Autobiography, chorégraphie de Wayne McGregor

Festival d’Avignon

Autobiography, chorégraphie de Wayne McGregor

© Andrej Upanski

© Andrej Upanski

Résident permanent au Sadler’s Wells de Londres, où il travaille avec le Royal Ballet depuis 2006, il est le chorégraphe contemporain le plus connu en Grande Bretagne. Et honoré du titre de Commandeur de l’Ordre de l’Empire britannique pour services rendus à la danse. Son style, très physique lui permet de créer une œuvre très esthétique mais un peu froide sur le plan émotionnel. Il cultive avec la science un lien étroit, en particulier pour cette pièce, créée en 2017 et composée de vingt-trois séquences issues de son patrimoine génétique : les vingt-trois  paires de chromosomes qui constituent la marque d’un individu. Nous découvrions donc autant d’éléments intimes de sa vie.

D’un soir à l’autre, les séquences se combinent, donnant lieu à un spectacle à géométrie variable. Transformer son ADN en chorégraphie est un challenge  pour les  dix interprètes, puisque la configuration de cette pièce se réinvente à chaque représentation, donc unique… Les danseurs, d’une qualité exceptionnelle, ont des mouvements rapides. Aitor Throup a conçu des costumes souples et fluides  qui font penser à ceux du couturier Yohji Yamamoto. Les lumières de Lucy Carter sont intenses, précises comme des rayons laser et forment, avec la fumée qui navigue de jardin à cour, un bel écrin. Elles concourent avec la musique électronique new age de Jerrilynn Patton dit Jlin,  à l’écriture nerveuse de Wayne McGregor.

Une scénographie mouvante s’adapte aux différents tableaux présentés: des cintres, pend une structure métallique constituée d’une succession de pyramides inversées, « version triangulaire de l’A.D .N. » selon le chorégraphe ; de hauteur inégale, elles obligent parfois les danseurs à se mouvoir au ras du sol. «Nous voulions être très rigoureux et disciplinés, comme  l’est l’A.D.N., dit Wayne McGregor. Nous avons construit un dispositif de lumières qui puisse bouger à l’intérieur d’un système fixe et souhaitons travailler à l’intérieur de ce cadre mais ne pas aller au-delà». Le public de cette première a assisté à un vrai ballet du XXI ème siècle …

Jean Couturier

Gymnase du lycée Saint-Joseph, rue des Teinturiers, Avignon, à 22h, jusqu‘au 23 juillet

 


Archive pour 19 juillet, 2019

Mauerspringer (« Sauteurs de murs ») à Bilbao

Mauerspringer ( « Sauteurs de murs ») à Bilbao 

E2B3C580-9DE7-4402-878F-DD5BBC02D9F7Cette opération est soutenue par l’Union européenne, dans le cadre de son appel à projets Creative Europe-Culture Sub-programme (2014-2020). Plusieurs milliers d’initiatives en faveur des demandeurs d’asile ont lieu  partout à travers le monde mais personne n’est capable de les recenser et la Presse, en général, préfère  évoquer la  construction de murs, plutôt que ce généreux élan.Les artistes participent un peu partout à un gigantesque élan de solidarité. Partout aussi sont ainsi créés des spectacles pour tenter de réveiller les consciences, comme parfois -mais pas suffisamment- la Presse le fait. Dans dix ans, dans vingt ans… on parlera peut être de tous ces “Justes”? Et il faut espérer qu’un tribunal international jugera un jour les chefs d’Etat et leurs complices pour leur égoïsme meurtrier: ils auront laissé mourir avec cynisme des milliers de gens fuyant leur pays. Le Teatro due mondi à Faenza en Italie a donc réussi à mettre en route cette opération en impliquant sept compagnies de six pays. Nom de code: Mauerspringer (en allemand: les Sauteurs de murs). Avec Hortzmuga à Bilbao, Dah teatr à Belgrade en Serbie, le Teaterlabor des Allemands de Bielefeld, la Compagnie du hasard à Feing et le Théâtre de l’Unité à Audincourt, en France, l’Academia Ruchu de Pologne et enfin le Teatro due Mondi italien à Faenza, près de Ravenne.Chacune de ses compagnies prépare une action ou un spectacle et le final aura lieu dans cette dernière ville au début septembre…Un temps fort vient d’avoir lieu à Belgrade, puis à Bilbao. Ce sera ensuite à Feing près de Blois, les 26 et 27 juillet et enfin à Bielefeld, fin août. Des échanges enrichissants ont lieu et on y a analysé les démarches de spectacles qui sont prêts à être joués. On parle toutes les langues et chacun est traducteur à tour de rôle. Avec des questions comme: jouer devant des gens déjà convaincus, cela sert-il à quelque chose? Comment faire bouger les Etats indignes ? Comment agir sur les mentalités?  De belles rencontres, où l’on voit que toutes ces troupes habitent un seul et même pays : le théâtre de combat…

Edith Rappoport

Rencontre à Bilbao,  les 7, 8 et 9 juillet.

Teatro Due Mondi, via Guglielmo Oberdan 9/a, 48018 Faenza RA, Italie. T. : 39 0546 622999.

Le doux parfum des jours à venir de Lyonel Trouillot, mise en scène de Christine Matos

©matos-marie-laure

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Le doux parfum des jours à venir de Lyonel Trouillot, mise en scène de Christine Matos

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©matos-marie-laure

En donnant naissance à sa fille, cette femme s’est sentie renaître: « Comme si j’avais eu deux enfants, la première née de moi, Toi, la deuxième, née de toi, Moi .» La metteuse en scène a donc conçu un spectacle à deux voix : une comédienne et une chanteuse se partagent le texte du grand auteur haïtien. Un poème dramatique dense et rythmé, organisé en séquences avec des phrases qui reviennent comme des leitmotivs musicaux. Une écriture pleine de parfums: celui de la honte, et les douces effluves des rêves inventés par la mère pour bercer son enfant ; «cette odeur de fruit pur, de rosée franche ».

Avec une extrême douceur, elle évoque sa vie marquée par la violence : celle des hommes et celle de la Nature. Elle a traversé la guerre, erré dans des paysages dévastés par les cyclones et les sécheresses, dans des cités délabrées aux quartiers sordides. Des bourreaux ont marqué sa chair, du sceau de la honte… Mais le texte ne descend pas jusqu’à ces enfers : il file la métaphore du parfum, pour le meilleur et pour le pire. Le doux parfum des jours à venir que délivrent ces interprètes, s’accompagne des compositions épurées de Laure Donnat. La chanteuse joue de plusieurs instruments et sa voix chaude berce ou se révolte, en créole, espagnol, français… La scénographie: rideaux et drapés de tissu rouge et blanc, évoque le cocon maternel mais quelques objets du vaudou rôdent aussi dans l’ombre, d’une inquiétante étrangeté…

Cette pièce tranche par sa douceur avec les nombreux spectacles qui, à Avignon, traitent des mêmes thèmes. Marie-Audrey Simoneau et Laure Donnat forment un duo délicat et puissant dont les éclats de colère restent en sourdine. Il y a une forme de résilience chez cet écrivain engagé qui a tant et si bien chanté son pays meurtri. Ici, aux violences qu’elle a subies, cette mère oppose une parole d’espoir : «Et tu marcheras seule vers la conquête de ton essence. N’oublie pas, mon amour. Le paradoxe du parfum, c’est qu’il libère ce qu’il capture. Capture la vie et libère-la. » Un message qui nous fait du bien.

Mireille Davidovici

Maison de la Poésie, 6 rue Figuière, Avignon (Vaucluse). T. 04 90 82 90 66, du 17 au 28 juillet à 18 h 45.

Le texte est publié chez Actes Sud et inaugure la collection Essences, les réminiscences olfactives embaument le texte entier.

Here and Now, une performance de Trân Tran

© Julien-Gremaud

© Julien-Gremaud

Festival d’Avignon OFF

Here and Now, une performance de Trân Tran

 Une femme aux allures de garçonne et son ombre bien féminine, genre Irma Vamp du cinéaste Louis Feuillade, doublée d’une voix off intervenant en direct. Trois présences insolites qui coïncident en une femme composite. Ainsi apparaissent Trân Tran et ses deux acolytes : la danseuse Pauline Raineri et la comédienne Claire Deutsch , en coulisse, pour dire le texte. Cette voix unique s’adresse  tout de suite au public .

 Après nous avoir expliqué son nom et son prénom, identiques pour nous, mais prononcés différemment et nous avoir présenté sa grande famille vietnamienne avec un film amusant projeté sur un écran en fond de scène, Trân Tran  demande : « Pourquoi  êtes vous ici aujourd’hui ?  » et elle propose un jeu. Nous devrons répondre aux motivations qui  s’affichent sur l’écran : «Pour rire ? S’émouvoir ? Découvrir une histoire ? Le sexe ? Un rendez-vous galant ? Être surpris ? Voir quelque chose de mauvais goût ? etc. » La liste s’allonge de manière à échafauder une performance de cinquante minutes.

Le public démarre au quart de tour et chacune de ses interventions trouve sa réponse en une séquence orchestrée par cette étrange figure à une voix et deux corps. Trân Tran et l’ombre noire cagoulée, souvent plus prompte et dont on apprécie la danse souple, vont puiser les objets idoines, souvent insolites, dans des cartons empilés à cour.

 

©© Julien-Gremaud

© Julien-Gremaud

Costumes et accessoires que la metteuse en scène a elle-même conçus renvoient à une esthétique de bazar: un grand vagin en feutrine surmonté d’un clitoris glorifie le plaisir féminin ; une frite géante, gonflée par une soufflerie pointe vers le public à  : «On vient pour avoir la frite  » . Un bâton qu’on manie les yeux bandés représente la violence aveugle exercée contre les homosexuelles. Ce kitsch affirmé et cet humour décalé et pétillant déclenchent les rires et l’adhésion des spectateurs.

 L’artiste ne se prend pas au sérieux mais aborde des questions graves comme la discrimination des lesbiennes, la violence machiste et n’hésite pas à parler d’elle, de ses inclinaisons sexuelles et de ses racines asiatiques…  Elle conclut le spectacle par un message d’amour : «Be kind to one another » (Soyez bons les uns envers les autres). Ce spectacle faussement interactif -tout est bien rangé dans des cases et les réponses sont prêtes à l’emploi- a tout pour plaire. Here and now: ici et maintenant, on s’amuse. Pourquoi pas ? On est sans doute venu aussi pour ça.

 La jeune artiste, formée à l’Ecole Cantonale des Arts de Lausanne (E.C.A.L.), s’inscrit dans une veine performative. Elle maîtrise parfaitement les codes et joue astucieusement de cette triple figure aux actions synchrones ou décalées. D’aucuns trouveront le spectacle racoleur mais cette pièce séduisante, lors de son passage éphémère à Avignon, permettront sans doute à Trân Tran de développer ses autres  projets.

 Mireille Davidovici

 Spectacle vu le 18 juillet au Train Bleu, 40 Rue Paul Sain, 84000 Avignon (Vaucluse) T04 90 82 39 06 Dans le cadre de la programmation suisse

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