Festival Pampa 2022 / Episode 2 : Guten Tag Madame Merkel de et par Anna Fournier
Festival Pampa 2022 / Episode 2
Guten Tag Madame Merkel de et par Anna Fournier
Elle ne paye pas de mine, la nouvelle Chancelière d’Allemagne, arrivée au pouvoir à la force du poignet dans un monde masculin… Pourtant, elle scellera pendant seize ans le destin de l’Union européenne. Seule en scène, Anna Fournier, convoque en une heure vingt, cette politicienne sans charisme, comme elle aimait à se définir elle-même. Elle quitte aussi l’éternel tailleur et les talons plats d’Angela Merkel, pour incarner aussi d’autres personnages avec lesquels elle a travaillé : Emmanuel Macron, Vladimir Poutine, Nicolas Sarkozy, Aléxis Tsípras… Nous révisons ainsi l’histoire des vingt-sept pays membres de 2005 à 2021 mais vue d’outre-Rhin. Et nous découvrons un autre point de vue sur le paysage politique français, au grand amusement des spectateurs.
Mais Anna Fournier, au-delà de la satire, entend donner consistance à son modèle: « On ne règne pas sur un pays comme l’Allemagne, en étant enfant de chœur, et il y a une question passionnante: qui est Angela Merkel pour tenir le pouvoir si fort et si longtemps ? » Pour y répondre, elle s’est glissée dans la peau de la Chancelière à partir de ses Mémoires et d’articles de presse. Et elle nous livre un portrait insolite, à la fois intime et distancié, de l’une des femmes les plus influentes au début de XXIème siècle qui a été aussi très discrète.
Avec ce texte bien écrit et interprété avec nuances, Anna Fournier ne brandit pas, contrairement à l’air du temps, le drapeau féministe. Celle que les Allemands appellent Mutti (Maman), n’a jamais joué sur ce registre et, quand on lui demandait si elle était féministe, elle répondait : « Si ça peut vous faire voter pour moi, oui, mais je considère que je n’ai pas à m’octroyer ce mérite. » Mais Anna Fournier se pose la question des femmes, face au pouvoir politique: « Qu’est-ce qu’une femme doit-elle faire pour être respectée? A cet égard, le texte est émaillé lde citations de Richard III. Comme cet agent du chaos shakespearien, Angela Merkel a su transformer son handicap -être une femme- en force que rien n’arrête… »
Dans Guten Tag, Madame Merkel, l’autrice ne révèle aucun secret d’Etat ni détail croustillant d’une vie privée sans vague, mais nous nous attachons à cette femme de sang-froid, qu’Anna Fournier recréée avec humour mais aussi humanité et tendresse. Après avoir connu le succès au festival d’Avignon, le spectacle va sans doute faire une belle tournée. Ne le manquez pas.
Hänsel et Gretel, adaptation et mise en scène de Caroline Arouas
La prairie boisée de Calabre où se déroule le festival, est le lieu idéal pour ce spectacle déambulatoire jeune public d’une heure, en trois stations. Pour cette création in situ, la comédienne et metteuse en scène du collectif Pampa, s’inspire du conte des frères Grimm et surtout du livret d’Adelheid Wette, écrit pour l’opéra romantique éponyme d’Engelbert Humperdinck qui a été créé en1893 à Weimar sous la direction de Richard Strauss. D’origine autrichienne, Caroline Arouas a été chanteuse à l’Opéra de Vienne, puis élève de l’Ecole du Théâtre national de Strasbourg. Elle est familière de cette oeuvre, souvent jouée dans les pays germanophones.
Cela se passe devant la chaumière de pauvres fabricants de balais que leurs deux enfants doivent aider pour assurer la subsistance de la famille. Pour se donner du cœur à l’ouvrage, Gretel dévoile à son frère un secret : elle a découvert un pot de lait caché par sa mère et, au lieu de travailler, les enfants préfèrent danser ensemble, en se réjouissant d’un futur dessert. La mère, furieuse de les voir s’amuser, en voulant les châtier, renverse le pot de lait et les envoie ramasser des fraises dans la forêt. De retour, le père craint pour Hänsel et Gretel : au plus profond des bois, habite une sorcière qui attire les petits pour les transformer en pains d’épices avant de les dévorer…
Dans une cabane construite en branchages trouvés sur place, Gretel (Valentine Catzéflis) et Hänsel ( Léonard Bourgeois-Tacquet) gambadent à cœur joie. Fabriquer des balais est le cadet de leurs soucis. Marion Lambert n’a rien d’une mère fouettarde quand elle surprend leurs ébats et elle déplore leur pauvreté en ces temps de disette. Au troisième acte, elle campera la sorcière, aussi séductrice que redoutable. Le père (Basile Lacoeuilhe), jouera le marchand de sable qui endort les enfants perdus dans la forêt.
« Hansel et Gretel, dit Caroline Arouas, est avant tout le récit initiatique d’un frère et d’une sœur livrés à eux-mêmes et qui tentent de survivre dans un monde hostile. » Elle entraîne les enfants et les spectateurs d’un lieu à l’autre, dans un cheminement ludique en trois temps, émaillés de jeux, chansons et comptines. Sur le plateau herbeux, entre les arbres, le public les suit de station en station, pour arriver enfin, par un sentier balisé de sucres d’orge géants, devant la maison en chocolat de la sorcière.
Nous sommes invités par les personnages à partager les rêves qu’ils s’inventent pour échapper à un réel angoissant. Cette fable terrifiante devient ici un parcours poétique. Au premier tableau, la rêverie permet aux enfants d’échapper à un travail contraignant. Dans le deuxième, elle les projette dans l’univers magique de la forêt, et dans le dernier, ils jouent la maladresse et la bêtise pour piéger la sorcière… Caroline Arouas met ainsi à distance les peurs que distillent souvent les contes populaires destinés à tort aux seuls enfants.
Mireille Davidovici
Spectacles joués du 19 au 27 août, 539 route de Calabre Port-Sainte-Foy et Ponchapt. T. 06 21 78 70 31.