Danse «Delhi » pièce en sept pièces d’Ivan Viripaev, traduction de Tania Moguilevskaia et Gilles Morel, création musicale de Viviane Hélary,mise en scène de de Gaëlle Hermant
Danse «Delhi » pièce en sept pièces d’Ivan Viripaev, traduction de Tania Moguilevskaia et Gilles Morel, création musicale de Viviane Hélary, mise en scène de de Gaëlle Hermant
La pièce, qui avait été mise en scène par Galin Stoev au Théâtre de la Colline il y a dix ans, est toujours aussi forte. Cela se passe- (chapeau à Margot Clavières, la scénographe) dans une sinistre petite salle d’attente d’un hôpital avec quelques sièges en série séparés d’un couloir par une cloison en plastique ondulé orange… Que nous avons tous connu à un moment ou un autre de notre vie… Le minimum pour attendre, encore attendre et en général du pas gai du tout. Ici, vont se rencontrer une infirmière, Andreï, un homme encore jeune avec un peu de ventre, sa femme Olga, la belle et jeune Catherine, amoureuse folle de lui qui a de curieux rapports avec sa mère, et une femme déjà âgée d’une rare élégance. Un microcosme où il n’y a qu’un seul homme… Et on devine aussi derrière une cloison une violoniste et musicienne qui reliera les sept moments-variations où ces personnages vont tour à tour se haïr mais aussi parfois se rejoindre, voire se rapprocher.
Ces variations sont comme autant de petites pièces juxtaposées où ils vont revivre une même histoire mais avec, à chaque fois, de nouveaux indices sur leur souffrance intérieure, leur sentiment d’être coupable ou leur cynisme, et l’angoisse de la mort d’un proche qui plane inexorablement. Et à chaque nouvel épisode, le décès, de l’un d’entre eux. La belle et jeune infirmière- -ordonnatrice de la Mort en blouse blanche immaculée- apparait à chaque fois, pour consoler et surtout faire signer par un proche, les papiers administratifs après décès .
Il y a parfois des situations de boulevard mais l’auteur sait très bien imposer une distance et même parfois un certain humour. Très bien dirigés par Gaëlle Hermant, Christine Brücher, Jules Garreau, Marie Kauffmann, Kyra Krasniansky et Laurence Roy sont là, tous avec un jeu impeccable, bouleversants de vérité pour dire cette litanie de la mort imaginée avec élégance par Ivan Viripaev. Mention spéciale à Manon Clavel: comment résister à l’émotion quand elle incarne cette jeune Catherine, ancienne danseuse racontant comment sur un marché en Inde, elle a découvert la misère. Et comment elle s’est brûlé la poitrine avec un morceau de fer chauffé pour être au plus près de ces gens. Comment elle a imaginé une chorégraphie, Danse Delhi admirée par tout le monde. A deux mètres de nous, elle est aussi là, à pleurer un amour qui, au début, n’est pas réciproque…
La pièce pourrait avoir quelque chose de répétitif mais non, le dramaturge russe a un incomparable savoir-faire pour entrelacer à chaque fois de nouveaux éléments dans un texte apparemment identique ou presque… Avec une écriture brillantissime. Et comme la mise en scène de Gaëlle Hermant est impeccable, malgré un contexte douloureux, le public ne s’y est pas trompé et a longuement applaudi. Si vous le pouvez, allez à Saint-Denis, vous ne le regretterez pas… C’est sans doute un des meilleurs spectacles d’une rentrée pas très enthousiasmante…
Philippe du Vignal
Jusqu’au 22 octobre, Théâtre Gérard Philipe, boulevard Jules Guesde, Saint-Denis (Seine-Saint-Denis).
Le spectacle sera en tournée à partir de janvier, à Marseille, Plaisir et Saint-Quentin-en-Yvelines.
Les textes d’Ivan Viripaev sont publiés aux Solitaires Intempestifs.