Les Autres de Rémi De Vos, mise en scène de Carole Thibaut et Rémi De Vos

 

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Les Autres de Rémi De Vos, mise en scène de Carole Thibaut et Rémi De Vos

Carole Thibaut, directrice du Théâtre des Îlets-Centre Dramatique National de Montluçon (Allier) et Rémi De Vos ont répondu à l’invitation du Conservatoire National. Ils ont imaginé une création sur place ce mois-ci pour les élèves de troisième année et jouée trois jours, puis reprise au Conservatoire à Paris. Cette série de courtes scènes a pour fil rouge les préoccupations de personnages qui ont moins de trente ans.

Cela commence avec un retard de treize minutes, sans que soit prononcée la moindre excuse. Inadmissible et pas très pédagogique! La ponctualité est une règle absolue et pas l’exception. Au milieu du plateau, une table ronde avec chaises en bois et et fauteuils en skaï rouge et noir années cinquante pour ceux qui jouent; les autres assis au fond, côté jardin et côté cour, attendent leur tour et apportent les accessoires. Un vieux truc brechtien passablement usé. Et pourquoi cette bagarre avec lumière blanche stroboscopique qu’on a vue partout au music-hall comme au théâtre, depuis au moins soixante ans

Ils s’appellent Julie, Thomas, Pauline, Damien… Certains en couple avec  un enfant et tous se retrouvent chez les uns ou les autres. Et ils parlent beaucoup, surtout au début, d’un émigré syrien qu’ils ont recueilli mais qui ne sort jamais de sa chambre: «Vous vouliez qu’il ait laissé ses problèmes en Syrie?» Et ils discutent, au cours d’un repas ou d’un verre, plaques tectoniques, La Bhagavad-Gita qui a une place importante dans la pensée religieuse hindouiste. Mais aussi régimes politiques, homophobie, P.M.A., philo et littérature avec l’amitié entre George Sand et Flaubert. Malgré leurs différences de pensée politique, l’une, baronne habitant un beau manoir et servie par une flopée de domestiques mais étant pour l’abolition des différends entre groupes sociaux. Et l’autre, pas très riche mais opposé aux lois sociales votées par la Commune… Rien de très passionnant et au bout d’une demi-heure, l’ennui pointe son nez. Dans la salle, les copains des jeunes acteurs rient souvent mais les autres spectateurs, beaucoup moins…

« Comme disait Thomas Bernhard, « les gens en théorie je les comprends, mais en pratique je ne peux pas les supporter.» Fort de cette maxime, Rémi De Vos a écrit une pièce qui, à la manière d’une ronde de personnages et de situations, explose le politiquement correct et les postures de tous bords, égratignant impitoyablement nos bien-pensances et éclairant avec un humour sans concession, les ambivalences de nos engagements. N’épargnant personne, l’auteur nous régale une nouvelle fois avec un sens unique du dialogue et de la comédie. À quelques semaines des élections présidentielles, voici de quoi se nettoyer les méninges! » Enfin dixit la note d’intention!

Mais sur le plateau, côté régalade, humour sans concession et nettoyage des méninges, il faudra repasser! Le texte, un poil laborieux, ne semble guère en accord avec les préoccupations des jeunes d’aujourd’hui que nous connaissons. Avec beaucoup d’énergie, les élèves de troisième année font ce qu’ils peuvent pour essayer de rendre crédibles les personnages peu convaincants d’un texte souvent caricatural et qui n’est pas du meilleur Rémi De Vos… Mais cela fait aussi partie du métier de jouer une pièce assez médiocre. Ici mission accomplie: rien à dire, même mal dirigés, ils font le boulot pendant… deux heures bien longues. Mais, à cause du retard, nous avons dû partir avant la fin et avons dû rater quelques minutes.

La mise en scène manque de rythme et quant à la direction d’acteurs, nous sommes restés sceptiques, alors que ces jeunes gens sympathiques -il faut tous les citer : Vincent Alexandre, Louis Battistelli, Théo Delezenne, Ryad Ferrad, Myriam Fichter, Yasmine Hadj Ali, Antoine Kobi, Samantha Le Bas, Agathe Mazouin, Basile Sommermeyer, Julie Tedesco, Zoé van Herck- ont de grandes qualités, notamment gestuelles. Comme cette jeune fille dans un étonnant solo dansé (au premier rang avec une canne sur la photo), ou d’interprétation, comme ce jeune homme ( juste derrière sa camarade sur cette même photo), aux airs de Philippe Noiret, son camarade au Cons… dans les années cinquante. Il dit remarquablement un long monologue face public.

Mais pourquoi diable, Remi De Vos et Carole Thibaut les font-ils tous si souvent crier et pourquoi -comme ailleurs, au Conservatoire National Supérieur (sic), la diction est parfois aux abonnées absents! La formidable acoustique de la salle n’est pas en cause mais le plateau nu, sans doute un peu. Ces élèves sont en toute fin de scolarité et nous attendons ici l’excellence dans un travail sur le texte d’un auteur contemporain ou classique, ici peu et mal dirigé. Bref, une soirée décevante…

 Philippe du Vignal

Présentation de travail vue le 21 avril, au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, 2 bis rue du Conservatoire, Paris (IX ème).

 


Archive pour 24 avril, 2022

Trézène Mélodies, L’Histoire de Pèdre en chansons, d’après Jean Racine et Yannis Ritsos, mise en scène et musique de Cécile Garcia Fogel

Trézène Mélodies, L’Histoire de Phèdre en chansons, d’après Jean Racine et Yannis Ritsos, mise en scène et musique de Cécile Garcia Fogel

Trezene Melodies - 06-03-21 -45

Mélanie Menu et Cécile Garcia Fogel © Simon Gosselin

 Avec cette pièce en forme d’oratorio, la metteuse en scène tisse fragments de la célèbre tragédie classique, extraits du Mur dans le miroir et Phèdre du poète grec. L’action se passe à Trézène, dans le Péloponnèse: Phèdre se meurt d’amour pour son beau-fils Hippolyte. Quand on lui annonce la mort de son mari Thésée, parti combattre dans les Enfers, elle ose, sur les conseils de sa nourrice, la perfide Oenone, avouer sa flamme au jeune homme. Amoureux de la princesse captive Aricie, Hippolyte horrifié, la repousse. Thésée qui revient, trouvera son épouse pendue et accusant son fils de viol. Le Roi déchaîne alors le courroux des Dieux sur l’innocent garçon…

 Ce court spectacle nous fait revivre les moments-clefs de la tragédie dans l’intimité des personnages. Nous retrouvons avec plaisir la langue musicale de Racine jusqu’au magnifique récit de la mort d’Hippolyte par Théramène qui clôt la pièce: «À peine, nous sortions des portes de Trézène, /Il était sur son char; ses gardes affligés/ Imitaient son silence, autour de lui rangés / Il suivait tout pensif le chemin de Mycènes… » Les textes de Yannis Ritsos font planer, entre les épisodes, un climat délétère. Avec une tonalité contemporaine il plonge dans le quotidien tourmenté de l’héroïne enfermée chez elle: «Cette maison est remplie de ton ombre. La maison est un corps – je le touche, il me touche, se colle à ̀ moi, la nuit surtout. Les flammes des lampes me lèchent les cuisses, les flancs, leur lave me brûle, me rafraîchit, me désigne. »

 La pièce est entièrement chantée. La musique, assez monocorde et répétitive, laisse entendre la fluidité des alexandrins, les lamentations et les plaintes des héros et se durcit pour faire sonner la prosodie heurtée et sensuelle de Yannis Ritsos. Elle se teinte d’accents empruntant aux âpres mélodies méditerranéennes et au rebetiko des anarchistes grecs. A la guitare sèche ou électrique, Ivan Quintero, qui signe les arrangements, impulse un rythme au chant de Cécile Garcia Fogel (Phèdre et Théramène) et Mélanie Menu (Aricie, Oenone, Aricie, Hyppolite). Elles monologuent, dialoguent ou entrelacent leurs voix avec simplicité, sans chercher la performance.

 Même simplicité dans la scénographie de Caroline Mexme : poteries, amphores, sable noir répandu pour circonscrire des aires de jeu. Un amas de chaises, sièges des personnages absents… Un dispositif léger et facile à implanter en tout lieu. Un beau concentré de Phèdre, qui, en à peine une heure, nous emporte avec émotion aux portes de Trézène…

 Mireille Davidovici

 Jusqu’au 30 avril, Théâtre 14, 20 avenue Marc Sangnier, Paris (XIV ème) T. : 01 45 45 49 77

 Le Mur dans le miroir anthologie de poèmes de Yannis Ritsos, traduction de Dominique Grandmont, Gallimard, collection Poésie.

Phèdre, traduction d’Anne Personnaz, Erosonyx éditions. 

 

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