Projet V. par le Diptyque Collectif

 

Projet V. par le Diptyque Collectif

Cinq jeunes comédiens, vidéastes, musiciens et artistes : moyenne d’âge vingt-huit ans. Ils nous font vivre en une heure trente le quotidien d’un E.P.H.A.D. non pas comme des voyeurs ou des chroniqueurs, mais en interprétant ceux qu’ils ont rencontrés à la Maison du Grand Cèdre à Arcueil: «D’abord partie d’une histoire personnelle, la question de la vieillesse s’est rapidement imposée à notre collectif. L’idée: proposer aux résidents des ateliers de pratique artistique, pour nous immerger dans ces lieux qui restent en marge, même si cela nous effrayait.» Ils ont pu ainsi les filmer et les enregistrer, eux mais aussi leurs enfants et les soignants. Parallèlement à Projet V., ils ont réalisé un court-métrage au sein de l’E.H.P.A.D., avec les résidents, le personnel et des adolescents d’Arcueil (Val-de-Marne).

imagesDe cette maison, ils nous restituent l’environnement sonore, diffusé en plusieurs points du théâtre : musique de fond, bruits de cantine, râles et toux, glissement des pantoufles sur le lino, sonnette de l’entrée, émissions de télévision, voix artificielle de l’ascenseur qui s’ouvre et se referme, murmures des aides-soignants. Et, sur plusieurs écrans, des images panoramiques des couloirs, halls et salle à manger…

Se jouent ici de courtes séquences: conversation entre une fille et sa mère lors d’une brève visite, discussion entre un soignant et un résident, conseil de famille pour le placement de l’aïeule, récit d’un fils hésitant à faire entrer son père dans un E.H.P.A.D., souvenirs d’une vieille dame, dialogue entre un homme dur d’oreille et sa voisine de table… Beaucoup de scènes muettes avec la seule présence des protagonistes sous différents angles de vue. Et on assiste aux répétitifs déjeuners et dîners rythmant leurs journées ternes.

Les artistes ne cherchent pas à composer des personnages plus vrais que nature mais ont réécrit ensemble les gestes et mots qu’ils ont empruntés et ils les portent dans leurs corps jeunes, transposant seulement une amorce de mouvement, une lenteur, un tic de langage, un déséquilibre ou un trou de mémoire, sans vouloir imiter la vieillesse. Ils s’investissent dans leurs rôles, tout en gardant la juste distance et sans pathos. Ce qui leur permet de naviguer en toute liberté de l’ironie à la noirceur. Un simple élément de costume et les voici devenus un soignant courant dans le couloir, un enfant culpabilisé de quitter son aîné ou un vieillard écroulé dans un fauteuil.  Ils rendent compte ainsi de situations absurdes voire parfois cocasses et du décalage entre le monde extérieur et cette maison. Mais aussi de la monotonie et de la vacuité de ces vies recluses.

Et finalement, entre les lignes de ce documentaire décalé réalisé avant le Covid, une interrogation : pourquoi, malgré toutes les bonnes volontés et intentions, de tels lieux existent-ils? Une alerte de plus sur un problème que tout le monde connaît et que la crise sanitaire a cruellement révélé.

Après cette première représentation, le spectacle devrait se jouer à l’automne au Nouveau Théâtre de Montreuil et à la Reine Blanche à Paris. En attendant, le Diptyque Collectif prépare Logique des passions (titre provisoire): une installation immersive (vidéo et sons) d’après des textes de Stefan Zweig, Roland Gori et Anne Dufourmantelle.

Mireille Davidovici

Représentation vue  le 2 avril au Nouveau Gare au Théâtre, 13 rue Pierre Sémard, Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne)

 

 

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