Les Nuits enceintes, texte et mise en scène de Guillaume Béguin
Les Nuits enceintes, texte et mise en scène de Guillaume Béguin
Un beau titre et une belle histoire, pas neuve… Après une longue séparation, deux sœurs se retrouvent dans la propriété familiale délabrée, au milieu de bois pillés et de marais. Et près d’un chantier d’autoroute interrompu, en plein désastre. La Maison près de la fontaine, chantait Nino Ferrer en 1973… Mais l’écologie active, et même activiste, n’a ni temps ni place pour la nostalgie, face à la destruction des espèces, de l’air, de l’eau. Voilà pour le fond de l’affaire. Le théâtre est aussi invoqué comme sauveur des esprits, face à la colonisation des industries culturelles.
Tout irait bien si la mise en scène y trouvait sa force mais ce n’est pas le cas ! Déplacements erratiques dans une scénographie mal commode et peu parlante, effets de voix ou «numéros » hors sujet. Pour compenser l’indécision du texte? Et les acteurs entrent par la salle, mais cela n’arrive pas à élargir l’espace… Objet métonymique révélateur, un sac à dos, rempli de billes de polystyrène ou autre matériau ultra-léger, que la sœur en visite posera au bout d’une longue scène de retrouvailles… Un accessoire emblématique d’un texte situé entre réalisme et féérie, entre objet et signe de cet objet. Comme si Guillaume Béguin lui-même ne croyait pas à son propre jeu…
Ici, nous trouvons -discrets rappels de La Cerisaie d’Anton Tchekhov- une sœur restée à la maison qui a baptisé son fils adoptif (?) et serviteur (?) Pierre : « petit moujik » . Mais aussi de La Mouette avec le jeune écrivain Treplev et sa pièce sur l’âme universelle de la nature. Et on pense aussi un instant à Shakespeare et, à Bartleby, le personnage de la nouvelle éponyme d’Herman Melville (1853) avec sa phrase-refrain : «Je préférerais ne pas ». .
De la, vient sans doute vient l’échec de cette pièce. Deux longues heures durant, Guillaume Béguin ne choisit pas et n’incite pas le public à faire le travail. Sommes-nous trop sévère ? En tout cas, nous pouvons attendre autre chose, fort et bouleversant, du théâtre contemporain….
Christine Friedel
Jusqu’au 16 décembre, Théâtre Ouvert, 159 avenue Gambetta, Paris (XX ème). T. : 01 42 55 55 50.