Le Cercle de craie caucasien d’après Klabund et Li Xingdao,mise en scène d’Emmanuel Besnault
Le Cercle de craie caucasien d’après Klabund et Li Xingdao, mise en scène d’Emmanuel Besnault
Le Cercle de craie est une légende chinoise de Li Xingdao (XIVème siècle) qui a inspiré celle de Klabund, écrivain allemand (1890-1928), créée en 1925. Qui a inspiré elle-même, la pièce de Bertolt Brecht créée en Allemagne en 1949 et huit ans plus tard en France par Jean Dasté à Saint-Etienne.
Emmanuel Besnault jeune metteur en scène de vingt-sept ans, a préféré revenir à cette version de la fameuse légende chinoise et à celle de Klabund. C’est l’histoire d’une jeune fille d’une famille misérable, poursuivie par le juge. Le père qui n’est pas arrivé à payer l’impôt sera retrouvé pendu. La mère conduira alors sa fille dans un salon de thé- traduisez bordel- contre un sac de pièces d’or… Le frère de la jeune fille en prendra sa part avant de s’enfuir. Le gouverneur attiré par ses charmes quand il vient au salon de thé épousera la jeune fille qui aura un enfant de lui. Mais la première femme de ce gouverneur se sent trahie, et l’accuse faussement d’avoir empoisonné son mari. Pire, elle déclare que ce fils est en réalité d’elle, ce qui lui permettrait de percevoir l’héritage. Un premier juge- acheté- fera condamner la jeune fille pour mensonge quand elle réclame son enfant.
Puis un second juge demandera que l’on trace un cercle à la craie sur le sol et que l’on place l’enfant au centre. Il demandera aux deux femmes de tirer chacune l’enfant par un de ses bras; celle qui y réussira, sera alors considérée comme sa mère. Mais la vraie mère ne veut pas le blesser et ne tire pas. Le juge conclura que c’est bien elle la vraie mère qui innocentée, se verra remettre l’enfant… Tous les éléments d’une pièce populaire- Victor Hugo n’est pas loin- sont réunis ici: destin tragique d’un pauvre homme, amour, extrême pauvreté, pouvoir politique, injustice de la justice, mais aussi finalement belle fin heureuse avec le Prince… Sur le grand plateau dans la grande cour pavée de l’Écurie royale, quelques praticables et des éléments métalliques avec fenêtres en plastique ondulé – l’ensemble est assez laid- que les acteurs déplaceront… trop souvent et sans raison. Ce qui casse le rythme!
Emmanuel Besnault installé avec sa compagnie à Carpentras, veut défendre l’idée d’un théâtre populaire, ce qui l’ a poussé à mettre en scène aussi Les Fourberies de Scapin, un spectacle joué à ce mois Molière mais que nous n’avons pu voir. Sa mise en scène du Cercle de craie est sobre et correspond bien à celle d’un théâtre de tréteaux en plein air. Cinq acteurs seulement pour jouer tous les rôles avec quelques modifications de costume. Avec une nette tendance à privilégier l’expression gestuelle et à chorégraphier quelques moments forts. C’était une première mais la pièce patine souvent: la faute… à une dramaturgie maladroite et à une direction d’acteurs qu’il faudrait revoir. Et ce spectacle d’une heure vingt seulement parait bien long.
Côté interprétation, les acteurs très maquillés se croient obligés d’en faire des tonnes, criaillent en particulier Eva Rami qui surjoue (la première épouse). Seule, Sarah Brannens (la jeune fille) que l’on avait déjà vue chez Wajdi Mouawad s’en tire au mieux avec une vraie présence. Calme et lumineuse, elle attire aussitôt le regard du public. Le spectacle sera joué en Avignon et dans un salle fermée, il se bonifiera peut-être. Laissons-lui une chance…
Philippe du Vignal
Le spectacle s’est joué les 27 et 28 juin aux Grandes Écuries, Mois Molière à Versailles.