Adieu Guy Rétoré

Adieu Guy Rétoré

JACQUES WINDENBERGER / SAIF IMAGES

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Il avait quatre-vingt quatorze ans, et fut un des pionniers de la décentralisation, non pas en province mais… dans un arrondissement sans théâtre de la Capitale, le XX ème, où il réussit à créer le T.E.P. (Théâtre de l’Est Parisien). Employé à la SNCF, il avait fondé  à Ménilmontant où il avait toujours vécu, la Guilde, une compagnie d’amateurs. Et il monte en 1956 (il avait trente-deux ans), La Vie et la mort du Roi Jean d’après Le Roi Jean, une pièce peu connue de Shakespeare qui y peint un monde politique marqué par l’ambiguïté et le compromis.

Guy Rétoré remporte un an plus tard avec ce spectacle le Prix du concours des jeunes compagnies institué par le Ministère de la Culture. Ce qui avait valeur d’adoubement dans la profession, avec à la clé, une enveloppe. Il put ainsi aménager rue du Retrait à Ménilmontant un petit théâtre qu’il voulait populaire dans une salle de paroisse. L’Histoire connaît parfois de curieux dérapages : au moment où Guy Rétoré nous quitte, l’église catholique, propriétaire de cette salle, la fait fermer pour des raisons financières…

Dans la ligne éthique et esthétique du T.N.P. de Jean Vilar, Guy Rétoré, discret et infatigable, ne fit aucune concession  et accomplit un véritable travail de terrain en montant les pièces de grand auteurs. Et en 1963, il réussit à emmener sa troupe dans un ancien cinéma, rue Malte Brun. Où il créa ce T.E.P. /Maison de la Culture qu’inaugura par André Malraux, alors ministre de la Culture sous le règne de de Gaulle. Et  en 1972,  le T.E.P.  était promu Centre dramatique national puis reçut le label suprême de Théâtre national. Guy Rétoré qui réalisa, accompagné d’acteurs comme, entre autres Jacques Alric, Gérard Desarthe, Arlette Thépany décédée en août dernier, de nombreuses mises en scène avec des auteurs comme Brecht avec L’Opéra de quat ’sous  (1969) qui fut un grand succès populaire, Sainte Jeanne des abattoirs (1972), Maître Puntila et son valet Matti, La Résistible ascension d’Arturo Ui (1988).  Mais aussi Poussière pourpre du grand écrivain irlandais alors peu connu chez nous, Sean O’ Casey et des pièces d’écrivains contemporains comme,  en 1968, Les 13 soleils de la rue Saint Blaise d’Armand Gatti, puis Le Chantier de Charles Tordjman, Clair d’usine de Daniel Besnehard, Entre Passion et Prairie de Denise Bonal, Dissident il va sans dire de Michel Vinaver. En 1974, il transforme une laverie automatique en seconde salle, le petit T.E.P. où Jacques Lassalle crée Travail à domicile de F.-X. Kroetz, et où fut jouée Fin de partie de Samuel Beckett en 1980.

Puis quand le Ministère décida de construire le Théâtre de la Colline à la place du T.E.P., Guy Rétoré alors proche de la retraite, préféra alors sagement en quitter la Direction et s’installa pas très loin dans une ancienne salle de répétition, avenue Gambetta. Mais le Ministère le poussa vers la sortie en 2002 mais pas de façon très élégante, comme souvent. Dans la droite ligne de Jean Vilar, avec discrétion mais pugnacité, il aura été un des bons artisans de la décentralisation, dans un quartier loin des théâtres bourgeois où, lui aussi, conquit un public populaire. Il était le père de Catherine Rétoré, et le grand-père d’Odja et Sara Llorca, toutes trois comédiennes.

Philippe du Vignal

 


Archive pour 25 décembre, 2018

Adieu Guy Rétoré

Adieu Guy Rétoré

JACQUES WINDENBERGER / SAIF IMAGES

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Il avait quatre-vingt quatorze ans, et fut un des pionniers de la décentralisation, non pas en province mais… dans un arrondissement sans théâtre de la Capitale, le XX ème, où il réussit à créer le T.E.P. (Théâtre de l’Est Parisien). Employé à la SNCF, il avait fondé  à Ménilmontant où il avait toujours vécu, la Guilde, une compagnie d’amateurs. Et il monte en 1956 (il avait trente-deux ans), La Vie et la mort du Roi Jean d’après Le Roi Jean, une pièce peu connue de Shakespeare qui y peint un monde politique marqué par l’ambiguïté et le compromis.

Guy Rétoré remporte un an plus tard avec ce spectacle le Prix du concours des jeunes compagnies institué par le Ministère de la Culture. Ce qui avait valeur d’adoubement dans la profession, avec à la clé, une enveloppe. Il put ainsi aménager rue du Retrait à Ménilmontant un petit théâtre qu’il voulait populaire dans une salle de paroisse. L’Histoire connaît parfois de curieux dérapages : au moment où Guy Rétoré nous quitte, l’église catholique, propriétaire de cette salle, la fait fermer pour des raisons financières…

Dans la ligne éthique et esthétique du T.N.P. de Jean Vilar, Guy Rétoré, discret et infatigable, ne fit aucune concession  et accomplit un véritable travail de terrain en montant les pièces de grand auteurs. Et en 1963, il réussit à emmener sa troupe dans un ancien cinéma, rue Malte Brun. Où il créa ce T.E.P. /Maison de la Culture qu’inaugura par André Malraux, alors ministre de la Culture sous le règne de de Gaulle. Et  en 1972,  le T.E.P.  était promu Centre dramatique national puis reçut le label suprême de Théâtre national. Guy Rétoré qui réalisa, accompagné d’acteurs comme, entre autres Jacques Alric, Gérard Desarthe, Arlette Thépany décédée en août dernier, de nombreuses mises en scène avec des auteurs comme Brecht avec L’Opéra de quat ’sous  (1969) qui fut un grand succès populaire, Sainte Jeanne des abattoirs (1972), Maître Puntila et son valet Matti, La Résistible ascension d’Arturo Ui (1988).  Mais aussi Poussière pourpre du grand écrivain irlandais alors peu connu chez nous, Sean O’ Casey et des pièces d’écrivains contemporains comme,  en 1968, Les 13 soleils de la rue Saint Blaise d’Armand Gatti, puis Le Chantier de Charles Tordjman, Clair d’usine de Daniel Besnehard, Entre Passion et Prairie de Denise Bonal, Dissident il va sans dire de Michel Vinaver. En 1974, il transforme une laverie automatique en seconde salle, le petit T.E.P. où Jacques Lassalle crée Travail à domicile de F.-X. Kroetz, et où fut jouée Fin de partie de Samuel Beckett en 1980.

Puis quand le Ministère décida de construire le Théâtre de la Colline à la place du T.E.P., Guy Rétoré alors proche de la retraite, préféra alors sagement en quitter la Direction et s’installa pas très loin dans une ancienne salle de répétition, avenue Gambetta. Mais le Ministère le poussa vers la sortie en 2002 mais pas de façon très élégante, comme souvent. Dans la droite ligne de Jean Vilar, avec discrétion mais pugnacité, il aura été un des bons artisans de la décentralisation, dans un quartier loin des théâtres bourgeois où, lui aussi, conquit un public populaire. Il était le père de Catherine Rétoré, et le grand-père d’Odja et Sara Llorca, toutes trois comédiennes.

Philippe du Vignal

 

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