Gloucester Time Matériau Shakespeare Richard III de William Shakespeare,d’après la mise en scène de Matthias Langhoff, nouvelle traduction d’Olivier Cadiot
Gloucester Time Matériau Shakespeare Richard III de William Shakespeare, d’après la mise en scène de Matthias Langhoff, nouvelle traduction d’Olivier Cadiot
Cela se passe dans la nouvelle salle rue des Cordes du Centre Dramatique National de Caen, agrandie et entièrement refaite par Maria Godlewska, architecte et urbaniste polonaise, qui a conçu à Avignon La FabricA. De grands espaces d’accueil lumineux, une scène au même niveau que la salle avec gradins rétractables et une jauge passée de 220 à 270 places. Ce théâtre, après plus de deux ans de travaux, est doté d’un équipement de tout premier ordre et permettra à la Comédie de Caen d’avoir enfin, en centre-ville, un beau plateau capable d’accueillir techniquement de grands spectacles….Pour l’inaugurer, une reprise de ce Richard III, un spectacle devenu culte du festival d’Avignon 95 qui avait été mis en scène à la Chapelle des Pénitents Blancs par le grand Matthias Langhoff, avec, dans le rôle éponyme comme aujourd’hui, un jeune acteur remarquable: Marcial di Fonzo Bo… «C’est en fait, nous a dit Matthias Langhoff juste avant le spectacle, une re-création faite par Marcial di Fonzo Bo, l’actrice Frédérique Loliée qui jouait déjà Margaret, avec les mêmes décors et costumes de Catherine Rankl. Ce type de re-mise en scène inconnu en France est souvent pratiqué en Allemagne; mais personnellement, je ne me sens pas capable de refaire un travail que j’ai déjà fait. Je reprends parfois certaines pièces mais pour les travailler de façon différente. Ici, bien sûr, j’ai assisté à un certain nombre de répétitions.» Le grand metteur en scène allemand n’en dira pas plus…Nous n’avions pu voir ce spectacle à sa création mais la dramaturgie comme la scénographie et le jeu en Europe ont beaucoup évolué en presque trente ans, et rien n’est facile quand il faut mettre en scène une pièce aussi célèbre que Richard III avec ses répliques fabuleuses. La plus forte réalisation que nous en avons vue était celle tout à fait remarquable de Thomas Ostermeier au festival d’Avignon 2015 dans une nouvelle traduction de Marius von Mayenburg avec le grand acteur allemand Lars Eldinger qui incarnait de façon magistrale ce tueur cynique n’hésitant pas à faire supprimer ses rivaux potentiels et deux enfants. Pièce de jeunesse, Richard III que William Shakespeare écrivit en 1592, est une sorte de quatrième partie de sa trilogie d’Henri VI.
La pièce raconte la fin de la guerre dite des Deux Roses qui déchira l’Angleterre juste un siècle avant. Une guerre entre les familles Lancastre et York, qui finira par la bataille de Bosworth. Richard tue d’abord son frère Édouard (un York), mari d’ Élisabeth et Henry VI, un Lancastre et son fils Édouard. Restée seule des Lancastre, la reine déchue Marguerite, quand son mari Henri VI était vivant, a participé entre autres, au meurtre de Richard Plantagenet (York), le père d’Édouard IV. Les Lancastre seront battus. Édouard IV est mourant et Richard fait tuer aussi son frère Clarence. À la mort d’Édouard, Richard réussit à épouser Lady Anne et veut avec l’aide de Buckingham, être couronné roi et va faire assassiner ses deux très jeunes neveux, les fils d’Édouard IV et d’Élisabeth et pour faire bonne mesure Buckingham, parce ce qu’il a refusé de les tuer. Mais les choses tourneront mal pour Richard. Depuis la Bretagne, le comte de Richmond, héritier des Tudor arrive avec son armée vers Bosworth, où Richard sera tué par Henri Tudor qui deviendra le roi Henri VII. Richmond proclamera alors l’union des roses d’York: «Maintenant les blessures de la guerre civile sont refermées. La paix est à nouveau en vie, pour qu’elle puisse vivre longtemps, Dieu dit : Amen. »
Côté dramaturgie, Marcial di Fonzo Bo a conservé la presque intégralité du texte shakespearien augmenté de quelques phrases d’un reporter américain envoyé en Irak lors de la première guerre en 91 à la fin de l’acte IV quand a lieu le récit de la bataille de Bosworth suivi de la mort de Richard. Il y a toujours eu dans les mises en scène de Matthias Langhoff à la fois une extrême rigueur et une exigence héritées de Bertolt Brecht avec lequel il avait travaillé mais aussi un côté foutraque un peu provocateur avec plusieurs niveaux scéniques et il adore mélanger les références temporelles, les objets curieux et les costumes déjantés. Ce qui était scandaleux pour un grand critique allemand furieux, quand Langhoff et son complice Manfred Karge récemment disparu avaient présenté en 81 un Woyzeck iconoclaste à Avignon que nous avions beaucoup aimé. Une vision de combat que Marcial di Fonzo Bo n’a pas voulu reprendre et il a eu raison. Les temps théâtraux ont bien changé…
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