Je te pardonne (Harvey Weinstein) texte, musique et mise en scène de Pierre Notte
Je te pardonne (Harvey Weinstein), texte, musique et mise en scène de Pierre Notte
Sur ce grand plateau, autour d’un pianiste travesti en femme (Clément Walker-Viry), trois interprètes dont l’auteur et metteur en scène : «C’est le propre du cabaret, ce (repaire), refuge à catastrophes humaines. Opportuniste, intempestif et putassier», dit-il un rien provocateur comme le sont le titre et le propos de cette pièce. Marie Notte et Pauline Chagne partagent la scène avec lui, oscillant entre personnages qui ont fait l’actualité de Me#too, commentaires désobligeants à l’égard du texte, adresses au public.
Harwey Weinstein lui-même, en tyran déchu au corps déliquescent sous les traits de Pierre Notte, s’agite face à des justicières comme Christiane Taubira, Elisabeth Badinter ou une femme de chambre du Sofitel de New York accusant un autre prédateur sexuel… L’auteur en profite pour égratigner le roi incestueux de Peau d’âne et les princes charmants des contes autres chevaliers “fervents“, machos patentés. Revenant du même coup à l’actrice qui fut l’héroïne du film éponyme de Jacques Demy, il revisite à la fin, la chanson de Moi aussi je suis Catherine Deneuve, son premier succès théâtral où il faisait déjà le portrait de femmes révoltées. Ici Pierre Notte souhaite présenter une version «améliorée» de son égérie d’antan: «Peut-on lui pardonner d’avoir estimé que le mariage pour tous était superfétatoire, puis d’avoir revendiqué le droit à être importunée ?»
Et peut-on pardonner aux Harvey Weinstein, Roman Polanski, Gabriel Matzneff et autres objets de la vindicte médiatique? Les acteurs demandent au public de se prononcer. Ce qu’il fera.. timidement. Dans cette pièce au titre ambigu, voire racoleur -mais son auteur l’assume pleinement- on retrouve l’humour particulier de Pierre Notte et ses chansons aux paroles astucieusement explicites où les voix des interprètes s’entrelacent dans un joli tissage lumineux, sous les poursuites et douches des projecteurs…
Qu’il joue Harvey Weinstein se métamorphosant en femme au fil du spectacle ou le Roi de Peau d’âne ou encore seulement lui-même, l’auteur-comédien a affaire à forte partie avec ses partenaires féminines et son travelo de pianiste qui sont à l’affut du moindre dérapage de langage…
Mais il ne faut pas chercher trop de sérieux dans cette joyeuse mise en boîte de notre époque. «Nous voulons nous amuser, chanter encore nos catastrophes et nos ridicules, partir faire des claquettes dans les champs minés aux alentours d’Alep, dit Pierre Notte, le tragique est alors plus tolérable. » Ce spectacle donnera sans doute lieu à des polémiques! Culs serrés s’abstenir…
Mireille Davidovici
Jusqu’au 26 juin, Théâtre du Rond-Point, 2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, Paris (VIII ème). T. : 01 44 95 98 21. www.theatredurondpoint.fr