’une fiction. Le décor reflète ainsi désirs et passions intérieures, et, à mesure que l’action avance, des colonnes dévoilent leur contenu: des objets personnels et des images de villages caractéristiques. Le passage de la métonymie à la métaphore se fait alors sans brusquerie et amplifie la dynamique du spectacle.
Nektarios-Georgios Konstantinidis
Théâtre Stathmos, 55 rue Victor Hugo, Athènes. T.: 0030 211 40 36 322.