Tribulations d’un musulman d’ici, de et par Ismaël Saïdi
Tribulations d’un musulman d’ici, de et par Ismaël Saïdi.
Nous avions croisé cet auteur en juin dernier à l’Institut français à Tokyo, où il avait présenté sa pièce Djihad, jouée fréquemment en France, (voir Le Théâtre du blog). Interprétée en version japonaise et mise en scène par Misaki Satoyama, au Sainokuni Saitama Arts Theater.
Toujours encadrée d’un débat, elle a déjà été jouée quatre cent cinquante fois avec succès dans le monde entier. «C’est juste une pièce de théâtre, précise Ismaël Saïdi, ce n’est pas un vaccin». Nous retrouvons Ismaël Saïdi ici dans une petite salle, avec un monologue autobiographique de soixante minutes, plein d’énergie et d’humour, où il retrace les grandes étapes de sa vie de fils d’immigrés marocains né en Belgique. Refus de choisir entre deux cultures malgré certaines pressions familiales, expérience de policier pendant plus de dix ans, rencontres qui ont façonné sa vie : tout cela décrit avec sincérité, tendresse et sensibilité quand en particulier, il évoque la mémoire de celle qu’il nommera: «Madame» toute sa vie, jusqu’à sa mort à 99 ans… Une Belge vivant seule qu’il a connu enfant. «Elle s’occupait de moi tous les jours, me soignait, aidait ma mère à me laver. Dès que j’ai eu quatre ans, elle lui a dit qu’il faillait commencer à m’apprendre à lire pour que je prenne de l’avance. Elle me rapportait des livres et les déchiffrait avec moi».
Ce goût des mots et de l’écriture ont fait qu’Ismaël Saïdi s’est peu à peu écarté de ce que pouvait être sa destinée de musulman de seconde génération. Cette prise de conscience de la valeur de l’écrit et le fantôme protecteur de «Madame» l’ont amené à devenir un auteur à succès et un interprète aujourd’hui en constant dialogue avec cette femme. Un beau travail, utile et émouvant de mémoire…
Jean Couturier
Le spectacle a été joué au Théâtre de l’Observance, 10 rue de l’Observance, Avignon, du 6 au 29 juillet à 15h30.