Festival d’Avignon La Dernière Nuit du monde de Laurent Gaudé, mise en scène de Fabrice Murgia

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La Dernière Nuit du monde de Laurent Gaudé, mise en scène de Fabrice Murgia

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© Christophe Raynaud de Lage

 Le metteur en scène et l’écrivain avaient déjà collaboré et depuis, gardé l’envie de construire un projet ensemble. Et ils sont tombés sur 24/7 Le Capitalisme à l’assaut du sommeil, un essai du philosophe  Jonathan Gary qui montre comment la pression sociale pousse l’homme à raccourcir ses nuits en grignotant sur son sommeil. A partir de là, Laurent Gaudé a écrit un conte moral en forme de dystopie.

Bientôt une pilule sera mise sur le marché et permettra de dormir quarante-cinq minutes par vingt-quatre heures, sans être fatigué. Gabor, enthousiaste, trouve les bons arguments publicitaires pour cette révolution planétaire. «Tout cela, c’est le monde de demain. Car l’enjeu est là, étaler l’activité du jour pour créer du travail… Peupler la nuit pour désengorger le jour .»
On va fêter l’abolition de la nuit quand il apprend que Lou, la femme qu’il aime, a été blessée dans une manifestation du mouvement Nuit Noire et  « ne passera pas la nuit ». Tout bascule alors: ce qui devait pour lui ouvrir une ère nouvelle, devient une catastrophe intime, sociale et écologique.. Les humains seront débordés par cette «nuit qui déborde ».

La Dernière nuit du monde, avec pour sous-titre : Monologue peuplé, donne une voix à de nombreux personnages. Mais ici la pièce est juste incarnée par le metteur en scène qui joue Gabor, et par Nancy Nkusi (en alternance avec Nadine Baboy), sa fiancée lointaine qui parle au micro avec lui derrière la vitre d’un studio d’enregistrement.
Gabor, fébrile, attend la dernière nuit et cette fiancée lui apparaît en gros plan sur grand écran où d’autres personnages se manifestent virtuellement : la directrice de Gabor, la cheffe rebelle des Samis de Laponie, des journalistes de la télévision… La vidéo, omniprésente, peuple la nuit avignonnaise d’images mouvantes aux couleurs artificielles, traitées avec des filtres rouge ou bleu, à en faire oublier les arbres et les voûtes du cloître…

Ici, la fable, bien que d’actualité, se perd sans nous capter. Le jeu survolté de Fabrice Murgia peine à convaincre et Nancy Nkusi, à la belle prestance et à la voix envoûtante, reste dans la pénombre… Malgré l’élégance sophistiquée du décor géométrique signé Vincent Lemaire et d’images vidéo léchées, cette histoire nous a paru invraisemblable.
Centrée sur le couple Gabor/Lou, elle passe sans doute à côté des enjeux philosophiques et sociétaux portés par les autres personnages, réduits ici à des images filmées. Nous avons
connu Laurent Gaudé mieux inspiré : la science-fiction ne semble pas être son rayon et son texte est noyé dans trop d’artifices visuels et sonores. Dommage…

 Mireille Davidovici

 Spectacle vu le 13 juillet au Cloître des Célestins, Avignon.

 Les 31 août et le 1er septembre, Théâtre de Liège, les 3 et 4 septembre, L’Ancre, Charleroi (Belgique) et du 14 au 18 septembre, Théâtre Wallonie-Bruxelles, Bruxelles ( Belgique).
Les 12 et 13 octobre Tonelhuis, Anvers (Belgique) ; du  21  au 24 octobre, Centro Dramatico Nacional, Madrid (Espagne).

Le 1er mars, Théâtres en Dracénie, Draguignan (Var) ; le 8 mars, Cultuurcentrum Brugge, Bruges et les 11 et 12 mars, La Louvière-Central, La Louvière (Belgique).  Les 16 et 17 mars, Scène nationale d’Albi (Tarn)  et le 24 mars, Théâtre de Namur, Namur (Belgique) ;

Du 10 au 14 avril, Théâtre national de Wallonie-Bruxelles, Bruxelles (Belgique) ;

Le texte est publié chez Actes-Sud.

 

 


Archive pour juillet, 2021

Fragments d’après Hannah Arendt, mise en scène de Charles Berling

Festival d’Avignon

 Fragments d’après Hannah Arendt, mise en scène de Charles Berling

 La comédienne Bérangère Warluzel a adapté avec Charles Berling les textes de la philosophe allemande. Elle est la belle vectrice de sa pensée, entourée de quatre enfants de la famille Oren qui parfois lui donnent la réplique, ou jouent du piano.

 

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©Vincent Béranger

Un piano à cour, une table à jardin pour tout décor, avec deux mannequins et trois spectateurs sur le plateau et, à l’avant-scène, trois transistors des années soixante. Nous sommes transportés dans une époque où le texte et la parole n’étaient pas écrasés par l’image. Pendant une heure vingt, l’actrice nous fait entendre des citations d’Hannah Harendt ou des extraits d’entretiens. Certains textes s’avèrent encore aujourd’hui d’une cruelle vérité : « La culture de masse est la culture de la société de masse … La société de masse ne veut pas la culture, elle veut des loisirs. Les produits de loisir servent à passer le temps … La société de masse est une société de consommateurs. »

 

Ce voyage en philosophie se fait très simplement grâce à une parole claire et intelligente. Le spectateur attentif ressort de la salle plus instruit. Espérons qu’il se précipitera dans une librairie pour lire et donc entretenir ce moment d’intelligence partagée.

 

Jean Couturier

 

Jusqu’au 28 juillet à 11 h sauf jeudi, Présence Pasteur, 13 rue du Pont Trouca, Avignon .T. : 09 80 08 40 40.

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À table, chez nous, on ne parlait pas, texte et mise en scène d’Hédi Tillette de Clermont-Tonnerre

 

À table, chez nous, on ne parlait pas, texte et mise en scène d’Hédi Tillette de Clermont-Tonnerre

© x

© x

Un bon fils, un adolescent qui se tient bien à table, grandit et devient étudiant, pourquoi pas en droit ? « Tout ça, c’est une destinée normale», aurait dit Karl Valentin, le Charlie Chaplin allemand  de la République de Weimar (1918-1933). Oui. Mais pour de jeunes Français nés en 1920, 21 ou 22, non. Ils vont devoir sauver la France contre elle-même, comme l’a fait le maréchal Pétain, en  collaborant mais de force. Réquisitionnés pour le S.T.O. service du travail obligatoire, ils partiront le cœur, non pas léger mais lourd de leur devoir.

En compensation de leur sacrifice, le sort des prisonniers français pourrait être amélioré (on ne parle pas des camps d’extermination), les frais d’occupation : autrement dit, la rançon de la défaite, serainet réduits et le ravitaillement de la population mieux assuré. Deux ans à maintenir à flot une Allemagne de plus en plus exsangue, en particulier sur le front de l’Est. Logés dans un «lager», moins dur que celui décrit par Primo Levi dans Si c’est un homme, exploités, et nourris au prorata de leur force de travail. Mais « faire son devoir de patriote » se change en « travailler pour l’ennemi ». Obéir et trahir.

Hédi Tilette de Clermont-Tonnerre fait le récit du départ et du retour d’un réquisitionné du S.T.O. entre deux repas de famille. Les gendarmes avaient beau être venus prévenir qu’ils fermeraient les yeux et laisseraient partir le « réfractaire »: c’est non. Fidèle à son Maréchal, fidèle à l’honneur et à la discipline militaire, le père, héros de la Grande Guerre, obtempère à la réquisition. Il sacrifie à sa propre loi son fils qui sera maudit à son retour, insulté même par les derniers résistants en papier mâché. Et là, pas de miracle : une génération de silence….

L’auteur-acteur entre en scène avec un sourire à la Charlie Chaplin, enjôleur, comme si le personnage s’excusait tout en voulant séduire. Scénographie minimale : une table avec nappe suffit à évoquer le noyau familial. Et fait alors irruption  (leur compagnie s’appelle le Théâtre irruptionnel ) le sacrifice d’Abraham, Lisa Pajon amenant au moment opportun, bonnet à bouclettes sur la tête, un très surprenant agneau. Pour Abraham: miracle, Dieu a sauvé Isaac. Mais, pour l’honorable capitaine et son fils, pas de miracle, décidément. La scène biblique casse dans sa forme naïve l’histoire de cette famille ordinaire. Elle creuse ainsi une absence, un manque dont le public comprendra plus tard le sens.

Ce spectacle, qu’on classerait dans les petites formes, au vu de ses moyens modestes se révèle être grand. Pas seulement par ses références historiques sur ce sujet dont on ne parle pas : combien de Français sont allés travailler en Allemagne, plus ou moins contraints ? La question n’est pas celle du nombre mais des vies abimée, honteuses, amères, avec leur noyau tragique. Peut-on encore dire le cœur tranquille : je n’ai fait qu’obéir ? Les réquisitionnés du S.T.O. ont obtenu en 2018 -soixante dix ans après les faits! – le titre de victimes du travail forcé en Allemagne nazie. Mais celui de « déportés du travail » leur a été refusé. Rien n’est réparé et ce n’est pas le thème de ce texte qui parle plutôt de l’irréparable, transmis en silence d’une génération à l’autre. Sans jamais expliquer : l’explication est l’ennemie du théâtre ! Et ce spectacle nous émeut aux larmes.

Christine Friedel

Les 20 et 21 août, festival Théâtre au jardin à Brioux-sur-Boutonne (Deux-Sèvres).

Les 18 et 19 septembre , Journées Européennes du patrimoine, Villa Bloch, Grand-Poitiers (Vienne).

Les 26 et 27 mars, Festival Mars en Braconne, Grand-Angoulême (Charente).

Été 2022 , en gare de l’Est à Paris.

 

 

 

 

 

 

 

Fraternité,conte fantastique, mise en scène de Caroline Guila Nguyen

Festival d’Avignon

 

Fraternité,conte fantastique, mise en scène de Caroline Guila Nguyen

Nous nous rappelons de l’émotion suscitée par Saïgon en 2017 à ce même festival (voir Le Théâtre du Blog). Ici, la metteuse en scène nous emmène dans un centre de soins et de consolation.Un lieu fictif inspiré du réel : le bureau de rétablissement des liens familiaux, un organisme de la Croix-Rouge internationale où on essaye que des gens qui se sont perdus de vue, notamment après une guerre, puissent renouer des liens. Ainsi, des femmes et des hommes laissent des messages vocaux à des proches qui ont disparu,  avec l’espoir de les retrouver un jour.

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage

Un agent de la N.A.S.A. contrôle le cœur de chacun et constate pour chaque souffrance, une baisse significative des pulsations, ce qui entraîne un dérèglement de la rotation du système solaire:«Quelque chose dans l’univers semblait réagir à cette douleur abyssale ouverte dans le cœur de tous, le cosmos devenait le miroir des cœurs. »«La fraternité, dit Caroline Guila Nguyen (…) s’incarnera à travers le parcours de  personnages qui cherchent à construire un avenir commun avec leurs invisibles. »

 Chacun nous fait ainsi partager sa souffrance, et les acteurs, entre autres, des amateurs de vingt-et-un à quatre-vingt deux ans, d’origine socio-culturelle différente, sont d’une vérité troublante. Impressionnant de réalisme, le centre avec une cabine à messages et un très grand écran de contrôle de la Terre. Un lieu porteur d’espoir mais aussi de douleur morale qui deviendra un lien entre les personnages. La metteuse en scène nous fait partager une expérience de vie et les témoignages incitent à l’émotion: «Je suis triste, je pleure, mais les larmes me permettent d’aller mieux.»
Mais le message de cette (trop!) longue pièce : trois heures trente avec entracte! manque vraiment de lisibilité… Avec cette forme de théâtre-récit fantastique où le cosmos devient le miroir des cœurs, Caroline Guila Nguyen veut sans doute lier notre destinée humaine à celle de l’univers, avec le risque potentiel d’une mise à l’arrêt…

 Jean Couturier.

 Spectacle vu le 11 juillet à la Fabrica, Avignon

 Du 27 août au 3 septembre, Dramaten, Stockholm, (Suède).

Du16 septembre au 17 octobre, Odéon-Théâtre de l’Europe, Paris (V ème).

Du 28 au 31 octobre, Centro Dramatico Nacional, Madrid, (Espagne).

Les 8 et 9 novembre, Le Parvis, Tarbes (Hautes-Pyrénées). Du  23 au 26 novembre, MC2: Grenoble (Isère).

Les 1er et 2 décembre, Théâtre de l’Union, Limoges (Haute-Vienne). Du 8 au 11 décembre, Théâtre national Wallonie-Bruxelles, Bruxelles du 15 au 18 décembre, Théâtre de Liège (Belgique).

Du 6 au 15 janvier, Les Célestins Lyon (Ier), (Rhône).

Du 23 février au 3 mars, Théâtre National de Bretagne, Rennes (Ile-et-Vilaine).

Du 9 au 11 mars, Comédie de Reims ; du 17 au 19 mars, Châteauvallon-Scène nationale, Ollioules (Var) et du 24 au 26 mars, La Criée, Théâtre national de Marseille.

Les 4 et 5 avril, Schaubühne, Berlin (Allemagne). Les 9 et 10 avril, Thalia Theater, Hambourg (Allemagne) ; les 26 et 27 avril, São Luiz Teatro, Lisbonne (Portugal).

Et du 11 au 13 mai, La Rose des Vents-Le Grand Sud, Lille (Nord).

 

Presque égal à de Jonas Hassen Khemiri, traduction de Marianne Ségol-Samoy, mise en scène de Laurent Vacher

Presque égal à de Jonas Hassen Khemiri, traduction de Marianne Ségol-Samoy, mise en scène de Laurent Vacher

 

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage

L’économie, ce n’est pas compliqué : il s‘agit tout simplement de produire de la valeur, d’augmenter son coefficient personnel de satisfaction. Cela s’applique surtout à l’argent mais aussi au chocolat –demandez au fantaisiste monsieur Van Houten-, mais parfois à d’autres « valeurs » dont le théâtre, comme le fait plaisamment remarquer le professeur d’économie dans ce spectacle. Vous avez risqué l’achat d’un billet. 1) en avez-vous pour votre argent ? 2) En avez-vous plus que pour votre argent?  Puisque vous avez été «déçu en bien » comme disent les Suisses soit : heureusement surpris…

Mais si l’on en restait là, l’économie serait un agréable divertissement. Tout le spectacle va consister à nous montrer à quel point elle n’est pas une science mais une piège mental destructeur pour les êtres humains qui tentent de le rester. Andrej, l’étudiant diplômé en économie fera très vite ses travaux pratiques : Pôle Emploi n’a pour lui que le conseil n°1, Débrouille-toi. Obstiné mais plein de bon sens, il finira par se présenter comme vendeur au bureau de tabac où il s’est ruiné en timbres pour envoyer ces C.V. dont personne ou presque n’accuse réception. Si ça ne ressemble pas à la vraie vie… Et ainsi de suite pour les autres personnages, Martina, Freya, qui aurait poussé sous une voiture sa rivale pour récupérer son poste, jusqu’au professeur d’Université en emploi précaire qui a été  remercié. On dirait que seul Pieter le SDF s’en sort, mais de façon ambiguë : quel rôle joue-t-il vraiment ?

La scénographie de Baptiste Billon, toute en châssis montables et démontables est une belle métaphore de l’étranglement des pauvres: ils manipulent eux-mêmes les mécanismes économiques qui les épuisent et les vident de leur âme. Les vertus moyennes ne résistent pas : meulées, broyées par le besoin, la concurrence, la guerre de tous contre tous, et avalées par la « machine capitaliste ». C’est la tragédie des pauvres : quoique les plus faibles, forcés de prêter la main aux plus puissants, ils n’ont même plus droit à leur innocence…

La force de Khemiri est de faire de cette tragédie une comédie. Ce que le public avait découvert avec Invasion, mise en scène par Michel Didym en 2010 et J’appelle mes frères , mise en scène de Noémie Rosenblatt deux ans avant. Nous ressentons un soulagement paradoxal à écouter en direct, à voir fonctionner à nu la machine dont nous sommes bien obligé de reconnaître qu’elle nous opprime et s’empare carrément de ce que nous avons cru être « nous ».

Quentin Baillot, Pierre Hiessler, Odja Llorca, Frédérique Loliée, Alexandre Palu, Marie-Aude Weiss, appuient le dessin du jeu avec juste ce qu’il faut d’insistance pour que cela tourne, non à la caricature, mais à la clarté et à l’efficacité du dessin de presse. De fait, il s’agit d’actualité…Pari tenu : la mécanique du théâtre fonctionne, au moins aussi bien que celle qu’elle décrit. Mais en plu,s elle n’est pas que mécanique. Les comédiens ne sont pas réduits à fonctionner : leurs personnages nous parlent, s’engagent et vivent. Le public est avec eux, non pas consolé mais ragaillardi.

Christine Friedel

Pour une fois, nous ne sommes pas d’accord avec notre amie Christine et moins indulgent; certes le texte avec une vingtaine de personnages, nous offre une critique virulente de l’économie capitaliste. Il est  intéressant et servi par une bonne distribution. Mais la mise en scène du genre laborieux, peine à convaincre: pourquoi ces noirs incessants cassant le rythme, pourquoi ce déménagement permanent de ces pauvres châssis métalliques, sans que cela soit en rien justifié de cette entreprise de déménagement permanente.

Nous n’y avons vu aucune métaphore mais plutôt une erreur de scénographie et de mise en scène et dans cette patinoire transformée en étuve, ces deux heures dix nous ont paru bien longuettes, même si, encore une fois, les acteurs font un travail des plus remarquables. Mais nous ne sommes pas sorti ragaillardi de ce spectacle. Bref, le texte de Jonas Hassen Khemiri aurait mérité un meilleur traitement… Dommage!

Philippe du Vignal

La Manufacture, rue des Ecoles (navette pour la patinoire à 15 h 50 jusqu’au 25 juillet. 

Les pièces de Jonas Hassen Khemiri sont publiées aux Éditions Théâtrales.

 

 

Droit de visite d’Alexandra Badea

Droit de visite d’Alexandra Badea

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Adrien_Rouyard ©_Tuong-Vi Nguyen

Ce monologue, distribué entre cinq comédiens -ou comédiennes pour sa version féminine- entraîne le spectateur face à face avec un individu multiple représenté par ces interprètes. L’autrice, pendant le confinement du printemps 2020, a voulu écrire sur l’enfermement.

Entre les murs d’une prison, un personnage auquel nous venons rendre visite. Cinq étapes, cinq parloirs pour entendre les fragments de la vie d’un jeune taulard et plonger dans son intimité. Sans jamais dévoiler la nature exacte du délit qui l’a conduit ici, il livre ses états d’âme à son interlocuteur et tisse une relation affective avec lui : «Tu me trouves défaitiste, non ? Nihiliste? Pessimiste? /Sombre?/Mélancolique?/Je me trouve enfin lucide et serein./ Il y a des moments comme ça. »

 En s’emparant de ce texte rythmé, chaque acteur nous regarde les yeux dans les yeux et nous ne pouvons nous soustraire aux flots de mots qu’il nous délivre. Selon sa personnalité et la partition qui lui est attribuée, cet être multiple oscille entre agressivité et tendresse envers son visiteur, colère et résignation quant à sa situation. Mais, pour conclure, il se sent plus apaisé et assume son crime: « Et j’ai aussi enfin compris la différence entre un coupable et un responsable./Le premier souffre en silence et se noie dans ses propres lamentations./Le deuxième essaie de réparer quelque chose, à commencer par ses propres blessures. Maintenant, je deviens enfin responsable.»

Les actrices et acteurs âgés de moins de vingt-huit ans, issus ou non d’une formation d’art dramatique, ont été recrutés anonymement à partir d’une vidéo où ils donnaient lecture du texte d’Alexandra Badea. Parmi les huit cents candidats visionnées par l’autrice et son assistante Madalina Constantin,  une cinquantaine a été auditionnée et dix ont été engagés par le Théâtre de la Colline qui veut donner ses chances à des jeunes venus de tous horizons. Conçue pour cinq spectateurs, cette pièce d’une heure a voyagé à Paris dans des salles des fêtes, associations, foyers et devrait être reprise à l’automne. Une expérience singulière qui ne peut laisser indifférent…

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 17 juillet, au Centre social La 20ème Chaise, 38 rue des Amandiers ,Paris (XX ème).

 

 

 

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Festival d’Avignon Làoùtesyeuxseposent de Johanny Bert

Festival d’Avignon 2021

 Làoùtesyeuxseposent de Johanny Bert

 

©x


© Christophe Raynaud de Lage

Après Hen que nous avions tant apprécié (voir Le Théâtre du blog), le marionnettiste ne déçoit pas. En résonance avec ce jardin intime aux murs tapissés de lierre, un plateau à mi-hauteur est flanqué d’un arbre et d’une statue vierge de la Vierge. Un lieu qui va se transformer grâce à des manipulateurs cachés: Faustine Lancel et le metteur en scène lui-même.

Dans ce paysage mouvant, le compositeur Thomas Quinart, seul humain visible, accompagne de son saxophone et de bruitages les images que ce lieu romantique et plein de mélancolie a inspirées à Johanny Bert. Une faune artificielle et disparate apparaît puis disparaît: oiseaux empaillés, rats mécaniques… et la végétation prolifère en tous sens.

Dans ce chaos végétal, des crânes, un miroir et un sablier évoquent les Vanités des XVI ème et XVll ème siècles, ironiquement juxtaposées à l’érotisme bon marché de poupées gonflables à têtes de mort ricaneuses … Vanitas Vanitatis, et comme nos vies, la nature  est fragile et éphémère…

De sinistres bonshommes gris semeurs de mort surgissent et de gros tuyaux se tordent en tous sens et, voraces, sucent l’air. Petit moment de paix dans de cet environnement dévasté : un vieux tourne-disque nous joue un air d’antan… Mais l’action souterraine des acteurs-manipulateurs n’a de cesse  et nos regards ne savent plus où donner de la tête tant ce poème visuel regorge d’imagination et de clins d’œil amusés. Un vrai coup de cœur. Ce spectacle – commande du festival et de la S.A.C.D.- conçu pour ce jardin, pourra être adapté à d’autres lieux. A suivre

 Mireille Davidovici

Spectacle vu le 13 juillet , dans le cadre de Vive le sujet,  au jardin de la Vierge du lycée Saint-Joseph, Avignon.

Les 30 et 31 octobre, au FRAC Hauts-de-France, avec le Bateau de feu, scène nationale de Dunkerque

 

Festival d’Avignon: une aide pour le off

Festival d’Avignon: une aide pour le off

 Enfin les choses bougent un peu… Sébastien Benedetto, président d’Avignon Festival & Compagnies (A.F. &C.) et Nikson Pitaqaj, son directeur délégué et  les membres du conseil d’administration, ont rencontré Christopher Miles, directeur de la Direction Générale de la Création Artistique, Bénédicte Lefeuvre, directrice de la Direction Régionale des Affaires Culturelles et Bertrand Gaume, préfet du Vaucluse. Ils ont évoqué la gestion des mesures sanitaires annoncées par le gouvernement et qui provoquent -c’est le moins qu’on puisse dire-  d’importants remous dans le pays. A ainsi été annoncée la création d’un fonds provisionnel pour soutenir les compagnies venues jouer dans le Off et qui compensera les baisses de recettes de billetterie actuelles mais aussi futures, à cause de la mise en place du passe sanitaire obligatoire à présenter à l’entrée des salles à compter de la semaine prochaine.

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©x Le Théâtre du Chêne noir

 
La D.G.C.A. a confié la gestion de ce fonds à Avignon Festival & Compagnies qui organise et coordonne le Off. L’attribution de cette aide -automatique!- sera faite par une commission réunissant début août les représentants de l’AF&C et la D.R.A.C. Provence-Côte d’Azur.
 Les compagnies pourront dès le 31 juillet, déclarer leurs recettes sur deux périodes: celle du début des représentations jusqu’au 21 juillet, et l’autre, à partir de  cette date jusqu’à la fin des représentations en juillet. Et l’aide sera calculée sur la différence de recettes entre les deux. C’est un moyen terme qui fera sans doute l’objet de critiques mais assez perspicace et qui aidera bien les compagnies… L’objectif étant de permettre à tous  ceux qui dépendent du régime de l’intermittence, de déclarer leurs heures et toucher leur salaire avant le 6 août, date du renouvellement de leur statut.

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©x Le Théâtre  des Carmes

Mais un bonheur n’arrivant jamais seul, il y a eu aussi l’annonce d’une revalorisation du FONPEPS (dispositif APAJ « petites salles ») : les critères de revalorisation des montants versés par représentation devraient être annoncés dans un décret à paraître dans les prochains jours. Ce dispositif  s’appliquera aux spectacles présentés dans des salles de moins de six cent places, et non plus de trois cent seulement  comme prévu. Et un Fonds d’Urgence au Spectacle Vivant géré par l’A.S.T.P., un volet Avignon serait créé dans le FUSV5 pour « compenser a posteriori les potentiels déficits des théâtres ».
    
Tout cela demande un peu de gestion par Internet pour les administrateurs des compagnies et des théâtres qui ne sont pas trop au fait de ces modes d’emploi mais en vaut largement le coup. Et l’Etat, en l’occurrence, le Ministère de la Culture – c’est un signe des temps qui ne trompe pas: les élections présidentielles approchent- semble se préoccuper davantage du Off en Avignon. Dont les plus importantes des salles comme le Théâtre des Halles, le Onze, le théâtre des Carmes et celui  du Chêne noir- les deux théâtres fondateurs du off- le Théâtre des Doms, Artéphile, La Manufacture, le Théâtre des Lucioles, Le Théâtre du Balcon, etc. et qui ont une importante programmation, risquaient d’être lourdement pénalisés… comme les compagnies qu’ils accueillent. Y aura-t-il des mesures semblables pour les autres festivals dont Eclats à Aurillac. Aux dernières nouvelles, ce festival de théâtre « de rue » aurait lieu, comme toujours en août mais sous une forme très limitée et dans des villes et villages à l’extérieur d’Aurillac… Pour le moment, rien ne parait envisagé. Nous vous tiendrons au courant.

Philippe du Vignal

Avec,texte et mise en scène de Damien Roussineau

Avec,  texte et mise en scène de Damien Roussineau
        
Cela se passe chez des gens comme vous et moi, avec leur lot de bonheurs et de malheurs issus d’une  histoire familiale parfois compliquée, comme dans n’importe quelle ville ou village de France. Ici,  à Paris  Au 41, rue de l’Arbre-Sec. Jolie trouvaille que le nom de cette rue déjà citée  dans un manuscrit de l’abbaye de Sainte-Geneviève… en 1450.

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© x  La façade du 52  rue de l’Arbre-Sec

 

Le thème -celui d’un après-décès avec régiment de comptes entre proches qui parfois ne sont plus très proches-  n’est pas nouveau mais fonctionne ici très bien…

Frédérique et Salomé se retrouvent après la mort de leur mère au moment de l’incinération dirigée par un employé des Pompes funèbres assez déjanté qui téléphone sans état d’âme pendant la cérémonie…

 

Les deux sœurs ont pour voisins à l’étage du dessous, Pierre et Leïla, un couple qui ne s’entend plus très bien. Lui est cet humble employé et elle, Juge pour enfants, assez autoritaire. On se demande quel hasard a fait qu’ils aient pu se rencontrer, puis vivre ensemble…

Un soir, on surprend un homme dans le local à poubelles de leur immeuble. Pas agressif  et même plutôt affable. Un émigré qui simplement voulait se laver un peu et qui deviendra un ami pour Pierre et réciproquement. Autre vieux thème théâtral, moteur essentiel d’une dramaturgie : l’incursion d’un étranger qui bouleverse le quotidien d’une famille ou d’un groupe social. Ici  celui des habitants de cet immeuble parisien et en particulier, celui de  Pierre et Leïla.

©-Igor Conroux

© Igor Conroux

Avec cette histoire, nous passerons de l’Afghanistan à Paris et à la Nièvre, mais aussi en Grèce et Libye. Bref, un voyage en France mais aussi en Méditerranée, théâtre depuis pas mal d’années de tragédies causées par une immense émigration. Pourtant, nous dit dans cette pièce, Damien Roussineau qui a travaillé avec Jean-Claude Penchenat, le directeur du Théâtre du Campagnol et qui assure la mise en scène,  les femmes et les hommes devront être porteurs de foi, d’espérance et charité, comme le dit Saint-Paul, si le sens des mots n’est plus identique. Mais ils  doivent être capables d’accepter l’autre, de s’entend re avec lui , même s’il est différent et de vivre AVEC, comme le rappelle le titre de la pièce.

Le spectacle de la compagnie Abraxas qui a été créé pour Avignon, avait encore besoin d’être rodé quand nous l’avons vu. Le début un peu bancal côté mise en scène  a depuis heureusement été rectifié et il faudrait sans doute revoir certains enchaînements -trop de noirs entre les scènes- et les lumières  sont  augmentées (si l’on peut dire) de brouillard d’eau pas méchants mais faciles et qui n’ont rien à faire là. Il y a quelques longueurs et à coups, les sur-titrages son trop nombreux et en blanc sur noir, et ceux en arabe pas évidents…

Mais à ces réserves près, le spectacle a de grandes qualités: de bons dialogues clairs pas géniaux mais sans aucune prétention ce qui, dans le théâtre actuel, n’est pas si fréquent. Souvent proche d’un dialogue de film, ils frappent toujours juste, à la fois dans le drame comme celui que vient les deux sœurs ou dans le burlesque quand Pierre et Leila se disputent. Et s’en emparent avec une certaine gourmandise, ces très bons acteurs que sont Sarah Bensoussan, Chloé Donn et Flore Gandiol dont le jeu a une véritable unité. Tout de suite, crédibles dès qu’ils entrent sur le plateau.Mention spéciale à Alexis Perret très solide en Pierre  et à Damien Roussineau qui interprète l’émigré avec une étonnante vérité…

Même si cette année, la vente de cartes de réduction a été en chute libre et si les spectacles sont moins nombreux, le off avignonnais qui ne cesse de progresser en qualité, est devenu une caisse de résonance exceptionnelle pour nombre de troupes en général, peu ou pas connues du grand public, comme la compagnie Abraxas qui avait créé il y a quelques années une excellente Iliade. Il faut souhaiter à ce spectacle d’être repris un peu partout, il le mérite vraiment…

Philippe du Vignal

 Théâtre des Lucioles ,Avignon jusqu’au au 31 juillet, à 19 h 25.
    
Théâtre 12, Paris ( XII ème) , du 9 au 13 novembre.
Cresco, Saint-Mandé (Val-de-Marne) , le 29 mars.
Espace Saint-Exupéry, Franconville  (Yvelines), le 17 mai.

Visions d’Eskandar, texte et mise en scène de Samuel Gallet

Visions d’Eskandar, texte et mise en scène de Samuel Gallet

©x

©x

Le collectif Eskandar dirigé par Samuel Gallet, a imaginé  une sorte d’oratorio  à la limite du théâtre et de la musique, avec comme interprètes Caroline Gonin, Jean-Christophe Laurier, Pierre Morice  et  avec aussi, sur le plateau les musiciens Mathieu Goulin (violoncelle, piano, machines, voix) et Aëla Gourvennec (contrebasse, machines, voix).  Avec des lumières très réussies signées Adèle Grépinet..
Mickel, architecte,  travaille sur des projets de villes plus durables dans un monde au bord d’une catastrophe politique, sociale et écologique, ce dont il a bien conscience. Un jour de canicule, il a un malaise cardiaque dans une piscine municipale et va entrer dans un coma profond et faire l’expérience d’une mort imminente.

Un fiction historique… Il se retrouve alors dans un monde parallèle, celui d’Eskandar, une ville complètement détruite, Eskandar, où il va rencontrer d’autres personnes comme un homme souffrant d’une grave amnésie et Everybody la caissière de la piscine. Il va malgré tout essayer de revenir à la vie…. Samuel  Gallet à partir d’une scénographie très simple mais rigoureuse de Magali Murbach, a conçu cette apocalypse programmée, teintée de cauchemar, qui ouvrirait quand même sur un avenir possible pour une humanité désorientée.

Ce court spectacle (une heure) d’une rigueur absolue n’évite pas une certaine sécheresse et un manque de sensibilité dans son approche des personnages et des longueurs vers la fin mais bon, vaut le coup d’être vu. On ne dira jamais assez que le théâtre contemporain a besoin aussi d’expérimentations comme celles-ci. Le Off d’Avignon semble avoir pris le relais du In dans ce domaine (à part Sujets à vif et la D.R.A.C de  Normandie a bien fait d’aider ce collectif caennais qu’il faudra suivre…

Philippe du Vignal

Une autre vision de ces Visions…  

A la suite d’un malaise cardiaque dans une piscine municipale, Mickel, architecte, plonge dans un coma profond et fait une expérience de mort imminente : « (…) Et Mickel s’enfonce dans les profondeurs du coma / Comme on enfonce dans une terre chaude et calme / Secrète obscure et silencieuse ». Visions et sensations s’emparent de son être, un autre monde prend forme, une ville détruite apparaît : Eskandar. 

Nom identique à celui de la compagnie, symbolique et en résonance avec la méthode de travaille et de  réflexion du Collectif. Partir pour ou à la recherche d’Eskandar, est un véritable projet de la troupe. Le texte s’inscrit dans un triptyque autour de cette ville imaginaire, ce spectacle en est le troisième volet. Chaque épisode raconte une histoire indépendante qui a lieu dans la cité : La Bataille d’Eskandar, Bonus Track et Visions d’Eskandar.   

Dans le récit, ce nom imaginaire, Eskandar, fait voyager notre esprit. Soudain les villes mythiques de Palmyre ou Samarcande se profilent, mais aussi un itinéraire intérieur en compagnie de Mickel. Dans cet univers existentiel, un homme amnésique : « Basile – Edouard – Marius – Alix – Guillaume – Maël –Alban – Abel – Elios – Arnaud – Thomas – Gildas – Blaise – Lazare- Egon – Clément – Ian – Wilfried – Amaury. Je ne sais plus qui je suis. J’ai oublié mon nom ».

Une succession de prénoms comme pour figurer chacun de nous et sous le flux de l’énumération, à travers le rythme des mots,  prendre corps avec l’homme amnésique ! Everybody, prénom de la caissière d’une piscine municipale qui un jour de canicule, a donné son ticket d’entrée (sans issue ? fatal)  à Mickel. Génial là encore le choix du nom du personnage, comme si, il sous-entendait le double fantasmé de la caissière, mais aussi le signifiant du double de tout le monde et personne ! Toutes ces figures types,  désorientées, viennent à la rencontre de l’Architecte et peuplent son cerveau. La mise en scène sobre de Samuel Gallet comme la scénographie astucieuse de Magali Murbach, les lumières de Adèle Grépinet et Martin Teruel, créent une théâtralité subtile : les cabines de rechange stylisés, réduites à des portes-manteaux améliorés sont par exemple une formidable idée. Toute cette ingéniosité, et cette inventivité ouvrent à l’esprit des spectateurs, divers chemins et espaces intimes, culturels ou sociaux et invitent le public à suivre ce parcours hors-norme, introspectif et très vivant ! 

Nous sommes surpris par une habile dramaturgie qui, riche de plusieurs disciplines artistiques, donne la part belle à l’imaginaire et à l’émotion. La dimension dionysiaque si vitale au théâtre prend vite le pas sur le rationnel. Une belle journée d’été en ville et l’envie d’aller se baigner à la piscine, contexte assez banal, laissent place avec finesse à un climat dramatique surprenant, drôle parfois, passant du  quotidien au plus extraordinaire ou au plus catastrophique. Un monde parallèle se dessine et vient en écho du nôtre, certes pas détruit mais plongé dans un chaos politique et socio-économique.

Rêve, abstraction, couleurs, sons… tout un bouquet d’impressions qui nous touche. Ce spectacle à la fois théâtral et musical, est d’une grande poésie sensorielle : « La piscine se reflète dans le ciel /Avec tous les nageurs qui flottent au milieu des nuages /Sous le regard attentif ou endormi /Impossible de savoir précisément à cause des lunettes noires/ Sous le regard énigmatique du gros maître-nageur». Visions d’Eskandar nous interroge avec un regard sans détour sur notre présent, notre destinée mais aussi  nos choix de vie.

Membres du Collectif, Mathieu Goulin et Aëla Gourvennec, contrebassiste et violoncelliste se joignent à la parole textuelle, et sont eux-mêmes personnages de cet ailleurs doté de langues surprenantes: téléphone, contrebasse, machines, voix vocales….  « La musique, dit  Samuel Gallet, prend le pas sur l’aporie de la parole pour exprimer peut-être cet enchevêtrement dont chaque vie est faite nous situant à la fois en nous et hors de nous. »

Dans ce spectacle, réel et rêve s’entrelacent et re-construisent, ré-inventent un monde. Il invite le public à cheminer à sa guise dans un univers qui lui échappe et dont  pourtant  nous nous sentons tous proche un jour ou l’autre. A la fin , le texte reprend une partie du début et les derniers mots seront donnés au maître-nageur: «Je trouve cela scandaleux de mourir. Je voudrais pouvoir enjamber cette époque comme on enjambe un cadavre ou un ennemi qui agonise sur un champ de bataille. Sauter par-dessus cette époque d’un bond et que l’époque riche commence maintenant. Maintenant. MAINTENANT. » Mickel est-il revenu du pays des lointains?

Loin d’un tableau théâtral naïf ou excessif sur notre temps, ce spectacle est orchestré avec perspicacité dans son ensemble : composition du texte, mise en scène et jeu des comédiens, interprétation des musiciens, bande-son…  Il donne une approche lucide, à la fois éthique et politique, sur les ruines prochaines ou en filigrane de notre Occident. A la sortie, encore sous l’émotion nous chancelons, entre urgence du présent et vision de l’avenir …

Elisabeth Naud

 

Le Onze, 11 boulevard Raspail, Avignon, jusqu’au 29 juillet à 11 h 40.

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