Festival international des arts de la rue à La Chaux-de-fond

Festival international des arts de la rue à La Chaux-de-Fond (Suisse)

Don’t worry par la compagnie du Long Raccourci

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Un duo sur la blessure physique: les acteurs, un genou bandé pénètrent en boîtant dans l’espace de jeu et s’écroulent sur une chaise, font des gestes sur une chanson : Don’t worry, be happy !  Le garçon se dandine devant la fille assise qui se lève aussi en boîtant. Elle marche sur les mains, fait la roue et le grand écart, semble disloquée.

Son partenaire la soulève et la reconstruit. Ils font le pont, puis le poirier et s’entremêlent. «Jeux de mains, jeux de pieds, chaque jour, nous en apprenons un peu plus. » Ils font un commentaire sur le fonctionnement de leur corps : «Le genou, articulation charnière, le ménisque, un jeu de construction. Nous allons à la rencontre des ligaments croisés ! » Puis ils dansent à genoux, jonglent avec des boîtes. « Trois mois d’attente pour une I.R.M., si ça se trouve, ils se sont trompés de côté ! « (…) « Allo, bonne nouvelle, on a retrouvé votre ménisque, il va pouvoir retrouver son articulation ! » Ce joli duo acrobatique est teinté d’une agréable ironie…

Ils étaient plusieurs fois par la compagnie Bougrelas (France)

Devant une urne funéraire, une fille fait l’éloge d’une  future défunte: Catherine Gaber, sa mère. On doit répéter les obsèques et on entend un éloge ampoulé puis le cortège funéraire s’ébranle. Le maître de cérémonie, aux commandes d’une tribune à roulettes, harangue la foule en se trémoussant. Nous le suivons jusqu’à un garage où nous écoutons un discours sur les événements de 1968 : «Nous sommes dans le lieu où Helvétia a fait ses premiers pas… » On nous distribue le texte d’une chanson à la mémoire de Catherine Gaber. Une vieille femme et une jeune fille chantent en italien leur pays natal qu’ils ont dû fuir à cause des dettes du père. Cette répétition d’un enterrement à venir nous a laissé perplexe, même si une foule suit le cortège…

Amor par la compagnie Bilbobasso (France)

Un duo flamboyant sur les amours étincelantes d’un couple qui s’aime, se provoque, se dispute puis se sépare. Le feu jaillit du moindre geste de l’homme et submerge la femme qui parvient toujours à s’en échapper. On croit assister à de la magie pure et on se demande comment ces artistes réussissent à s’échapper de ce feu dévorant. Une étrange allégorie sur les crises de couple.

Le Jeu de l’Amour et du hasard  revisité par la compagnie suisse Bagatelle

Un voyage sans aucun décor ni costumes, à travers les scènes de ménage extraites de grands textes de Marivaux, Victor Hugo, Ionesco et Molière…  On prend du plaisir à repérer les auteurs, subtilement interprétés ici devant un temple, en haut de la Chaud-de-Fond.

Sitting Duck par Chiringuito Paradise (Belgique)

On dévoile un stand où Monsieur Bony et Monsieur Almondo préparent des cocktails pour une vingtaine de personnes. Ils jonglent avec des verres sur un plateau, lancent un tabouret, puis entament une course-poursuite dans la baraque. L’enseigne tombe, un garçon s’effondre sur les verres, l’autre le relève. Une chorégraphie fondée sur le ridicule, accompagnée d’extraits de musique classique qui nous a bien fait rire.

Pierre et Marie célèbrent l’amour par la compagnie Marche ou Rêve de Toulouse

Un couple d’enseignants catholiques chante pour la paix. «C’est la première fois que nous allons interpréter notre chant dans votre paroisse ! » Ils l’interprètent plutôt mal.  « Nous sommes tous les deux enseignants dans un lycée catholique? » Ils se trémoussent, entonnent quelques vieux tubes comme Non, ne rougis pas, ne pleure pas, tu as, tu as toujours de beaux yeux. La femme finit sur 25 rue de la Grange aux Loups. Un petit spectacle, amusant par son côté ridicule comme le précédent, et très efficace.

Spectralex  par la compagnie Olaf Nichte

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Un homme en chasuble noire est aux manettes de la musique, l’œil sombre. Un autre emperruqué, drapé dans un costume foutraque qu’il ne cesse de perdre, fait des gestes lents, s’agenouille, tape sur un gong avec un os. «Ce que vous voyez, ce n’est pas moi, mais une image holographique. » (…) « Je suis le comédien céleste, je n’apparais que tous les cent cinquante ans avec la planète Altaïr! En 2.752, la Terre risque d’exploser ! »

Il apostrophe les spectateurs qui sortent, perd sans cesse le renard dont il est coiffé, court de long en large. «A quoi sert d’être des dieux, si nous ne pouvons pas avoir des chips ? « (…) « La barbarie  ne doit pas pénétrer dans la ville  ! » (…) « Ma vie n’est que confusion et malheur! » Mais ce discours haletant est un peu incohérent et lassés, nous sommes partis avant la fin…

Comme un vertige par la  compagnie Avis de Tempête (France)

Un couple d’acrobates sidérants s’envolent sur une immense structure métallique, accompagné par deux musiciens qui rythment leurs prouesses à cour et à jardin. Louise Faure et son partenaire nous coupent le souffle avec leurs ascensions et écroulements vertigineux.

Edith Rappoport

Spectacles vus les 4 et 5 août, Plage des Six Pompes, à La Chaux-de-Fonds (Suisse).

 

 


Archive pour 7 août, 2019

Festival d’Avignon: Le Champ des possibles (Élise : chapitre trois) de et par Elise Noiraud

Festival d’Avignon

Le Champ des possibles (Élise : chapitre III) de, et par Elise Noiraud

PHOTO-LE-CHAMP-DES-POSSIBLES-VERTICALE-3 Une trilogie haute en couleurs. Après La Banane américaine et Pour que tu m’aimes encore, chapitre deux, joué plus de deux cent cinquante fois, voici Le Champ des possibles créé cette année au Théâtre de la Reine Blanche à Paris.

 

Les étapes d’une vie: enfance, adolescence, passage à l’âge adulte avec  cette trilogie tragi-comique, intime et universelle à la fois, à la verve originale: Élise Noiraud orchestre avec malice, tendresse et douleur aussi ces  trois phases inspirées de ses expériences… Rire et chagrin, véritable chant à la vie avec ici, comme dans ses précédents spectacles rythme, esprit et voix ! Une  épopée auto-fictionnelle avec laquelle  nous éprouvons éprouve un vrai partage. Élise Noiraud évoque des tranches de vie et chaque génération peut entrer bon gré mal gré en complicité avec son personnage et ses proches.  Une tragi-comédie reflétant avec justesse l’évolution des mœurs et des rapports inter-générationnels…

 L’installation, La construction, L’effondrement, La séparation…  Élise, jeune fille d’un village de Poitou-Charentes a dix-huit ans et son bac en poche: l’avenir désormais s’ouvre à elle. Quitter sa famille, « monter » à Paris, trouver un logement, choisir et entreprendre des études… En trois mots : devenir adulte ! Et prendre la vie à bras le corps, comme bon lui semble. Elle nous raconte ainsi son entrée à l’Université, sa découverte de Paris et ses expériences de petits boulots: garde d’enfants chez des bourgeois insupportables et ridicules, etc. Au bout de ce parcours initiatique, une révélation, un presque miracle : le théâtre !

Le public, pris sous le charme d’Élise Noiraud, est ému et joyeux. Rien de ce passage à l’âge adulte, n’échappe à l’œil critique, à l’humour et la sensibilité aiguisée de l’auteure, seule en scène. Dans un espace noir, juste une chaise et quelques jeux de lumière lui suffisent à passer d’un personnage à l’autre : mère possessive, aimante et névrosée, tante hystérique, grand-mère envahissante, copains puis agent immobilier vulgaire et opportuniste: «Excusez-moi (l’agent immobilier décroche son téléphone) Ouais, Majid. Ouais (…) C’est pas un bidet, cinquante centimètres, c’est une baignoire. Et c’est 900, hein. Avec baignoire, on passe à 900. Ouais, ouais, ils vont essayer de te la faire à l’envers mais c’est 900. Ben, ils ont qu’à acheter une bassine. »
Et le personnage d’Élise, jeune fille idéaliste, angoissée et enthousiaste : «Je suis une jeune femme pleine d’énergie, vive et débrouillarde. Si vous acceptez ma candidature, soyez certains que je saurai mettre mes qualités humaines au service de votre Université. Je sais que ma faculté de rattachement se trouve à Poitiers mais je veux aller à Paris, car c’est une ville qui m’a toujours attirée et parce que, là-bas, il y a tout. », écrit-elle dans sa lettre de motivation, en vue de son inscription en lettres à Paris-Sorbonne.

L’auteure-interprète a su mettre les mots et trouver une veine de langage très personnelle dans une série de portraits pleins d’esprit.  Avec humour et imagination mais aussi humanité. Depuis La Banane américaine, Élise Noiraud façonne avec dextérité son personnage, comme ici, dans ce troisième et dernier chapitre où elle est habitée par ce désir de liberté sans fin, si propre à la jeunesse. Au risque de le payer cher. On ne revient jamais en arrière… Tout cela exprimé ici dans une relation mère/fille, à travers des situations en apparence banales et connues de tous. Non-dits, silences, rires et cris en disent long et c’est une des forces et toute la subtilité du spectacle.
Elise Noiraud laisse les paroles surgir de la bouche des personnages, le plus souvent d’une spontanéité ravageuse ou touchante, quelquefois pathétique. Et la gestuelle expressive de cette acrobate du langage comme du corps, font de ce solo et de sa thématique : enfance et jeunesse face au monde, un spectacle fin et touchant mais sans cadeau. Elise Noiraud se rit de nous, les adultes, de nos convictions, proches parfois de la bêtise et nous nous laissons surprendre, réfléchir, grâce à cette série d’images de toute une jeunesse encore à l’écoute de l’enfance et de sa beauté. Du théâtre, un conte, du cabaret poétique.
Tout un champ des possibles, tout le champ de la vie !

Elisabeth Naud

Du 5 au 28 juillet, Théâtre Transversal, 10, rue Amphoux, Avignon. T. : 04 90 86 17 12

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