Rosa Luxemburg Kabarett, texte et mise en scène de Viviane Théophilidès
Rosa Luxemburg Kabarett, texte et mise en scène de Viviane Théophilidès
L’auteure, metteure en scène et comédienne pensait depuis longtemps à recréer la célèbre militante politique qui fut assassinée par les Spartakistes. Et il y avait eu déjà une première version de ce spectacle au festival d’Avignon 2017 (voir Le Théâtre du Blog). Viviane Théophilidès a dessiné un portrait intuitif de cette icône mythique révolutionnaire.
«Rosa Luxemburg, née à Zamosc, le 5 mars 1871, en Pologne alors annexée par l’empire tsariste, dut quitter Varsovie pour Zurich où elle fit de brillantes études et devint aussi membre du Groupe des pairs où se retrouvaient des émigrés révolutionnaires polonais. Parmi eux Léo Joguiches dont la rencontre marqua toute la vie privée et publique de Rosa (…). L’un et l’autre étaient juifs et fondèrent « la cause ouvrière », que Rosa rédigeait avant de partir pour l’Allemagne en 1898. » Ainsi s’exprimait Jack Ralite (1928-2017), longtemps maire d’Aubervilliers, ancien ministre, fondateur des Etats-Généraux de la Culture, que cite la metteuse en scène.
Rosa s’oppose là-bas au militarisme allemand, se lie avec Karl Liebknecht qui fut assassiné avec elle. En août 1914, après le vote des crédits de guerre par les députés sociaux-démocrates, Rosa Luxemburg connaît un moment de désespoir dans sa lutte sans fin contre les «Obscurants». Elle aura fait, entre Pologne et Allemagne plusieurs séjours en prison: des résidences forcées où elle écrira ses ouvrages et ses fameux discours. Libertaire, opposée aux courants nationalistes, cette femme politique était curieuse du monde: art, histoire, économie, sciences, géologie, ornithologie, plantes….
Sur le plateau nu de théâtre, quelques accessoires : des couvertures, livres et objets… Les interprètes habités par l’Histoire, participent à ce cabaret à l’allemande aux courtes scènes dialoguées, avec des chansons et sketches aux anachronismes délibérés. Comment prendre la mesure de l’influence qu’eut à l’époque cette icône politique ? L’auteure émue évoque sa ville originelle de Poissy (Yvelines) et la haine de son grand-père pour Pétain, un traître selon lui comparable à Hitler et Staline. Le spectacle passe du XX ème au XXI ème siècle et Viviane Théophilidès essaye d’élucider un présent qu’elle a du mal à comprendre et dont elle est déçue…
Les interprètes font résonner une partition originale, à la fois poétique et musicale selon les arrangements précis de Géraldine Agostini aux claviers et au chant. Et la vivante et gaie Anna Kupfer chante en allemand, en yiddish, en tzigane ou en français. D’un poème de Mörike ou d’une mélodie de Hugo Wolf, on se laisse emporter par les chansons de Viviane Théophilidès, musique de Géraldine Agostini et de Jacques Labarrière, par une complainte yiddish ou les paroles de La Fête continue de Jacques Prévert, musique de Joseph Kosma, L’Hirondelle, un poème de Louise Michel et enfin par un chant tzigane bien enlevé. Entre mélancolie et sourire, Viviane Théophilidès réussit à nous émouvoir avec cette évocation du personnage historique qui participa aux mouvements ouvriers révolutionnaires …
Véronique Hotte
Les Déchargeurs, 3 rue des Déchargeurs Paris (Ier), jusqu’au 1er février. T. : 01 42 36 00 50.