Mes ancêtres les Gaulois de Nicolas Bonneau et Nicolas Marjault
Pierre Bonneau, né en 1875 à Germond (Deux-Sèvres) est le premier de la famille à fréquenter l’école de Jules Ferry…Ce paysan ne parlait que le poitevin saintongeais et apprit la langue et l’Histoire de la France selon Ernest Lavisse (1842-1922), «l’instituteur national» comme l’appelle Pierre Nora dans Les Lieux de mémoire. Un historien, ex-précepteur du prince Louis-Napoléon et converti au républicanisme dans les années 1870.
Seul en scène, avec, pour seuls accessoires, un petit bureau d’écolier, quelques images et un globe terrestre, Nicolas Bonneau dialogue avec Alésia, un robot vocal qui clignote, projette des illustrations sur écran et envoie des documents sonores. L’acteur raconte et interprète tous les personnages : ses aïeux, sa grand-mère qui éleva seule cinq enfants, son père, le maire inaugurant la statue de Jeanne d’Arc, toujours là dans le village… Et un instituteur à l’ancienne relatant les riches heures de l’histoire de France et de ses héros.
©Jeanne Nicolas Marjault
Brandissant le “Petit Lavisse“ de son trisaïeul, Nicolas Bonneau commente et décrypte le fameux tableau de Vercingétorix jette ses armes aux pieds de César (1899) de Lionel Royer, une huile sur toile de plus de douze m2! dont on a longtemps exposé la reproduction dans les écoles primaires. Tout est faux, nous dit-il, dans ce chromo… Le peintre, marqué par la défaite des Français à Sedan en 1870, y exalte la noblesse des vaincus et le sacrifice du héros gaulois. A l’instar de Jeanne-d’Arc, Vercingétorix a alimenté le sentiment national de générations de Français …
«C’est quoi se sentir Français? C’est quoi la nation française? Quelle est cette étrange idée qui nous fait frissonner ? Qu’est-ce qui nous fait pleurer devant Notre-Dame en flammes ? Qu’a-t-on bien pu nous raconter pour qu’on se lève tous devant un but de Benjamin Pavard en huitième de finale contre l’Argentine?», se demande Nicolas Bonneau. Il creuse ces questions à la lumière de la vérité historique et à l’aune de plusieurs générations de sa famille.
Dans la continuité d’un travail sur la mémoire collective (voir Le Théâtre du Blog), il remonte son arbre généalogique pour écrire son propre roman et revisiter celui de la France. D’un côté, la légende, la mythologie et, de l’autre, la réalité des guerres, des crises politiques et des revers de fortune qu’ont vécu de modestes citoyens dans un coin perdu du Poitou, bien loin des lieux où s’exerce le Pouvoir. Un père ouvrier mort d’un cancer dû à l’amiante, un grand-père inconnu et un arrière-grand-père rescapé de l’enfer de Verdun et du Chemin des Dames…
Un parcours sensible avec, en contrepoint, le regard critique apporté par Nicolas Marjault, historien et par ailleurs, auteur de polars qui s’appuie sur les travaux de grands historiens et sociologues, pour rétablir la vérité et analyser la fabrication de ce fameux «sentiment national» qui semble aujourd’hui avoir le vent en poupe dans le paysage politique européen.
Les auteurs s’inquiètent de cette résurgence et, pour conjurer le danger, nous adressent ici un message fort avec quelques illustrations savoureuses. Une pièce émouvante, ludique et populaire qui devrait contribuer à ouvrir les esprits. Chacun, quelle que soit son origine, y projettera son histoire familiale avec ses personnages marquants et leurs secrets. Le spectacle s’adresse à un large public et peut être joué sur un plateau de théâtre, à l’extérieur, ou encore dans une salle de classe. Créé à la veille du confinement, il reprend vie un peu partout dans de nombreux départements…
Mireille Davidovici
Spectacle vu le 7 octobre au M.A.I.F. Social Club, 37 rue de Turenne, Paris (III ème).
Le 2 novembre, Régions en scène, Pau (Pyrénées-Atlantiques) du 18 au 20 janvier Moulin du Roc, Niort (Deux-Sèvres). Le 21 janvier Espace Agapit, Saint-Maixent-l’Ecole (Deux-Sèvres) ; 22 janvier, Metullum, Melle (Deux-Sèvres) ; du 26 au 29 janvier, Théâtre des Sources, Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine).
Le 6 mars, Foyer rural, Orcines (Puy-de-Dôme) ; les 11 et 12 mars, Les 3 T, Châtellerault (Vienne).
Le 16 avril, Segré (Maine-et-Loire) ; le 23 avril, Culture Commune, Ferfay (Pas-de-Calais).
Le 8 mai, Germond-Rouvre et les 11 et 12 mai, Théâtre de Thouars (Deux-Sèvres).