Le Cycle de l’absurde, mise en scène de Raphaëlle Boitel

Le Cycle de l’absurde, mise en scène de Raphaëlle Boitel

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© Christophe Raynaud de Lage

Spectacle de sortie de la trente-deuxième promotion du Centre National des Arts du Cirque à Chalons-en-Champagne…. Faire travailler un collectif déjà constitué en respectant les individualités, telle est l’exigence du genre. « Je ne peux prendre leurs quatorze univers et en faire un patchwork, dit la metteuse en scène. »

Raphaëlle Boitel qui, à treize ans, travaillait déjà avec James Thierrée est rodée aux grands formats et a construit un lien entre les jeunes circassiens et un fil conducteur: «Parler des travers des hommes et des hommes de travers. » Elle nous fait ainsi découvrir les aptitudes des artistes et leur fragilité, leur force quand ils poussent leur talent aux limites, et leur humour juvénile. On les découvre au rythme de leurs exploits physiques, ponctués de dérapages contrôlés, conciliabules et échanges musclés, amoureux ou amicaux…

Quatorze étudiants de sept nationalités et douze disciplines se croisent dans un grand corps collectif dont l’appartenance s’affiche par des mouvements d’ensemble chorégraphiés. Il y a des dialogues entre spécialités comme ce beau moment où Guiseppe Germini, évolue sur un fil, accompagné par Alberto Diaz Gutierrez au trapèze fixe, Andres Mateo Castelblanco Suarez ,au trapèze washington, Pablo Fraile Ruiz, à la corde lisse et Erwan Tarlet, au bout de sa sangle. Tandis que Fleuriane Cornet, tourne autour de la piste, en équilibre sur son vélo….

Un autre moment éloquent autour d’une étrange machinerie, le spider, marque l’apogée du spectacle. Cet agrès en fils convergents actionne une sangle accrochée à leur croisement. La structure en toile d’araignée met en lumière l’interdépendance de ceux qui tirent les ficelles et du sangliste Mohamed Rarhib voltigeant en solo et oscillant comme le battant d’une cloche…

 Nous avons aussi eu le plaisir de retrouver les interprètes rencontrés au festival d’Alba, dans le Cabarêve des établissements Félix Tampon (voir le Théâtre du blog) : l’élégante Cannelle Maire, à la roue allemande, Tia Balacey qui ponctue le spectacle de ses danses acrobatiques sinueuses, le poétique Ricardo Serrao Mendes et ses balles jaunes et l’impressionnante Vassiliki Rossilion défiant les lois de la gravité à la corde volante.  Il y a aussi des acrobates qui interviennent souvent comme Aris Colangelo avec ses clowneries enfarinées, Marin Garnier, porteur et Maria Jesus Penjean Puig, voltigeuse…  Raphaëlle Boitel réussit à mettre chacun en valeur dans ce groupe en mouvement. Eclairages et musique conçus au début des répétitions, y sont pour beaucoup. Rythmant les parcours, les lumières de Tristan Baudouin accrochent dans leurs rais un fragment de figure, un bras, une tête, une attitude, en les faisant émerger du clair-obscur qui règne sur la piste, comme autant de membres de ce grand corps solidaire. Et les compositions d’Arthur Bison offrent une ambiance sonore feutrée aux mouvements d’ensemble et soulignent au plus près la tension de chaque numéro… Dans ce Cycle de l’absurde, Raphaële Boitel a un regard amusé et tendre sur un travail artistique rigoureux et privilégie l’aspect ludique propre aux jeux de cirque. Une belle réussite …

 Mireille Davidovici

Jusqu’au 31 juillet, Grande Halle de la Villette Paris (XIX ème). Métro : Porte de Pantin. T. :01 40 03 75 75.

Centre National des Arts du Cirque, 1 rue du Cirque, Châlons-en- Champagne (Marne).

 


Archive pour 23 juillet, 2021

Festival d’Avignon Les Ateliers d’art plastique de l’École supérieure d’art d’Avignon

Festival d’Avignon

Les Ateliers d’arts plastiques de l’École supérieure d’art d’Avignon

Une initiative intéressante. L’Ecole  Supérieure d’Art de cette ville programme des ateliers pour enfants et adolescents dans l’année mais cette fois aussi sur toute la durée du festival In en liaison avec des formes théâtrales qui y sont présentées. A notre connaissance, une première. Cette Ecole a un long passé. Située en 1801 dans le bel hôtel de Sade, rue Dorée, elle émigrera en 1889 dans une ancienne caserne, rue des Lices où elle sera dirigée pendant de longues années par le remarquable peintre Michel Steiner. Le photographe Willy Ronis et l’écrivain et artiste Pierre Tilman y enseignèrent…

Sans doute le site était-il assez petit et mal adapté à un enseignement spécialisé mais d’une grande poésie… Dans le jardin, une forge, le printemps revenu, servait aussi à midi de barbecue. Ses anciens élèves et enseignants se souviennent avec nostalgie de ce lieu en plein Avignon mais le bâtiment fut vendu sans état d’âme par la municipalité en 1997 et est devenu un site d’habitations privées dont l’architecture avec sa galerie extérieure a été préservée et restaurée. L’Ecole a ensuite déménagé  dans un bâtiment plus vaste, actuellement occupé par la collection Lambert…. 

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 Il y a huit ans en effet,  elle a quitté le centre-ville pour une ancienne école d’infirmières  construite en  1992 à la périphérie de la ville Un vaste bâtiment  d’une esthétique peu raffinée comme savent en construire les architectes actuels, mais fonctionnel sur environ 2.000 m2, juste en face du centre hospitalier Henri Duffaut. Raphaëlle Mancini, administratrice de l’Ecole chargée de mettre en œuvre le projet d’établissement renouvelé en 2019,  nous l’a fait visiter. Il y a, entre autres, un espace d’accueil pouvant accueillir des expositions, une grande bibliothèque visiblement bien fournie, de vastes ateliers pour, entre autres, l’enseignement de  la conservation-restauration, une spécialité de l’Ecole depuis longtemps et un amphithéâtre d’une centaine de places pour les enseignements théoriques. Mais il faut une demi-heure de bus depuis le centre ville pour arriver à l’Ecole…

Donc excentrée et peu connue du grand public avignonnais, elle dispose aussi d’une annexe dans le quartier Champfleury où ont lieu ces ateliers gratuits, ouverts aux enfants et adolescents pendant l’année et cette fois pendant le festival, en liaison avec les spectacles  Pinocchio (live)#2, un spectacle d’Alice Laloy et  Histoire des cartes de Nicolas Doutey et Paul Cox, un spectacle que Bérangère Vantusso a créé avec des acteurs mais aussi des marionnettes et des images. «Objet. De pouvoir et  de contrôle, représentation du réel ou reflet d’un imaginaire, la carte s’utilise pour s’orienter, commercer, faire la guerre ou encore s’échapper, rêver. » Avec la très bonne compagnie de l’Oiseau-Mouche (voir Le Théâtre du Blog) dont les interprètes sont en situation d’handicap mental. Pour la plupart, les enfants et ados ont vu l’un ou l’autre de ces spectacles…

© Merlin Dramais

© Merlin Dramais

Ces ateliers sont animés par Sylvette Ardoino, enseignante à l’Ecole Supérieure d’Art d’Avignon, après y avoir été élève après celle de Toulon. « A ma sortie de l’Ecole, j’ai obtenu la bourse Entrez les artistes du Ministère de la Culture et celui  de l’Education nationale pour travailler au collège Joseph Vernet en résidence pendant un an. Puis j’ai été  recrutée à pour m’occuper des cours pour enfants. Et j’ai aussi parcouru la France et l’étranger, pour trouver d’autres formes de pédagogie artistique innovantes, notamment à Reggio en Italie. Les principes de base? Une structure d’accueil favorisant la communication et l’autonomie en favorisant l’expression artistique, corporelle, langagière, émotionnelle… où l’enfant est considéré comme un être unique et  compétent mais aussi acteur de son développement. Ainsi  l’adulte l’accompagne, respecte son rythme et «provoque» des situations pédagogiques en favorisant ses compétences. Et on l’invite aussi à découvrir la nature et  à l’observer.  Le lien à l’art dans l’approche Reggio est  fondé sur la notion des cent langages de l’enfant de Loris Malaguzzi. Des «atelieristes» sont à demeure dans chaque école et interviennent dans les crèches.  Ces peintres, danseurs graphistes, informaticiens…. proposent aux enfants de travailler sur des projets créatifs. L’objectif: favoriser chez eux une autre vision de la réalité et chez l’adulte, une autre façon d’être et de travailler avec les enfants, hors des normes. Le dessin est très important, notamment dans cette découverte de la nature.

 

Que dire de mon travail? Je me définis aussi comme une ateliériste. Ce qui veut dire être pour moi au cœur des apprentissages par l’art. J’ai créé la Chapelle Sixteen pour accueillir dans la vie artistique les jeunes de trois  à dix-huit ans.. J’ai enseigné douze années à Sète où j’ai été missionnée pour ouvrir l’école des Beaux-Arts aux touts-petits et à leurs familles. Puis j’ai créé la Petite Épicerie, un service pédagogique du Musée International des Arts Modestes. Et revenue à l’Ecole Supérieure d’Art, je suis coordinatrice des Ateliers Libres pendant l’année scolaire. Et ici, à dans le quartier Champleury, une annexe, j’anime  en ce moment un peu particulier qu’est le festival, pour la première fois, chaque après-midi pendant trois heures avec mon assistant, Merlin Dramais, un élève de l’Ecole, deux ateliers. L’un à partir de cartes routières récupérées chez Emmaüs et chez des particuliers. Ils sont fréquentés par  une quinzaine d’enfants et adolescents qui habitent Avignon ou y sont de passage, belges, italiens…  Il y a même un jeune émigré du Venezuela… Cette mixité me parait indispensable.

Merlin Dramais

©Merlin Dramais

Nous essayons de leur faire établir des des parallèles entre le corps et les cartes mais aussi entre circulation et flux qui les traversent. Ils  participent à la création de sachets de voyage, badges, etc.  et apprennent aussi à se servir de machines à découper des formes diverses. Ces ateliers sont gratuits; faudrait-il les rendre légèrement payants, de façon à ce que  les enfants soient incités par leurs parents à être assidus? Une question que l’on peut se poser…

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Un autre atelier est aussi dirigé par Sylvette Ardoino sur le thème des yeux. En lien avec  Pinocchio (live)#2, un spectacle d’Alice Laloy joué seulement quatre fois au festival (voir aussi Le Théâtre du Blog) Pinocchio signifiant en italien:  «yeux en bois de pin » . Le deuxième de ces spectacles étant sans doute parmi les meilleurs de cette soixante-quinzième édition assez inégale du festival.Tout un programme offert à un enfant qui s’empare d’une feuille de papier et d’un crayon sous la houlette d’un enseignant….Pour  représenter l’œil qui, avec la main et  les élèves des écoles d’art le savent bien, est un élément capital du corps humain -l’œil oudjat égyptien était le symbole protecteur du dieu faucon Horus- mais pas facile à dessiner!

 Et cette action artistique, vu les bons retours d’expérience, sera renouvelée l’an prochain. Il faut espérer que cela favorise chez les habitants comme chez les festivaliers, une meilleure connaissance de cette Ecole d’art… même si elle n’est plus au cœur de la Cité des Papes.

 

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Morgan Labar vient d’être nommé directeur de l’École supérieure d’art à compter du 1 er septembre et succède à Alfredo-Cardenas.

Chercheur contractuel au département des arts à l’École normale supérieure Paris, il y enseigne l’histoire de l’art contemporain depuis l’an dernier  et chargé d’enseignement en histoire de l’art à l’université PSL de Paris  XIV ème) depuis 2013.

Il est aussi critique d’art et auteur d’une thèse : La Bêtise comme pratique artistique et les hiérarchies esthétiques. Il a aussi été assistant au Centre Pompidou-Metz de 2011 à 2013…

Philippe du Vignal

Ateliers d’arts plastiques par l’École supérieure d’art d’Avignon, à Champfleury, 1 avenue de la Foire, Avignon.

Pour enfants et adolescents de six à quinze ans, de 14 h 30 à 17 h 30 sauf le dimanche, jusqu’au  24 juillet. Gratuit mais réservation obligatoire auprès de la billetterie du festival In.

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