Chers lecteurs
Chers lecteurs,
Le Théâtre du Blog a maintenant dix ans et nous avons publié à ce jour 5.818 articles soit en moyenne quarante-huit par mois. Ce qui est à la fois beaucoup mais pas toujours suffisant-nous en sommes conscients- pour traiter de l’ensemble de l’actualité française et étrangère. Nous savons que vous êtes friands de ce qui se passe dans les pays proches mais aussi en Grèce, en Russie, au Japon, au Canada et nous continuerons à vous en rendre compte.
2018 n’aura pas connu de grands bouleversements, que ce soit sur le plan théâtral, chorégraphique ou circassien, à Paris ou en régions. On notera cependant la montée en puissance de la danse au Théâtre national de Chaillot avec de remarquables spectacles mais malheureusement aux dépens du théâtre. Par ailleurs, on ne comprend pas bien le scénario de la programmation des travaux au Théâtre de la Ville. Rappelons que cela fait déjà plus deux ans que cet établissement-phare de la Ville de Paris est fermé et on n’imagine pas un instant qu’il pourra rouvrir en 2019!
Les grands festivals comme ceux d’Avignon, Aurillac ou Chalon se portent, eux à merveille et font toujours le plein de spectateurs. Comme le tout petit mais très pointu festival de Villerville… Du côté du théâtre privé à Paris, la situation n’est pas des meilleures. La faute à quoi? Probablement à un public vieillissant qui hésite à se déranger même quand il y a une ou deux vedettes dans la distribution (comme dans le théâtre public !) mais aussi à un répertoire loin d’attirer les jeunes, et à un prix des places dissuasif. Et enfin à des temps perturbés à Paris depuis quelques semaines… Cela fait effectivement un ensemble d’éléments négatifs!
Du côté mise en scène, pas de révélations majeures mais on peut saluer la maîtrise de plus en plus évidente de Cyril Teste avec Festen à l’Odéon et Hamlet à l’Opéra-Comique, le seul qui ait réussi à intégrer avec une grande intelligence, le cinéma dans un spectacle. Les autres jeunes -ou moins jeunes!- créateurs se contentant la plupart du temps, d’images-relais d’une rare banalité. On notera aussi le nombre croissant de compagnies qui s’appuient sur la notion de collectif comme pour se rassurer mais rarement pour le meilleur et souvent pour le pas très intéressant du tout!
Il y a aussi un phénomène frappant surtout à Paris : l’augmentation récurrente du nombre de solos, purs et durs, ou camouflés avec une voix off… Pour des raisons qui n’ont rien à voir avec une quelconque raison esthétique mais essentiellement financières. Augmentation aussi du nombre de spectacles-fleuves de plus de cinq heures dans les théâtres publics. Donc par définition élitistes puisque réservés à ceux qui ne sont pas obligés de se lever tôt ! Mais aussi ce qui reste inquiétant, le nombre très limité de représentations de spectacles à la création: le plus souvent une dizaine à peine! Tout se passe comme si la plupart des théâtres parisiens, surtout les petits ou moyens servaient de vitrines d’exposition, avec un public de plus en plus souvent, majoritairement professionnel…
On note aussi les adaptations de plus en plus fréquentes de romans et nouvelles, classiques ou contemporains, célèbres ou inconnus par les jeunes metteurs en scène qui préfèrent jouer les écrivains, au lieu de faire appel à l’un d’entre eux. Pour un résultat très approximatif et avec le plus souvent la béquille d’images-vidéo utilisées de la pire façon!
Ainsi va être porté à la scène le célèbre roman Le Grand Meaulnes d’Alain Fournier, livre-culte du XX ème siècle autrefois adapté au cinéma par Jean-Gabriel Albicocco en 67, puis par Jean-Daniel Verhaege en 2006. Mais qui tombe maintenant des mains des adolescents… Lesquels, curieusement mais avec logique, tombent parfois sous le charme des grands classiques comme Eschyle, Sophocle ou Euripide, Molière, ou Marivaux comme on l’a encore vu cet été à Versailles, joué en plein air par de jeunes acteurs inconnus, ou au Théâtre de la Tempête. Cela veut dire quoi? Sans doute que tout reste possible au théâtre mais à la condition de ne pas tricher…
Nous aurons encore une pensée pour Jacques Lassalle et Guy Rétoré qui nous ont quitté cette année.
Nous vous souhaitons une année théâtrale enrichissante.
Philippe du Vignal