Festival Eclats à Aurillac : De la mort qui rue d’Adèle Zouane et Jaime Chao
Festival Eclats à Aurillac, Champ libre : De la mort qui rue d’Adèle Zouane et Jaime Chao
En février dernier, dans le quotidien La Montagne, Frédéric Rémy, le nouveau directeur, était bien conscient de la situation: «On avait fait le choix l’an dernier, d’attendre le dernier moment. Là, on ne peut pas ne pas être lucide. Et poser les bases qui vont être maîtrisables. Il ne faut pas dénaturer le festival d’Aurillac, c’est un rendez-vous majeur de la création artistique en public. En 2020, on était sonné et tributaire de cette situation sanitaire et de ses conséquences. Mais il faut essayer d’être responsable et honnête ». (…) « Oui, nous n’attendons que les grandes retrouvailles mais cet été on va essayer d’imaginer un autre rendez-vous qui sera ouvert, qui aura une certaine ampleur, qui ne sera pas fait dans la précipitation, qui sera pensé pour accueillir le public dans le cadre qu’on aura au mois d’août, pour qu’on puisse le maîtriser et l’adapter au besoin, mais pas l’annuler. (…) Ce sera différent, ce sera un rendez-vous intermédiaire. »
Six mois plus tard, où est-on? Pas de spectacles dans la ville elle-même ni même aux abords comme cela avait été d’abord annoncé. Sauf, la promenade-spectacle (payante) Dans la Forêt du Suisse Massimo Furlan avec un jauge limitée à vingt-cinq spectateurs, une ballade de quatre heures mais en forêt. En cause, une décision préfectorale : « risque de perturbation de l’ordre public. » Formule bien connue et passe-partout… Mais quelques rencontres professionnelles auront quand même lieu comme celle du mercredi 18, suivie d’une grande manifestation des compagnies qui sont quand même venues et qui partira de la place Michel Crespin. Nous vous en reparlerons.
Ces compagnies ne sont évidement pas d’accord avec cette décision préfectorale ni avec celles prises par Frédéric Rémy et ont bien l’intention de le faire savoir… Comme l’avait déjà fait Dominique Trichet, ancien directeur de la Fédération des Arts de la Rue, un des fondateurs du festival d’Aurillac et très proche de Michel Crespin disparu il y a déjà sept ans. Visiblement très en colère, il ne mâche pas ses mots dans une lettre ouverte : «Le Festival de théâtre de rue d’Aurillac n’aura pas lieu. Pourtant, ce n’était pas la guerre. Nous sommes en droit de savoir qui a pris cette décision et pourquoi. Nous sommes en droit d’exiger que soit rendue publique la lettre de Monsieur le préfet du Cantal à la présidente de l’association Éclat. Vous ne pouvez dire Madame la présidente, Monsieur le maire, Monsieur le directeur: « Nous, nous savons des choses que vous ne savez pas ! » C’est le langage d’autorité, infantilisant, qu’utilise celui dont vous dites que sa position-on ne peut dire sa décision, c’est un malin- est inique et injuste. Quand on utilise le même langage…. c’est flou et, quand c’est flou, il y a un loup. »
Bref, dans un contexte politique spécial où les mesures sanitaires concernant le festival, peu lisibles, semblent changer selon le vent, les compagnies n’ont pas l’intention de se laisser faire et cela risque d’être chaud. Nous vous raconterons cela dès mercredi soir. En attendant, avec Champ libre le nouveau nom des Préalables,le festival offre une série de quelques spectacles joués gratuitement dans une vingtaine de villages du Cantal et une promenade en forêt, quatre heures durant près d’Aurillac mais celle-là payante, par l’artiste suisse Massimo Furlan, avec une jauge réduite à vingt-cinq spectateurs.
De la Mort qui rue d’Adèle Zouane et Jaime Chao
Les jeunes auteurs et acteurs annoncent la couleur : «On n’aura droit qu’à une seule mort, chacun la sienne, alors autant commencer à s’y entraîner tout de suite, non ? ». Et ils nous invitent à nous réjouir de notre mort plutôt que d’en avoir peur, et essayer d’en faire un beau moment! Et cela commence plutôt bien : la jeune actrice en corsage blanc et pantalon noir, excellente diction et très espiègle, demande au public qu’elle sait manier avec humour : « Vous voulez mourir de quoi ? Les réponses fusent : « D’amour » , « De bravoure », « De rire ».
Et Adèle Zouane propose au public un entrainement collectif à la mort pour que chacun puisse la vivre pleinement et la savourer. « Ce qui est bien, dit-elle, c’est qu’on est sûr, de ne pas s’y préparer pour rien ». Et suivent quelques citations de Sénèque ou de Montaigne : « La mort, c’est bien le bout et non le but de la vie. Mais ensuite les choses se gâtent avec des exercices de méditation, des postures à prendre et une invite à choisir sa dernière petite phrase. «Je ne regrette rien mais je ne recommencerai pas », dit un homme au cheveux blancs d’une certain âge ou d’un âge certain ? La cloche de l’église sonne six heures comme une sorte de glas, écouté en silence par le public… Un hasard mais un bel instant. Et il y a aussi une phrase remarquable d’un petit garçon qui a oublié d’être sot comme on dit dans le coin : « J’ai eu une mort tranquille. »
A part cela, le spectacle, malgré le talent de sa jeune actrice, souffre d’un texte indigent et ce quasi-monologue, bavard et pas très passionnant, flirte avec une animation pour clubs de vacances. Le Théâtre de l’Unité, sur ce même thème, avec des acteurs haïtiens avait, dans le village proche de Mourjou, parfaitement réussi son coup. Et les habitants de Cassaniouze méritent mieux que ces cinquante minutes bien longuettes, d’autant plus que leur commune participe financièrement à ce genre de plaisanterie. Bref, le compte n’y est pas et Frédéric Rémy ferait bien d’avoir des choix plus malins. Champ libre soit mais Liberté, que de choses approximatives on commet en ton nom!
Philippe du Vignal
Spectacle vu à Cassaniouze ( Cantal), le 14 août. Champ libre continue jusqu’au 21 août.
www.aurillac.net T : 04 71 47 84 75.m