Les Forteresses, texte et mise en scène de Gurshad Shaheman

Les Forteresses, texte et mise en scène de Gurshad Shaheman

Les Forteresses 2

Gurshad Shaheman et sa mère © Agnes Mellon

 Trois femmes nous invitent à prendre place dans un vaste salon de thé oriental: larges divans avec coussins et tapis persans, musique de leur pays… Ce sont la mère et les tantes du metteur en scène. Elles vont nous raconter, par la voix de trois actrices, leurs tribulations depuis leur enfance dans les années soixante à Mianeh, dans l’Azerbaïdjan iranien, jusqu’au jour où Gurshad Shaheman les a réunies, après des années de séparation.

Né en Iran en 1978 et arrivé en France à douze ans avec sa mère et sa sœur, l’auteur, acteur et metteur en scène écrit un théâtre fondé sur des expériences personnelles. Dans le sillage de sa trilogie autobiographique Pourama Pourama (voir Le Théâtre du Blog), il a écrit Les Forteresses à partir de récits de ces trois soeurs au parcours houleux dont les histoires s’entrelacent.

Chacune au douloureux destin, a subi le poids de la tradition familiale avec mariage arrangé, violences masculines, arrivée brutale de la révolution islamique avec son cortège de répressions et crimes. Ces femmes qui ont connu les révoltes de 1979 contre le Shah, l’espoir déçu d’une démocratie, la guerre avec l’Irak,  sont là, en chaire et en os, retrouvant devant nous les gestes et les costumes des époques et es épreuves traversées.

Leurs doubles: Guilda Chahverdi, Mina Kavani, Shady Nafar prennent en charge avec conviction et pudeur leurs paroles croisées recueillies par leur fils et neveu, et organisées en trois temps ponctués par des chansons qu’elles interprètent avec Gurshad Shaheman, parfait en crooner persan. Le texte a obtenu le Prix de la Librairie théâtrale 2022.

 Du chapitre 1 : « Le monde portée de la main » qui aborde leur foi en l’avenir, au chapitre 3 « Choisir sa prison », elles voient le monde se refermer sur elles mais elles ne baissent jamais sans les bras. Elles en ont fait du chemin les trois sœurs de Mianeh ! L’une exilée en France y a trouvé sa place, l’autre,  en Allemagne a vécu le chemin de croix imposé aux demandeurs d’asile, la troisième est restée en Iran malgré les troubles politiques et les difficultés financières.

Les Forteresses 3

© Agnes Mellon

Dignes, fières et fortes, elles disent leur lutte contre l’adversité et comment de leurs prisons respectives, elles ont choisi la vie. Elles disent aussi, avec humour et douceur, leur soif de liberté. Gurshad Shaheman a su trouver la clef pour ouvrir les forteresses qui les enserrent. Et il les écoute, discrètement assis au bord du plateau. Mathieu Lorry Dupuy conçu la scénographie nécessaire pour établir une convivialité entre public et interprètes. Nous partageons avec émotion, trois heures durant, les heurs et malheurs de ces mères-courage.

 Mireille Davidovici

Jusqu’au 11 juin, MC 93, 9 boulevard Lénine, Bobigny (Seine-Saint-Denis) T. :01 41 60 72 72.

Et du  2 au 4 janvier, Le Maillon, Strasbourg (Bas-Rhin).

Du 7 au 9 mars Théâtre de l’Union, Limoges  (Haute-Vienne ; le16 mars, La Faïencerie, Creil (Oise) ; le 18 mars, Théâtre de Chelles (Seine-et-Marne) ; Les Les 24 et 25 mars, Le Bateau-Feu, Dunkerque (Nord) ; le 31 mars, Thêâtre de Châtillon (Hauts-de-Seine).

Le 4 avril, Théâtre d’Angoulême (Charente).

Les 24 et 25 mai, Comédie de Valence (Drôme) ; les 30 mai et 1 er juin, Théâtre du Nord  (avec la Rose-des-Vents) Lille (Nord) ..

La pièce est  publiée aux Solitaires Intempestifs.

 

 


Archive pour 10 juin, 2022

Tout commence toujours par une histoire d’amour (soliloque autour d’une disparition) texte et mise en scène de Pauline Ribat

Tout commence toujours par une histoire d’amour (soliloque autour d’une disparition), texte et mise en scène de Pauline Ribat 


Mademoiselle R. serait l’histoire intime de l’autrice qui l’interprète, avec parfois quelques photos de famille projetées en fond de scène. Il s’agit de la disparition d’un père au regard bleu turquin qui vit dans une maison aux volets rouges. Avec le récit de ce parcours sans doute en partie autobiographique, elle va à la recherche d’elle-même et essaye de se construire. Pauline Ribat est impressionnante de vérité:  elle a une belle présence, une excellente diction,  un don évident pour nous embarquer avec pudeur dans cette histoire d’amour…

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Celle de ses parents qui commence dans un cours de théâtre amateur. « C’est là qu’ils se voient pour la première fois. Peut-être est-ce lui qui – effrontément – engage la conversation. Ou alors elle qui remarque ce beau blond au regard bleu turquin et se débrouille pour s’asseoir à côté de lui, l’air de rien. Ou bien peut-être lui propose-t-il – ou bien elle – la scène entre Marie Tudor et Fabiano Fabiani, celle où tous deux se retrouvent en secret dans la chambre royale – elle majestueusement installée dans son lit de reine. L’autrice – c’est-à-dire moi – dit à l’actrice – c’est-à-dire moi – de jouer LA REINE et Fabiano Fabiani. »

Admirative, elle paraît revivre leur bonheur: «Lui, est étudiant à Centrale Lyon, il a vingt-cinq ans. Elle, a dix-huit ans et vit encore chez ses parents – son visage est celui d’une enfant, elle se rêve danseuse. Lui est blond, le regard bleu turquin – hypnotique, il mesure 1m 83, porte des pattes d’eph et des chemises à fleurs. Elle a les yeux noisettes – pétillant de vie, les cheveux bruns bouclés et désordonnés, un port de reine et une passion pour les boucles d’oreille – en particulier les dormeuses élégantes. Lui est né à Paris dans le XV ème arrondissement à l’hôpital Cognac-Jay,15 rue Eugène Million,le 9 octobre 1951. Elle a grandi au Laos à Vientiane, avec sa soeur et ses deux frères. » Elle a grandi au Laos à Vientiane, avec sa sœur et ses deux frères. Ses parents se sont mariés à Saïgon. Son signe astrologique est le Lion. Lui aime la musique, c’est un collectionneur compulsif de vinyles et a pour modèle John Lennon. Elle aime se rouler dans l’herbe fraîche du matin et les poésies d’Emily Dickinson et de Charles Baudelaire. Ils ont sept ans d’écart. Ils sont jeunes, beaux et magnétiques. »

Mais bon, une fois de plus, la Bible a menti: la vie n’est pas un longue fleuve tranquille. Et, dit-elle, « Le jour où tu as repeint les volets de la maison aux volets rouges, j’ai compris que mon existence avait cessé de compter pour toi, que je n’étais plus ta fille. Qu’à tes yeux, j’avais cessé d’exister.» Et elle fume, se droguera. Je bois je fume. Elle accepte tout, ne dit rien.» Et le sexe d’un homme laboure mon corps d’adolescente. »
Puis elle a comme elle dit : trois fois sept ans, et son père disparaît totalement de sa vie. Et, à quatre fois sept ans, elle sort du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris et court vers la sienne. « Et à cinq fois sept ans- elle se tient devant vous et tente de raconter. »
Une fois le divorce prononcé, son père ne la verra plus. Elle le reprochera à sa mère et a l’impression qu’on lui a arraché son papa. Départ pour Paris. Ennuis divers puis avortement. Mais ce texte sonne comme un exorcisme personnel. « Maintenant je sais que le Père-Noël n’existe pas. Puis elle se tait. Maintenant je suis grande. »

Pauline Ribat a un talent indéniable de conteuse. Mais la réalisation ne suit pas toujours (refrain connu: un acteur gagne rarement à se mettre en scène) et la scénographie est un peu brouillonne et inutilement compliquée. Ce soliloque-exorcisme dure une bonne vingtaine de minutes de trop: dommage mais il n’est pas trop tard pour y remédier. A ces réserves près, cela vaut le coup d’aller découvrir une parole et une actrice…

Philippe du Vignal

Théâtre de Belleville, Passage Piver, Paris (XI ème). T. : 01 48 06 72 34 16.

Festival d’Avignon: Le 11, 11 boulevard Raspail, du 7 au 29 juillet.

Et du 11 au 15 octobre, Théâtre de la Renaissance, Oullins (Rhône).

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