The Down of the Gods texte de Marius Ivaskeviius, mise en scène de Vladimir Gurfinkel

The Down of the Gods texte de Marius Ivaskeviius, mise en scène de Vladimir Gurfinkel

© J. Couturier

© J. Couturier

Le théâtre RusDrama de Lituanie présente un spectacle d’une actualité brûlante: la guerre en Ukraine. Proche de celui qu’ont présenté les Dakh Daughters aux ateliers Berthier, (voir Le Théâtre du blog), le spectacle rapporte des faits douloureux à entendre.

Témoin des événements dramatiques survenus à Marioupol, Mantas Kvedaravicius réalisateur du film Marioupol retourne sur les lieux début février avec sa femme Anna pour filmer la suite :  Marioupol 2 . Blessé, il meurt le 2 avril. Anna parle de sa blessure, de sa douleur, de la brutale irruption d’une guerre barbare dans un quotidien bouleversé.
Après avoir récupéré son corps, Anna réussit avec de nombreuses difficultés à le rapatrier en Lituanie.Cette création comprend pour le rôle d’Anna des comédiennes biélorusses et ukrainiennes, réfugiées à Vilnius. La pièce est fondée sur des faits réels et beaucoup de personnes présentes pendant ce drame ont été interviewées. Ici, pas de distanciation possible. On lit en surtitrage : « Il a été gravement blessé à la cuisse. Deux jambes cassées et les intestins touchés. Les voisins lui ont recousu les jambes, à vif. » Autres mots dits à propos de ce conflit très médiatisé et de la manière dont l’écrivain peut rendre compte de ce qui se déroule sous nos yeux en direct : «  Les gens font des selfies et meurent sur livestream. En temps de guerre, où chaque balle est filmée sous différents angles, il n’y a aucune place pour le récit. »

 Au milieu de la pièce, on entend la voix de Mantas Kvedaravicius qui, au téléphone, cherche à rassurer sa famille… Des paroles bouleversantes. The Down of the Gods est un cri pour dire le crime d’Etat qui se perpétue aujourd’hui.

 Jean Couturier

Jusqu’au 28 juillet, La Scierie, 15 boulevard du quai Saint-Lazare. T. 04 84 51 09 11.


Archive pour 22 juillet, 2022

Solitaire de Lars Norén, mise en scène de Sofia Adrian Jupither

Solitaire de Lars Norén, mise en scène de Sofia Adrian Jupither

solitaire

© Inga Restriktioner

Un amas de personnes, indistinctes, debout sur le plateau, dans un espace rectangulaire tellement réduit qu’elles ne peuvent bouger ni se voir dans la pénombre. Pourquoi sont-elles là ? Quelle sera l’issue de cette situation insupportable ?
Selon les didascalies : « Ils ne sont pas enfermés entre des murs, et pourtant ils ne peuvent pas s’en aller et ne savent pas pourquoi ils sont là ». Hommes et femmes, certaines avec des enfants, pressés comme dans un métro aux heures de pointe, voient leur vie courante brutalement suspendue: «J’étais en route pour faire des courses», dit l’un. «J’allais simplement chercher ma valise , explique une autre, « J’allais déposer ma fille au club de danse », raconte un père… D’interrogatifs, leurs échanges deviennent angoissés puis agressifs verbalement, voire physiquement.

 Pour cette pièce de l’auteur suédois (1944-2021), l’une de ses dernières, Sofia Adrian Jupither a conçu une mise en scène minimaliste, sans autre décor qu’une orchestration des voix et bruits environnants : pluie, rats, vent… dans un espace exigu, sorte d’isolat sur le grand plateau et plongé, comme la salle de spectacle, dans l’obscurité. Nous ne les distinguons pas plus, qu’ils ne se distinguent entre eux… La metteuse en scène suédoise, familière de l’œuvre de Lars Norén, a créé sept de ses pièces dont six ont été présentées pour la première fois en public.. « Comme la réalisation repose sur une scénographie du rien, dit-elle, l’espace se construit principalement à partir du son, du travail de clair-obscur et du texte. » 

 « L’enfer c’est les autres » écrivait Jean-Paul Sartre dans Huis-Clos (1944) où les trois personnages auraient quelque chose à expier. Mais, ici personne n’a rien à se reprocher, ni à reprocher aux autres, si ce n’est leur présence gênante. Nous sommes loin aussi de la cruauté du Radeau de la Méduse, même si le dramaturge dépeint une humanité à la dérive, qui ne va nulle part. sinon à sa perte... Et nous ne saurons que très peu de ces gens, mais leur être essentiel se révèle dans cette situation de survie où chacun joue sa peau. Aucune psychologie mais un climat brut, étouffant et anxiogène.

 Dans le noir, le rythme, les silences, pauses et reprises de paroles prennent une grande intensité. Et même si la mise en scène a ménagé de l’air entre les mots, il y a peu d’humour. Les interprètes de trois nationalités -la pièce est coproduite par six théâtres, en Suède, Finlande et Norvège- vont nous tenir en haleine une heure trente, dessinant leur personnage anonyme au fil de répliques banales. Dans l’écriture même, ils sont désignés par des numéros et nous saurons peu de choses de ces gens qui, dans la promiscuité, sont capable d’entraide comme de détestation.« Ce qui est génial dans cette pièce, dit Sofia Adrian Jupither, c’est le retournement de situation. »

Bravo à ces artistes endurants. Lars Norén, considéré comme le successeur d’August Strindberg, Ingmar Bergman, Henrik Ibsen, a connu l’enfermement en hôpital psychiatrique, à l’âge de vingt ans. Sans doute s’en est-il souvenu dans cette oeuvre tardive…

 Mireille Davidovici

 Jusqu’au 23 juillet à la Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon, (Gard)

Bus n°5 , toutes les demi-heures.

27 août-1à septembre, Folkteatern, Gothenberg (Suède); 14-24 septembre, Svnska Teaterne, Helsinki (Finlande); 3-31 octobre, Riksteaterne, the national touring theatre of Sweden (Suède) .

La pièce, traduction d’Amélie Wendling, est publiée chez L’Arche-Éditeur.

 

 

FUTUR PROCHE, chorégraphie de Jan Martens avec l’Opéra Ballet Vlaanderen

Festival d’Avignon

Futur proche, chorégraphie de Jan Martens avec l’Opera Ballet Vlaanderen

 

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© Filip Van Roe

Le festival accueille rarement un corps de ballet. L’Opéra d’Anvers et Gand, qui a fusionné avec Ballet Vlaanderen en 2014, s’ouvre à la danse contemporaine, avec des chorégraphes comme Anne Teresa de Keersmaeker, Crystal Pite ou Germaine Spivey. Il a obtenu l’an dernier le Prix de la meilleure coproduction européenne du Syndicat de la critique avec Der Silbersee. Jan Martens, artiste associé du Ballet, vient ici enrichir son répertoire avec une pièce composite, où il déplace la technique de la danse classique vers de nombreux styles, autour de musiques contemporaines pour clavecin.

 Un instrument déjà présent dans Any attempt will end in crushed bodies and shattered bonesay,  créé en Avignon l’an passé au lycée Saint-Joseph, et il occupe ici une place centrale, au milieu d’un banc de dix-huit mètres, presque toute   la longueur du plateau.
Au clavier, la Polonaise Goska Isphording, « mise en scène de façon pontificale », plaque des rythmes et sonorités inattendus. Le chorégraphe belge inscrit ainsi concrètement la musique comme élément structurel de sa pièce. Les dix-sept interprètes  avec deux enfants) dansent pendant une heure trente, sur des compositions peu connues de Pëteris Vasks (1946), Janco Verduin (1972), Anna Sigríður Þorvaldsdóttir , Garciane Finzi (1945) Aleksandra Gryka (1977). Nous sommes heureux de découvrir ces sonorités métalliques et vigoureuses comme les tableaux successifs, d’une grande liberté.

Les danseurs flânent d’abord, en tenue de sport, tout en se préparant à entrer en piste avec une étonnante décontraction. Ils ne changeront pas ou peu de costume et la chorégraphie garde un esprit de liberté de tableau en tableau, interrogeant aussi l’avenir de notre monde comme le suggère le titre. Jan Martens se joue des codes formels avec des effets de citation, alternant mouvements lents, postures tenues et déplacements vifs, voire courses ou cavalcades ludiques. Ses interprètes virtuoses aux postures personnelles vont ensuite se fondre dans des mouvements d’ensemble. Le créateur ménage les effets de surprise, comme ces projections géantes sur le haut mur de la Cour d’Honneur Palais des Papes où les corps semblent flotter, ou cet amusant cérémonial : une partie de baignade collective, dans une grand baquet qu’on a pris le temps de remplir en apportant des dizaines de seaux d’eau. Comme pour déjouer la canicule qui sévit…

Avec une scénographie rigoureuse, Joris van Oosterwijk souligne le format panoramique des déplacements et les éclairages d’Elke Verachtert découpent l’espace en zones d’ombre où les  interprètes se replient. Le chorégraphe applique les recherches intimistes de ses petites pièces à ce grand format, en ménageant entre les vifs mouvements collectifs, des moments de silence interrogatif ou de flottement dubitatif . « Futur proche, dit-il, évoque les grands défis à relever et l’absence d’actions probantes pour y faire face. (…) Le banc a une connotation de repos, d’absence de participation. C’est aussi un endroit où les gens peuvent se rencontrer et où peut naître la révolte. »

 Mireille Davidovici

 Jusqu’au 24 juillet, Cour d’Honneur du Palais des Papes, Avignon.

Du 23 septembre au 1er octobre De Singel, Anvers (Belgique).

Du 18 au 26 novembre Vlaamse Opera Gent, Gand ( Belgique).

Le 21 avril, Cultuurhuis de Warande, Turnhout  et  du 26 au 28 avril. Théâtre de la Ville, Paris (VIII ème).

Le 10 mai, Concertgebouw, Bruges, (Belgique).

 

 

Le cas Lucia J. ( Un Feu dans sa tête) d’Eugène Durif, mise en scène d’Eric Lacascadee

Un Feu dans sa tête d’Eugène Durif, mise en scène d’Eric Lacascade

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Une représentation exceptionnelle de cette pièce avec Karelle Prugnaud  aura lieu en l’Eglise des Célestins, à Avignon
Entrée libre sur réservation : contact@bureaurustine.co

« Expulsés d’Artephile le 16 juillet et sans lieu pour continuer à jouer, nous sommes accueillis par le festival d’Avignon qui met à notre disposition l’église des Célestins. Nous tenons à remercier Olivier Py et toute son équipe. Comme Lucia, nous voulons parler et nous taire quand nous le décidons.
Parce qu’il n’y a pas de fatalité à exercer son art. Il n’y a que des obstacles qui nous construisent. Pour ceux qui nous soutiennent. Pour ceux qui n’ont pas vu le spectacle. Pour ceux qui, comme nous, ont quelque chose à défendre…

Le cas Lucia J. (Un feu dans sa tête) tourne librement autour de la relation entre James Joyce et sa fille Lucia qui s’initie à la danse, abandonne cette pratique, tombe amoureuse du jeune Beckett, assistant de son père, qui la rejette. Elle se perd, est soignée par Jung, qui la déclare schizophrène, avant d’être internée. Après la mort de James Joyce à Zurich, en 1941, Lucia ne quittera plus ces lieux asilaires, jusqu’à sa mort en 1982. 

À l’origine de cette aventure singulière, une rencontre entre trois artistes : l’auteur Eugène Durif, le metteur en scène Éric Lacascade et la comédienne-performeuse Karelle Prugnaud qui, seule en scène, donne vie au personnage de Lucia. Elle incarne et désincarne avec force la densité poétique du texte, explorant des chemins artistiques aventureux, sous la direction audacieuse de son metteur en scène. Une expérience scénique bouleversante. »

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