Ciné, création et texte d’Itsaso Arana et Celso Giménez
Chantiers d’Europe au Théâtre de la Ville:
Ciné, texte et mise en scène d’Itsaso Arana et Celso Giménez
De la compagnie espagnole Tristura, ce Ciné, un prétendu road-movie documentaire sur l’Espagne post-franquiste… Avec un thème important, puisqu’il s’agit de dénoncer le vol de quelque 300.000 bébés pendant la dictature de Franco, et celà dès 1930. Le protagoniste cherche à retrouver ses vrais parents : une mémoire douloureuse et occultée qui ne dramatise ni n’accuse. Ce fils, également chanteur avec Vamos a ponernos a vivir (Commençons à vivre) a été adopté mais ne connaît pas ses parents biologiques et va sans trop de conviction à la recherche de son identité, jouant à la guitare, nonchalant, des airs de chansons qu’il interprète aussi.
Mais la dimension documentaire du spectacle nous échappe et il filtre peu d’informations sur ce drame volontairement tu, si ce n’est l’existence d’un juge tyrannique, retraité aujourd’hui en Italie qui avait décidé seul du destin de nouveaux nés enlevés à leurs mères, juste après leur accouchement.. Après quelques conversations animées avec une avocate dans un café bruyant, dans le fond du plateau, le musicien décide de s’enquérir des basses motivations financières et va aller trouver dans sa retraite italienne, ce juge aux pouvoirs de décision abusifs.
Sur un rideau transparent, défilent les noms des villes traversées entre l’Espagne, la France et l’Italie, par des trains qui démarrent, roulent et s’arrêtent avec bruit, ce que chaque spectateur muni d’un casque peut entendre. Le guitariste prend une chambre dans un hôtel et discute avec la serveuse du bar. Entre-temps, surgit le souvenir pour ce fils sans nom, amateur du septième art, d’un détail de la biographie de François Truffaut. Le cinéaste s’est trouvé aussi dans cette même situation troublante, en quête d’un père qui ne l’avait pas reconnu. Il sait qu’il est chirurgien-dentiste dans une ville de province et décide d’aller le voir. Mais François Truffaut, bien qu’il ait presque touché au but, ne veut plus le rencontrer et préfère aller voir La Ruée vers l’or de Charlie Chaplin…
Mais bon, ici cette mélancolie reste trop conventionnelle avec peu d’invention, malgré la vidéo et le cinéma. Et l’urgence théâtrale ne se fait guère sentir, même si des enfants investissent les lieux, figurant les bébés volés….
Véronique Hotte
Spectacle vu au Théâtre des Abbesses, le 26 mai. T. : 01 42 74 22 77