Les confinés parlent aux confinés (suite et pas fin)

 

Sophie Vonlanthen, co-directrice de la Manufacture des Abbesses à Paris

 - Comment cela se passe pour votre théâtre?

 - Fermé bien sûr, comme les autres. Mais j’ai un avantage: comme j’habite au-dessus, j’y descends pour travailler, sans que mes enfants (quinze et six ans) ne m’accaparent… Mais comme tout le monde, nous ne savons pas ce qui va se passer dans le monde du spectacle et attendons les nouvelles! photo Sophie VonlanthenNous avions à notre programme un stage de formation A.F.D.A.S.  pour comédiens dirigé Jordan Beswick en anglais, un enseignant américain exceptionnel dont j’avais suivi les cours aux Etats-Unis. D’ici là, il pourrait faire une formation à distance comme il le pratique couramment mais faudrait-il que l’A.F.D.A.S et les acteurs en soient d’accord…

-Et la fin de votre saison est plus que compromise?

-Râpée tout comme le festival d’Avignon où nous devions aller jouer. Un espoir? Rouvrir le théâtre à l’automne avec la programmation prévue mais pour le moment, c’est loin d’être évident. Et normal, dans cette incertitude artistique et financière, les compagnies que nous recevons, n’arrivent pas à se projeter dans l’avenir!

- Et budgétairement, comment vous en sortez-vous?

- Pour le moment, cela va encore mais comme nous en savons pas combien de temps cela pourra durer…. Mais je mesure notre chance, comme la saison a été bonne, nous vivons sur nos réserves. Et quant au paiement du bail, il peut être mis en attente, on attend de voir.

- Et votre personnel?

- Nous avons une régisseuse en C.D.I, que l’on a mise en chômage partiel et les autres employés sont en CDD. C’est une période effroyable! L’activité normale des petits théâtres comme le nôtre  est toute chamboulée. Une chose est au moins sûre: nous allons maintenir le cycle Nathalie Sarraute avec plusieurs de ses pièces dont Héléna, Pour un oui, pour un non, et des lectures de ses romans. Quant au reste, c’est encore bien flou… En octobre, Yann Reuzeau, auteur et metteur en scène reprendra sa pièce Les Témoins qui devait finir le 22 mars.

– Je suppose que vous êtes en contact avec les directeurs des autres petits théâtres comme le vôtre?

-Oui, bien sûr, Salomé Lelouch, la directrice du Théâtre Lepic (ex-Ciné 13 ) pas très loin de chez nous est dans la même situation. En fait, nous sommes tous un peu anesthésiés, sans rêves, comme en pause. Mais nous recevons de nombreux messages du public et cela fait du bien…

- Vous ne passez pas sur votre site comme de nombreux lieux  des captation de vos anciens spectacles?

-Je n’en fais pas donc je n’en ai pas  et je me méfie de celles que l’on m’envoie pour me donner une idée d’un spectacle des metteurs en scène qui voudraient venir jouer à la Manufacture des Abbesses. Nous faisons une sélection sur dossier et nous demandons à voir dix minutes du spectacle joué sur scène, pour avoir un aperçu concret. Cela me parait plus juste et plus convaincant.

- Et votre quartier, celui du métro Blanche et du Moulin Rouge?

– Il y a du monde parce qu’il y a une vraie vie de quartier mais très peu de voitures et aucun car de tourisme, donc il y a beaucoup moins de pollution et je n’ai plus les yeux qui piquent… Je monte chaque jour un des escaliers de Montmartre pour faire un peu d’exercice. Et puis  je travaille énormément: je réalise quelle chance, j’ai! Le public, les acteurs, les équipes: j’aime cela.  Et nous avons l’impression que, malgré tout, il y a plus de gens qui ont des projets…

Alain Timár, directeur du Théâtre des Halles à Avignon

 - Il y a quelques jours la décision est tombée: les festival in d’Avignon n’aura pas lieu et du même coup, le off non plus…

-  Oui, le 21 avril a eu lieu le conseil d’administration du in dont je fais partie, a fait ce choix qui était le seul possible. On ne voyait pas très bien comment des jauges réduites pouvait résoudre le problème, alors qu’en juillet, les rues sont bourrées de monde.
Il y aurait un report vous le savez sur une semaine en novembre de quelques spectacles dans des salles fermées. Mais, bien entendu, cela ne règle pas tout et reste la question cruciale des intermittents: il y a nécessité absolue d’un plan de sauvetage et toutes les compagnies vont être durement touchées.

-Et votre travail à vous en ce moment?

-Je travaille un peu sur Skipe, je lis beaucoup: rien, absolument rien ne m’arrête de lire! Je m’occupe de la mise en ligne de notre programmation et de petites vidéos. Et aucun des artistes ne m’a dit que son spectacle ne pourrait avoir lieu.

-Et votre création personnelle Naufrage de Rémi de Voos?

-Actuellement, c’est une traversée héroïque… Je dois d’abord trouver des solutions comme responsable d’un lieu : Il faut assurer la permanence de l’équipe J’ai sept permanents en CDI mais aussi sept en CDD pendant le festival.  Il faut que nous finalisions les projets et puissions à un moment ou un autres assurer l’accueil des compagnies que nous avions prévu d’accueillir en juillet. Ce qui, vous le savez bien, est un gros travail.  Nous avions cette année plus de 80% de créations soit onze spectacles sur les quatorze programmés. La plupart des compagnies étaient déjà  en répétition quand le  gouvernement a ordonné le  confinement est intervenue. Comment dans ces conditions assurer une vraie programmation! 

Et  vu la panique économique qui se profile à l’horizon, je crains que ces troupes ne soient nombreuses à être obligées de mettre la clé sous la porte. On peut jeter un caillou, en l’occurrence un galet du Rhône, au gouvernement: personne en effet n’a pris à temps les indispensables mesures sanitaires. 2 ATOn pense avec effroi aux déclarations d’Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé il y  a  deux mois qui minimisait cette très grave crise, alors que son mari est directeur de recherches dans un laboratoire à Youan en Chine, d’où est parti le virus! Et au début de cette pandémie, il y avait en France un regard un peu ironique sur ce qui se passait en Italie. Le coq gaulois continuait à chanter, même s’il avait déjà les pattes dans la merde. Cela rappelle le nuage de Tchernobyl qui ne pouvait traverser nos frontières…  

– Et le off dans tout cela?

 - Vous savez bien que les deux  ont un lien maintenant historique.  Pour le festival in, ses partenaires  assureront  la pérennité  des aides et subventions, donc l’ensemble des salaires pourra être versé.  Et il y aura cette Semaine d’art en novembre dans des lieux fermés comme La FabricA , le théâtre Benoît XII, etc. J’ai demandé au Conseil d’administration du In que l’on réfléchisse en commun à une possible relation du in avec les théâtres permanents d’Avignon, entre autres, avec le Théâtre des Halles que je dirige…

Il faut en effet, essayer d’inventer l’avenir mais ce virus corona permettra au moins que naisse dans le milieu du spectacle, une réflexion profonde, ce qui n’a jamais vraiment eu lieu! Charles Berling qui dirige le Théâtre Liberté de Toulon est dans le même état d’esprit: aucun  doute là-dessus,  il y a une nécessité absolue d’un changement de cap pour le festival d’Avignon. Et il y aura une table ronde fin juin début juillet.
Avec cette dérégulation permanente du marché de la location et cet ultra-libéralisme, que ce soit celui des appartements ou celui des salles de spectacle,  nous somme entrés dans un système infernal… Certains propriétaires de lieux exigent un minimum garanti de 15.000 €!  et parfois encore même un pourcentage sur les recettes: cela s’appelle de la voyoucratie.  Il y a Avignon, des hommes d’affaires purs et durs qui louent des salles à qui le peut mais qui ne connaissent rien  du théâtre contemporain, d’autres plus avertis qui font des choix solides. Mais tout cela reste malsain.
Au Théâtre des Halles, nous nous en tenons à des règles strictes; entre autres, nous recevons trois compagnies régionales  avec 80 % de la recette garantie et il y a chaque années, deux compagnies en coproduction avec nous.

On entend peu le Ministère de la Culture, Frank Riester. Mais comme il  a été aussi victime de cette pandémie, cela explique peut-être ce silence. Finalement, tout se passe comme si le corona virus était le révélateur d’une crise économique profonde…on se demande parfois si l’Etat a bien conscience de la nécessité de préserver l’avenir et il faudrait au moins qu’il apporte un soutien psychologique au secteur culturel. Avec le tourisme, il subit de plein fouet cette crise sanitaire et il faudra des années pour  nous en remettre.
- Mais alors que faire? La seule alternative possible est d’introduire dans ce tissu complexe un minimum de déontologie et de sécurité pour les compagnies qui veulent jouer à Avignon. Jusque là, on voit que l’Etat n’a guère fait preuve de bonne volonté et a laissé les choses se faire. Nous voyons tous que cela ne pourra pas durer. Une des solutions serait que, que par exemple, le Ministère de la Culture mette en place un système aidé dans le off avec l’aide des pouvoirs publics. La dérégulation actuelle en prendrait alors un coup, la concurrence joueraient son rôle et les propriétaires des lieux qui exigent des prix exorbitants, seraient obligés de revoir leur  tarifs…

- Et votre spectacle à vous?

 -Nous pensions pouvoir continuer les répétitions de Sosies de Rémi De Vos,  commencées au Théâtre Montansier à Versailles en février mais voilà, tout est évidemment arrêté et nous sommes confinés… Dans l’attente de ce qui se passera à la mi-mai. Si on a le feu vert, nous accueillerons en résidence trois compagnies pour qu’elles puissent créer leurs spectacles.  Pour Sosies, seize représentations ont déjà été vendues pour le début 2021 en  France et en Suisse ! Et les deux compagnies  de la région que nous soutenons, ont aussi des tournées prévues. Et nous essayerons au maximum de maintenir tous les apports en coproduction…

Le théâtre qui est construit sur un rapport privilégié entre  salle et plateau : il faut être constructif et donner le meilleur de soi-même mais  la qualité artistique est aussi fondée sur les errances et les ratés, bref, au théâtre, rien n’est simple et cette crise amplifie tout…

Philippe du Vignal


Archive pour avril, 2020

Les confinés parlent aux confinés (suite)

Les confinés parlent aux confinés ( suite)

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 Contredanse à Bruxelles

La compagnie Trisha Brown et Yvonne Rainer mettent leur répertoire au goût du jour, partagent leurs partitions chorégraphiques dans le New-York Times et proposent à chacun de s’y essayer. L’emblématique Roof and fire Piece de Trisha Brown se transforme en Room/Roof Piece, Yvonne Rainer adapte une partition de la pièce Terrain et nous invite à pratiquer l’exercice Passing and Jostling While Being Confined to a Small Apartment. 

Articles en ligne (EN) : → A Home Version of Trisha Brown’s ‘Roof Piece,’ No Roof RequiredA D.I.Y. Dance for Your Home, From Yvonne Rainer et pour aller plus loin sur Trisha Brown : → http://www.ubu.com/dance/brown_roof.html (film Roof and fire Piece, 1971, 32min01)→ https://www.numeridanse.tv/videotheque-danse/roof-and-fire-piece (extrait de Roof and fire Piece, 1973, 2min.53)

https://trishabrowncompany.org/repertory/roof-piece.html (photos, 1973)

La Maison de la poésie

Elle propose un enregistrement audio d’une lecture  en une heure vingt de La Divine Comédie de Dante par Denis Podalydès. Avec d’abord une bonne introduction au très célèbre poème écrit en toscan qui deviendra la langue italienne. d4b96093ee4dd3415cf75aab7f25d19a5e75389aacfc702a11ac535842a2223a

 Dante s’est inspiré par le sanglant conflit qu’il a lui-même vécu, opposant les Guelfes et les Gibelins (1125-1300) et il fait référence e à L’Enéide de Virgile comme à l’Apocalypse de Paul. Ce célèbre poème comprend  trois « cantica » : Enfer, Puragtoire et Paradis, chacun  composé de trente-trois chants sauf l’Enfer qui a un chant préliminaire. Dante raconte  un voyage à travers les trois règnes supraterrestres qui le conduira jusqu’à la vision de la Trinité chrétienne.
Une occasion de retrouver oralement toute la magie textuelle de cette Divine Comédie, surtout L’Enfer grâce à Denis Podalydès.

www.paris.fr › la-maison-de-la-poesie-1628

Philippe du Vignal

 

 

Du côté des intermittents (suite) !

Du côté des intermittents (suite) !

 hbinXpcTQovsOAA-800x450-noPadDès  le 1er mars, le secteur culturel a été touché et depuis, les annulations en cascade des festivals sonnent le glas de l’économie du spectacle. À ces inquiétudes, le Ministère de la Culture a adapté à ce secteur les mesures générales prises par le gouvernement, en modifiant aussi les critères d’accès au fonds de solidarité des auto-entrepreneurs et des très petites entreprises. Ce qui permettra aux artistes-auteurs d’y accéder: la période de référence concernant la baisse de revenus n’est plus mars 2019 mais une période de douze mois.

Un autre volet d’adaptation concerne l’assurance-chômage des intermittents du spectacle et les conditions du recours au chômage partiel. Les producteurs et compagnies qui avaient prévu de jouer dans le off d’Avignon (pour la plupart en auto-production) seront obligés de déclarer leurs artistes et techniciens au chômage partiel. Mais cela implique un minimum de trésorerie pour avancer les salaires…

Unknown

Samuel Churin

 En effet, il reste encore beaucoup de flou quant aux modalités envisagées par l’Etat.  La C.F.D.T. demande des négociations avec les partenaires sociaux. «Les mesures d’urgence c’est bien, mais ça ne pallie que les urgences», dit aussi  la C.G.T.  Et Force Ouvrière-Fédération des Arts, du Spectacle, de l’Audiovisuel et de la Presse (F.A.S.A.P.), par la voix de sa secrétaire générale Françoise Chazaud, demande que la “neutralisation“ commence avant le 15 mars, «car les rassemblements de plus 1.000 personnes ont été interdits dès le 8 mars ».

On peut aussi se demander si les heures payées sur la période de confinement  seront prises en compte au moment de recalculer les droits, ou si celle-ci sera neutralisée pour tout le monde.  Et que va-t-il se passer pour tous les intermittents travaillant chez de petits employeurs qui ne pourront pas activer les mesures de chômage partiel ? Et pour ceux qui ne retrouveront pas tout de suite du travail à la sortie après le confinement ?

Les syndicats C.G.T. demandent la mise en place d’un fonds spécial, ce qui permettrait d’aider notamment les artistes employés par les employeurs occasionnels, moins susceptibles que les grosses structures,  d’activer les dispositifs de chômage partiel.

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Guy-Pierre Couleau

 Jean Varella, directeur du Printemps des comédiens à Montpellier, un des nombreux  festivals annulés, explique ses priorités : « Nous travaillons avec les tutelles du service public à l’accompagnement des artistes et techniciens. Derrière le mot : intermittent, il y a des savoirs-faire qu’il faut maintenir  pour consolider ce vivier.  » Et Jean Varella dit qu’il a  besoin « d’un moment de silence avant de reprendre. » « Je ne me vois pas  reprendre sans me poser la question du sens de notre travail, dit aussi une intermittente:  il faut qu’on vive dignement de ce qu’on fait mais on ne peut pas ignorer la souffrance des personnels et pensionnaires des E.P.H.A.D, soignants, enseignants…

 Prodiss, Syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle musical et de variétés, représentant 400 entreprises dont 90% de petites, s’interroge sur les conséquences socio-économiques désastreuses et se propose de «travailler sur la renaissance du spectacle vivant dans l’après le confinement qui, on le sait, ne sera pas levé pour lui ».

affiches-dAvignonde-73e-edition-festival_0_600_372Le off d’Avignon a été annulé par le conseil d’administration d’AF&C le 15 avril, après des semaines d’incertitude, ce qui a éclairci les choses. Pour cette association qui gère le off : « Les lieux devraient rembourser les acomptes payés, pour bénéficier d’une aide du fonds d’urgence qu’AF&C cherche à monter avec ses partenaires: Ville d’Avignon, Région, État et organismes professionnels du fonds de soutien aux compagnies.» A suivre !

 «Les directeurs de théâtre vont passer six mois sans voir une première, ni même un spectacle. Dans quel état d’esprit, seront-ils pour une reprise ? », s’interroge Frédéric Maurin, président du Syndicat national des scènes publiques. Les solutions passeront par la coopération, comme l’ouverture des antennes de Radio-France au Printemps de Bourges et aux festivals musicaux et par des engagements réciproques comme la promesse des Francofolies de La Rochelle de réinviter les artistes,. Mais aussi par des expériences comme le festival d’Aix-en-Provence  qui propose, grâce au « streaming », une présence de ses créations 2020.

 Face aux directeurs de théâtre et aux producteurs inquiets, les intermittents, eux, ont d’autres préoccupations et se demandent comment boucler leur fin de mois. Ainsi Nicolas Barrot s’indigne dans son blog relayé par Mediapart* : « Au mieux, les spectacles reprendront en septembre. Cela fera donc six mois sans travail. Nous attendions une grande solidarité de toute une profession  mais… elle ne semble pas être au rendez-vous. Les réactions des théâtres et festivals ne sont pas claires et  bien loin de ce que l’on pouvait attendre d’un milieu dit « de gauche“ . Mais maintenant, comment gère-t-on ces annulations? On paye, ou on ne paye pas? On reporte à la saison prochaine, oui, mais on vit avec quoi, en attendant? Et on peut vraiment dire que les choix et explications ne sont pas convaincants. »

 Dans les journaux, les articles fleurissent sur l’annulation des festivals d’été et le retard à l’allumage prévus par les programmateurs dont certains s’étonnent du peu d’attention des journalistes des grands médias quant au sort des artistes. La metteuse en scène Catherine Boscowitz cite  un article publié dans Le Monde: elle est sidérée  « de constater qu’à aucun moment, ses auteurs ne font allusion à la situation des artistes eux-mêmes. Comme s’ils étaient totalement déconnectés de ce qui va se jouer (sans jeu de mots) dans les mois à venir pour les salles de spectacle et les musées. Comme s’ils n’étaient pas le cœur de l’activité de ces lieux de culture. Et pourtant, il paraît bien évident que dans la catastrophe qui s’annonce, c’est le cœur (donc les artistes) qui vont être touchés au premier chef. Et que c’est donc AVEC EUX  que les directeurs de salles feraient bien de s’interroger, au lieu de pleurer seuls dans leur coin ! Il est intéressant de constater que la seule allusion  faite aux artistes est de les comparer à des animaux : des comédiens de la Comédie-Française «tournent comme des lions en cage ».
  Les théâtres seraient donc devenus des zoos? Et leurs directeurs, en bons patrons paternalistes du XIXème, seraient les seuls à avoir le privilège et le devoir de penser pour sauver leurs « entreprises » ?  » (…) « Arrêtez s’il vous plaît ! Messieurs mesdames les commentateurs de la Culture et directeurs de lieux interrogés, mettez-vous au vrai travail avec les artistes et pas sans eux, pour reconsidérer ce que sera le monde de demain ! Car sans la pensée de ceux qui vous font vivre, les artistes, vous risqueriez bien, vous, de vous retrouver confinés à vie ! »

 La pétition Culture en danger **, lancée par le metteur en scène Jean-Claude Fall sous forme d’une lettre ouverte au président de la République, explique que pour les intermittents du spectacle, la prolongation de la durée d’assurance-chômage prévue par le ministère de la Culture est insuffisante : «La plupart des spectacles ou des projets reportés ne pourront se réaliser au mieux qu’un an, à un an et demi après la réouverture des salles. Nous demandons que les droits de tous les artistes et des techniciens intermittents soient prolongés d’une année au-delà des mois où toute activité aura été impossible. » 35. 000 personnes l’ont signée à ce jour

 Plus globalement,  Samuel Churin, acteur bien connu pour son action au sein de la Coordination des Intermittents et Précaires. pense aussi à tous les précaires ne bénéficiant pas de ce statut: « Les autres, les intermittents de l’emploi : l’Etat a décidé de faire des économies sur les plus pauvres avec la baisse des allocations. La  réforme du chômage n’est pas annulée mais repoussée. Il faut que cette réforme sur les  « activités réduites » soit annulée ! Pour assumer une continuité de revenu à ceux qui ont une discontinuité des salaires. »

 Mireille Davidovici

*Nicolas Barrot https://blogs.mediapart.fr/nicolas-barrot/blog/240420/annulation-de-spectacle-paye-ou-ne-paye-pas?utm_source=facebook&utm_medium=social&utm_campaign=Sharing&xtor=CS3-66&fbclid=IwAR1KMkyMObVCcqr7tf_yG8bUPtBX-vWPJDztvYYDsiUQdXALN7O9M87BQSg

** Pétition Culture en danger: sur change.org. : https://www.change.org/p/pr%C3%A9sidence-de-la-r%C3%A9publique-culture-en-danger-lettre-ouverte-au-pr%C3%A9sident-de-la-r%C3%A9publique/psf/promote_or_share

 

Les confinés parlent aux confinés (suite et non pas fin!)

 

Les confinés parlent aux confinés (suite et non pas fin!)

   
Esclarmonde Monteil, directrice générale et scientifique du musée des Tissus à Lyon

-Confinée à la campagne, je prépare les prochains rendez-vous du musée et j’occupe mon temps libre à la couture et au tricot… Des activités méditatives qui conviennent aussi à l’écoute de la radio…sTFbuh74S5ibWEF7QbvEbg-Esclarmonde J’ai l’impression de vivre un temps suspendu, une parenthèse hors du rythme effréné qui est notre normalité. Qu’en sera-t-il après ? J’espère que nous prendrons le temps de vivre…
 
-Une pièce de vos collections?

-Pour illustrer le printemps, un tissu décrit par Émile Zola dans Les trois villes: Rome. « Le salon était vaste, drapé de la plus admirable tenture de velours de Gênes qu’on pût voir, cet ancien velours jardinière, à fond de satin pâle, à fleurs éclatantes, mais dont les verts, les bleus, les rouges se sont divinement pâlis, d’un ton doux et fané de vieilles fleurs d’amour. »

-Votre coup de cœur?
- Le site du Collège de France d’un excellent niveau scientifique avec notamment les cours de Roland Recht sur l’histoire de l’art, agréables à écouter et faciles d’accès.
 
Jérôme Bastianelli, directeur général délégué et président par intérim du musée du quai Branly,  Jacques Chirac  à Paris ( VII ème)

Confiné à Paris, dans le quartier Montparnasse… Cela me permet de passer au musée une à deux fois par semaine, le reste du temps: télétravail, réunions par vidéo-conférence et entretien de mes trois passions : Marcel Proust, musique et photographie.
 
-Une pièce de vos collections?sTFbuh74S5ibWEF7QbvEbg-IMG_2027-1
-Au titre de sa participation à la foisonnante #CultureChezNous lancée par le ministère de la Culture, le musée diffuse, entre autres, des vidéos comme La minute anthropologique. On y entend notamment Julien Rousseau, conservateur des collections Asie, raconter l’histoire et la symbolique du waï thaïlandais, cette manière de saluer en joignant les mains verticalement, sous le menton, tout en inclinant un peu la tête.
 
-Votre coup de cœur?
-On parle beaucoup de Proust pendant le confinement… L’opération #UneCitationDeProustParJourDeConfinement, lancée par la Société des Amis de Proust sur ses réseaux sociaux, permet d’en bien comprendre la raison. Par exemple avec cette phrase : « Là où la vie emmure, l’intelligence perce une issue ».   Grâce aux diffusions organisées par les plus grandes institutions internationales, on peut chaque jour découvrir une nouvel  opéra ou un  ballet comme ces trois Tchaïkovski diffusés par le Bolchoï qui resteront un grand souvenir.  
 
Delphine Pinasa, directrice du Centre national du costume de scène à Moulins (Allier)

-À Moulins, le temps est suspendu: salles d’exposition plongées dans le noir, costumes confinés en vitrine, immobiles et emplis d’espérance dans ce monde irréel et une biche gambade dans le jardin… sTFbuh74S5ibWEF7QbvEbg-IMG_3143Je profite de cette période pour avancer sur les dossiers à plus longue échéance comme la création d’un espace scénographie, la refonte de notre site Internet, le développement de résidences d’artistes ou la programmation estivale …  

- Une pièce de vos collections?
- Grâce à notre partenariat avec la plateforme Google Arts & Culture, on peut voir en ligne l’exposition actuelle Couturiers de la danse, de Chanel à Versace (en français et en anglais).
 
-Votre coup de cœur?
-Les Indes Galantes de Jean-Philippe Rameau mise en scène de Clément Cogitore, une œuvre de musique baroque réinterprétée. Mais aussi globalement, tous les spectacles diffusés en ligne sur les sites de l’Opéra national de Paris, la Comédie-Française, l’Opéra-Comique, l’Opéra de Lyon… Cela permet de découvrir ou revoir la richesse culturelle du monde culturel et théâtral français.

Philippe du Vignal

Remerciements à Pierre Laporte  Communication
 

Quelques petits cadeaux à saisir ( suite)

Quelques petits cadeaux à saisir ( suite)

 Les Goguettes

Quatre auteurs interprètes (Stan, Aurélien Merle Valentin Vander et Clémence Monnier, pianiste, (voix, synthés et guitare et piano)  revisitent la chanson française.  Ce  quatuor créé il a sept ans excelle dans des  petites chansons parodiques avec des paroles le plus souvent inspirées de l’actualité.fb63571_snf1Ag_YC1wmmcFF5pPmxtUy

Les thèmes ? Le confinement sur l’air de Vesoul de Jacques Brel: très réussi. Regardez-cela vous ne serez pas déçus… https://www.youtube.com/watch?v=BFOJtRFlY-8

Mais aussi l’avenir du premier ministre Edouard Philippe, le véganisme ou encore la fourme d’Ambert…
Une excellente diction, de bonnes voix, un bon savoir-faire musical et plusieurs louches de joyeuse impertinence. Bref, un cocktail très réussi. Prochain spectacle: Globalement d’accord avec plusieurs dates reportées.

Le 21 mai, Festival L’Humour des Notes Haguenau (67).  Le 28 mai, Théâtre Claude Debussy, Maisons-Alfort (94)
Le 30 novembre L’Artymès, Mesquer (44).
Les 6 et 8 juin La Cigale, Paris (XVIII ème)
Le 14 octobre Espace Beauséjour, Châtelaillon-Plage (17).

Le Théâtre de l’Odéon à Paris

Roméo et Juliette

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Ce vendredi 24 avril à partir de 19h et pendant vingt-quatre heures: captation de Die Tragödie von Romeo und Julia de William Shakespeare, mis en scène en 2014 par Jette Steckel au Thalia Theater (en néerlandais, sous-titré en anglais) sur le site du Thalia Theater de Hambourg.

 

Le Théâtre des Déchargeurs

A voir toute cette semaine, sur le site du Théâtre, Providence, une pièce de Neil LaBute créée à Paris il y a deux ans. Le dramaturge américain s’est inspiré d’un rapport tenu secret selon lequel plusieurs centaines de personnes dont aucune trace n’avait été retrouvée à la suite de l’attentat des tours jumelles en septembre 2001 par des avions dirigés par Al-Quaïda – des hommes surtout- en  auraient profité  pour être déclarés disparus et changer de vie…

Un huis-clos où  un de ces couples dits  » illégitimes »  (ici Marie-Christine Letort et Xavier Gallais) essaye  de recommencer sa vie. Un hasard à la base de ce scénario plutôt bien ficelé… Lui, marié, deux enfants, a choisi ce jour-là de rejoindre son amante, au lieu d’aller travailler comme tous les jours  dans une des tours. Ils vont être vite confrontés dans leur relation aux événements tragiques qui ont secoué les Etats-Unis et le monde entier. Sa femme l’appelle sans arrêt sur son portable, mais il ne répond jamais. Et elle peut donc penser qu’il a aussi disparu dans cet attentat ! Les deux amoureux, comme dans un rêve, voudraient tous les deux quitter New York à jamais, et aller vivre aux Bahamas. Mais ce sera donnant/ donnant. Il lui demande de tout quitter et surtout son poste très bien payé, mais  réticente, elle exige d’abord qu’il téléphone enfin à sa femme pour la mettre au courant de la situation et officialiser la rupture. Mais visiblement, lui n’a aucune envie de quitter celle qu’il aime quand même, et ses deux enfants…
A voir,  malgré une mise en scène quelque peu laborieuse de Pierre Laville.

 

Les poissons-pilotes du Théâtre de la Colline à Paris

 Wajdi Mouawad son directeur a tenu quotidiennement un journal du 16 mars au 20 avril de sa propre expérience, à ses songes poétiques. AVT_Wajdi-Mouawad_9817« Si, aujourd’hui, l’essentiel est que le service public des soins puisse aider tous ceux qui en ont besoin, si le plus important sont les hôpitaux, les médecins et les aides-soignants ; que peuvent et doivent faire les artistes ? Si la santé est aujourd’hui le grand requin blanc se battant contre la maladie, qui sont alors les petits poissons pilotes qui accompagnent les squales ? Nous sommes peut-être ces petits poissons pilotes… Comment la poésie peut-elle soigner ? Et comment peut-elle le faire lorsqu’il n’est plus possible de sortir de chez soi ?
À cette question, il y a quantité de réponses joyeuses que l’équipe de La Colline invente et vous propose dès aujourd’hui et jusqu’à nouvel ordre.
La Colline s’associe au Festival On The Cloud imaginé par le Shizuoka Performing Arts Center à Tokyo, et au Théâtre de la Schaubühne de Berlin pour proposer le samedi 25 avril à 18h (à voir sur le site Internet  du Théâtre) l’épisode du jour 18 en version vidéo, sous-titrée en quatre langues : japonais, allemand, anglais et français. Comme l’intégralité des épisodes de ce journal de confinement. De quoi meubler vos soirées…

Philippe du Vignal

Festival d’Avignon 74 ème édition (suite)

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Festival d’Avignon 74 ème édition (suite)

Le Conseil d’administration du Festival s’est réuni par visio-conférence et a voté à l’unanimité le plan d’annulation de cette soixante-quatorzième édition et les mesures de maintien et relance de l’activité présentées par Olivier Py et Paul Rondin. Il s’agit pour le moment de réagir en urgence, disent-ils, pour éviter la précarité à ceux qui auraient dû travailler cet été: salariés permanents mais aussi intermittents et saisonniers qualifiés réguliers. Et garantir la pérennité de l’outil, la continuité de l’activité et imaginer collectivement  la relance. Avec des mesures d’accompagnement social, de soutien à la production artistique.

Le Festival est en effet une grosse entreprise: 432 emplois qualifiés seront donc maintenus ou indemnisés jusqu’au 31 juillet prochain. Non pour éliminer totalement -à l’impossible, nul n’est tenu- mais pour atténuer les répercussions économique de la crise. De nombreux  professionnels du spectacle -surtout des techniciens-  habitent dans la région. Il s’agit donc aussi d’une mesure favorable à l’économie locale. Et le Festival d’Avignon s’engage à maintenir les apports en coproduction des créations prévues 2020 au festival mais aussi  en tournée dans d’autres lieux: une mesure capitale.

Autre mesure capitale : sanctuariser l’enveloppe  les financements  des coproductions prévues en  2021. Et pour les compagnies programmées  cette année, il y aura des mesures d’accompagnement: indemnisation en cas d’annulation, report à l’automne 2020, ou encore reprogrammation en 2021, Et les équipes artistiques pourront disposer  du site (salles et séjours) de la FabricA pour des résidences à partir de septembre. Ce qui permettra de terminer les spectacles: bien vu!

Le festival offrira aussi  en juillet (mais cela parait moins convaincant) un programme audiovisuel et numérique pour rêver du festival d’Avignon, notamment avec France-Culture, France- Télévisions et Festival- Expériences.

Et sera organisée en novembre prochain dans plusieurs salles comme le Théâtre Benoit XII,  la Chapelle des Pénitents blancs, etc.  une  Semaine d’art à Avignon. Un terme qui sonne comme un hommage à  Jean Vilar qui l’avait d’abord créée et qui allait devenir le festival, dans les jardins du Palais des papes. Ce mini-festival permettra de présenter quand même quelques créations cette année.

Mais est aussi prévue d’aujourd’hui à décembre prochain, la poursuite des actions culturelles et éducatives sur le territoire. Tous les théâtres et tous les lieux de spectacle, toutes disciplines confondues, sont gravement touchées par  cette crise sanitaire. Et bien sûr, ce report entraîne a un coût mais l’État, la Ville d’Avignon, la Communauté d’agglomération, la Région, le Département ont confirmé le maintien à 100% des subventions prévues . Et un des principaux mécènes, le Crédit Coopératif, a a confirmé le maintien de son aide.

Dans les circonstances actuelles où il faut faire face à l’urgence, une refonte du festival ne semble pas à l’ordre du jour. Pourtant, comme le souligne Alain Timár, directeur du Théâtre des Halles et membre de ce conseil d’administration, cela semble inéluctable. Le off est né du in, comme dans de nombreux festivals mais là aussi, on n’échappera pas à une révision drastique des conditions de création et de séjour des très nombreuses compagnies qui viennent parfois plusieurs années de suite. Le festival est depuis longtemps un élément essentiel de l’économie locale…

Des chiffres ?  Quelques exemples: l’an passé, un appartement -impeccable et  tout près de la rue des Teinturiers, donc dans les remparts- avec cuisine-salle à manger au rez de-chaussée, et à l’étage, deux petites chambres climatisées et une autre non climatisée donc inhabitable, était loué par leurs propriétaires (au noir, bien entendu) un peu plus de 4.000 € pour les quatre semaines du festival.   Et on trouve guère de  chambre d’hôtel correcte pour deux personnes à moins de 150 €…
Et côté prix de location de salles, les chiffres depuis quelques années s’envolent. Intra muros mais près des remparts, une salle de 49 places avec  petite scène peu profonde  et  une installation technique minimum mais sans régisseur et sans services extérieurs : 29.000 €. Autre exemple, le Théâtre du Balcon mais avec d’autres conditions : billetterie, régisseur et permanence téléphonique soit un théâtre en ordre de marche et selon les horaires : plus ou moins 85.000 € !

 Est-il normal qu’un propriétaire privé après achat et travaux de mise en conformité minimum, puisse rentabiliser un salle en la louant très cher quatre à cinq ans : en plein centre d’Avignon mais quand même? Est-il normal qu’une Région louant une salle pour ses compagnies locales fasse passer une sorte de concours auquel même  le Centre Dramatique National du coin doit soumettre  sa candidature ?  Il y a parfois quelque chose de pourri dans le royaume des papes…. Alors, pourquoi pas une charte de déontologie ? Reste à savoir comment l’Etat, en l’occurrence et surtout le Ministère de la Culture et celui des Finances, auraient le pouvoir d’intervenir dans ce secteur privé…

ll y a en Avignon une dizaine de salles ouvertes à l’année dont le Théâtre du Balcon dirigé avec sûreté par Serge Barbucsia. Il est aussi le président des Scènes d’Avignon qui regroupe le in du off, c’est à dire : le Théâtre des Carmes (Sébastien Benedetto), le Théâtre du Chêne Noir (Gérard et Julien Gelas): les deux plus anciens, le Théâtre du Chien qui Fume (Gérard Vantaggioli), le Théâtre des Halles (Alain Timár). Ces lieux qui ont les moyens techniques et financiers voudront-ils faire partie de la solution proposée par le in, à savoir le report à l’automne prochain?  Et les compagnies qui viennent y jouer chaque année, les auront-elles ? Et le public suivra-t-il ? Le off dépend du in mais Avignon in serait-il ce qu’il est sans cette exubérance et cette folie du off où le meilleur parfois côtoie le pire, souvent En tout cas, Le Théâtre des Halles, le Théâtre des Doms, Le Train bleu comme La Manufacture ( ceux qui ont une programamtion exiegantesemblent bien avoir jeté l’éponge pour juillet..

Le corona virus a frappé les théâtres mais pas que ! Et Cécile Helle, la maire d’Avignon et Vice présidente du Grand Avignon, appelle déjà à l’aide! Avec son équipe municipale, elle constate tous les jours que l’économie de la ville, fondée en juillet mais aussi la plus grande partie de l’année, sur le tourisme : bars, restaurants, hôtels, boutiques de luxe, etc. ,  est en chute libre…

C’est dire l’ampleur de cette catastrophe. Mais restons optimistes: le pire n’est pas toujours sûr comme le signale le sous-titre du Soulier de Satin de Paul Claudel, un spectacle-culte qu’avait monté Antoine Vitez dans la Cour d’Honneur…

 Philippe du Vignal

Le musée David Copperfield

 

Le Musée David Copperfield

 

Copperfield et sa collection Harry Houdini (Cré dit The David Copperfied Collection Museum)Le célèbre magicien a créé son International Museum and Library of the Conjuring en 1991 et a acquis la Mulholland library of Conjuring and the Allied Arts:  80.000 pièces dont 15.000 ouvrages et la plus grande collection consacrée à Houdini et des collections Cole, Dr Robert J. Albo, etc.

Ce musée privé dans le désert de Las Vegas veut être la mémoire de l’art magique et il a pour but de restaurer et conserver le patrimoine de l’illusionnisme. Installé dans un entrepôt en plein désert de Las Vegas, il est uniquement ouvert aux magiciens, universitaires, historiens, acteurs et à certains médias. David Copperfield le garde fermé au grand public, pour que les secrets de la magie restent en lieu sûr dans ce coffre-fort aux allures de base militaire où il préfère exposer ses objets en plein jour pour une expérience plus interactive, sans vitrines ni cordes mais en en  limitant l’accès.
 Il prête aussi certaines pièces pour des expositions temporaires ou les apporte en tournée. À ce jour, cette collection, évaluée à des centaines de millions de dollars, est considérée comme la plus grande au monde avec… environ 150.000 pièces.

 David vient nous chercher. Il y a ici des magiciens comme Sébastien Clergue, Silvan, Shimada, Pollock … Deux limousines avec vitres occultées nous emmènent: on ne peut pas voir où on va. Cela monte, on le sent et puis tout d’un coup on s’arrête sur un plateau. On descend: le lieu est protégé comme un camp de prisonniers ou une centrale nucléaire avec de hautes grilles vraisemblablement électrifiées et des lumières qui tournent. Il manque juste des miradors dans les coins. Et des maîtres-chiens promènent de belles bêtes…

Au milieu du terrain, une grande bâtisse aux dimensions des Galeries Lafayette. Tout est éteint, sauf une petite boutique éclairée avec, en vitrine: soutien-gorges, strings, porte-jarretelles sur des présentoirs ou des mannequins. En plein désert, à deux heures du matin, ça réveille ! David nous laisse là deux minutes, en  attendant sans doute des commentaires salaces qui ne viendront pas: chacun est bien élevé mais  se demande quelle est cette embrouille… On ne peut même plus ressortir à cause des chiens, on est là entre hommes et il n’y a aucune femme, dans un magasin de lingerie moyennement chic. En France, on a Cadolle, Simone Pérèle, Etam Et puis David dit: «Bon maintenant, il va falloir essayer. » – Pardon ? – Oui, Jean, entre donc dans la cabine avec Silvan et il nous pousse dedans.

Dès qu’on est entré, la lourde porte se ferme et on ne peut plus ressortir. Confinés dans deux m2 et  surpris,  nous pouffons de rire comme tous ceux qui ne savent pas quoi faire : nous nous retrouvons avec un mannequin en string. A ce moment, son sein gauche s’allume et Silvan, en grand pro, appuie d’un index sûr sur le téton : on voit qu’il maîtrise le geste… Cce qu’il fallait faire: une paroi se lève et nous pouvons entrer dans un gigantesque entrepôt… Magique. Puis on attend les autres visiteurs qui, deux par deux, vont subir le même rituel.

Après coup, c’est rigolo! La première chose que l’on découvre:  un coffre fort utilisé dans l’implosion d’un bâtiment : tordu certes, mais presque intact. D’autres châssis de décor, d’autres shows TV jalonnent  le parcours : ainsi les piques de Fire of passion.  Pour le reste, les éléments de chaque spectacle à la télé est emballé avec tous les accessoires et costumes dans du papier bulle et sur des  palettes. Soigneusement rangés pour les shows eux-même, les « spéciaux », les pubs et il y a même une cassette vidéo scotchée sur l’ensemble comme témoin, en cas d’oubli d’un détail ou d’une manœuvre ! Dans cet entrepôt « dantesque » qui ressemble plus a celui de J.M Bruneau ou d’Office dépôt, qu’à un temple de la magie, on peut aussi voir une grande collection de  jeux de fêtes foraines. De ceux où on ne peut jamais gagner… car tous truqués. Mais nous ne les verrons pas fonctionner : emballés aussi dans du papier bulle avec la photo de l’appareil tel qu’il se présente, scotché dessus.

Cette collection ici en attente d’un miracle, mériterait une vidéo de deux heures avec démonstration de chaque jeu et de son trucage. Cela intéresserait grandement tous les magiciens et cela servirait la gloire de David. Mais il ne semble pas décidé et n’a aucun besoin des revenus que cela générerait. Il essaye de donner des explications mais parfois, s’embrouille un peu ! Il commettra une ou deux erreurs, aussitôt rectifiées par Sébastien Clergue, qui connaît son Copperfield par cœur, voire  mieux que lui… qui finira d’ailleurs par se taire de peur de dire une nouvelle connerie, félicitant Clergue: « Vous êtes un vrai fan, ça c’était bien le show numéro 13. »

On arrive ensuite dans une salle de réunion très design où sans aucun doute on conçoit les spectacles avec les consultants. Puis on nous emmène dans une « salle de presse », mais grande comme le séjour  d’une HLM  et rempli de cartons à dessins en plastique de format raisin ou supérieur et qui contiennent TOUT ce qui est paru sur David Copperfield depuis l’origine. En chinois, malais et en d’autres langues dont on ne sait même pas qu’elles existent…

Cela a presque un côté obsessionnel. Ainsi collés l’un contre l’autre, deux articles rigoureusement identiques d’un même quotidien à la même date. ??? Réponse: il y a, de ce journal, deux éditions: une le matin et une à 18 heures! Pour passer d’une pièce à l’autre, il y a un digicode de chaque côté de la porte et il faut donc être deux pour ouvrir et une fois que les bons codes ont été tapés, David appuie sur une télécommande, genre TV et la porte s’ouvre. Cela rappelle Fleury-Mérogis…

Nous demandons alors  de nous envoyer quelques photos. En effet, ici, on fait théoriquement ce qu’on veut, mais en pratique, c’est comme chez Disney : il y a des points photos où on s’arrête et on vous dit « Regardez ! De là, vous pouvez prendre une jolie photo. » Par contre, si l’on veut prendre le détail d’une charnière d’un appareil astucieux : «C’est mieux si vous ne le faites pas ! » Mais bon,  on peut comprendre  que chacun est maître chez lui.

 Puis David dit : «Et si on prenait un petit café. » A cette heure avancée de la nuit, personne n’en a vraiment envie mais depuis longtemps, on a compris qu’on ne contrarie pas le beau David. Il y a une cuisine noire et métal : David n’aime sans doute pas cuisiner ni peut-être même manger. Ce qui nous sera confirmé dans la soirée: Pollock raconte alors une histoire surréaliste: David  se fait descendre en limousine jusque chez Mc Donald et demande au chauffeur d’aller chercher un double burger avec une grande frite et un coca ! Pour déjeuner, il fait apporter des burgers qu’on a dû manger dans la limousine en essayant de ne pas faire tomber de miettes… David en effet, a peur qu’on le reconnaisse et qu’on vienne lui casser les pieds. Et il ne veut pas non plus se faire livrer pour qu’on ne sache pas où il vit.

Mais bon, pour l’instant, il entre seul dans la cuisine et quelques instants plus tard, nous appelle. Puis  la porte se referme et il s’est comme volatilisé. Comme il y a une machine à café, bien en évidence,  on se dit : appuyons  sur  la touche : on et les quatre murs vont se lever, une pluie de confettis va tomber  et un orchestre de 80 musiciens va attaquer l’ouverture du  God shave the gouines chanté en duo par Franck Sinatra et Pavarotti pour accompagner l’arrivée de Silvain Mirouf lui-même. Déguisé en capitaine de bateau-lavoir, il va nous dire : «Vous pouvez tourner la roue qui fera de vous un billionnaire ! Et, de toute façon vous avez déjà gagné une montre en bois avec un ressort du même métal!» Rien de tout cela et, comme on ne peut plus sortir,  nous explorons méthodiquement les boutons de placards et portes mais nada ! Et on pense alors  au bouton de dégivrage du frigo, bonne idée : l’intérieur de frigo est le départ d’un escalier en colimaçon….

Un assistant doit recevoir un signal quelconque de David et on chronomètre le temps que chacun des magiciens met à trouver la façon de sortir par le frigo. Bref, tout commence là et nous allons visiter deux étages du musée : sans doute ce que nous avons vu de plus beau dans toute notre vie de magicien… On va découvrir cinq pendules Robert-Houdin en état de marche Les horloges mystérieuses de J-E. Robert- Houdin (Crédit  The David Copperfied Collection Museum)et une « leçon de chant » en ordre de marche !Outre de portraits de grands magiciens, il y a là un gramophone à rouleaux de cire. Avec sans doute le premier et le seul enregistrement de Howard Thurston.

Sur des étagères des matériels ayant appartenu aux plus grands… Et bien sûr, une collection d’affiches, de programmes mais que nous n’aurons pas assez de temps pour consulter et toute la correspondance de Thurston, Malini, Houdini etc..Le tout en livres reliés. David saisit l’occasion de nous dire qu’à l’époque, les magiciens se détestaient déjà : Thurston parle de ce « nabot de Malini », Houdini partage avec Jarrett le sentiment que l’intelligence de Thurston se situe juste en dessous de celle d’une vachette  de rodéo… Bref, rien n’a changé !

A ce moment, trois danseuses du Crazy sont arrivées pour visiter le musée.  Toutes originaires de l’Est (il n’y a plus une seule française au Crazy !) Ce qu’il y a d’agréable ici : une assemblée de gens qui tous n’ont plus rien à prouver et qui, pour un soir ont décidé de laisser tomber le masque ! Un moment de grâce… Silvan, honnête, dit à même à Pollock : « Sans vous je n’aurais jamais fait les tourterelles. » et Pollock de répondre : « Oh ! Vous savez, si on remonte à l’origine, l’effet n’est même pas de moi ! » On était sur une autre planète…

 Puis on est remonté d’un étage, et si le Paradis existe, ça doit ressembler à quelque chose comme ça. Salle Harry Houdini (CrŽdit The Dav id Copperfied Collection Museum)Il y avait la cage et le chapeau-canne de Pollock sur une petite estrade et il a fait marcher l’ensemble: être là, devant ce matériel historique qui a tourné dans Nuits d’Europe et qui a fait fantasmer et parler deux générations de magiciens, pouvoir le toucher, avec à côté, celui qui s’en servait et qui explique comment ça marche et pourquoi ça marche: on a pendant trois minutes l’impression d’être Dieu!

 Il y a aussi une collection de poupées de ventriloques,dont l’une ressemble à s’y méprendre au Charlie Mc Carty d’Edgar Bergen.Suit une époustouflante collection de boîtes de magie. – Auriez-vous celle avec laquelle j’ai commencé ? –Quel âge avez-vous? Soixante ans ! -Venez et à la section 1940/50 .Et il y a bien en effet LA boîte de nos débuts.

Puis nous sommes redescendus par un autre escalier. En franchissant la dernière porte, si David nous avait annoncé qu’on allait prendre place à bord d’un sous-marin nucléaire conduit par le petit-fils du capitaine Némo pour gagner l’Atlantide, on l’aurait cru…  Mais on s’est retrouvé dans un endroit spécial où David a fait léviter chacun de nous, un par un. Sans harnais! Puis David a dédicacé les photos, il s’en va tout d’un coup sans qu’on n’ait pu lui dire vraiment merci, et on nous ramène jusqu’aux limousines. Il est cinq heures, on est un peu fatigués, mais pas vraiment, on rentre à l’hôtel en se disant  que dans notre vie, jamais plus on ne connaîtra un truc comme ça. Il nous reste une impression d’admiration mêlée de respect devant la réussite du personnage…

On est même prêt à l’aimer mais on se demande s’il le souhaite vraiment. Il a gravi pas à pas la difficile montagne du succès et il trône là, au sommet, assis sur un tas d’or. Mais terriblement et résolument seul! Comme Jean-Sébastien Bach, comme Théolonius Monk ou Pablo Picasso, seul dans sa tête comme tous ceux qui sont montés si haut que personne n’a pu suivre ce qu’ils disent quand ils parlent et qui, bientôt vont prendre la décision de se taire. Après toute une vie de peinture, de musique, de théâtre, d’enseignement, de conférences, aux abords du dernier voyage u dernier voyage, celui qui sait avoir dit ce qu’il avait à dire, s’enferme parfois définitivement dans le silence : peut-être le la dernière des musiques de l’homme ?

La poupŽe marionnette Charlie McCart hy du célèbre ventriloque et acteur américain Edgar Bergen(Crédit The David Copperfied Collection Museum)

 

Même chose pour David. Le maître convoque des gens pour lesquels il a une petite estime mais qui se sont arrêtés en chemin, faute  d’imagination ou de courage et pour eux, il soulève un coin du voile et leur dit:  «Voilà jusqu’où on peut aller ». D’aucuns vont alors penser que le Maître cherche à satisfaire une dernière fois son ego. Même pas sûr ! Du haut de sa montagne, le Maître s’ennuie et se dit peut-être: « Je vais en prendre quatre et je vais essayer de leur donner envie et cela me fera toujours de la compagnie pour un soir ! Ce que David a essayé de faire pour nous… Qu’il en soit remercié mille fois.

Toutes proportions gardées, cela nous rappelle une représentation du Cid de Corneille que nous avons eu le bonheur de voir avec Gérard Philipe, Jean Vilar, Maria Casarès et dans le rôle de hallebardiers: Philippe Noiret et Jean-Pierre Darras. Des années plus tard nous nous sommes dit que jamais, plus jamais, nous ne pourrions plus jamais aller voir  Le Cid...

Jean Merlin

Musée privé David Copperfield Las Vegas (Etats-Unis).
( Les photos sont de la collection David Copperfield)

 

Les confinés suisses (et pas que suisses) parlent à tous les confinés ( suite)

Les confinés suisses (et pas que suisses) parlent à tous les confinés ( suite)

 Deuxième épisode de cette belle performance de nos amis helvétiques,  les Yesterboys  (Max Peter, Klaus Grimmer et Jacques Rohner) qui, grâce à leur savoir-faire et aux technologies actuelles, l’ont réalisée tous les trois mais… chacun chez soi: confinement oblige. Et avec, pour compléter ce trio de musiciens, une marionnette qui tourne la manivelle d’un orgue de barbarie. “ Comme le dit finement leur compatriote Jean-Luc Godard: “La solitude n’est pas l’isolement. On est toujours deux en un. Il y a les autres en soi. »  Si on compte bien, ici cela  ferait donc huit…

«Le carrousel du corona virus continue de tourner, disent-ils, tandis que le vautour des faillites tourne au dessus de l’économie et que l’aspiration à la liberté de mouvement s’élève à des hauteurs insoupçonnées. Comme toujours, nous serons heureux de recevoir vos commentaires. »

320px-Jean_Fouquet-_Portrait_of_the_Ferrara_Court_Jester_GonellaUn petit film tout à fait réjouissant, même si la marionnette  -très bien conçue- n’a pas tout à fait  la même drôlerie que celle du premier épisode. Mais la  musique est toujours très soignée. Les personnages que l’on voit défiler en arrière-plan sont des femmes et hommes politiques suisses  confinés mais on aperçoit aussi Macron… Et ce fragment de tableau ancien ? C’est le visage comme en gros plan, du bouffon Gonella coiffé d’une toque de fourrure qui exerçait son métier à la cour d’Este à Ferrare. Et qu’a peint avec un grand souci du détail, Jean Fouquet vers 1440, même si les mains -qui ne sont sans doute pas  de lui- sont  un peu ratées, le portrait reste sublime.

Amusez-vous bien si c’est encore possible et, comme le dirait encore Jean-Luc Godard : «Si vous n’aimez pas la mer, si vous n’aimez pas la montagne, si vous n’aimez pas la ville… allez vous faire foutre!» Cela tombe bien, nous sommes en ce moment confinés à la campagne….

Philippe du Vignal

 https://youtu.be/VB7CsqXDLsY

Et la traduction en allemand de Jacques Rohner  (grand merci à lui) pour nos amis germanophones:

Schweizer (und nicht nur Schweizer) mit eingeschränkter Bewegungsfreiheit sprechen mit allen Eingesperrten ( Fortsetzung)

 Zweite Episode dieser schönen Aufführung unserer Schweizer Freunde, der Yesterboys: Max Peter, Klaus Grimmer und Jacques Rohner, die es dank ihres Know-hows und aktueller Technologien alle drei geschafft haben, aber… jeder zu Hause, in relativer Ausgangssperre. Dieses Musikertrio wird ergänzt durch eine Marionette an der Kurbel einer Drehorgel. Wie ihr Landsmann Jean-Luc Godard sagt: «Einsamkeit ist keine Isolation. Wir sind immer zwei in einem. Es gibt andere in uns selbst.» Wenn wir richtig zählen, wären das dann acht…

« Das Karussell des Coronavirus dreht sich weiter », heißt es im Begleittext, « Während der Pleitegeier über der Wirtschaft kreist und die Sehnsucht nach Bewegungsfreiheit in ungeahnte Höhen steigt. Wie immer freuen wir uns über Ihre Kommentare. « 

Ein sehr unterhaltsamer kleiner Film, auch wenn die Marionette – sehr gut gestaltet – nicht ganz so lustig ist wie in der ersten Episode. Aber die Musik ist immer noch sehr ordentlich. Die Figuren, die wir im Hintergrund scrollen sehen, sind eingesperrte Schweizer Politiker, aber wir sehen auch Macron… Und dieses Fragment eines alten Gemäldes? Es ist das Gesicht, wie in Nahaufnahme, des mit einer Pelzmütze bekleideten Narren Gonella, der am Hof der Este in Ferrara wirkte. Und was Jean Fouquet um 1440 mit viel Liebe zum Detail malte, auch wenn die Hände – die wahrscheinlich nicht von ihm gemalt wurden – nicht so recht ins Bild passen, ist ein ausdrucksvolles Porträt.

Viel Spaß, wenn das überhaupt noch möglich ist, und wie der gleiche Jean-Luc Godard sagen würde: «Wenn du das Meer nicht magst, wenn du die Berge nicht magst, wenn du die Stadt nicht magst… hol dich der Teufel!» Gut, dass wir zur Zeit auf dem Land bleiben müssen…

 

 

(Re) Faire le Gilles par Robert Cantarella

photo-©-Marc-Domage Photo Marc Domage

(Re) Faire le Gilles par Robert Cantarella

Robert en Gilles, Gilles en Robert: depuis quelques années, l’acteur-metteur en scène incarne Gilles Deleuze ou, du moins, sa pensée qui chemine au long cours, de leçon en leçon. Il ressuscite ainsi les séminaires que le philosophe a tenu à Vincennes puis à Paris VIII, notamment celui consacré à l’image en mouvement (1981-1982) .
Il nous propose quelques dates pour revivre avec nous en direct cet événement et réécouter Gilles Deleuze, par sa voix !  Nous avions, à l’époque, beaucoup apprécié ce Faire le Gilles.

Relié par un cordon et une oreillette à un magnétophone, Robert Cantarella dit, mot pour mot, les paroles du philosophe, avec ses intonations, hésitations et invectives envers les étudiants ou l’administration universitaire… Il ne cherche pas à jouer Deleuze ou à interpréter un texte. Ici, pas d’écriture préalable mais le phrasé d’une pensée qui avance et où il se glisse : « La théâtralité réduite à son minimum, dit-il,… des oreillettes de petit format me font entendre la voix de Gilles Deleuze, je redis ce que j’entends, au plus près de celle d’origine, en refaisant les inflexions, suspens et interventions. Je ne copie pas ses attitudes ou bien une manière d’être; au contraire, le texte traverse le passeur qui le retransmet avec la réalité de son corps et du grain de sa voix…  C’est en jouant avec que peu à peu, je me suis pris à le dire, puis à en faire une copie exhaustive… J’ai pensé aux exercices de copie si habituels en peinture et j’ai entamé des ateliers de copie sonore. Une pratique  jubilatoire pour celui qui fait, comme pour celui qui reçoit. »

Gilles Deleuze lui-même ne lui a-t-il pas tracé le chemin avec Ce que la voix apporte au texte, écrit en hommage à Alain Cuny et publié dans la revue du T.N.P. en 1987 ?  «Les concepts ont des vitesses et des lenteurs, des mouvement qui s’étendent ou se contractent à travers le texte: ils ne renvoient plus à des personnages, mais sont eux-mêmes des personnages, rythmiques. Ils se complètent ou se séparent, s’affrontent, s’étreignent comme des lutteurs ou des amoureux. C’est la voix de l’acteur qui trace ces rythmes, ces mouvements de l’esprit dans l’espace et le temps. L’acteur est l’opérateur du texte ; il opère une dramatisation du concept, la plus précise, la plus sobre, la plus linéaire aussi. Presque des lignes chinoises, des lignes vocales. »

Mais la théâtralité s’opère aussi grâce à une double jeu : l’acteur Cantarella révèle l’acteur Deleuze : son sens de l’improvisation, sa voix qui donne chair à une pensée vocale qui se constitue au fur et à mesure qu’elle est en train d’être partagée. L’acteur redonne lui, devant un public ravi, corps et intelligence à cette pensée toujours en mouvement.

 Mireille Davidovici

Performance en direct, les dimanches 19, 26 avril et 3 mai à 17 heures. https://www.facebook.com/photo.php?fbid=10157482995322830 set=a.10151141027767830&type=3

 

Radio TOMA et TOMA TV au service des artistes d’Outremer


280px-Chapelle_Ordre_du_Verbe_IncarnéRadio TOMA et TOMA TV au service des artistes d’Outremer

 

«La violente crise sanitaire que nous traversons ici, frappe aussi la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Réunion, Saint-Pierre et Miquelon, Wallis et Futuna, Mayotte, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie…», disent Greg Germain et Marie-Pierre Bousquet, les directeurs  de la Chapelle du Verbe Incarné, où sont présentés, depuis vingt-trois ans au festival d’Avignon, des spectacles venus d’Outre-Mer. «Si les Outre-Mer ne peuvent venir à la Chapelle du Verbe Incarné, c’est elle qui  ira aux Outre-Mer ! »
Radio TOMA, créée il y a deux ans, se met donc au service des compagnies et des artistes qui devaient y  jouer cet été. Et TOMA TV  sera disponible du 3 au 14 juillet:  «Nous allons réinventer, ensemble, depuis les dix coins de nos petits pays et nous serons présents partout dans le monde», disent les créateurs de TOMA (Théâtres d’Outre-Mer en Avignon). Une initiative grâce à laquelle, au-delà de ces médias audiovisuels, «sera  facilitée la connaissance et la diffusion des spectacles produits outre-mer et dans la diaspora ».

Greg Germain et Marie-Pierre Bousquet,ont conçu un Centre de Ressources où sont rassemblés les archives des créations de ces territoires. Il y aura aussi des résidences et des spectacles joués pendant le festival mais aussi toute l’année, à la Chapelle du Verbe Incarné et dans les régions…

Dans Dean est passé, il faut renaître. Aprézan !* Edouard Glissant et Patrick Chamoiseau, écrivaient, après le passage en Martinique du cyclone Dean en 2007 : « Un cyclone est passé. Dans son sillage : désolation végétale, ruptures diverses et accablement des plus démunis… Mais les moments chaotiques sont souvent des lieux de renaissance. (…) Quand tout s’effondre ou se voit bousculé, (…)  ce sont des improbables qui soudain, se voient sculptés par de nouvelles clartés. (…) Dans toute crise, un maintenant s’ouvre d’emblée. »

Mireille Davidovici

Chapelle du Verbe Incarné, 21G rue des Lices, Avignon (Vaucluse) . T. : 04 90 14 07 49.
Contact permanent : Association ADOC, 33 boulevard Saint-Martin, 75003 Paris, T. : 01 76 21 45  75 www.verbeincarne.fr – info@verbeincarne.fr

(*) En intégralité : Dean est passé,  il faut renaîttre. Aprèszan ! sur :  http://tout-monde.com/deanaprezan.pdf

 

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