Mes Parents, conception et mise en scène de Mohamed El Khatib

Mes Parents, conception et mise en scène de Mohamed El Khatib

Cet auteur et metteur en scène associé au Théâtre de la Ville, au Théâtre National de Bretagne et à l’Espace Malraux-Scène nationale de Chambéry, écrit un théâtre entre fiction et documentaire, influencé par la performance et la littérature, avec la collaboration d’ouvriers, ou d’un agriculteur, d’une femme de ménage, de marins, d’une danseuse….
Et pour 
Stadium, il a mis en scène cinquante-huit supporters du Racing Club de Lens. Mohamed El Khatib, Grand Prix de Littérature dramatique 2016 avec la pièce Finir en beauté où il évoque la fin de sa mère. Et au cinéma, il a abordé le thème de l’héritage dans Renault 12, un «road-movie» entre Orléans et Tanger. L’an passé, il avait signé avec Valérie Mréjen une courte mais tout à fait remarquable pièce sur les gardiens de musée: Gardien Party créé au Centre Georges Pompidou (voir Le Théâtre du Blog).

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Cette fois, il a travaillé avec la dixième promotion de l’École du Théâtre National de Bretagne: Hinda Abdelaoui, Olga Abolina, Louis Atlan, Laure Blatter, Aymen Bouchou, Clara Bretheau, Valentin Clabault, Maxime Crochard, Romain Gy, Alice Kudlak, Julien Lewkowicz, Arthur Rémi, Raphaëlle Rousseau, Salomé Scotto, Merwane Tajouiti, Maxime Thébault, Lucas Van Poucke, Mathilde Viseux, Laou Wysocka.
Le metteur en scène a demandé à ces jeunes de vingt à vingt-sept ans de parler de leurs parents. Questions qu’ils se sont déjà sûrement posées auxquelles ils n’ont jamais ou pas vraiment eu de réponse mais qu’ils conservaient enfouies en eux: comment pouvaient-ils se comporter à leur âge? Comment se sont-ils rencontrés? Quelles ont été leurs relations sexuelles entre eux ou avec d’autres? Des questions tabous qui ressurgissent parfois quand ces jeunes ne le sont plus du tout…
Comment aussi peut-on dire à douze ou treize ans qu’on ne quittera jamais ses parents alors qu’il suffit de regarder autour de soi pour voir qu’il faudra un jour les quitter pour grandir et découvrir la vie et l’amour de quelqu’un d’autre notre famille?  C’est même la condition sine qua non, pour rester au plus près d’eux.
Avec pudeur et souvent avec un certain humour, ces jeunes ont écrit puis interprété -diction et gestuelle très correcte- ce qui touche à un pan de leur jeune vie et à une intimité sur laquelle ils n’avaient pas eu encore forcément l’envie et/ou l’occasion de mettre des mots.  » Un jour, dit une jeune fille, j’ai entendu mes parents faire l’amour et cela m’a excitée. »Un tabou était levé, dit Mohammed El Khatib, la sexualité des parents. »

Sur le plateau nu, un banc d’école maternelle, une table basse, un piano droit et toute cette équipe qui aura vécu trois ans ensemble et qui, très vite, sauf exception, se dispersera.  Comme les enfants quittent un jour leurs parents et doivent alors parler avec eux entre adultes… Et c’est sans doute cette mise en abyme qui touche ici le public surtout composé d’amis et… parents. Avec une fin tout à fait remarquable quand une dizaine de pères ou mères arrive sur le plateau juste avant le salut. Magnifique idée de mise en scène: à ce moment-là, aucun doute là-dessus, il y avait bien de l’émotion dans l’air.
Le texte est parfois un peu facile, voire faiblard et sent l’écriture dite de plateau, les costumes n’ont rien de remarquable -et c’est un euphémisme- mais la direction d’acteurs et l’interprétation sont d’une telle qualité que nous nous attachons vite à la parole de ces jeunes gens qui disent sans doute non leurs propres paroles, mais celles de leurs camarades. Question de pudeur mais aussi de mise en scène, puisqu’ils jouent en alternance.
Mes Parents est une sorte de geste artistique original. Le spectacle, compris dans sa totalité, écrivait Guy Debord, est à la fois le résultat et le mode de production existant.  » ( …) Et il ajoute plus loin: « La séparation est l’alpha et l’oméga de la division sociale du travail. Effectivement il y a ici une double séparation: public et acteurs mais aussi acteurs et parents. Et dit-il aussi: »Le spectacle réunit le séparé mais il le réunit en tant que séparé.
Ce que Mohamed El Khatib appelle avec raison « les fantômes familiaux », le théâtre, dit-il, peut contribuer à les traquer. Depuis Eschyle, le spectacle, tous genres confondus: tragédie, comédie y compris et surtout le boulevard, farce,opérette, comédie musicale n’en a jamais donc fini avec le thème de la famille. Et cela fait partie de sa grande richesse…

 Philippe du Vignal

Spectacle vu le 13 septembre au Théâtre des Abbesses-Théâtre de la Ville, 31 rue des Abbesses, Paris (XVIII ème), jusqu’au 23 septembre.

Le texte est publié aux Solitaires Intempestifs.

 

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