Toute l’Histoire de la peinture en moins de deux heures par Hector Olbak

Toute l’Histoire de la peinture en moins de deux heures par Hector Olbak

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On le connait depuis longtemps. Il a, entre autres, écrit un livre sur un mythe Andy Warhol n’est pas un grand artiste et a réalisé en 2007 une série de documentaires pour la série Grand Art sur Arte et pour d’autres chaînes. Et il tient une chronique sur l’art dans Elle. Devant un immense écran impressionnant de quelque 4.000 tableaux, soit toute l’histoire de la peinture… ou presque! Il va passer d’une fresque de Giotto, aux chefs-d’œuvre absolus de la Renaissance italienne, aux peintres flamands, puis au XVIII ème, et enfin à Paul Cézanne… Bien entendu, seul devant quelque huit cent personnes, accompagné à quelques instants d’un violoncelliste et d’une violoniste, il nous emmène voir seulement quelques exemples de tableaux, avec grossissement d’un détail à partir d’un ordinateur, manipulation impeccablement réglée par un technicien qui fait glisser ce grossissement sur l’écran et à l’instant voulu. Le spectacle lui doit beaucoup.

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Un travail d’orfèvre bien rodé et qui met en valeur les domaines picturaux qu’Hector Obalk maîtrise parfaitement, comme l’anatomie, le rendu de l’espace et du temps, les lumières, la texture, le récit. Il aime s’attarder avec humour et pertinence, sur un visage, une main, un coin de paysage dans une fenêtre… Détails presque impossibles à voir autrement que devant le tableau lui-même. Et cet homme passionné en parle bien et jamais au hasard. Il analyse avec jubilation et finesse les visages de La Dormition de la Vierge, une fresque de Giotto (1310): »« Si les premiers tableaux sont sans paysages avec des fonds or,
c’est avant tout parce que les peintres ignoraient encore la perspective qui ne sera découverte qu’à la Renaissance, dans la seconde moitié du siècle suivant…»

  ou la sublime Annonciation avec son ange au premier plan d’un Léonard de vingt-trois ans, un tableau qu’Hector Olbak compare avec La Belle Ferronnière pour montrer l’évolution de ce génie. Et il parle du corps chez Botticelli qu’il assimile un peu méchamment à… du caoutchouc. Le public admire et applaudit à cette brillante leçon d’histoire de l’art.

©x Détail du Chancelier Rollin

©x Détail du Chancelier Rollin

Il avoue ne pas être trop séduit par Fra Angelico mais il choisit des détails qui justifient son propos : ce que les historiens de l’art ont souvent tendance à faire… Il parle aussi avec intelligence entre autres du Corrège. «A la sensualité duvetée de Corrège, dit-il, s’oppose l’érotisme glacé de Bronzino.» Mais aussi de  Michel-Ange et Raphaël, du Caravage, un des peintres qu’il analyse le plus finement, avec L’Amour vainqueur (1601) et de Véronèse.«L’Amour vainqueur, c’est un adolescent qui assoit avec insolence sa beauté prépubère sur les attributs de la science, de la littérature et de la musique…»

©x L'amour vainqueur

©x L’Amour vainqueur

Et du Greco. Hector Obalk vise juste et avec subtilité mais parfois un peu trop vite pour un public peu initié. Quand, entre autres, il parle de l’arrivée de la perspective: mais bon, mieux vaut viser haut. Il respecte -mais on le sent bien- il a moins de passion pour la peinture flamande quand il explique le très fameux ex-voto (66 cms x 62 cms) dit La Vierge du chancelier Rolin de Van Eyck (vers 1435) peint à l’huile sur bois, une «sacra conversazióne» classique du genre, avec la Vierge Marie et l’Enfant accompagnés de personnages de l’époque comme un donateur. Et quand il ne sait pas, il le dit avec humilité comme à propos de ces incroyables lapins en bas d’une colonne (ci-contre).

©x Les Grands arbres au Jas du Bouffan

©x Les Grands arbres au Jas du Bouffan

Il passe sans difficulté au XVIII ème siècle avec des natures mortes entre autres, de Chardin puis au XIX ème siècle avec Paul Cézanne qu’il admire.« Contrairement aux tableaux de Van Gogh, ceux de Cézanne gagnent à être regardés de très près. Il faut repérer tous les traits bleus, rouges, bruns ou verts qui nourrissent la verdure des mauvaises herbes, au pied des arbres.» Il avoue ne pas avoir une très grande passion pour Vincent Van Gogh comme des 2% de gens qui ne l’aiment pas. Et il compare avec un grand savoir-faire, un sous-bois d’un très beau paysage du premier, à un fragment de paysage du second, sans doute peint avec moins de nuances. Mais c’est un peu facile et réducteur de traiter ainsi Vincent van Gogh. Et tiens, si on demandait à Victor Olbak de faire la preuve inverse. C’est sans doute un peu les limites de ce jeu pictural où par ailleurs, excelle cet amoureux du détail et des lointains…
Il n’abordera ni la peinture moderne ni contemporaine qu’il connait aussi, puisqu’il a exposé des peintres comme François Boisrond, Gilles Aillaud, Vincent Bioulès… Et à la toute fin, il développe une idée selon laquelle les peintres contemporains comme Yves Klein ne peuvent avoir d’élèves et que le tableau peint ne renaîtra que grâce aux autodidactes. On veut bien mais comment, il ne nous le dit pas …In fine, il nous présente les toiles non figuratives de Laurence Elbé, une artiste contemporaine, mais assez peu convaincantes. A l’art actuel, cela se sent et c’est son droit, il préfère nettement la peinture figurative, comme, entre autres, chez Lucian Freud.

Après ces fleurs, quelques orties. Pourquoi se faire applaudir si souvent? Pourquoi aussi vouloir faire chic et « moderne» du genre : « C’est pas de la merde, regardez ce truc, vous parlez d’un machin, c’est gentil de ma part, c’est assez épatant ». Ou encore : « On est chez les Flamands, donc ça rigole pas ». Bref, désolé, racolage et cabotinage, même en petite touches, n’apportent rien à ce spectacle par ailleurs vraiment réussi, et cela Hector Olbak aurait pu facilement nous l’épargner. Dans un spectacle comme en peinture, il n’y a pas de détails. Il lui manque, vous l’aurez compris, un metteur en scène et directeur d’acteurs. Mais bon, parler avec intelligence et sensibilité, d’histoire de la peinture en deux heures chrono à un vaste public pour une fois de tout âge, cela exige un sacré travail.  Encore une fois, chapeau ! Et il a été longuement applaudi.

Philippe du Vignal

Spectacle vu au 13 ème Art, Place d’Italie, Paris ( XIII ème). Réservations GRAND-ART.on line

Autre épisode de ce spectacle au Théâtre de l’Atelier, Paris ( XVIII ème).

Exposition de ce mur d’images en quarante ou quatre-vingt modules à la Galerie Sabine Bayasli, 99 rue du Temple, Paris ( III ème). T. : 06 34 29 40 82.


Archive pour 9 mars, 2022

Stallone d’après la nouvelle d’Emmanuèle Bernheim, mise en scène de Fabien Gorgeart

Stallone d’après la nouvelle d’Emmanuèle Bernheim, mise en scène de Fabien Gorgeart

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© Huma Rosentalski

 Rocky 3, l’œil du tigre, histoire d’un champion du monde déchu qui va regagner son titre de poids lourd après s’être ressaisi est une révélation pour Lise et le film va changer son destin. Elle suit l’exemple du boxeur et avec la même pugnacité, reprend ses études de médecine, quitte son petit ami et rompt avec sa famille. Pour mordre la vie à pleines dents, sans manquer un film de Rocky Balboart incarné par Silvester Stallone, mentor imaginaire à qui elle voue une infinie reconnaissance.

 A la lecture de la nouvelle, Clotilde Hesme a proposé au réalisateur Fabien Gorgeart avec qui elle a tourné Diane a les épaules (2017) de la mettre en scène: «Nous partageons, dit le cinéaste, le fait d’avoir été tous les deux très bouleversés par la découverte de Stallone. Vivre intensément la vie d’un personnage, partager son intimité et se faire surprendre par le vertige de sa disparition en un fragment de seconde. Et sur le ton de l’écriture d’Emmanuèle Bernheim, dans la légèreté et l’humour»

Clothilde Hesme partage cette légèreté avec Pascal Sangla. Il a composé une musique dans l’esprit pop des années quatre-vingt et celui d’un tube, bande originale d’Eye of the Tiger. Campée devant son micro, avec l’énergie d’une rock-star, elle donne une épaisseur existentielle à cette Lise naïve et volontariste. Le musicien interprète avec humour au synthétiseur tous les personnages secondaires de cette histoire.

Sous les éclairages subtils de Thomas Veyssière, ils nous donnent un concert de mots et de musique et nous entraînent sans artifice, dans l’univers de cette femme attachante, drôle et battante, jusqu’au bout des épreuves qu’elle traverse avec le courage d’un Rocky… Pour l’actrice, « c’est aussi l’occasion de défendre une figure féminine forte et libre.»

Stallone réhabilite à sa façon le cinéma populaire et son icône bodybuildée, souvent décriée mais qui a séduit des générations d’adolescents et qui devient une pulsion de vie pour Lise.

Ce spectacle vaut le déplacement et continue sa route avec succès : depuis sa création au Théâtre Daniel Sorano à Toulouse en 2019, il a fait salle comble au Petit Saint-Martin à Paris et a reçu des applaudissements debout à Bonlieu-Scène nationale d’Annecy.

 Mireille Davidovici

 Spectacle vu le 3 mars à Bonlieu-Scène Nationale d’Annecy, 1 rue Jean Jaurès, Annecy (Haute-Savoie). T. : 04 50 33 44 11.

Les 10 et 11 mars, L’Arc – Le Creusot. Les 15 et 16.mars, Le Grand R, La Roche-sur-Yon (Vendée) ; les 17 mars et 18 mars, La Soufflerie, Rezé (Loire-Atlantique). Le 22 mars, Le Parvis, Tarbes (Hautes-Pyrénées) ; le 24 mars,  Circa Auch (Gers) ; le 29 mars, Théâtre de Bressuire, Bressuire (Deux-Sèvres).

Le 1er  avril , Forum Jacques Prévert,  Carros (Alpes-Maritimes ) et du 4 au 9 avril, La Garance,  Cavaillon (Vaucluse) ; le 10 avril, Théâtre d’Arles (Bouches-du-Rhône)

La nouvelle est publiée aux éditions Gallimard.

 

Somnole, chorégraphie et interprétation de Boris Charmatz

Somnole, chorégraphie et interprétation de Boris Charmatz

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© Marc_Domage

Le chorégraphe sortant de ses grands formats habituels, réalise et interprète son premier solo: «J’aimerais, dit-il, faire un solo somnolant qui s’inspire d’états de latence, pour explorer l’hibernation et sa sortie, les ressacs du rêvassement et les cris du réveil.» Créé en 2020 sur la grande scène de l’Opéra de Lyon, cette pièce d’une heure tient d’une performance, entièrement sifflée et donc suspendue aux lèvres du danseur.  Et où le mouvement émane du souffle-même. Boris Charmatz entre en scène par la salle et avance, fantomatique. Dans la pénombre , il s’étire lentement, rampe, se relève, et tombe, léthargique, sur le plateau gris. Sans qu’on sache ce qui, du sifflement ou du geste, mène la danse…

D’abord monotonale, la mélodie s’élabore. La somnolence se dissipe et les mouvements sont plus marqués, le rythme de plus en plus rapide, et les airs, sifflés jusqu’à bout de souffle. Même hors d’haleine, le danseur explore toute les possibilités sonores de son corps devenu instrument de percussion sous les coups de ses mains contre le thorax ou les cordes vocales et quand il frappe le sol de ses pieds. Enfantin et ludique, il en appelle à la connivence : « Quand j’étais petit, dit-il, je m’entraînais à siffler pour pouvoir ensuite imaginer un concert entier de sifflets». Concert qu’il essaye de diriger, en sollicitant la participation des spectateurs qui s’amusent à siffler avec lui -avec plus ou moins de bonheur- des airs connus, des ritournelles populaires ou des musiques de films comme celles du Bon, la brute et le truand ou d’Il était une fois dans l’Ouest d’Ennio Morricone. Summertime, issu de Porgy and Bess de George Gerswhin, de Stormy Weather d’Harold Arlen. Ou encore Les Feuilles mortes de Joseph Kosma…

Quel plaisir de le voir danser en sifflant le pimpant Voi che sapete des Noces de Figaro de Wolfgang Amadeus Mozart ou l’inquiétant musique de Dans l’Antre du roi de la montagne de Peer Gynt d’Edvard Grieg, qui annonçait l’assassin dans M Le Maudit de Fritz Lang. Et surgit une vive émotion quand le danseur sort lentement par la salle, en sifflant la fameuse aria Lascia ch’io pianga de Georg-Friedrich Haendel. Ces mélodies génèrent un joyeux mouvement perpétuel, un désir de danser et sauter, jusqu’à épuisement. Et quand le souffle vient à manquer à Boris Charmatz, nous pensons au récent confinement et au: « I can’t breathe » (Je ne peux pas respirer) de George Floyd qui engendra le mouvement Black Lives matter… «Le sifflet convertit le grand, en ténu. Un air d’opéra de Haendel réduit à presque rien, son squelette. C’est comme craquer une allumette : il y a la lumière, la chaleur, mais c’est ténu, ça s’éteint vite et un seul souffle peut l’éteindre. »

Il nous parle de cette fragilité, grâce à la magie d’un corps devenu musique et danse. Considéré comme l’un des chefs de file du mouvement non-danse dans les années quatre-vingt dix, le directeur du Centre Chorégraphique National de Rennes et de Bretagne et de son Musée de la danse de 2009 à 2018, va, en septembre prochain, diriger le Tanztheater Wuppertal Pina Bausch pour y développer un nouveau projet entre la France et l’Allemagne. A suivre…

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 4 mars, à Bonlieu-Scène Nationale d’Annecy, 1 rue Jean Jaurès, Annecy (Haute-Savoie). T. : 04 50 33 44 11.

Du 11 au 12 mars, Triennale di Milano, Milan (Italie) ; du 18 au 19 mars, Sadler’s Well, Londres (Angleterre).

Le 5 avril, Pavillon ADC Genève (Suisse) ; du 26 au 27 avril, Teatro Municipal do Porto, Porto (Portugal) .

Le 10 juin, festival Uzès danse, Uzès (Gard).

Du 6 au 8 juillet, festival de Marseille (Bouches-du-Rhône).

Et du 23 au 24 août, Festival d’Helsinki (Finlande).

 

 

 

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