Festival les Boréales à Caen: Wild Minds, Les Rêveurs compulsifs de Marcus Lindeen


Festival les Boréales à Caen:

Wilds Minds Les Rêveurs compulsifs, texte et mise en scène de Marcus Lindeen, musique et conception sonore d’Hans Appelqvist, traduction de Marianne Ségol-Samoy

WildMinds1L’auteur-metteur en scène de théâtre suédois qui est aussi réalisateur de films reconnu, a été invité pour la seconde fois aux Boréales avec cette même pièce. Il a interviewé des gens qui se reconnaissent eux-même comme des rêveurs compulsifs.Ils se créent des univers de fiction totalement imaginaires mais élaborés avec une grande précision où ils sombrent car incompatibles avec la vie réelle qu’ils sont bien obligés d’affronter au quotidien. Ils doivent alors demander une aide psychologique pour pouvoir se sortir de cette obsession.

Le public est installé en rond. Pas de gradins mais une cinquantaine de chaises. Aucun décor, juste un abat-jour en fer émaillé avec une grosse ampoule éclairant le centre d’un tapis de danse noir. On assiste ici à une session de thérapie de groupe, et cinq rêveurs compulsifs, assis parmi les spectateurs vont suivre, grâce à une oreillette, les propos recueillis par Marcus Lindeen. Et ils vont essayer de les reproduire et de les jouer le plus fidèlement possible, ce qui n’a rien d’évident. D’autant plus qu’ils ne bougent pas de leur siège

Les acteurs amateurs dits, selon le programme: « performeurs »: Barbara French, Anne-Sophie Ingouf, Claude Thomas, Hida Sahebi, El Hadji Abdou Aziz Diaw, malgré la difficulté de ce jeu de rôles, interprètent leurs personnages avec humilité et précision, mais le jeu comme la diction de certains d’entre eux reste parfois approximative. Cette expérience théâtrale ne manque pas d’intérêt mais on navigue ici entre la performance et le théâtre participatif, et faute sans doute d’une direction et d’une dramaturgie plus solides, l’osmose ne se se fait pas vraiment entre intervenants et public, et on a du mal à se plonger dans les mondes imaginaires de ces malades. Bref, ces trente-cinq minutes sont peu convaincantes…

Philippe du Vignal

Spectacle vu le 24 novembre, au Centre Chorégraphique National de Caen.


Archive pour 30 novembre, 2018

Sombre Rivière, texte et mise en scène de Lazare

 

©Jean-Louis Fernandez

©Jean-Louis Fernandez

Sombre Rivière, texte et mise en scène de Lazare

« J’ai une tendance/ trop délirante ? Peut-être ?: Entends-tu la mer derrière moi ?:Peut-être ?/ Je vis ma vie comme un spectre./C’est pour ça que je délire, j’ai envie qu’elle soit réelle ma vie »,  dit l’acteur qui joue Lazare. Dans ce long poème dramatique, entrecoupé de vidéos,  sketches,  et chansons, l’auteur met en scène son « je », accompagné d’un chœur de comédiens-danseurs mais aussi musiciens. Soit un flot de paroles soutenues par des parties chantées et dansées.

 Dans ce spectacle créé  en 2017,  Lazare entend faire la clarté en lui, après les attentats survenus à Paris deux ans plus tôt . «De par mon histoire, tout me renvoie au fait que je suis des deux côtés de la séparation, explique-t-il. (…) Tiraillé entre deux mondes (…)Le  «je» que j’emploie est un personnage. (…) Celui d’un auteur, enfant de l’immigration et pétri de désirs et de paradoxes … » Ici, la mort rôde et les dix artistes  -chœur des trépassés et/ou chœur des vivants- essayeront,  en quelque cent-vingt minutes  de la conjurer, la repousser,  et de  transformer ce Styx amer en joyeux carnaval. La mise en scène est, comme l’écriture, débridée. Lazare ose tout, avec plus ou moins de bonheur et de bon goût. Il y a entre autres des sketches-clins d’œil à l’actualité. Lazare (Julien Villa) devient triple (rejoint par Mourad Musset et Olivier Leite) ou  dialogue avec d’autres personnages de ses pièces, dont le fameux Libellule, figure centrale de sa trilogie, interprétée par Mourad Musset.  La vidéo prend souvent le relais des actions scéniques filmées en direct, mais montre aussi Lazare en personne avec sa mère, son chien, un cheval… Difficile de nous y retrouver dans ce kaléidoscope permanent.

La vitalité de la compagnie Vita Nova fondée par l’auteur-metteur en scène en 2006, reste le gros atout de ce spectacle vibrionnant. Julie Hega et Ludmilla Dabo chantent avec talent, et leurs voix donnent vie aux fragments de poèmes de Lazare. Le violoncelle de Veronika Soboljevski et la batterie de Louis Jeffroy contribuent à des arrangements musicaux haut de gamme. Les parties dansées témoignent d’un grand professionnalisme et l’on finit par s’attacher à ces artistes polyvalents, tous excellents comédiens. Malheureusement, cela ne suffit pas à sauver un spectacle qui sombre dans une kermesse où se noient, malgré sa poésie et sa générosité.  les propos incisifs de l’auteur : « Le théâtre, dit-il, est un espace de combat poétique.»  Il veut faire spectacle des questions brûlantes de notre société malade car il y a urgence, mais une dramaturgie rigoureuse n’aurait pas nui au propos…

 Mireille Davidovici

Théâtre du Rond-Point, 1 avenue Franklin D. Roosevelt, Paris VIIIème, jusqu’au  30 décembre.

L’Atelier des Lumières: Gustav Klimt

 

L’Atelier des Lumières: Gustav Klimt

culturespaces_hundertwasser_final_version_web_sans_barres_noiresQuand on pénètre dans cette ancienne fonderie à Paris, on est aussitôt baigné dans la lumière qui recouvre ses moindres recoins et on sent affleurer à chaque pas, la mémoire du lieu qui amplifie l’émotion. Il s’agit en effet d’une véritable mutation qui a lieu sous nos yeux, transformant constamment l’espace grâce à un enchaînement d’images animées.

Fidèles au lieu d’origine, les concepteurs en ont gardé la dimension populaire et mémoriale, ce  qui permet une appréhension directe et sans prérequis théoriques: ici, l’art est une plongée dans la beauté, et un songe éveillé, dans un patrimoine architectural unique.  Une marée de visiteurs, de tout âge, parcourt les lieux : on mesure  le succès de cette opération qui marquera durablement le paysage parisien, en devenant un lieu culturel incontournable !   

Cette ancienne fonderie de fer installée dans une halle de 2. 000 m2, en a gardé la structure métallique, la corpulente cheminée centrale, la mezzanine, la tour de séchage, et un réservoir d’eau. La fonderie du Chemin-Vert, créée en 1835 par les frères Plichon, a fermé ses portes en 1933 et  devint ensuite un lieu de vente de machines-outils durant soixante-cinq ans. En 2000, ses portes se ferment à nouveau.  Treize ans plus tard, Bruno Monnier, président de Culturespaces, découvre  cet espace et  veut créer à Paris un centre d’art numérique. La propriétaire du lieu, la famille Martin, , séduite par ce projet, accepte de lui louer la grande halle et ses annexes. Et le 13 avril  dernier, après d’importants travaux, l’Atelier des Lumières ouvre ses portes.

Il propose des expositions immersives monumentales. Avec cent-quarante vidéoprojecteurs laser Barco et une sonorisation spatialisée: cinquante enceintes à directivité contrôlée Nexo. Un équipement  multimédias qui épouse 3.300 m2 de surfaces, du sol au plafond, avec des murs s’élevant jusqu’à dix mètres et qui nous fait vivre une expérience immersive totale avec plus de 3.000 images mises en mouvement, selon le procédé AMIEX. «Le rôle d’un centre d’art, pour Bruno Monnier, est de décloisonner et le numérique doit donc prendre sa place dans les expositions du XXI ème siècle. Mis au service de la création, il devient un formidable vecteur de diffusion, capable de créer des passerelles entre les époques, faire vibrer les pratiques artistiques entre elles, amplifier les émotions, et toucher le plus grand nombre. »

 En 2012, Culturespaces met au point le procédé AMIEX (Art & Music Immersive Experience) et lance sa première exposition immersive : Carrières de Lumières aux Baux-de-Provence (voir Le Théâtre du Blog réalisée par Gianfranco Iannuzzi, Renato Gatto et Massimiliano Siccardi. Conçues sur-mesure pour épouser totalement l’espace où elles s’intègrent, ces expositions  sont fondées sur la projection d’œuvres sur d’immenses surfaces en très haute résolution grâce à un équipement numérique hors-normes. Dès que retentit la première note de musique, la technologie s’efface au profit de l’émotion esthétique, suivant un scénario tout en poésie. Immergé dans l’image et la musique, le visiteur est emporté dans une aventure sensorielle.

«Tous les contenus de la réalisation doivent être orchestrés dans une composition rigoureuse et fluide, dit Gianfranco Iannuzzi, directeur artistique et coréalisateur. Le défi: s’adapter aux structures et aux proportions exceptionnelles du lieu pour en faire une des plus grandes installations multimédias au monde : murs panoramiques de quatre-vingts mètres de long sur dix de hauteur, surfaces de projection cylindriques… Nous avons dû élaborer tous les  visuels pour qu’ils épousent parfaitement l’espace de cette ancienne fonderie. C’est du sur-mesure ! »

 L’Atelier des Lumières accueille les visiteurs dans  une halle de 1500 m2 et  dans le Studio, un espace consacré à la création contemporaine de 160 m2. Les programmes : long et court, réalisés par Gianfranco Iannuzzi, Renato Gatto, Massimiliano Siccardi et Ginevra Napoleon, tournent en boucle.  Programme long :  Gustav Klimt en six séquences : La Vienne néoclassique / Klimt et la Sécession viennoise / Klimt et l’or / Klimt et la nature / Egon Schiele / Klimt et les femmes.  pour le centenaire de la disparition de ce grand artiste, ses œuvres s’animent en musique sur les murs. En traversant un siècle de peinture viennoise, on propose ici un regard original sur le peintre et ses successeurs (dont Egon Schiele, cet excellent dessinateur), à travers la mise en scène de portraits, paysages, nus, couleurs et dorures qui ont révolutionné la peinture viennoise dès la fin du XIXe ème siècle. Avec la collaboration musicale de Luca Longobardi. Pour rythmer la mise en mouvement les séquences d’images, et amplifier l’expérience émotionnelle : des musiques de Richard Wagner, Johann Strauss, Ludwig van Beethoven, Frédéric Chopin, Gustav Mahler, Philip Glass…

 Programme court: Hundertwasser, sur les pas de la Sécession viennoise, avec également la collaboration musicale de Luca Longobardi. Une invitation à découvrir l’œuvre de cet artiste  (1928-2000) qui incarne un renouveau, et marquée par la révolution instituée par Gustav Klimt. «Nous souhaitons, dit Gianfranco Iannuzzi, directeur artistique et coréalisateur, que le visiteur conserve sa liberté de perception et d’interprétation dans un espace où ses mouvements intègrent l’exposition. S’immerger dans une œuvre tridimensionnelle permet d’amplifier l’émotion,  et invite à avoir une attitude plus participative. »

7_002 Et on peut voir aussi une création contemporaine, POETIC_AI par le collectif turc OUCHHH, studio de création numérique basé à Istanbul, Los-Angeles et Londres. Soit un voyage onirique qui fait appel à l’intelligence artificielle mais aussi une réflexion autour de la peinture. Et grâce à des images numériques à haute résolution, on explore des contrées inédites en isolant, grossissant et transformant des éléments, formes, couleurs et détails qui jaillissent telles des apparitions. Cette «loupe grossissante» éclaire l’œuvre d’un nouveau regard. Pour la première fois, le spectateur fait corps avec les œuvres d’art: peut-être atteint du syndrome de Stendhal, un trouble psychosomatique décrit par le célèbre écrivain, très ému devant les toiles des grands  maîtres à Florence. Un état magistralement porté à l’écran par Dario Argento qui anticipait déjà en 1996, cette plongée immersive dans des tableaux.

 Avec ces images, on fait vite le parallèle avec les tours de magie : effets, apparitions, disparitions, mais aussi, transformations, changements d’échelle et de couleur. Toute la matière, en constant changement, est engendrée ici par le fondu enchainé. Est aussi convoquée  toute la pensée chamanique qui va de pair avec cette magie. Dans une sorte de rituel remontant aux sources des croyances, par le biais d’une savante alchimie picturale et sonore.

Sébastien Bazou

Jusqu’au 6 janvier,  L’Atelier des Lumières, 38 rue Saint-Maur, Paris XIème.

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