Festival International Vive la Magie à Semur-en-Auxois
Cyril Lefebvre avait monté en 2012 une société d’événementiels pour les arts du specatcle et avait pris contact avec nous pour créer un festival de magie à Montbard (Côte-d’Or) . Une aubaine pour cette région où il y en à part Les Scènes magiques à Mâcon mis en place par Stefan Leyshon en 2009 et qui a lieu tous les deux ans. Nous avions réussi à programmer en 2013, une Nuit de l’illusion avec entre autres Michel Dejeneffe et Tatayet, Kenris Murat, Parenthèse cubique, Mikael Szanyiel, Eric Leblon et Frank Truong, à la salle des fêtes de Semur-en-Auxois. Mais cette soirée ne put avoir lieu, à cause du décès prématuré de Cyril Lefevre….
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La deuxième édition du « plus grand festival de magie d’Europe», a eu lieu une nouvelle fois en Bourgogne pour un week-end après une pause covid obligatoire. Grâce à Marie Alison, chargée de mission Culture et directrice du théâtre du Rempart, la ville a pris en charge l’accueil des artistes à la bibliothèque municipale, au théâtre du Rempart et dans l’ancien tribunal. Avec de la magie de proximité (close-up) le samedi après-midi, un gala, le samedi soir) et une conférence, le dimanche après-midi. Une situation idéale pour Gérard et Monique Souchet; ces programmateurs ont été soutenus par la municipalité et n’ont pas eu besoin de louer de salle. Indispensable vu les fréquentations souvent en berne depuis septembre. Mais cette année marque le retour du public avec, pour chaque représentation, une jauge maximale! La magie attire un public familial et multi-générationnel qui pendant deux heures, va déambuler dans la bibliothèque pour découvrir trois univers de la magie de proximité (close-up), avec François Normag, Anaël Meunier et Gérard Souchet.
D’abord avec un classique: la « routine » de gobelets avec l’apparition de quatre grosses balles. Vient ensuite une torsion où le spectateur dit stop parmi une série de photos, sur des cuillères (maintenues par un élastique) et qui met sa signature sur leur manche. La vraie cuillère alors placée sous un foulard (comme un mini « cabinet spirite ») se met à bouger toute seule et se révélera tordue. La photo est alors retirée de l’élastique et montre la cuillère tordue, comme en vraie, avec la signature sur le manche. François Normag propose ensuite à une spectatrice de gagner 200 € si elle retrouve une carte signée et perdue dans le jeu. Après avoir fait remonter plusieurs fois la carte (tour dit de la carte Ambitieuse), le jeu est coupé en deux et la spectatrice pose sa carte sur l’un des deux paquets, avant de reconstituer le tout. Le magicien retourne alors la situation et somme un autre spectateur de faire remonter la carte de la spectatrice et s’il y réussit, il lui donnera 200 €. Mais ce n’est pas la bonne carte qui remonte sur le dessus du jeu…. Qu’à cela ne tienne, le magicien change immédiatement cette « erreur », en carte signée, qui se retrouve rangée dans un portefeuille dans la poche de sa veste. Enfin, cette carte signée est placée librement dans le jeu par le spectateur et le paquet de cartes placé dans l’étui. Le tout maintenu fermement par l’assistant occasionnel et on voit la carte choisie sortir alors doucement du paquet…
Anaël Meunier présente une nouvelle baguette magique sous forme d’une petite ventouse (modèle réduit d’un déboucheur pour évier).Puis il propose à un enfant de soulever un nombre de cartes choisies dans un paquet. Le magicien chuchote alors à la ventouse le nombre, place l’objet sur le jeu et soulève le nombre exact de cartes. L’opération est répétée plusieurs fois. Une carte est alors librement choisie et perdue dans le jeu. L’enfant se saisit alors de la ventouse qui soulève toutes les cartes au-dessus de la carte choisie. Très ludique et participatif, en référence au Magic Plunger de Tenyo. Puis il nous propose une grande illusion: c elle de « la femme transpercée». mais en miniature La grande boîte étant ici remplacée par une enveloppe, et la partenaire étant une cuillère à soupe et la lame de l’épée est un banal couteau. Après avoir placé la cuillère dans l’enveloppe (manche visible), le magicien transperce cette cuillère avec le couteau. Les matières semblent fusionner et la voilà transformée en fourchette…
Après un échauffement des doigts qui voit le pouce du magicien s’allonger, il demande à un enfant quelle est sa couleur préférée. Réponse : le bleu. Le magicien fait alors apparaître une petite balle bleue et la dédouble. Les deux balles passent alors d’une main à l’autre puis dans celle de l’enfant. Enfin Anaël montre un jeu de cartes représentant différentes paires de chaussettes. Le jeu séparé en deux paquets, face en bas, le magicien fait défiler les cartes une par une en les retournant face en l’air en même temps. Au stop du spectateur, deux cartes sont mises de côté (face en bas) et le magicien continue sa distribution pour bien montrer que les paires sont différentes à chaque fois. Ces cartes sont retournées face en haut et on s’attend à voir une correspondance de modèle… mais c’est une paire dépareillée ! Le magicien montre alors qu’il avait prévu le choix du spectateur en montrant ses chaussettes de couleurs identiques aux deux cartes.
Gérard Souchet commence par une énigme topographique (qu’il distribuera à la fin aux enfants) représentant un groupe de six personnages et quatre hauts-de-forme. Après inversion des deux parties supérieures du dessin, un personnage disparaît et un chapeau apparaît, il réalise ensuite le tour des trois cordes (voir Professor’s Nightmare) sur un texte de Jean Merlin (Les trois sœurs). Puis Le fil hindou sur un beau texte qui «créée» les liens que nous tissons ensemble. Pour conclure en beauté, le magicien présente un pliage en carton souple. Il fait choisir une carte librement et la perd dans le jeu. Après différentes transformations qui s’enchaînent (une couronne, un canard, un renard, une poule, un bateau à voile, une barque, une étoile, une cabane, un interrupteur, une boîte), le magicien retrouve la carte du spectateur à l’intérieur d’une boîte. Voir le papier se transformer au gré de l’histoire, est vraiment étonnant et subjugue petits et grands par la simplicité minimaliste des évocations, comme celle de l’Origamagique de Ludovic Toulouse…
Quant au gala c’est le grand moment de ce festival! Avec François Normag, Adrien Quillien, Nathalie Romier, Laurent Piron, Mikaël Szanyiel et Jérôme Murat, tous artistes de grande qualité représentant la diversité de l’art magique. Comme à son habitude, François Normag, en costume de velours violet, gilet orange, haut de forme noir et rouge, joue le maître de cérémonie avec gourmandise et en profite pour réaliser de petits numéros entre ceux de chaque artiste. D’abord, hommage au music-hall avec transformation d’un foulard en canne, apparition d’un éventail et d’une colombe puis d’un deuxième éventail, sous couvert d’autres foulards. Deux grands anneaux chinois s’enclavent et se désenclavent avec, sur chacun, une colombe en équilibre. Pour terminer, les deux colombes placées dans une cage, disparaissent et se transforment en lapins….Puis « dressage d’un fantôme » grâce à une clochette que François Normag confie à un spectateur qui n’arrive pas à la faire sonner (gag répétitif) Transformé en médium, il se propose d’attraper un fantôme en le fabriquant avec un mouchoir surmonté d’un nœud. Il prend un de ses cheveux (gag du chauve) et commence à animer la «tête de nœud» du mouchoir. Le foulard s’anime ensuite derrière une mallette disposée sur un guéridon, derrière un foulard, puis dans la main et sur l’épaule du médium. Suit un hommage aux Indiens: François Normag, coiffé d’un chapeau melon avec plumes entonne un chant rituel repris par le public et montre une boîte avec, écrit dessus : DANGER montrée vide au public. Mais il fait apparaître Patrak, un animal totem sous les traits d’un raton laveur. Vient ensuite un numéro d’hypnose avec l’animal mis en catalepsie et placé dans une petite boîte verticale (la tête et la queue dépassent). Il sera coupé en trois puis reconstitué. Quatrième passage avec une classique chasse aux pièces accompagnée par un enfant. Puis description audio d’un cours de magie grâce à une chaîne hifi vintage. Comment devient-on magicien ? Grâce à des livres mais aussi avec des cours par correspondance. François Normag insert un cd avec « le cours n°1 où il propose d’apprendre le Tour des trois cordes pas à pas. Mais cela s’avère moins facile que prévu et l’apprenti magicien Normag se prend la tête quand il entend la voix du C D : gags verbaux…. En colère, il fait disparaître la chaîne hi fi dans sa veste.
Sixième et dernier passage avec la présentation d’une œuvre d’art contemporain Mur de briques sur fond bleu. Valeur: 850.000 €. Une œuvre évolutive sous forme de pièces de puzzle géométriques symbolisant le spectacle dont François Normag va passer en revue toutes les composantes symboliques de sa réussite, pièce par pièce (en les retirant du cadre) : festival idéal, un théâtre, des artistes, des lumières, de la technique,du mystère, des répétitions, un sens de l’humain, une équipe organisatrice et le plus important : la passion. Les éléments sont ensuite remis un par un mais le public s’aperçoit qu’il y a deux espaces vides. Le magicien annonce que l’on peut donc ajouter deux nouveaux éléments pour arriver au tableau du spectacle idéal : un présentateur et un public en or. Et il fait ainsi monter le prix de l’œuvre à 950.000€ ! Une très belle présentation scénique de ce numéro paradoxal qui sort des sentiers battus.
Adrien Quillien ouvre le gala avec un numéro mode apéritif magique. Il fait apparaître une bouteille dans un effet pyrotechnique, fabrique des «potions magiques» sur une musique swing où des citrons sortent de trois shakers à cocktail et disparaissent un à un en confettis et en serpentins. Un citron se retrouve collé à son chapeau. Des pétards retentissent et le magicien-barman jongle avec ses shakers et fait ensuite apparaître des piles entières de verres sous les shakers, allume deux grosses bougies et produit des glaçons puis de l’eau des shakers. Le tout versé dans la ligne de verres avec à chaque fois un liquide de couleur différente. Et dernier feu d’artifice, le magicien actionne une bombe lance-flammes et fait apparaître un citron puis un shakers géants sous sa veste.Premier prix de manipulation et champion de France de magie de scène en 2017, Adrien Quillien est taillé pour le spectaculaire malgré pour ce Bar Act un début qui tâtonne: la suppression des passages parlés ne serait pas un luxe. Mais sa réécriture de tours avec des accessoires modernes, apporte un vent de fraîcheur aux manipulations classiques.
Une femme bohème (Nathalie Romier) traîne une grande malle et une poule (une marionnette) la suit. D’un coup, la femme rabat la malle sur la poule et l’écrase dans un rire nerveux. Elle se place alors derrière la malle, à la verticale, là où une petite fenêtre s’ouvre comme un castelet. Elle y apparaît déguisée en Edith Piaf et chante Milord. La poule réapparaît avec elle dans la fenêtre. Changement de costume et Nathalie Romier revient en Charles Aznavour. Autre transformation: Barbara en robe noire avec sa chanson L’Aigle noir : la poule lévite derrière un foulard, à l’effigie d’un aigle. Puis autre costume sur la musique de Mon truc en plume de Zizi Jeanmaire et la poule est déplumée. La robe de la femme apparaît alors déchiquetée après un combat avec le volatile sur l’air de Quand on n’a que l’amour de Jacques Brel. Sous couvert d’un voile blanc, la robe en lambeaux se transforme en robe de bal blanche avec de petites fleurs rouges dessus: transformation saisissante. La chanteuse monte alors sur un piédestal et se met à léviter, faisant apparaître la poule sous ses pieds, qui chante à l’unisson avec elle. Nathalie Romier, championne de France de magie de scène en 2015, mêle chanson en direct, magie et changement rapideavec son numéro La Poule Mistinguett, conçu et réalisé par Jérôme Murat, dans la pure tradition du music-hall. Un numéro qui plaît au public mais sans surprise et un peu vieillot.
Dans un décor d’atelier, Laurent Piron interprète un concepteur-designer en bleu de travail qui griffonne le croquis d’une lampe. On entend le bruit du feutre amplifié. La feuille se plie alors toute seule et disparaît dans un chapeau. Puis réapparaît, légèrement dépliée, et se froisse à nouveau dans les mains du designer puis rampe sur le sol jusqu’à se cacher sous un des cartons qui jonchent le sol. La feuille, à nouveau froissée et jetée dans un carton, se téléporte dans un autre plusieurs fois de suite. Le carton se met à léviter dans les mains du désigneur qui réussit à dompter cette feuille qui lui obéit. Il finit par fixer le dessin sur un tableau et construit avec des cartons, le modèle de la lampe dessinée à grande échelle. Une vraie ampoule est alors vissée et s’éclaire. La feuille se froisse à nouveau toute seule et se cache dans le bleu de travail du designer pour être ensuite placée dans un bocal transparent qui fait léviter l’homme (un superbe effet). Puis le papier disparaît à l’intérieur du bocal, en s’enflammant tout seul et réduit à des cendres… Un moment très poétique.
Le Belge Laurent Piron a été sacré Champion d’Europe de magie en 2021 pour son Paper Ball Act créé en 2019 avec sa compagnie Alogique, une subtile métaphore de la création où il donne une réinterprétation du Foulard spirite (Spirit handkerchief) avec des objets épurés du quotidien dans un atelier de design d’objets. Nous sommes ici dans la tête du concepteur-magicien qui créé ses objets-illusions et matérialise ses idées qui évoluent au fil du temps et prennent vie. Avec une économie de moyens et une scénographie minimaliste, Laurent Piron nous offre une belle épure d’un univers singulier et un brin surréaliste.
Depuis seize ans Mikaël Szanyiel présente dans le monde entier son Magic Maestro avec la même énergie et le brin de folie qui l’anime et c’est toujours un succès. Ce numéro intemporel qui n’a pas vieilli convoque un univers et des accessoires reconnaissables par tous les publics à l’international. Le magicien a eu l’intelligence de travailler des situations burlesques par le mime et la gestuelle qui rappellent les grandes heures des comédies américaines filmées de la première moitié du XX ème siècle et des cartoons des années quarante. .
Le gala se conclut avec un des numéros visuels les plus beaux du monde : La Statue à deux têtes de Jérôme Murat. Une pièce d’une suprême délicatesse qui a enchanté un public international depuis les années quatre-vingt dix.Il a construit au fil des années un numéro unique. Courtisé par de nombreux pays, il en est arrivé à se multiplier en sept statues pour absorber les demandes ! Jérôme Murat a ensuite cherché à développer une nouvelle forme d’art visuel en convoquant le mime, la magie et les beaux-arts. Lors d’une visite dans un musée, il a eu l’idée de son futur numéro. Il travaille ensuite avec le mime Daniel, puis avec la compagnie Philippe Genty où il se perfectionne dans l’art du masque. Murat rode ensuite son numéro dans la rue puis dans les cabarets. Son numéro évoluera avec le temps, incluant une séquence en lumière noire qui lui permettra de réaliser de nouveaux effets de lévitations et terminer en apothéose. Il prend pour base l’art de la statue vivante classique, une technique dérivée du mime qui consiste à ralentir sa respiration et à entrer dans un état proche de la méditation afin d’imiter une statuaire de pierre dans une immobilité absolue. Cette forme de spectacle vivant s’est développée dans la rue et a évoluée sous différentes formes: statue automate, statue à postures impossibles, statue en lévitation… Jérôme Murat reprend les deux grands thèmes de la statue vivante, à savoir: l’animé/ l’inanimé et la dualité. Il combine ses notions avec une recherche esthétique proche de la statuaire baroque en privilégiant le blanc et les drapés des vêtements. La statue de pierre fait l’objet d’une bataille intérieure par la présence de deux visages identiques Un numéro limpide, poétique et à la beauté foudroyante d’une œuvre d’art à classer parmi les chefs-d’œuvre. Le public ne s’y trompe pas et se lève, à chaque fois, comme un seul homme pour ovationner cet artiste exceptionnel qui a l’art de transmettre des notions universelles au travers de sa figure de pierre qui possède un cœur d’or.
Le cadre solennel de l’ancien tribunal de Semur-en-Auxois accueille le grand Gaëtan Bloom pour une conférence-spectacle inédite et sur mesure pour grand public, un genre normalement réservé aux professionnels de la magie. Il va nous montrer comment fonctionne son cerveau quand il imagine et construit un numéro. Le grand public est toujours en attente et Gaëtan Bloom se propose de montrer des choses simples expliquées et d’autres non. Une magie fondée sur des principes essentiels : détournement d’attention et curiosité. Le fait de regarder les choses autrement change beaucoup notre créativité. Gaëtan Bloom demande aux spectateurs de participer au « test des deux index » (les yeux fermés) comme dans le préambule d’un numéro d’hypnose. Avec cette expérience, le magicien démontre que ce phénomène n’a rien à voir avec l’hypnose mais est un mécanisme naturel (les doigts se fatiguent et se resserrent automatiquement) qui permet à l’hypnotiseur de choisir des sujets « réceptifs » pour la suite de sa démonstration, en employant plus de compères que de vrais spectateurs…
Gaëtan Bloom évoque Robert-Houdin : « Un prestidigitateur n’est point un jongleur ; c’est un acteur jouant un rôle de magicien. » Et il affirme qu’il doit lui-même croire en sa magie pour faire adhérer le public ! Gaëtan Bloom nous explique une expérience avec une petite figurine extra-terrestre enfermée dans une bouteille remplie d’eau, qui monte et descend, aux ordres du magicien. Un tour relaté dans La Science amusante de Tom Tit (Arthur Good) (1889). « Parmi les expériences contenues dans ce livre, les unes sont de simples jeux destinés à récréer parents et enfants, lorsqu’ils sont réunis le soir autour de la table de famille. D’autres, au contraire, d’un caractère vraiment scientifique, ont pour but d’initier le lecteur à l’étude de la physique… »Effectivement, la magie est un des premiers spectacles que l’on faisait en famille: ombres chinoises sur les parois des cavernes, puis tours, dits récréatifss à la fin des repas. Aux XVIII et XIX ème siècles, de nombreux magiciens s’intéressaient à la science (voir Robert-Houdin) et reprenaient à leur compte des expériences de «science ou physique amusantes ».
Bloom nous montre un tour saisissant, avec une simple ficelle et une bague empruntée et il y fait participer un enfant. Il montre deux bouts de ficelle sur quatre bouts et place dans sa main les deux bouts qu’il souhaite et les fait dépasser de son poing. L’enfant choisit alors un des deux bouts restant à l’autre extrémité pour enfiler la bague qui tombe dans le poing. Quand le magicien tire sur les deux bouts, la bague s’enclave sur une seule ficelle raccommodée (la deuxième ayant disparu). Tout peut être examiné. Avant de nous expliquer les principes de la « double ficelle » et du «choix équivoque », Bloom nous rappelle qu’il n’y a pas une seule solution pour réaliser un tour mais pluiseurs possibles. Il faut aussi savoir habiller une routine avec une histoire. Gaëtan Bloom nous montre ensuite un casse-tête en bois, d’où sort une tige accrochée par un soi-disant élastique. Tige qui est tirée et qui revient à chaque fois se loger dans son foyer. Quand le spectateur essaie, il n’y arrive pas et se rend compte qu’il n’y a aucun élastique qui relie les deux morceaux. Le magicien ancre son histoire dans son enfance, quand il s’amusait à éjecter des noyaux de cerises entre ses doigts.
Le Polonais Max Malini (1873-1942) travaillait pour les cours d’Europe et savait se faire embaucher par les riches. Dans les grands hôtels, il invitait les clients à des représentations, et ensuite, ils le voulaient chez eux. Après cette introduction, Bloom nous présente un des tours inventés par Malini : la pièce déchirée. Une pièce de monnaie empruntée est emprisonnée dans un morceau de papier sur ses quatre côtés. Malgré cela, le papier est déchiré et la pièce disparaît. Bloom explique le principe à plusieurs enfants qui refont ce tour en pliant d’une certaine façon le papier pour que la pièce se libère à un moment de « faible attention ». Gaëtan Bloom révèle aussi un tour de cartes diabolique révélé par avec le concept «îles/pas îles » (une carte dite close étant une île ), un système de classement invisible permettant de repérer la carte intruse parmi d’autres. Le magicien demande à une jeune fille de choisir une carte au hasard dans un paquet (la carte à retenir), puis d’en choisir quatre autres et de les mélanger avec la première carte choisie. Les cinq cartes sont étalées face en l’air et Gaétan Bloom devine celle choisie, grâce à un trombone se baladant sur un élastique et s’arrêtant sur la bonne carte.
Suit un tour de numéromagie, avec un jeu marqué sur son dos par des numéros écrits au feutre. Gaétan Bloom fait une triple prédiction et demande ensuite, tour à tour, à trois spectateurs,de choisir une carte avec d’abord un numéro entre 1 à 20, ensuite un autre entre 30 et 52, puis encore une autre, face en l’air et librement choisie au stop dans le jeu. Les trois cartes sont alors retournées et correspondent aux prédictions du début. Un nombre entre 1 et 100 est demandé dans la salle et écrit sur un carnet. Le magicien invite toute la salle à se lever. Une spectatrice ouvre une enveloppe visible depuis le début de la conférence et en sort une lettre où est écrite dessus cette phrase : «Dans mon rêve, c’est une femme qui gagne, elle a des chaussures noires, un peu plus de trente ans, des cheveux blonds, un pantalon de couleur, une écharpe orange et elle me répond : Christiane. » Au fil des descriptions successives, les personnes non concernées s’assoient et il ne reste plus qu’une seule personne correspondante à la description: la spectatrice qui se trouve à côté du magicien depuis le début.
Une nouvelle prédiction dans une enveloppe est confiée à un enfant. Un spectateur est invité à choisir un journal ou un magazine parmi la vingtaine disponible sur une table. Le magicien lui demande de lancer un dé invisible et d’annoncer son résultat (par exemple : 4). La page 4 du magazine est déchirée en deux, puis encore en deux. Le spectateur donne un des deux morceaux au magicien qui le met à la poubelle. Elle plie son bout en six qui est ensuite coupé plusieurs fois. Les bouts sont mélangés et le magicien laisse tomber les morceaux un à un. Au stop du spectateur, deux morceaux sont dans chaque main et il faut en choisir un. A la manière de Robert-Houdin, Gaëtan Bloom récapitule toutes les actions « librement » menées par le spectateur pour déterminer, au final, un seul bout. Puis il lui demande de prendre connaissance de ce morceau et de penser à quelque chose écrit dessus. L’enveloppe est alors ouverte et la prédiction correspond au mot pensé.Gaëtan Bloom demande alors au public comment le tour peut bien marcher, avant de révéler une autre prédiction: dans un sac noir, visible depuis le début du tour, il y a le même journal choisi avec la seule page 4 et le nom choisi entouré au feutre.
Pour finir cette conférence, une spectatrice tient une épuisette où un paquet de cartes est mélangé. A son stop, des petits paquets sont éliminés et jetés dans l’épuisette à son choix.. Ensuite elle est invitée à poser le doigt sur une des six cartes restantes, face en bas. Le magicien lui demande d’imaginer le nom d’une ville en quatre à cinq lettres maximum puis de révéler le surnom de son chéri. Le magicien prend alors une enveloppe géante où il gribouille avec un feutre le mot : NON. A l’intérieur, un grand papier plié où sont révélés le premier mot choisi dans le magazine (dans l’expérience des journaux), la ville choisie, le surnom du chéri et la carte choisie. Ainsi se termine cette intervention généreuse de Gaëtan Bloom, véritable Géo Trouvetout de la magie, maître dans l’art de recycler des principes oubliés et les remettre en lumière. Adage bien connu : c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes.
Sébastien Bazou
Théâtre du Rempart, Semur-en-Auxois, (Côte-d’Or) les 13 et 14 novembre.