Bachelard Quartet, de Pierre Meunier, Marguerite Bordat, Noémi Boutin et Jeanne Bleuse

Bachelard Quartet de Pierre Meunier, Marguerite Bordat, Noémi Boutin et Jeanne Bleuse

 

Ce grand et robuste comédien éprouve depuis une vingtaine d’années, la résistance de la matière et en fait du théâtre, avec une discrète et originale scénographe qui invente en amont du spectacle, des univers visibles, et une violoncelliste et une pianiste…. Ce quartet joue sur la matérialité de la musique, et la musique joue elle de la matière. Bois des instruments et des praticables, lourd carillon de métal au son léger, verre, voix, bruits des cordes frottées comme elles n’en ont pas l’habitude… Rien d’une cacophonie, mais une exploration. Car « cela ne veut pas rien dire ».

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Pierre Meunier est parti des textes que Gaston Bachelard a écrit au milieu du siècle dernier sur les quatre éléments, La Psychanalyse du feu, L’Eau et les rêves, La Terre et les rêveries du repos, L’Air et les songes. Où se concentre la démarche de ce philosophe mais aussi poète et homme de science. Gaston Bachelard pense et démontre qu’une réelle démarche rationnelle et scientifique s’appuie aussi sur les intuitions poétiques et sur la «rêverie active» qui permettent de lever les «obstacles épistémologiques», autrement dit: les œillères interdisant au savoir de prendre toute son ampleur.

En le découvrant, Pierre Meunier a compris et précisé sa pratique, avec un théâtre qui ne ressemble à aucun autre. Et même le théâtre le plus conventionnel travaille là-dessus : penser avec des mots, mais aussi avec des éléments de décor et des costumes, de la musique, dont les « mots-sons» font partie, comme l’émotion qui va avec… (pardonnez-nous le jeu de mots: il fait aussi partie des plaisirs du théâtre et de la psychanalyse!). Le chef d’orchestre de cet ensemble musico-théâtral est un spécialiste du bricolage philosophique au théâtre. Comme dans ce Chant du Ressort: «D’un côté, les ressorts avec leurs mouvements parfaits mais imprévisibles, de l’autre, deux êtres maladroits qui tentent de s’aligner. Le combat est inégal pour eux mais jubilatoire pour le public qui finit par succomber devant la formidable capacité des spires à réactiver en nous des retrouvailles sensibles et drolatiques avec la matière et son mouvement primitif. »

Autre exemple : Le Tas, une théorie en action du suspense au théâtre. Prouver le mouvement en marchant ? Éprouver la matière des pierres, leur résistance à la masse qui voudrait les casser, leur élasticité, oui, et leur tendance, quand elle sont accumulées dans un toile au-dessus de la tête de l’acteur, à suivre la devise de l’eau, « toujours plus bas », jusqu’à ce que… Rassurons-nous, aucun acteur n’a été tué par cette pesanteur. Quand on vous dit, scientifiquement, que la matière c’est de l’énergie… Ici, musiciennes et acteurs ne subissent aucune menace mais malmènent avec amour leurs instruments pour obtenir d’eux qu’ils répondent aux textes. L’espace, lui aussi, est bousculé avec un plateau tri-frontal, pour que nous y voyons de plus près, «rassemblés comme autour du foyer», «pour faire éprouver facilement l’acoustique non amplifiée des instruments». Une qualité décisive en ces temps où les acteurs sont souvent dotés d’un micro H F et où la musique est amplifiée. Deux tournettes pour que le piano attrape le tournis et le violoncelle, sa mélodie, car ces musiciennes n’oublient pas qu’elle savent aussi jouer en concert, et transmettre cette qualité de silence que produit la musique.

Voilà, c’est beau et simple (mais il fallait y penser), léger et dense. L’air circule, les yeux s’ouvrent, tout comme les esgourdes, et l’imagination galope. Nous vous laissons la surprise d’une expérience finale de l’ « eau de feu » avec ses flammes dansantes. Encore !

Christine Friedel

Jusqu’au 27 janvier, Nouveau Théâtre de Montreuil (Seine-Saint-Denis). T. : 01 48 70 48 90. Et

Au milieu du désordre les 29 et 30 janvier et  La Bobine de Ruhmkorff  les 4 et 5 février de Pierre Meunier, Théâtre de l’Aquarium, Cartoucherie de Vincennes,  dans le cadre du festival Bruits. T. : 01 43 74 99 61.

Les 10 et 11 mars, Les Quinconces-Scène Nationale du Mans (Sarthe).

Du 28 au 30 avril, Scène Nationale d’Orléans (Loiret).

Du 17 au 20 mai au Théâtre de Lorient-Centre Dramatique National (Morbihan).

Et du 31 mai au 3 juin, Comédie de Saint-Étienne (Loire).

 

 

 

 

 

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