Cet Été suivi de La Rencontre/Portraits de Femmes, écriture et mise en scène de Pauline Bureau

 

Cet Été suivi de La Rencontre/Portraits de Femmes, écriture et mise en scène de Pauline Bureau

07BE3E3E-4D58-4373-AD79-7EB9A1490765 Un centre d’apprentissage dans la banlieue de Caen propose aux élèves des activités culturelles mises en place avec la Comédie de Caen. Devant une classe de C.A.P. coiffure, deux comédiennes vont, tour à tour, se mettre dans la peau de femmes qui livrent leur parcours de vie. Avec ces récits, Pauline Bureau et son équipe répondent à une commande de La Poudrerie de Sevran, une compagnie produisant des spectacles dits «immersifs», joués dans des appartements, écoles, bibliothèques, collectivités… (voir Le Théâtre du Blog) Une trentaine de femmes, choisies par l’intermédiaire des réseaux associatifs de Sevran, se sont portées volontaires pour se raconter, en relation avec cette ville de Seine-Saint-Denis qui compte aujourd’hui quelque cinquante mille habitants. Elles se sont confiées aux magnétophones de Pauline Bureau et de ses actrices, Sabrina Baldassarra et Sonia Floire. Une fois ces paroles recueillies, puis décryptées, la metteuse en scène a demandé à chaque comédienne de choisir le personnage qu’elle désirait incarner. Elle a ensuite opéré des coupes en respectant le parler, les silences, le style d’élocution des personnes interviewées et assuré la mise en scène de ces petites formes. Le hasard a voulu que, sans se concerter, les actrices optent pour des portraits qui se répondent. Une femme battue qui s’en est sortie, et la directrice de la crèche municipale qui s’est occupé à un moment donné du fils de la première !

  »Dans le corpus global, précise Sonia Floire, il y avait deux sortes de femmes : les battantes, et les battues. Ce qui m’a intéressée dans mon personnage, c’est sa capacité de résilience. » Dans Cet été, elle retrace l’itinéraire douloureux d’une jeune coiffeuse qui a dû abandonner son métier, quand elle s’est mariée et qu’elle s’est trouvée confrontée à un homme alcoolique et violent  : «Je suis maman de deux enfants. De quatre ans et demi, et le petit de deux ans. » (…)  « Il voulait pas que je travaille. Il m’a dit que c’est lui qui va assumer./ Et qu’il n’a pas besoin que je travaille, il gagnait bien sa vie, il était ingénieur en informatique. Et au début, il buvait, il buvait que le week-end, mais pas beaucoup … ». Elle montre au public, avec fierté, les coiffures qu’elle a réalisées, compilées dans un petit carnet rose : son trésor ! On sent alors que cette femme est sortie du cercle vicieux où elle se trouvait enfermée.

 Après ce touchant témoignage, Sabrina Baldassarra prend le relai avec La Rencontre, une narration beaucoup plus structurée, la parole militante d’une directrice de crèche qui apporte un point de vue lucide et pertinent sur son métier et son rôle social. Elle raconte comment, dans son établissement, elle accueille plusieurs enfants handicapés, et combien, avec eux, on apprend sur soi-même : «Un mot qu’on utilise beaucoup en ce moment, c’est la tolérance et notamment par rapport à… Voilà, où il faudrait être tolérant avec le handicap, etc. Et quand on dit à quelqu’un : je te tolère, excusez-moi, mais ce n’est pas s’enrichir de l’autre. Pour moi, il y a quand même dans la rencontre, l’idée de, bien sûr, qu’on s’expose, hein, dès l’instant où on entre dans une rencontre, bien sûr qu’on s’expose (… ) »

 Sans décor, avec quelques accessoires, et la force des mots, s’invente ici un théâtre hors-les-murs, pour des publics tenus éloignés des scènes traditionnelles. Les échanges avec les apprentis, d’abord timides, ont permis de tracer la limite ténue entre réalité et fiction, de mettre en évidence la distance qu’apporte le jeu, l’écriture  et la mise en scène : l’essence même du théâtre. «Vous êtes courageuses», ose une jeune fille. S’adressait-elle aux comédiennes ou à leurs personnages, ces Sevranaises qui, chacune à sa façon, nous ont donné une leçon de vie… Et encore quelque espoir en l’humanité. On sort de cette petite heure chargée d’émotion.

 «Rencontrer, dit Pauline Bureau, c’est accepter d’être surprises, bougées. » Et elle le démontre avec sa compagnie La Part des anges, engagée depuis des années dans ce type d’action artistique et actuellement en résidence à la Comédie de Caen. Dernièrement, on a pu apprécier son implication sociale avec Mon cœur (voir Le Théâtre du Blog). La prochaine création de la metteuse en scène, à la Comédie-Française, promet d’être dans le même esprit : Hors la loi raconte l’histoire d’un avortement clandestin au début des années 70, jugé au Tribunal de Bobigny. En attendant, ces Portraits de femmes qui ont déjà été en tournée dans la région parisienne, devraient partir à la rencontre d’autres publics.

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 8 mars au C.I.F.A.C de Caen (Calvados), dans le cadre de la saison Appart’ C.A.F/C.E.M.E.A. de Normandie.

Le 10 mai, Maison d’arrêt de femmes de Caen.

Hors la loi sera créé du 24 mai au 7 juillet, au  Théâtre du Vieux-Colombier, Paris VI ème.

 

 

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