Les ex-confinés du Théâtre du Blog parlent aux ex-confinés: Sébastien Bazou, spécialiste des arts de la magie

Les ex-confinés du Théâtre du Blog parlent aux ex-confinés: Sébastien Bazou, spécialiste des arts de la magie

-Comment avez-vous vécu ce confinement?

- Plutôt bien, et je travaille tous les jours selon un plan de travail que je me suis fixé. Lever à 6h ; rédaction d’articles  à la fraîche … comme Paul Claudel en Chine. Puis petit déjeuner des enfants et surveillance de leurs devoirs. Déjeuner et promenade digestive. Détente au jardin et ensuite de nouveau travail: soit la redécouverte de valeurs simples qu’on avait, je crois, un peu perdues…

_ Question rituelle: les conséquences du corona virus dans votre domaine ?

- La majorité des magiciens sont intermittents ou auto-entrepreneurs et beaucoup ont aussi un second métier dont ils vivent principalement. Vous serez sans doute étonné de savoir qu’il y a pas mal de médecins ou pharmaciens… En ce moment les réseaux sociaux fonctionnent à plein rendement, avec des ventes de conférences: les magiciens expliquent leurs tour en détail  mais  bien entendu moyennant finances… Ce qui leur permet  non d’en vivre mais de vivoter en attendant mieux. Un certain nombre travaillent aussi à préparer de nouveaux numéros scéniques et montent des projets. Mais bien entendu, la fermeture des lieux de spectacle a entraîné comme pour le théâtre, la danse, etc. l’annulation de tournées  en salle comme ailleurs…

- Et l’avenir?

- A court terme, se posera la question de la relation avec le public ! Dans la magie interactive dite « close up » en bon français, c’est à dire à moins d’un mètre le plus souvent du public, il va falloir tout repenser. La balle mousse ou la flamme qui apparait subitement dans la main  ou le choix d’une carte dans un paquet:HervŽ Troccaz - magicien 2  (Crédit Hervé Troccaz) on sera obligé d’oublier tout cela, je le crains, pendant encore un bon moment…
Mais les magiciens ont toujours eu un temps d’avance sur leur public qui ne connait jamais la finalité d’un tour: c’est le principe même de leur art. Et au cours des âges, ils ont toujours réfléchi à des solutions et se sont vite adaptés. Y compris quand ils ratent un de leurs tours…  qui ne sont pas du tout  les mêmes sur scène que dans la proximité  immédiate.  Et en ces temps de précautions sanitaires maximum, on ne voit pas bien comment on pourrait faire choisir une carte sans la toucher, à moins de tout désinfecter à coup de gel hydro-alcoolique!

Magicien de rue à La Paz en Bolivie

Magicien de rue à La Paz en Bolivie

Mais on peut penser à d’autres solutions comme un choix sur écran… De toute façon, une chose est sûre: il faudra travailler autrement et dans une  autre relation avec les spectateurs.

- Vous pensez que le grand public  qui, on le voit chaque année dans le off à Avignon où les places s’arrachent, est absolument fasciné par la magie, finira par revenir?

-Oui, je n’ai pas trop d’inquiétude, le public a besoin de contact et de partage d’émotion. On voit déjà de nombreux artistes qui ont investi la rue comme cela existait déjà avant, notamment aux Etats-Unis où je vais régulièrement voir des spectacles à Las Vegas. Il y a là-bas une très importante communauté de magiciens.
Et des producteurs ont investi dans des “drive magic” sur des aires de stationnement de supermarchés. La voiture d’un client passe devant un numéro de magie à proximité immédiate mais, comme les vitres du véhicule doivent rester fermées, il n’y a aucun risque. Et en plus, c’est gratuit: le supermarché… qui a tout à y gagner,  rémunère le magicien. Le drive est plus dans la culture anglo-saxone que dans la nôtre mais  à Bordeaux, on a vu renaître un cinéma en drive…
De toute façon, la magie saura s’adapter et  ce n’est pas le corona qui la fera disparaître…

Philippe du Vignal

Association ArteFake 16, rue Henri Gérard, 21121 Fontaine-lès-Dijon.

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Archive pour 29 mai, 2020

Adieu Guy Bedos

Adieu Guy Bedos

 Il avait 85 ans; d’origine algéroise, il était arrivé à Paris à quinze ans avec sa mère et son nouveau mari. Et il fut vite reçu  à l’Ecole de la rue Blanche (maintenant l’E.N.S.A.T.T. à Lyon). Déjà engagé politiquement, après avoir fait une grève de la faim, il fut réformé et réussit ainsi à échapper au service militaire- c’est à dire à la guerre d’Algérie! – qui était alors de trente six mois !

Et il commença à participer comme humoriste dans des émissions de télévision et il fit plus tard en 66 un duo bien connu d’humoriste avec Sophie Daumier qui était née en 1934 et est morte en 2004 d’une maladie génétique incurable) c9bcdd5164131d4349cae3d8a3ae2cfd1246471578311501avec laquelle il se mariera. Jacques Prévert lui conseilla d’écrire des sketchs. Ce qu’il commença à faire mais jouera aussi au cinéma. Et on put le voir notamment dans Les Tricheurs de Marcel Carné en 58 ou dans Ce soir ou jamais de Michel Deville trois ans plus tard. Et surtout dans Un éléphant ça trompe énormément d’Yves Robert qui le consacra, puis dans sa suite Nous irons tous au paradis. Et  il joua dans une quarantaine de films. Il épousera ensuite Karen Blanguernon dont curieux hasard, nous vous parlions récemment ( voir Livres et revues dans Le Théâtre du Blog).

Karen Blanguernon

Karen Blanguernon

Côté théâtre, il fit déjà une mise en scène à dix-sept ans d’Arlequin poli par l’amour de Marivaux avec ses camarades de la rue Blanche, des inconnus comme… Jean-Paul Belmondo, Jean-Pierre Marielle, Michel Aumont. En 1965, Guy Bedos est à Bobino avec Barbara. Et dans un sketch avec Muriel Robin. Puis on le vit dans plusieurs texte de lui  et de son fils Nicolas; mis en scène par Jean-Michel Ribes  (2003) ou  l’année suivante dans Sortie de scène de Nicolas Bedos, mise en scène  de Daniel Benoin au Théâtre national de Nice ou Rideau encore un texte de lui, mise en scène de Roger Louret.  Ou dans Moins 2 de Samuel Benchetrit une pièce pas bien fameuse au Théâtre Hébertot (voir Le Théâtre du Blog).  Mais il joua aussi magnifiquement en 93 à Chaillot le rôle-titre de La résistible Ascension d’Arturo Ui de Bertolt Brecht, avec Bernard Ballet, Jean-Pierre Kalfon et Valérie Vogt dans une des meilleures mises en scène de Jérôme Savary .  

Guy Bedos n’a jamais caché  ses préférences pour la gauche.th Comme il le raconte dans Mémoires d’outre-mère, il eut des rapports plus que difficiles avec une mère pétainiste et surtout avec un beau-père raciste, ce qui contribua sans doute à lui forger une conduite politique engagée dès sa jeunesse. «Le premier gouvernement que j’ai eu à subir, c’est ma mère et mon beau-père. Ma constance dans la rébellion vient de là.» Et ce fut la ligne de vie de cet acteur engagé et volontiers polémiste qui n’avait pas peur de prendre des coups. Et il dut faire face à de nombreux deuils parmi ses proches. Rebelle assumé, il  ne soutenait aucun parti et reconnaissait que, politiquement, on était le plus souvent obligé de choisir entre deux inconvénients! Pas mal vu…

Guy Bedos avec les ouvriers d'Arcelor Mital Photo X

Guy Bedos avec les ouvriers d’Arcelor Mital
Photo X

Et c’est tout à son honneur, il avait soutenu l’association Droit au logement et était membre de La Ligue des Droits de l’homme et demandera aux candidats à l’élection présidentielle de déposer un projet de loi pour légaliser l’euthanasie. 
Il écrivit souvent dans Siné Hebdo, un magazine satirique créé par le dessinateur Siné. Ce polémiste infatigable et très populaire tirait à boulets rouges sur toux ceux qui avaient un quelconque pouvoir social ou politique et qui n’avaient pas l’heur de lui plaire… On se souvient notamment de son spectacle en 2013, quand il s’en prit à l’ancienne ministre Nadine Morano qui le poursuivra en justice  mais il sera relaxé… Et la Cour de cassation la déboutera de ses poursuites contre l’humoriste.

Adieu Guy Bedos, vous n’aurez pas survécu très longtemps à votre ami Jean-Loup Dabadie, auteur et scénariste mort il y deux semaines. Vous avez eu une vie bien remplie et votre présence nous manquera surtout dans le paysage du spectacle actuel… «Il était beau, il était drôle, il était libre et courageux, a dit son fils Nicolas. Comme je suis fier de t’avoir eu pour père. Embrasse Desproges et Dabadie, vu que vous êtes tous au Paradis. » Nous aussi, on aimait bien son insolence et sa générosité…

Philippe du Vignal

 

 

 

 

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