Ni Couronne ni plaque , conception et mise en scène de Janice Szczypawka

Ni Couronne ni plaque , conception et mise en scène de Janice Szczypawka

Jules Audry

Jules Audry

La mort, vaste question et éternel mystère…En réponse à l’ouvrage de Sophie Calle :   »Que faites vous de vos morts ? » Janice Szczypawka en a fait un spectacle. La disparition, plus précisément tout ce qui matériellement, accompagne le décès d’un défunt et son cérémonial sont au cœur de la pièce. Donner vie et représenter l’envers des funérailles ne manquent pas d’humour et ce n’est pas si courant dans le paysage théâtral.

En 2012, bouleversée et à la fois intriguée par le décès de sa grand-mère, elle observe l’ensemble des démarches pour ses obsèques. Quelques années plus tard, en 2017, la jeune artiste regarde un documentaire sur les croquemorts et « Ni couronne ni plaque dit-elle, naît alors de mon envie de traiter un fait universel et sociologique, à travers un rapport intime à la mort et une enquête de terrain au sein d’une entreprise de pompes funèbres lorraine.»

De nos jours, au XXI ème siècle, le décès d’un être et le rituel en hommage au mort sont traités de plus en plus comme un produit commercial. Ou au mieux, comme un moment de rassemblement où le sacré n’est pas mis à l’écart, mais où consciemment ou inconsciemment, il se manifeste avec le maximum de discrétion possible. Or le texte, et son manque volontaire de profondeur et de poésie, laisse sous-entendre cette réalité marchande et désacralisée, grandissante face au rituel de la mort. Et comme le dit Janice Szczypawka : «Ce spectacle a été conçu avec une démarche documentaire. Il est question d’individus qui existent réellement ou qui ont existé (…) et de la retranscription de leurs paroles. Je n’ai pas écrit une fable. » La transfiguration poétique malgré tout prend corps, portée par une belle mise en scène et une scénographie-installation réussie, ambiance cabaret. Si le spectacle révèle au public des pratiques souvent ignorées par le commun des mortels,  cette création  n’a rien de didactique ou moralisateur. Elle nous laisse découvrir  avec humour et une sensibilité crue, la boutique des pompes funèbres dans tous ses recoins. Style et couleurs bigarrées des costumes participent de cette esthétique festive, peu banale du repos éternel. La force du spectacle tient aussi pour beaucoup et trouve un rythme jubilatoire grâce aux comédiens. les trois actrices particulièrement sont formidables,  pour ne citer qu’elle, Juliette Blanchard, à travers ses regards et son mutisme… est un vrai bonheur.

Les « Cathy » créent au sein de cet univers singulier, un décalage inattendu, comique et absurde. Un point d’honneur au musicien, Tristan Boyer, à la stature de dandy. La bande-son, impeccable, intervient comme des interludes entre les scènes et diffuse une onde poétique, une tension… Un joli moment, où la préparation du défunt nous surprend  et nous instruit  mais nous laisse aussi de temps à autre perplexe. Choisir comme thème, la mort, pour une première création, ne manque pas d’audace ! Chapeau bas à Janice Szczypawka qui, avec ce spectacle, a remporté cette année la mention spéciale du prix Théâtre 13 /Jeunes metteurs en scène.

 Elisabeth Naud

Théâtre de Belleville 16, passage Piver, Paris  (XI ème). T. : 01 48 06 72 34, jusqu’au 25 février.

 


Archive pour 17 février, 2020

Ni Couronne ni plaque , conception et mise en scène de Janice Szczypawka

Ni Couronne ni plaque , conception et mise en scène de Janice Szczypawka

Jules Audry

Jules Audry

La mort, vaste question et éternel mystère…En réponse à l’ouvrage de Sophie Calle :   »Que faites vous de vos morts ? » Janice Szczypawka en a fait un spectacle. La disparition, plus précisément tout ce qui matériellement, accompagne le décès d’un défunt et son cérémonial sont au cœur de la pièce. Donner vie et représenter l’envers des funérailles ne manquent pas d’humour et ce n’est pas si courant dans le paysage théâtral.

En 2012, bouleversée et à la fois intriguée par le décès de sa grand-mère, elle observe l’ensemble des démarches pour ses obsèques. Quelques années plus tard, en 2017, la jeune artiste regarde un documentaire sur les croquemorts et « Ni couronne ni plaque dit-elle, naît alors de mon envie de traiter un fait universel et sociologique, à travers un rapport intime à la mort et une enquête de terrain au sein d’une entreprise de pompes funèbres lorraine.»

De nos jours, au XXI ème siècle, le décès d’un être et le rituel en hommage au mort sont traités de plus en plus comme un produit commercial. Ou au mieux, comme un moment de rassemblement où le sacré n’est pas mis à l’écart, mais où consciemment ou inconsciemment, il se manifeste avec le maximum de discrétion possible. Or le texte, et son manque volontaire de profondeur et de poésie, laisse sous-entendre cette réalité marchande et désacralisée, grandissante face au rituel de la mort. Et comme le dit Janice Szczypawka : «Ce spectacle a été conçu avec une démarche documentaire. Il est question d’individus qui existent réellement ou qui ont existé (…) et de la retranscription de leurs paroles. Je n’ai pas écrit une fable. » La transfiguration poétique malgré tout prend corps, portée par une belle mise en scène et une scénographie-installation réussie, ambiance cabaret. Si le spectacle révèle au public des pratiques souvent ignorées par le commun des mortels,  cette création  n’a rien de didactique ou moralisateur. Elle nous laisse découvrir  avec humour et une sensibilité crue, la boutique des pompes funèbres dans tous ses recoins. Style et couleurs bigarrées des costumes participent de cette esthétique festive, peu banale du repos éternel. La force du spectacle tient aussi pour beaucoup et trouve un rythme jubilatoire grâce aux comédiens. les trois actrices particulièrement sont formidables,  pour ne citer qu’elle, Juliette Blanchard, à travers ses regards et son mutisme… est un vrai bonheur.

Les « Cathy » créent au sein de cet univers singulier, un décalage inattendu, comique et absurde. Un point d’honneur au musicien, Tristan Boyer, à la stature de dandy. La bande-son, impeccable, intervient comme des interludes entre les scènes et diffuse une onde poétique, une tension… Un joli moment, où la préparation du défunt nous surprend  et nous instruit  mais nous laisse aussi de temps à autre perplexe. Choisir comme thème, la mort, pour une première création, ne manque pas d’audace ! Chapeau bas à Janice Szczypawka qui, avec ce spectacle, a remporté cette année la mention spéciale du prix Théâtre 13 /Jeunes metteurs en scène.

 Elisabeth Naud

Théâtre de Belleville 16, passage Piver, Paris  (XI ème). T. : 01 48 06 72 34, jusqu’au 25 février.

 

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