Ola Maciejewska, performance au Musée d’Orsay

 Ola Maciejewska, performance au Musée d’Orsay

 Cette danseuse de formation classique, chorégraphe et performeuse polonaise vit et travaille en France. Depuis dix ans, elle a développé Loïe Fuller: Research. Et cette performance s’inspire de la fameuse Danse serpentine de Loïe Fuller (1862-1928). « La robe de la Danse serpentine n’est pas vraiment une robe, dit-elle. Mais un assemblage fait de bâtons, de tissu, d’un corps et de sons, dans une boucle active qui fait du bruit. (…) Plus que la figure «magique» de Fuller, l’une des artistes les plus reconnues du modernisme en danse et une individualité libre de corps et d’esprit, c’est la tradition et le motif de la Danse serpentine  qui jouent un rôle central dans mon travail. C’est un déploiement joyeux de formes changeantes, évoquant la relation entre la sculpture et le sculpteur. »

 

C Martin Aryroglo

©Martin Aryroglo

Un siècle plus tard, c’est ici une sculpture minimale vivante en tissu léger, un matériau très employé sur scène mais plus rarement dans les arts plastiques et plutôt chez des femmes comme Anni Albers, Magdalena Abakanowicz, Sheila Hicks, Annette Messager avec ses bien connues broderies de phrases anti machistes et féministes ou Ewa Korczak-Tomaszewska. Mais aussi bien sûr Christian Boltanski avec ses collines de vêtements ayant déjà été portés. Ola Maciejewska parcourt quelques espaces à proximité de nus en bronze, notamment ceux de Carpeaux qui l’entourent, comme autant de bonnes fées d’un autre siècle penchées sur son travail. Dans une interaction remarquable; « Ce sont les vivants qui ferment les yeux des morts et ce sont les morts qui ouvrent les yeux des vivants, disait Anton Tchekhov. »  Une parenté évidente puisqu’il s’agit bien ici comme là du corps féminin et d’un rapport évident au mouvement. D’un côté, une jeune femme absolument seule et silencieuse dans cette grande nef. Munie de deux grands bâtons, elle fait s’envoler autour d’elle avec une grande maîtrise, des mètres de tissu léger noir. Aussi noir que les magnifiques bronzes de Carpeaux. Puis elle s’enveloppe dune sorte de robe-chasuble d’un beau jaune pâle toujours avec une gestuelle très sobre mais où la forme développée (l’interprète est presque invisible) prend une ampleur poétique de tout premier ordre… Il y a du Philippe Genty dans l’air: dans ses spectacles, de grandes surfaces de tissu en mouvement emportaient le public vers un univers magique. On ne dira jamais assez toute l’importance du travail de Loïe Fuller, ici magistralement repris par Ola Maciejewska non sur une scène mais dans un musée… Une belle idée que ce rapprochement à faire par le spectateur de cette performance entre entre gestuelle créée in situ et geste recréé par les sculpteurs. Et ce n’est pas un hasard si entre autres, Auguste Rodin et Henri de Toulouse-Lautrec qui a peint tant de corps de femmes, admirèrent Loïe Fuller et furent ses amis…

 

©x

©x Loïe Fuller en 1902

Et la grande historienne de la danse que fut Laurence Louppe, aurait aimé cette réinterprétation. «A l’aube de la modernité en danse, Loïe Fuller a inversé le rapport en faisant de son propre corps un un écran englobant l’image, la recevant, l’animant par des envols de plis dont ses bras ancrés au corps, profondément depuis le carré des lombes, connaissaient sels les secrets ondoyants. »

Philippe du Vignal

Performance vue le 16 décembre au Musée d’Orsay, Paris ( VII ème).

 

Quinze ans de ma vie de Loïe Fuller, Paris, librairie Félix Juven, (1908) en ligne sur Gallica. 

Ré-édition Paris, Mercure de France ( 2016), 350 p.

 

 

 

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