L’Encyclopédiste,conception : Encyclopédie de la parole, texte et interprétation de Frédéric Danos

L’Encyclopédiste, conception : Encyclopédie de la parole, texte et interprétation de Frédéric Danos

Cela se passe dans une belle petite salle située dans les hauts de Belleville. Frédéric Danos, membre du collectif L’Encyclopédie de la parole qui collecte des enregistrements de parole, seul sur un plateau nu entre des châssis noirs, commente un choix de paroles originales enregistrées, issues de cette bibliothèque vivante de l’oralité créée en 2007, entretenue et augmentée par un collectif de poètes, artistes et linguistes.

Cela commence plutôt bien avec quelques phrases poétiques que n’auraient pas reniées les surréalistes: «J’étais sous la douche et je me disais: on fabrique une parole comme on fabrique un nid. Brindille après brindille.»( …) Et même si des oiseaux bâtissent de bluffants abris dignes des meilleures maîtrises mathématiques, contentons-nous ce soir de l’anarchie, c’est à dire la collaboration et le partage qui une définition personnelle de l’anarchie que j’assume et qui je pense s’applique.Et d’ailleurs anarchie et mathématiques ne sont pas antinomiques. Donc je suis sous la douche, je me suis savonné, maintenant je me rince, les pies en face de la cuisine et de la salle de bains, qui donne du même côté de l’immeuble que la cuisine donc les pies à côté de moi quand je me douche les pies érigent leur nurserie. »

L’auteur et unique interprète commente des documents sonores diffusés pour servir à une théorie de la parole avec une sincérité indéniable mais avec quand même un poil de prétention:  «La dynamique du spectacle, dit-il,  repose sur une alternance entre commentaires et restitutions, et, après des moments de possession, L’Encyclopédiste reprend sa démonstration théorique, revient à la motivation première de sa présence sur scène : je vais vous parler du Comment parler se fait. (…) L’Encyclopédiste est  « en démonstration» – en démonstration théorique et pratique. Chaque document diffusé abonde nécessairement dans le sens de l’hypothèse de départ. Chaque enregistrement vient se faire brindille dans ce nid en construction. Dès le début, le public dispose de la structure d’ensemble (le nid) et de l’unité de construction (la brindille). Pas besoin d’en passer par un fictionnement lourd ou une dramatisation compliquée, il y a un simple constat documentaire. »

© Martin Argyroglo

© Martin Argyroglo

Oui, mais voilà, sur scène, les choses sont beaucoup moins convaincantes. Les pièces sonores, restituées par le biais d’un haut-parleur, sont censées venir à l’appui du discours sur la parole et illustrer le propos de Frédéric Danos. Mais pas vraiment de fil rouge: la mise en scène est aux abonnés absents. Et il y a un manque flagrant de relation entre les affirmations proférées sur scène et les dix-huit extraits de paroles -à la qualité inégale- issues, entre autres, de deux émissions de France-Culture, de Satan est un clochard, un beau soliloque enregistré par l’auteur sur un quai de métro et qui aurait mérité d’être mieux exploité, une annonce en anglais dans un TGV, un « dialogue » de bébés… Tout cela, habilement tricoté aurait pu faire sens si cela avait été construit, ce qui est loin d’être le cas, et en variant  son et lumières.
Le théâtre, lieu de la parole: pourquoi non ? Mais surtout quand on veut justement traiter de la parole, mieux avoir une impeccable diction. Et celle de Frédéric Danos est très souvent approximative: les cours de théâtre servent en principe à quelque chose! Et comme il reste
face public et très statique, passé les  premières minutes, cette conférence illustrée sur la parole, à cause d’une dramaturgie mal ficelée et d’une direction d’acteur inexistante, devient vite ennuyeuse. Bref, ce qui aurait pu faire l’objet d’un sketch réussi en trente minutes, ne tient pas la route sur une heure… Et pourquoi ce short et cette chemise bleue pour tout costume, comme au café du coin? Quelle négligence, quelle vulgarité… Nous sommes au théâtre, alors Frédéric Danos, trouvez-vous quelque chose de plus adapté. Certes, il faisait très chaud dehors mais pas du tout dans la salle.
Bon, nous ne sommes pas là pour faire du mal mais pour voir comme éviter le pire. Lequel n’est pas toujours sûr: Popaul nous le rappelle avec son sous-titre du Soulier de Satin! Alors maintenant, comment éviter un naufrage annoncé, même si le public du off d’Avignon n’est pas très exigeant… 1) D’abord en revoyant drastiquement et avec une paire de ciseaux, un texte à la dramaturgie médiocre. 2) En faisant mettre en scène par un professionnel ce texte qui, alors, commencerait à ressembler à un spectacle. D’accord, c’était une avant-première, même si le spectacle avait déjà été présenté au Centre Georges Pompidou ce mois-ci.
Pour le moment, on est loin du compte. Mais il reste deux semaines et tous les professionnels vous le diront: en quinze jours, on peut encore faire des miracles. Alors, vite, vite au travail, M. Danos, si vous voulez que le wagon du train bleu attire du monde…

Philippe du Vignal

Spectacle vu le 18 juin à la M.J.C. de Belleville, 49 rue du Borrégo, Paris (XX ème).

Du 8 au 27 juillet, à 11h 40, Théâtre du Train Bleu, 40 rue Paul Saïn, Avignon (Vaucluse).

 

 


Archive pour 20 juin, 2022

L’Encyclopédiste,conception : Encyclopédie de la parole, texte et interprétation de Frédéric Danos

L’Encyclopédiste, conception : Encyclopédie de la parole, texte et interprétation de Frédéric Danos

Cela se passe dans une belle petite salle située dans les hauts de Belleville. Frédéric Danos, membre du collectif L’Encyclopédie de la parole qui collecte des enregistrements de parole, seul sur un plateau nu entre des châssis noirs, commente un choix de paroles originales enregistrées, issues de cette bibliothèque vivante de l’oralité créée en 2007, entretenue et augmentée par un collectif de poètes, artistes et linguistes.

Cela commence plutôt bien avec quelques phrases poétiques que n’auraient pas reniées les surréalistes: «J’étais sous la douche et je me disais: on fabrique une parole comme on fabrique un nid. Brindille après brindille.»( …) Et même si des oiseaux bâtissent de bluffants abris dignes des meilleures maîtrises mathématiques, contentons-nous ce soir de l’anarchie, c’est à dire la collaboration et le partage qui une définition personnelle de l’anarchie que j’assume et qui je pense s’applique.Et d’ailleurs anarchie et mathématiques ne sont pas antinomiques. Donc je suis sous la douche, je me suis savonné, maintenant je me rince, les pies en face de la cuisine et de la salle de bains, qui donne du même côté de l’immeuble que la cuisine donc les pies à côté de moi quand je me douche les pies érigent leur nurserie. »

L’auteur et unique interprète commente des documents sonores diffusés pour servir à une théorie de la parole avec une sincérité indéniable mais avec quand même un poil de prétention:  «La dynamique du spectacle, dit-il,  repose sur une alternance entre commentaires et restitutions, et, après des moments de possession, L’Encyclopédiste reprend sa démonstration théorique, revient à la motivation première de sa présence sur scène : je vais vous parler du Comment parler se fait. (…) L’Encyclopédiste est  « en démonstration» – en démonstration théorique et pratique. Chaque document diffusé abonde nécessairement dans le sens de l’hypothèse de départ. Chaque enregistrement vient se faire brindille dans ce nid en construction. Dès le début, le public dispose de la structure d’ensemble (le nid) et de l’unité de construction (la brindille). Pas besoin d’en passer par un fictionnement lourd ou une dramatisation compliquée, il y a un simple constat documentaire. »

© Martin Argyroglo

© Martin Argyroglo

Oui, mais voilà, sur scène, les choses sont beaucoup moins convaincantes. Les pièces sonores, restituées par le biais d’un haut-parleur, sont censées venir à l’appui du discours sur la parole et illustrer le propos de Frédéric Danos. Mais pas vraiment de fil rouge: la mise en scène est aux abonnés absents. Et il y a un manque flagrant de relation entre les affirmations proférées sur scène et les dix-huit extraits de paroles -à la qualité inégale- issues, entre autres, de deux émissions de France-Culture, de Satan est un clochard, un beau soliloque enregistré par l’auteur sur un quai de métro et qui aurait mérité d’être mieux exploité, une annonce en anglais dans un TGV, un « dialogue » de bébés… Tout cela, habilement tricoté aurait pu faire sens si cela avait été construit, ce qui est loin d’être le cas, et en variant  son et lumières.
Le théâtre, lieu de la parole: pourquoi non ? Mais surtout quand on veut justement traiter de la parole, mieux avoir une impeccable diction. Et celle de Frédéric Danos est très souvent approximative: les cours de théâtre servent en principe à quelque chose! Et comme il reste
face public et très statique, passé les  premières minutes, cette conférence illustrée sur la parole, à cause d’une dramaturgie mal ficelée et d’une direction d’acteur inexistante, devient vite ennuyeuse. Bref, ce qui aurait pu faire l’objet d’un sketch réussi en trente minutes, ne tient pas la route sur une heure… Et pourquoi ce short et cette chemise bleue pour tout costume, comme au café du coin? Quelle négligence, quelle vulgarité… Nous sommes au théâtre, alors Frédéric Danos, trouvez-vous quelque chose de plus adapté. Certes, il faisait très chaud dehors mais pas du tout dans la salle.
Bon, nous ne sommes pas là pour faire du mal mais pour voir comme éviter le pire. Lequel n’est pas toujours sûr: Popaul nous le rappelle avec son sous-titre du Soulier de Satin! Alors maintenant, comment éviter un naufrage annoncé, même si le public du off d’Avignon n’est pas très exigeant… 1) D’abord en revoyant drastiquement et avec une paire de ciseaux, un texte à la dramaturgie médiocre. 2) En faisant mettre en scène par un professionnel ce texte qui, alors, commencerait à ressembler à un spectacle. D’accord, c’était une avant-première, même si le spectacle avait déjà été présenté au Centre Georges Pompidou ce mois-ci.
Pour le moment, on est loin du compte. Mais il reste deux semaines et tous les professionnels vous le diront: en quinze jours, on peut encore faire des miracles. Alors, vite, vite au travail, M. Danos, si vous voulez que le wagon du train bleu attire du monde…

Philippe du Vignal

Spectacle vu le 18 juin à la M.J.C. de Belleville, 49 rue du Borrégo, Paris (XX ème).

Du 8 au 27 juillet, à 11h 40, Théâtre du Train Bleu, 40 rue Paul Saïn, Avignon (Vaucluse).

 

 

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