Un Enterrement de vie de jeune fille, texte du collectif Femme Totem, mise en scène d’Esther Van den Driessche et Arthur Guillot
Un Enterrement de vie de jeune fille, texte du collectif Femme Totem, mise en scène d’Esther Van den Driessche et Arthur Guillot
« Votre amie se marie ? Offrez-lui un moment dont elle se rappellera toute sa vie ! Optez pour la réalité virtuelle ! Une aventure inoubliable, originale et atypique. » Pour plus de détails, continuez sur Internet. Avec le marché du mariage, se développe celui de ses à-côtés, dont les « enterrements de vie de jeune fille ». Égalité oblige : les femmes prennent le relais, avec une cérémonie tout aussi transgressive mais conventionnelle et arrosée, que le bon vieil enterrement de vie de garçon.
Ce spectacle ne va pas chercher de ce côté là mais d’un aspect hérité du triomphe à la romaine : on raille (gentiment) l’héroïne du jour pour que les Dieux du bonheur ne soient pas jaloux, et surtout les amis font défiler devant elle les étapes de sa jeune existence. Qui est Alice ? Son frère Augustin va tirer le fil de sa vie, en toute complicité avec ses sœurs et amies. Alice est elle-même chercheuse ; pour son mémoire en sociologie, elle interroge tout un chacun (ou plutôt toute une chacune) sur le “nomadisme“ de ses désirs. Et elle tombe très vite amoureuse avec l’un de ses objets d’étude, la danseuse de cabaret Stella Arc-en-ciel. Où l’on voit qu’une enquête peut faire une entrée fracassante dans la vraie vie. Alice, saisie par l’amour, Alice, paralysée le jour de son audition de piano, oubliant sa thèse devant le jury pour respirer un grand coup. Un enterrement de vie de jeune fille pas piqué des hannetons et une tentative de mariage en rafting dans l’écume d’un torrent : la destinée n’est jamais là, où elle-même l’attend…
Bon, le scénario cahote un peu, les ellipses sont plutôt raides et on aimerait en savoir davantage et être emporté par un rythme plus dynamique. Comme si le spectacle était encore un travail en cours mais qu’ importe : il y a des moments de théâtre intenses, drôles, surprenants et cette bande de jeunes artistes déjà riche de belles expériences professionnelles laisse leur temps réel aux émotions. Inès de Broissia, Arthur Guillot, Mathilde Levesque, Alexandrine Serre et Esther Van den Driessche ont le culot de remettre les compteurs à zéro et de revenir aux sources de leur création collective. Avec ce travail sur le désir, autrement dit sur la vie -et son corollaire, la mort- il se passe quelque chose. Ce spectacle généreux avec une lucidité très contemporaine, nous laisse quelquefois en plan et ne répond pas à tout. Il a des manques mais est fort, a une vraie vitalité, pose de vraies questions et mérite donc le détour…
Christine Friedel
Théâtre de l’Atalante, 10 place Charles Dullin, Paris (XVIII ème), jusqu’au 9 mars. T. : 01 46 06 11 90.