Les Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis

Les Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis

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Changement dans la continuité ou bien l’inverse? En tout cas, Frédérique Latu, la nouvelle directrice qui a succédé à Anita Mathieu, retraitée nolens volens de cette institution, a su s’inscrire dans le prolongement du concours historique de Bagnolet. Au « travail de repérage artistique », à l’engagement « en faveur de la création chorégraphique et des artistes » et à l’action ayant contribué à « la renommée nationale et internationale des R.C.I. », Frédérique Latu veut, elle, ajouter une touche personnelle en « renforçant des dynamiques de réseaux avec les acteurs du champ chorégraphique et de la diffusion, tout en renouvelant leur lien au territoire ».
Aguerrie par l’expérience acquise à l’Échangeur-C.D.C.N. des  Hauts-de-France où elle a assuré les fonctions de secrétaire générale puis de directrice déléguée en 2014, elle a été regrettée par  Christophe Marquis, le directeu qui a dit lors de l’événement C’est comme ça  en septembre dernier : « Frédérique Latu doit maintenant voler de ses propres ailes… »

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Sa formation en gestion des organisations culturelles à Dauphine l’aidera sûrement dans cette fonction, pour mieux « repositionner »  ces rencontres et en « faire un festival… ancré sur son territoire ». Un débat pas nouveau, opposant deux visions de la Culture, quitte à réactiver la vieille querelle entre tenants de l’art pour l’art, et ceux de l’art au service du peuple. Et qui se poursuit dans la capitale où les salles de spectacle ne sont pas gérées de façon optimale… Travaux sans fin depuis six ans au Théâtre de la Ville à Paris avec réouverture, en principe fin 2023, abandon de la salle Pleyel, sous-utilisation de lieux comme La Gaîté lyrique ou de l’Auditorium Saint-Germain,  encouragement de la pratique amateur… Voir aussi ainsi dans les Hauts-de-France, la destruction du cinéma-bowling-dancing à Tourcoing destiné à la population ouvrière et qui a été remplacé par Le Fresnoy, un outil de production et post-production dans les domaines de l’image et du son mais d’où sortent quelques artistes n’ayant pas tous le niveau international. A quelques encablures de La Piscine à Roubaix, son contraire… Un lieu d’art traditionnel, appliqué, naïf et parfois kitsch, mais toujours poétique.

Il faudra dépasser dialectiquement cette antinomie. Nous ne pensons pas qu’il faille opposer «défrichage chorégraphique» à «ancrage sur le territoire». Souhaitons donc à Extensions -tel est le nom de cette manifestation- d’imposer son style. Pour surmonter cet obstacle et se mettre à l’écoute du monde, Frédérique Latu et les équipes artistiques qu’elle a invitées, joueront de l’indiscipline, une notion proposée en 1994 par Jean-Marc Adolphe dans Les Lettres françaises. Et qui depuis a fait florès, utilisée comme slogan par Mouvement et comme concept au sens publicitaire du terme, par nombre de médias.

Augurons qu’Extensions visera toutes les cibles avec des artistes comme entre autres, Nora Chipaumir, Massimo Fusco, en passant par Katerina Andreou, Doria Belanger, Dalila Belaza, Hortense Belhôte, Bo /Kevin Jean, Mayra Bonard, Yvan Clédat et Coco Petitpierre, Mercedes Dassy, Olga Dukhovnaya, kabinet k, Wanjiru Kamuyu, Marc Lacourt et Delphine Perret, Prue Lang et Jana Castillo, Anne Nguyen et Yves Mwamba, collectif Ouinch Ouinch, Selma et Sofiane Ouissi, PJPP, Sylvain Prunenec, Thibaut Ras, Soa Ratsifandrihana, Maxence Rey, Sylvain Riéjou, Marcela Santander Corvalán et Hortense Belhôte, le collectif V. I.D.D.A. Seront aussi reprises trois pièces du regretté Andy De Groat mort en 2019 à Montauban, qui sauront «nous mettre à l’écoute du monde». Pour mieux nous captiver…

 Nicolas Villodre

Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis, du 13 mai au 18 juin, 96 bis rue Sadi-Carnot, Bagnolet Cedex 01 France. T.:+33 (0)1 55 82 08 08. contact@rencontreschoregraphiques.com

 

 

 


Archive pour 7 mai, 2022

La Fondation LUMA à Arles

La Fondation LUMA à Arles

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 Créée en 2004 par Maja Hoffmann à Zurich pour soutenir la création artistique dans la photo, l’édition, les films documentaires, les multimédias,etc. cette fondation soutient, finance et réalise des projets artistiques visant à approfondir la compréhension des questions liées à l’environnement, aux droits de l’homme, à l’éducation et à la culture.

En 2013, Maja Hoffmann lance LUMA Arles, un site de création interdisciplinaire où, à travers des expositions, conférences, spectacle, projets d’architecture et design, des artistes et scientifiques interrogent les relations entre art, culture, environnement, droits humains et recherche. En juin 2021,  cette fondation a ouvert son propre site, englobant sept anciennes usines de réparation et construction de locomotives installées sur une partie de l’ancienne nécropole antique des Alyscamps au XIX ème siècle, et une tour dessinée par l’architecte Frank O. Gehry sur le Parc des Ateliers…
Un lieu à la fois de production et d’expérimentation pour les artistes comme pour le grand public. Cette tour accueille chaque année des expositions d’artistes majeurs, des œuvres de grands créateurs d’aujourd’hui contemporaine. Mais aussi des commandes spécifiques et des projets in situ. Des archives d’artistes, photographes sont accessibles dans les conditions des grandes institutions internationales.

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La tour conçue par l’architecte-star Frank Gehry et construite de 2014 à 2021, veut être une nouvelle proposition d’un bâtiment culturel au XXI ème siècle, en hommage à l’histoire d’Arles et de sa région : d’abord à l’architecture romaine1 avec le «roman plan», de la rotonde à la base de la tour faisant référence aux arènes antiques. Un hommage enfin aux Alpilles absorbant la lumière qui colore les pierres. Ici, des plaques métalliques renvoient la lumière  pénètrant dans le tambour de verre au rez-de-chaussée. Enfin, les murs des ascenseurs sont couverts de carrés de sel cristallisé, un clin d’œil aux salines locales. (2)

Cette tour de 15. 000 m2 aussi haute que large (56 m x sur 54 m) a été surtout construite en acier, béton et verre, en couches superposées avec douze niveaux dont 2.000 m2 pour des expositions dans un espace labyrinthique. Les espaces des sous-sols, à la terrasse panoramique au neuvième étage, ont été conçus pour des usages publics ou privés. Comme la Galerie principale: un espace d’exposition de 1.000 m2 d’un seul tenant et sans pilier porteur;  deux autres de 500 et 350 m2, un café-restaurant, un auditorium de cent cinquante places, des ateliers d’artistes, une bibliothèque, des espaces d’archives et d’autres consacrés à l’événementiel, des salles pour séminaires, et des bureaux.

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Dans une salle spécialement aménagée avec de très grandes photos d’Arles, sont exposées les maquettes de Frank Gehry pour cette tour et son implantation sur le Parc des Ateliers. Une collection permanente in situ en a tout de suite fait partie avec, entre autres, Take your Time (2021), un très grand miroir tournant du Danois Olafur Eliasson, au-dessus de l’escalier à double révolution de Frank Gehry. Une prouesse architecturale imaginée comme un trompe-l’œil géant, tel celui de Léonard de Vinci au château de Chambord. Et Isometric Slides (2020) de Carsten Höller, un étonnant toboggan qui, lui aussi à double révolution, dialogue avec l’escalier de Gehry et permet de descendre du deuxième étage, au rez-de-chaussée.

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Dans les expositions temporaires de mars, une utilisation minimale de l’espace -ce qui donne une impression de vide mal exploité dans cette tour- avec de nombreuses œuvres d’art conceptuel… peu accessibles au grand public. Le parc paysager, imaginé par Bas Smets de 2017 à 2021, est composé de jardins s’inspirant de la région et du parc régional de Camargue avec écosystème artificiellement recréé. Dans le Parc des Ateliers, ont été restaurés la grande halle, les forges, la mécanique générale, les lieux de formation et le réfectoire…

Sébastien Bazou

Fondation LUMA, 35 avenue Victor Hugo, Arles (Bouches-du-Rhône). T. : 04 65 88 10 00.

 1) Arles possède un incroyable trésor architectural romain et roman, classé au Patrimoine Mondial de l’UNESCO en 1981, avec des monuments exceptionnels de conservation: l’église romane Saint-Trophime et son cloître (XII ème et XIV ème siècle). L’amphithéâtre romain du Ier siècle après J.C. (136 m x 107m ) pouvait accueillir environ 21.000 spectateurs. Le Théâtre antique (Ier siècle avant J.C.) bâti au cœur de la cité. Les crypto-portiques  (I er siècle avant J.C.), souterrains d’un forum aujourd’hui disparu. Les Thermes de Constantin (IVe siècle), des lieux publics très fréquentés, et aujourd’hui en partie dégagés. Les vestiges des remparts romains et le site des Alyscamps (IV ème siècle après J. C. Et une immense nécropole romaine et médiévale avec une église romane, des chapelles et une allée bordée de sarcophages aménagée au XVIII ème siècle par les Frères minimes.
A voir aussi le Musée Départemental d’Arles antique avec, entres autres, un chaland fabuleux bateau à fond plat long de trente-et un mètres, découvert en 2004 et ici exposé depuis huit ans…Daté des années cinquante après J.-C., donc sous Néron,  et impeccablement restauré, il est en parfait état de conservation avec mobilier de bord et cargaison de blocs de pierre calcaire…

Musée Départemental Arles Antique,presqu’île du cirque romain. T. : +33 (0)4 13 31 51 03.

2) Les salins de Camargue remontent à l’Antiquité. L’ingénieur romain Peccius avait été chargé au début de l’ère chrétienne de les organiser et en 1856, leurs propriétaires s’unirent pour fonder les Salins du Midi.

 

 

 

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Des femmes respectables, mise en scène et chorégraphie d’Alexandre Blondel

Des femmes respectables, mise en scène et chorégraphie d’Alexandre Blondel

Crédit photo 3

©Etienne Laurent

Cette création fait pendant au ballet De la puissance virile où trois danseurs s’expriment en mouvements et en mots sur le machisme ordinaire subi par chacun, selon son origine (voir Le Théâtre du blog). Nous retrouvons ici le style du chorégraphe entre théâtre, acro-danse et hip hop. Cet artiste pluridisciplinaire, sociologue de surcroit, installé dans les Deux-Sèvres avec sa compagnie Carna, nourrit ses pièces de recherches sur le terrain.

Pour le versant féminin de son diptyque, Alexandre Blondel s’est inspiré de l’ouvrage Des femmes respectables de la sociologue féministe britannique Beverly Skeggs. Il a composé cette pièce à partir d’entretiens qu’il a menés lui-même dans sa région auprès de femmes âgées de soixante-dix à quatre-vingt cinq ans, issues du monde rural: agricultrices, ouvrières et autres. Quatre danseuses s’emparent des paroles de ces «invisibles» qui pourraient être leurs grands-mères et les mêlent aux leurs. D’une génération à l’autre, les problématiques féminines se répondent avec écarts et similitudes. Le metteur en scène et chorégraphe a construit cette pièce suivant  des thématiques : le don de soi, la maternité, le mariage, les violences conjugales, la sexualité mais aussi le divorce et la précarité

Emilie Camacho, Camille Chevalier, Jade Fehlmann et Léna Pinon-Lang investissent le plateau tandis qu’une voix off, délicieusement rétro, raconte une jeunesse rurale: «Le dimanche, au bal, on dansait comme tous les ados avec ceux qui nous plaisaient. On dansait souvent entre filles d’ailleurs, parce que flirter c’était mal vu et mes frères étaient toujours là. Eux, je les aime, ils sont pas responsables de ça…ils étaient pas responsables de tout ça… c’est pas eux, c’était pas eux… » Derrière les mots, on entend l’aliénation mais aussi les stratégies pour la déjouer: une forme de contestation pointe, reprise avec gourmandise par les danseuses pour souligner la résistance de ces femmes.

Dans ce théâtre à la fois de paroles et de gestes, les moments forts sont ceux où la danse prédomine et où la chorégraphie souligne minutieusement par des états du corps, les différentes formes d’aliénation. L’assemblage est surtout réussi quand texte et danse opèrent en symbiose comme dans cette avancée chorale à petits pas mécaniques rythmant des phrases syncopées: «Je travaillais, je faisais des petites choses, je faisais de la couture, des finitions de couture.. Je travaillais souvent le soir pour cinq francs de l’après-midi, alors là, trente-six métiers, trente-six misères… J’ai vendu des encyclopédies, y’avait un monsieur, il m’emmenait avec lui, un homme charmant, vraiment, il vendait ça comme des petits pains. Et quand je me suis retrouvée toute seule, j’ai jamais rien vendu… Puis à l’époque, les femmes n’étaient pas considérées… Après, j’ai vendu des assurances pour les Mutuelles du Mans…. » Il y a aussi les souvenirs des luttes de cette syndicaliste d’une usine textile, qu’elle a menées et qui l’ont décillée …

De petites et grandes résistances au quotidien que les jeunes interprètes nous donnent à entendre et à voir, en y mêlant leur ressenti de femmes et danseuses d’aujourd’hui. #Metoo et #Balancetonporc qui agitent, entre autres, le monde du spectacle, sont évoqués ici avec humour : la légèreté reste de mise parfois avec des gestuelles allusives sans être grossières. L’écriture chorégraphique va à l’encontre d’un corps normé et idéalisé. Entre puissance et fragilité, Alexandre Blondel déjoue les codes de la féminité avec des torsions, bascules arrière, cambrés exagérément provocants mais aussi des lâcher-prise et déséquilibres. Les mots débordent parfois sur la danse mais il faut saluer ce travail original, bien construit et très physique où les artistes s’engagent avec talent et drôlerie pour mettre en valeur les espaces de résistance et d’émancipation dans la fabrique sociale du féminin d’hier et d’aujourd’hui

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 4 mai, Les Trois T-Scène Conventionnée de Châtellerault, 21 rue Chanoine de Villeneuve, Châtellerault (Vienne). T. : 05 49 85 46 54.

Du 7 au 29 juillet à 18 h 15, Théâtre de la Danse Golovine, 1 bis rue Sainte-Catherine, Avignon (Vaucluse). T. : 04 90 86 01 27


Radicale Vitalité, chorégraphie de Marie Chouinard

Radicale Vitalité, chorégraphie de Marie Chouinard

Le Théâtre de la Ville entretient une vraie fidélité avec de nombreux chorégraphes. Le Cri du monde, Les Vingt-quatre préludes de Chopin, cette première pièce de Marie Chouinard, avait été jouée -et un duo de cette nouvelle création en est issu- quand le bâtiment place du Châtelet, revu et corrigé par Fabre et Perrottet en 1968 mais pollué à l’amiante, était encore ouvert.  Les gigantesques travaux commencés en 2016 six ans ne sont toujours pas finis! On parle d’une réouverture au public à l’automne prochain… Son directeur Emmanuel Demarcy-Mota qui avait succédé à Gérard Violette,en 2011 aura jusque là finalement passé plus de temps à l’Espace Cardin…

© Sylvie-Ann Paré

© Sylvie-Ann Paré

Marie Chouinard a remonté les solos et duos emblématiques de son travail et a réveillé la mémoire du corps de ses danseurs canadiens. Mais elle a aussi fait des recherches dans ses archives vidéo. Un résultat surprenant, parfois inégal mais l’engagement des onze interprètes est ici total.Les spectateurs qui lui sont fidèles reconnaîtront certains extraits de ses pièces, en particulier un très beau duo (2018) avec Valeria Galluccio et Adrian W.S. Batt, sur le Lascia ch’io pianga de Händel, chanté par Montserrat Caballé. Nous retiendrons aussi l’incroyable solo de Carol Prieur ouvrant la pièce. Malgré ses cinquante ans, elle réalise ici une performance physique impressionnante… Il y a aussi une belle «danse » filmée du visage de Motrya Kozbur qui a une hyper-laxité cutanée.

 La danse de Marie Chouinard est très animale et charnelle. Elle aime déconstruire les relations femmes-hommes et mettre en danger l’éternelle domination masculine, avec un travail plastique provocant… Comme avec ces tableaux de groupe dans Le Nombre d’or (Live) créé à Vancouver en 2010 où ses danseurs nus, aux têtes de vieillards ou de bébés, prenaient des poses incongrues. Ce qui dérangeait certains spectateurs.
Après la pandémie, Radicale Vitalité en une heure quinze nous réveille d’une longue torpeur et nous fait du bien.

 Jean Couturier

 Jusqu’au 12 mai, Espace Cardin-Théâtre de la Ville, 1 avenue Gabriel, Paris (VIII ème). T. : 01 42 74 22 77.

 

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