No woman’s land, lecture imaginée et mise en abyme par Odile Roire

No woman’s land,  lecture imaginée et mise en abyme par Odile Roire

Flyer 4 juilletEn plein hiver, six femmes se retrouvent pour fonder un groupe de celles qui ont plus de cinquante ans. L’une déploie une toile plastique autour de trois  tables. « La femme qui couche dans mon lit,  n’a plus  vingt ans depuis longtemps. » (…) « Je suis désolée, je n’ai plus de voix, ma fille a sa première demain. » (…) « Nous allons essayer de lire sans nous arrêter, on pourrait faire un collectif, nous voici aujourd’hui face au vide, y a-t-il une vie après cinquante ans ? T.V.G. : Théâtre des Vieilles Gonzesses (…)  » Il y a cent quatre-vingt-dix rôles d’homme pour dix de femme! Etre femme et avoir cinquante ans, est-ce un handicap ? » (…)  » Cela veut dire quoi être actrice, quand on n’a pas joué depuis dix ans ? Non, j’ai le sentiment que ma vie est finie, je vieillis, tout le monde s’en fout; à partir d’un certain moment, une femme seule n’est plus une femme libre !» On assiste à des engueulades sur des auditions ratées. «On va se faire traiter de féministes, ce qui est difficile, c’est de séparer le professionnel, du personnel, mettons la franchise au goût du jour : Qu’est ce que vous pensez de moi ? » (…) « Finalement, ça veut dire quoi vieille ? » (…) Les jeunes acteurs, Jean Vilar, etc, ils ne connaissent pas ! »

Une lecture insolite  avec une belle vigueur par des interprètes déterminées: Nathalie Villeneuve, Marianne Wolfsohn, Françoise Viallon, Odile Roire, Catherine Gantois, Emmanuelle Lecoultre, Roman Kané, Esmé Planchon et Jeanne Cremer. On espère qu’elle aura une suite.

Edith Rappoport

Lecture présentée au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, 2 bis rue du Conservatoire, Paris (IX ème)


Archive pour 13 juillet, 2019

Casanova Le pardon de Christian Rome, mise en scène Jean Louis Tribes,

© Julien Fonti

© Julien Fonti

 

Casanova Le Pardon de  Christian Rome, mise en scène de Jean-Louis Tribes

Cela se passe dans un salon bourgeois à Dresde en 1770.  Zanetta, soixante- cinq ans, a joué jeune avec succès les pièces Goldoni. Elle retrouve son fils Casanova, le célèbre séducteur, aussi intelligent que cynique, qui en lui quarante-cinq. Mais ils ne se sont pratiquement jamais vus et ne se connaissent que de réputation. Casanova a été élevé par sa grand-mère. Sa mère lui parle de ses difficultés:  son compagnon, en train de mourir, refuse de la coucher sur son testament…

Casanova plaisante : « L’argent, ça va, ça vient. De toutes façons, l’argent est une vaste plaisanterie, je ne crois pas à l’amitié, ni à l’amour !» Il veut partir mais sa mère le retient. Ils se mettent alors à jouer aux cartes et boivent du vin. «J’aimerais, dit-il, revoir Venise. »

La mère lui raconte une aventure de son amant avec une jeune actrice, elle manque de s’évanouir, son fils la soutient: «Je veux juste vous aider, mère, mais vous m’avez toujours détesté ! ». Elle lui demande pardon, il veut l’embrasser, elle le repousse.  Un duo insolite interprété par les énergiques comédiens que sont Marie-Christine Adam et Alain Sportiello. Mais cette entrevue réussit-elle à faire spectacle? Une fausse bonne idée? Le dialogue, assez conventionnel, ne nous a pas semblé être tout à fait à la hauteur des aventures et de la personnalité de ce personnage… de théâtre.

Edith Rappoport

Le Lucernaire, 53 rue Notre-Dame-des-Champs, Paris ( VI ème)  du mardi au samedi  à 19 h, jusqu’au 11 août. T. : 01 45 44 57 34.

La Green Box d’après L’Homme qui rit de Victor Hugo, écriture et mise en scène de Claire Dancoisne

 

La Green Box d’après L’Homme qui rit de Victor Hugo, écriture et mise en scène de Claire Dancoisne

 

Crédit photo : Christophe Loiseau

Crédit photo : Christophe Loiseau

La Compagnie de La Licorne a encore  frappé fort avec cette création, une petite forme inédite, noire et lumineuse, de théâtre dans le théâtre. Belle mise en abyme de l’œuvre hugolienne . La Green Box, titre éponyme de la roulotte à la fois accessoire et refuge du saltimbanque et penseur Ursus, un préposé du théâtre de foire. A la façon  d’une vitrine moyenâgeuse et de ce qui pourra devenir plus tard le théâtre de rue, aux XVII et XVIII èmes siècles en Angleterre, l’attraction se déplace, de parvis de cathédrale londonienne en place d’église villageoise. Un théâtre ambulant de carrefours, de marchés, foires, et fêtes… Le public voyeur étant toujours nombreux, quand il s’agit d’apprécier les fantaisies cruelles et mauvaises.

 Ursus n’est pas celui qui assure ce mélodrame animalier et carnassier, homme pourtant : philosophe, médecin et guérisseur,  il connait  dépité ses semblables, mais est aussi le protecteur des exclus de ce monde.  Comme ces êtres que les Comprachicos, brigands et trafiquants d’enfants de privilégiés qu’ils ont volés et qu’ils défigurent pour les rendre monstrueux donc attractifs. Par ailleurs, Ursus est aussi un défenseur de la cause animale et végétale. Le monstre Gwynplaine, lui,  retrouvera ses titres de lord et siègera à la Chambre où il dénoncera les injustices et les trahisons, l’iniquité des puissants face aux miséreux. Rien n’y fera, les députés de la noblesse se moqueront de  cet  homme qui rit.

 Ici, le loup domestiqué est le protagoniste: Homo le bien nommé, plus humain que les hommes, se glisse dans la parole avertie du bateleur Ursus. Et, via son regard politique, il  rend compte de l’inhumanité et de la corruption des hommes arrogants et suffisants. Les boutiques foraines ne peuvent  rivaliser sur les places publiques avec la Green Box, un  divertissement populaire bas et inavouable, un lieu de curiosité bien malsaine :« Ce loup, docile et gracieusement subalterne, était agréable à la foule. Voir des apprivoisements est une chose qui plaît. Notre suprême contentement est de regarder défiler toutes les variétés de la domestication. »

 Mais sur scène, le Loup mène la danse. Claire Dancoisne, artiste habitée par une esthétique décalée immédiatement identifiable, tendance baroque, apporte toute la dimension mélancolique de l’univers gothique et se plaît à cultiver l’œuvre hugolienne. Puisqu’attraction il y a avec cette Green Box, elle sera volontairement sombre et noire, profondément minérale et mortifère, puisque ossements et squelette morcelé tiendront lieu de décor, une danse macabre moqueuse.

 Avec un sac de marin, rempli d’os pour seul bagage, l’acteur à la tête de loup, -jambes et bras aux longs muscles vigoureux -s’agite sur son piano d’os accumulés, comme s’il jouait une partition. Il s’adresse au public, donnant son avis sur l’obscénité du rire humain, à l’aide de sa collection personnelle d’ossements :  crâne, fémurs et tibias, mains squelettiques, colonnes vertébrales en miettes.

 Olivier Brabant se fait aussi bestial que possible, bondissant, pivotant sur son établi d’os, soulevant la patte et prenant une clavicule ou une vertèbre dans ses griffes, multipliant les mouvements vifs du loup, sautant courbé, puis se redressant, mimant avec ses muscles d’animal, le prédateur royal.  Une performance de haut vol : le public écoute la dénonciation politique des malversations des prétendus puissants, subjugué par ce comédien qui joue de sa voix rauque mais aussi de son corps  si proche de la bête.

Véronique Hotte

Présence Pasteur, lycée Pasteur, 13 rue du pont Trouca, Avignon. T. : 04 32 74 18 54, jusqu’au 27 juillet à 18 h, relâche le 18 juillet.

 

 

 

aaAhh Bibi, de Julien Cottereau, mise en scène d’Erwan Daouphars

aaAhh Bibi, de Julien Cottereau, mise en scène  d’Erwan Daouphars (spectacle tout public à partir de six ans)

 836EDB74-A43A-487D-A29C-B00C9D6F6E64Ancien élève d’Alain Knappp, Pierre Tabard et Aurélien Recoing, ce mime et clown a  rejoint le Crique du Soleil  pour le spectacle Saltimbanco et  en 2003 a travaillé pour l’association Clowns sans frontières. On l’a vu aussi chez Brigitte Jaques  et cirque Bouglion avec des extraits d’Imagine-toi son spectacle le plus connu et pour lequel il avait reçu le Molière de la Révélation théâtrale masculine. Ici, c’est une nouvelle histoire muette qu’il entreprend de nous raconter avec d’étonnants bruitages qu’il produit lui-même vocalement par le biais d’un petit micro sur la joue : une sorte de pustule toujours trop grosse, donc très laide…

Julien Cottereau a un sacré métier et cela se voit dès qu’il entre en scène. Avec une gestuelle qui fait penser à celle du mime Marceau, une référence en la matière. Et quand il choisit dans la salle des partenaires, il ne se trompe pas : comme ce jeune Chinois qui se révèle être un mime fabuleux,  un professionnel ?   Ou une jeune femme qui accepte de monter avec lui sur un fil imaginaire (là, c’est sûr une danseuse ou au moins  une pro du spectacle en tout cas).  Ce soir-là, il y avait un tel échange entre elle et lui qu’on avait la nette impression qu’elle était sa complice depuis longtemps. On nous a dit non pas du tout… Dans ces moments exceptionnels, la magie opère.

Oui, mais voilà: ce spectacle d’une heure, dans la mise en scène actuelle, est encore trop brut de décoffrage. Et même si les spectateurs au festival Avignon in et off sont traditionnellement indulgents, il faudrait resserrer et préciser les choses. On voit bien qu’il s’agit  ici du thème de la transmission mais beaucoup de moments restent flous…  Et quand Julien Cottereau joue du violon (mais la chaleur était telle dans cette salle mal climatisée  qu’il était obligé de s’essuyer sans arrêt la sueur sur son visage!),  il mime trop grossièrement le jeu des doigts sur les cordes de son instrument.  Et il y a plusieurs fausses fins et une avalanche de fumigènes qui n’a  rien à faire là. Et le metteur en scène aurait pu nous épargner ces sorties du mime escaladant les rangées de fauteuils: un gag usé jusqu’à la corde… Bref, il a encore du pain sur la planche avant les représentations au Lucernaire à la rentrée. Attention! Le public parisien, lui, est beaucoup plus exigeant…

Philippe du Vignal

 La Luna, 1 rue Séverine, Avignon à 20h jusqu’au 28 juillet . T.: 04 90 86 96 28.

Why, mise en scène Peter Brook et Marie-Hélène Estienne


Why
,  mise en scène de Peter Brook et Marie-Hélène Estienne

Hayley Carmichael, Katryn Hunter et Marcello Magni s’interrogent sur la création du monde. «There shall be theatre ! Qui d’entre nous est le plus important? » Ils demandèrent de l’aide à Dieu, il écrivit un mot sur un papier, l’ange l’emporta, le message fut oublié. Sur le mur une projection : « Pourquoi donnons nous notre vie au Théâtre ? Printemps, été, automne, on veut le résultat trop vite. Pourquoi et comment faire du théâtre ? Piscator, Craig, Stanislavski, de ce rien, la vie va naître. » (…) « Je sais ce que le théâtre ne doit pas être… ». Les comédiens font des exercices pour les spectateurs : «Je suis morte plus de cinq cent fois au théâtre, le public opprime et terrifie l’acteur ! » Puis ils prennent deux spectateurs et les installent sur des chaises : « Je veux inventer une mise en scène sans mise en scène. Un acteur a dit: « Catastrophe, on n’a rien donné qu’une seule phrase. Le meilleur auteur, c’est celui qui ne donne pas d’indication scénique ! »

Un comédien jette une clef parmi les spectateurs. « Meyerhold c’était un pirate des mers du sud entouré par son équipe ! Maïakowski rentra à Moscou pour avoir une balle dans le cœur en 1930 : «Maintenant que je suis mort, entendez-moi rugir. » (…) Nicolas Erdman arrêté et envoyé dix ans en exil. Il écrit des films pour enfants. On ferme le théâtre de Meyerhold.  Le chemin vers la simplicité n’est pas facile, la solitude n’est pas bonne pour l’homme. Stanislavski lui propose de travailler avec lui.

Une grande photo de Meyerhold est projetée, Zinaida Raikh est assassinée et  le théâtre de Meyerhold est fermé en 1938 sous prétexte de faux aveux extorqués. « Il ne croit pas en Dieu, mais il croit en la vérité, ma vérité, elle l’a déjà emporté ! » Du vrai, du beau théâtre documentaire du très grand Peter Brook.

Edith Rappoport

Théâtre des Bouffes du Nord,  37 bis boulevard de la Chapelle, Paris (X ème) jusqu’au 13 juillet. T. :  01 46 07 34 50.

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