Adieu Philippe Adrien
Adieu Philippe Adrien
Atteint depuis cinq ans d’une grave maladie neurologique, il vient de mourir à quatre-vint un ans. C’était l’un de nos meilleurs metteurs en scène et hommes de théâtre qui s’était d’abord fait connaître avec une première pièce La Baye à Avignon en 1967, mise en scène par Antoine Bourseiller, quand Jean Vilar dirigeait encore le festival et ce spectacle avait été salué comme très prometteur.
Mais il devint vite metteur en scène et prit la suite d’Antoine Vitez au Théâtre d’Ivry puis fut l’assistant de Jean-Marie Serreau, figure emblématique du théâtre d’avant-garde des années cinquante qui créa le Théâtre de la Tempête à la Cartoucherie de Vincennes (Val-de-Marne). Il lui succèdera de 85 à 2016 et enseigna aussi au Conservatoire National de 89 à 2006.
Très vite, cet homme infatigable et curieux de tout, fut reconnu comme un figure majeure du théâtre d’avant-garde et monta des auteurs célèbres: Tennessee Williams (Doux oiseau de jeunesse ou Un Tramway nommé désir). Ou alors peu connus en France comme Witold Gombrowicz, Stanislas Witkiewicz, Werner Schwab, Hugo von Hofmannsthal ou Tom Stoppard.
Philippe Adrien, boulimique de mise en scène et curieux de toutes les écritures, proche de l’Afrique, avait aussi une passion pour Molière dont il monta L’Ecole des femmes, Monsieur de Pourceaugnac, Le Médecin volant et Amphitryon mais cette fois à la Comédie-Française… Mais il admirait aussi beaucoup Tchekhov dont il mit en scène La Mouette et Ivanov. Et Le Partage de midi et Protée de Paul Claudel.
Bref, il s’intéressait aussi bien aux auteurs classiques ou contemporains, qu’ils soient français: Jean-Claude Grumberg, Véronique Olmi… et aussi plus curieusement à Georges Feydeau. Son Dindon connut un grand succès il y a dix ans. Mais surtout étrangers comme Juan Mayorga (La Tortue de Darwin) ou Werner Schwab (Excédent de poids, insignifiant amorphe). Puis récemment en 2014, Boesman et Lena de l’écrivain sud-africain Athol Fugard. Et une remarquable adaptation du roman d’Amos Tutuola, L’Ivrogne dans la brousse
Il y a quelque vingt ans il travailla avec Bruno Netter, un comédien aveugle pour créer des spectacles avec des acteurs voyants et non-voyants Le Malade imaginaire de Molière, Le Procès de Franz Kafka, Oedipe de Sophocle, Don Quichotte de Cervantès ou Les Chaises d’Eugène Ionesco. Il écrivit aussi plusieurs scénarios pour le cinéma.
Merci Philippe Adrien pour tout ce que vous aurez apporté au théâtre contemporain, à la Tempête et comme enseignant.
Philippe du Vignal