©christophe martin
Détails de Lars Norén, traduction de Camilla Bouchet et Amélie Wendling, mise en scène de Frédéric Bélier-Garcia
Lars Norén, auteur suédois né en 1944, publia ses premiers recueils de poèmes à dix-neuf ans : Lilas, Neige, Résidus verbaux d’une splendeur passagère. Un an plus tard, il fut admis à l’hôpital psychiatrique pour schizophrénie et écrivit alors plusieurs livres sur cette douloureuse expérience. En 1973, publia une pièce Le Lècheur des princes.
Son théâtre d’inspiration autobiographique est proche de ceux d’August Strindberg, Eugene O’Neill ou Ingmar Bergman, avec des situations familiales ou sociales, psychiques tendues. Avec Oreste en 1980 à Stockholm, Lars Norén devient un dramaturge reconnu en Suède et dans les pays scandinaves… En France, ses pièces ont été traduites et souvent montées, notamment par Jean-Louis Martinelli qui avait créé Personkrets, Kliniken, Calme et Détails dans une remarquable mise en scène (2008) avec Marianne Basler et Stéphane Freiss. L’auteur, lui, avait mis en scène une de ses dernières pièces Poussière il y a deux ans à la Comédie-Française (voir Le Théâtre du Blog).
Ici, cela se passe dans les années 1990… Emma, une jeune apprentie-écrivaine de vingt-sept ans est venue rencontrer Erik, un éditeur qui parait assez chaleureux mais qui en fait a un certain cynisme , même s’il se veut drôle. Elle a envoyé son premier roman mais il ne lui a jamais répondu. Commencera vite une histoire d’amour, même si Emma, encore mariée, va divorcer, et a déjà une liaison avec Stefan, un jeune dramaturge de trente et un ans qui se retrouvera aux urgences d’un hôpital pour de graves insomnies. Où un médecin Ann, la femme d’Erick -ils ont tous les deux la quarantaine- va le soigner…
Pendant dix ans- la date s’inscrit à chaque fois en vidéo sur le décor- on va suivre ce quatuor intello-bobo qui lit Paul Auster, va dans les cafés branchés, fait du sport et suit l’actualité artistique contemporaine. Dans de très courtes scènes, seuls ou en couple (mais les combinaisons restent limitées à onze ce qui les fait revenir assez souvent!), ces personnages vont se retrouver, par hasard, ou au gré des circonstances. A Stockholm surtout, avec Erick et Stephan dans une salle de sport ou une librairie où Emma travaille pour gagner sa vie et retrouve Stephan. Mais aussi par hasard, à Florence où ces couples visitent le Musée des Offices et se retrouvent devant La Vénus d’Urbin (1538) du Titien, très sensuelle avec son regard posé sur le visiteur. Ou à New York où Erik est allé travailler et où il retrouve Emma. Les couples se font et se défont réciproquement. Union, désunion: à quoi bon et quelle différence à la fin, semblent-ils penser, chacun lourd d’expériences douloureuses… «Plein de petits riens, dit Frédéric Bélier-Garcia, finissent par dessiner la Vie, selon l’angle sous lequel on les observe. »
Ce théâtre d’inspiration autobiographique est proche de ceux d’August Strindberg, Eugene O’Neill ou Ingmar Bergman, et où le climat psychique sous des airs de grande politesse reste toujours très tendu, et cela quel que soit le sexe ou les relations conjugales. Avec Oreste en 1980 à Stockholm, Lars Norén devient un dramaturge connu en Suède et dans les pays scandinaves… En France, ses œuvres ont été traduites et souvent montées, notamment par Jean-Louis Martinelli qui avait créé Personkrets, Kliniken, Calme et Détails en 2008 dans une remarquable mise en scène avec Marianne Basler et Stéphane Freiss. L’auteur, lui, avait mis en scène une de ses dernières pièces: Poussière, il y a deux ans à la Comédie-Française (voir Le Théâtre du Blog).
Ici, cela se passe dans les années 1990… Emma, une jeune apprentie-écrivaine de vingt-sept ans est venu rencontrer Erik, un éditeur assez cynique et qui se veut drôle. Elle a envoyé son premier roman mais il ne lui a jamais répondu. Commencera vite une histoire d’amour, même si Emma encore mariée va divorcer et a déjà une liaison avec Stefan, un jeune dramaturge de trente et un ans qui se retrouvera aux urgences d’un hôpital pour de graves insomnies. Et là qu’un médecin Ann, la femme d’Erick -ils ont tous les deux la quarantaine- qui va le soigner…
Pendant dix ans- la date s’inscrit à chaque fois en vidéo sur le décor- on va suivre ce quatuor intello-bobo. Et que ce soit à Paris ou dans les capitales européennes, il a le même style de vie, lit les romans de Paul Auster, fait du sport et suit l’actualité artistique contemporaine. Dans de très courtes scènes, ils sont en couple ou à trois mais les combinaisons restent limitées, ces personnages vont se retrouver, par hasard ou au gré des circonstances. A Stockholm avec Erick et Stephan dans une salle de sport ou dans une librairie où Emma travaille pour gagner sa vie et retrouve Stephan. Mais aussi par hasard, à Florence où les deux couples regardent ensemble La Vénus d’Urbin au Musée des Offices à Florence. Ou à New York où Erik est allé travailler et retrouver Emma… Les couples se font et se défont réciproquement. Union, désunion… à quoi bon et quelle différence semblent-ils penser, chacun lourd d’expériences douloureuses… « Plein de petits riens, dit Frédéric Bélier-Garcia, finissent par dessiner la Vie, selon l’angle sous lequel on les observe ».
L’auteur suédois sait en effet avec une grande habileté et à coup de petites touches apparemment sans importance, tisser une trentaine d’ instants de la vie quotidienne qu’un détail peut vite faire basculer. De ces couples, l’un a déjà un passé et l’autre vient de se créer mais tous les quatre, sont blessés à vie, à la limite psychotiques et l’un souffre de ne pas avoir d’enfant. Ils n’arrêtent pas de se mentir et de se mentir… Souvent proches des fameux personnages de Qui a peur de Virginia Woolf d’Edward Albee.
Et ici, cela donne quoi ? Isabelle Carré, Ophélia Kolb, Laurent Capelluto et Antonin Meyer-Esquerré sont heureusement là et créent des personnages tout à fait crédibles dont on suit avec intérêt… mais pendant quarante minutes seulement les hésitations, la brutale indifférence à l’autre, les revirements, l’ amour et la jalousie, au gré des détails de ce qu’ils vivent au quotidien: « Ce miroir déformant, écrivait Cervantes, qui grossit les détails insignifiants, transforme les nains en géants et les soupçons en vérité.” Autrement dit l’auteur porte le fer là où cela fait mal: pourquoi un couple amoureux en en arrive, quelques années plus tard, à se déchirer, voire à se retrouver plus ou moins… “ Tout le monde dit Lars Noren, a l’expérience de tomber amoureux, celle de vivre une relation, de se séparer, de se sentir coupable, de vivre dans un petit monde comme celui de la culture par exemple… Tout le monde se connaît, vous pouvez retrouver votre ex-petite amie avec votre ex-meilleur ami etc. On connaît tous ça.” (…)Mais je pense qu’on se reconnaît dans ce que j’écris, parce que j’écris sur le monde d’aujourd’hui. Celui où l’on vit. »
Mais ensuite ce texte qui ne manque ni d’intelligence ni de grâce devient assez répétitif dans sa structure: cela doit faire une douzaine de combinaisons de personnages et fait du sur-place: cela se sent peut-être moins à la lecture mais devient pesant sur un plateau de théâtre… Et Frédéric Bélier Garcia a commis trop d’erreurs ou maladresses pour qu’on ait envie de s’intéresser aux dialogues de cette fable théâtrale contemporaine… qui semble déjà un peu datée. D’abord, pourquoi avoir accepté de jouer sur un aussi grand plateau où tout se perd, sous un éclairage parcimonieux… Et du coup, même avec des micros HF, les personnages semblent flotter dans ce trop grand espace. Surtout avec un texte aussi intimiste, souvent plus proche d’un dialogue de cinéma et trop long! Tout se passe comme si le metteur en scène a bien du mal à gérer cet espace inadapté. Et le tout, avec une certaine sécheresse et sans incarnation ni l’ombre d’une quelconque poésie. Comme les acteurs boulent souvent leur texte et que la diction n’est pas toujours au rendez-vous… forcément, on décroche. Et ces deux heures dix sans entracte auraient mérité de sérieuses coupes… Côté scénographie, rien de bien réussi: on voit mal la nécessité de ces quelques marches d’escalier avec portes battantes, comme de ces longues banquettes et de cette tout aussi longue table à roulettes charge de grands livres et que les accessoiristes n’arrêtent pas de remettre en place d’une scène à l’autre. Ce qui casse un rythme déjà difficile à tenir…
Bon, Détails (1999) n’est sans doute pas la meilleure des pièces du célèbre auteur suédois mais, à la relire, ces séquences mieux rythmées et situées dans un espace adapté, auraient sans aucun doute été plus efficaces. Il y a de rares moments forts comme celui où une une jeune femme entièrement nue arrive, très troublante, comme une mise en abyme, un double bien réel de la célèbre Vénus… Mais passées les premières quarante minutes, on s’ennuie. Le public a salué mollement et on le comprend… Un spectacle pour inconditionnels de Lars Norén, les autres pourront s’en dispenser.
Philippe du Vignal
Jusqu’au 2 février, Théâtre du Rond-Point 2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, Paris (VIII ème). T. : 01 44 95 98 00.