Animal de Kaori Ito et Manolo, par le Théâtre du Centaure
Animal de Kaori Ito et Manolo, par le Théâtre du Centaure
Quatre chevaux noirs attendent sagement avec leur picotin d’avoine, que le public s’installe et que le spectacle commence. Autour d’eux ; l’équipe artistique s’active, prête à se lancer dans une aventure: la rencontre entre l’univers de la danseuse japonaise et celui de Manolo qui se dit « Centaure en mutation» : « Par l’écoute des corps et la danse, dit-il, Kaori me guide dans cette recherche sur la piste animale. »
Une pièce en quatre temps, un par cheval : Indra, Arjuna, Nakula et Sahadeva. Chaque séquence révèle les personnalités des animaux comme celles des artistes et induit un dialogue spécifique entre l’humain et la bête, considérée comme partenaire à part entière. Johanna Houe, écuyère et accordéoniste, accorde le soufflet de son instrument à la respiration de sa monture, en l’amplifiant, au rythme du martèlement des sabots. Ce travail musical est ici accompagné comme aux autres moments du spectacle, à jardin, par le guitariste Virgile Abela et, à cour, par Anwar Khan, virtuose des tablas mais aussi du chant et de l’harmonium. La danseuse Léonore Zurflüh rivalise avec la circassienne à cheval en imitant sa cavalcade et plus tard, entamera un pas de deux ludique avec Arjuna, généreux et bondissant à ses côtés comme un chien familier…
Manolo, dans un corps à corps charnel avec Nakula, se love, peau contre poil sur la bête immobile. Un dialogue muet s’instaure, émouvante intimité, dans le silence du plateau. Ce dernier tableau dit poétiquement la possible symbiose entre l’humain et le règne animal . «C’est, résume Kaori Ito, l’histoire d’un homme qui joue avec des animaux fabuleux, qui danse avec eux et disparait en eux. »
L’homme-centaure a rassemblé autour de ses chevaux une prestigieuse équipe que Kaori Ito a chorégraphiée avec finesse, en mettant en avant le talent de chaque artiste et de chaque animal. Nous avons apprécié la virtuosité équestre de Johanna Houé, vice-championne d’Europe de dressage des Masters ibériques, qui a souvent collaboré avec Zingaro. Le compositeur Virgile Abela, artiste associé du Laboratoire de Mécanique et d’Acoustique du C.N.R.S., va et vient entre musique contemporaine et jazz. Il se lance ici dans un duel humoristique dans la grande tradition de la musique indienne, avec le malicieux Anwar Khan qu’on a pu voir chez Zingaro, au Théâtre de la Ville ou à la Philharmonie de Paris.
Et Léonore Zurflüh, interprète de la compagnie de Kaori Ito, s’intéresse depuis longtemps à l’éthologie équine pour lire et sentir le mouvement du cheval. Elle n’a ici rien à envier aux foulées des montures noires élevées depuis leur plus jeune âge par Manolo et chouchoutées par Séverine Deperrois et Malorie Leclerc selon les directives d’une ostéopathe pour chevaux qui accompagne la création.
En 1989, Manolo a fondé le théâtre du Centaure en Bourgogne et sa compagnie est maintenant installée à Marseille. Il oriente sa recherche vers la danse: «Petit à petit, je découvre un nouvel état d’être. C’est peut-être ça un Centaure : une relation, une danse avec le vivant». Animal est conçu pour être joué dans un théâtre ou en pleine nature, à la lumière du jour. Il faut découvrir ce spectacle et sa joyeuse énergie.
Mireille Davidovici
Spectacle vu le 20 novembre, aux Théâtre des Gémeaux-Scène Nationale, 49 avenue Georges Clemenceau, Sceaux (Hauts-de-Seine) T. : 01 46 61 36 67.
Les 25 et 26 novembre, Grand Théâtre de Provence, Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). Du 26 au 29 janvier et du 3 au 5 février, Biennale Internationale des Arts du Cirque, Marseille (Bouches-du-Rhône)
Le 5 mai, Quai 9, Lanester ; les 7 et 8 mai, Haras d’Hennebont (Morbihan).
Pôle de création des arts équestres en extérieur les 13 et 14 mai, baie du Mont-Saint-Michel, Saint-Jean-le-Thomas (Manche).